Question au Gouvernement n° 1119 :
affaire Banalla

15e Législature

Question de : M. Olivier Faure
Seine-et-Marne (11e circonscription) - Nouvelle Gauche

Question posée en séance, et publiée le 25 juillet 2018


AFFAIRE BENALLA

M. le président. La parole est à M. Olivier Faure, pour le groupe Nouvelle Gauche.

M. Olivier Faure. Monsieur le Premier ministre, vous avez raison : la République exemplaire, ce n'est pas une République sans brebis galeuses – il y en aura hélas toujours. La République exemplaire, c'est le refus de l'impunité, avec une règle simple : la même justice que l'on soit puissant ou misérable. (Applaudissements sur les bancs des groupes NG, LR et UDI-Agir. – M. Cyrille Isaac-Sibille applaudit également.) C'est pourquoi, le 1er mai, l'affaire Benalla n'est encore qu'un fait divers, mais le 2 mai, elle devient une affaire d'État. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et FI.)

Mme Danièle Obono. Exactement !

M. Fabien Di Filippo. Un scandale d'État !

M. Olivier Faure. Parce que le pouvoir sait, parce que le pouvoir cache et parce que depuis jeudi, le pouvoir ment. (Applaudissements sur les bancs des groupes NG, LR, GDR et FI.)

M. Vincent Descoeur. Eh oui !

M. Olivier Faure. Non, il n'y a pas eu d'autorisation de la préfecture ; non, il n'y a pas eu de rétrogradation ; non, M. Benalla n'a pas été cantonné à des tâches administratives… ;

M. Pierre Cordier. Exact !

M. Olivier Faure. …non, il n'est pas davantage devenu bagagiste. M. Benalla a poursuivi ses missions et s'est même vu gratifier d'un rare appartement de fonction quai Branly.

M. Pierre Cordier. Exact !

M. Frédéric Reiss. C'est la triste réalité !

M. Olivier Faure. L'État de droit se transforme avec vous en État de passe-droits. Il y a aujourd'hui un clan qui s'autorise tout parce qu'il ne se croit redevable de rien. Et un président qui a placé la loyauté à sa personne au-dessus de la légalité. Alors comment allez-vous chercher à vous en sortir ? Par la lâcheté, en décrivant une dérive personnelle de M. Benalla à laquelle le pouvoir serait étranger ?

M. Sylvain Maillard. Mais c'est le cas !

M. Olivier Faure. En braquant les projecteurs de la justice et des médias sur un homme, pour mieux sauver un système ? En faisant payer des lampistes pour protéger les véritables responsables ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Oui, c'est exactement ce qu'ils font !

M. Olivier Faure. Nous voulons toute la vérité et nous l'aurons. Vous vouliez affaiblir le Parlement mais il est là, devant vous. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes NG, LR, UDI-Agir, FI et GDR.) Il joue son rôle. À vous maintenant d'assumer le vôtre ! La République ne peut pas reposer sur un mensonge.

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur Faure, vous m'interrogez sur la République exemplaire que vous appelez de vos vœux. Je partage votre point de vue, nous voulons tous une République exemplaire où le droit s'applique et où les sanctions sont prises (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe LR)…,

M. Michel Herbillon. Vous êtes loin du compte !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . …que l'on soit faible ou puissant. Je n'ai rien à redire à cette pétition de principe, à cette conviction.

Mme Danièle Obono. Et pourtant…

M. Éric Straumann. Le problème, c'est la pratique !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . En la matière, je me permets d'indiquer – et j'y insiste – que l'ensemble des procédures ont été déclenchées immédiatement (Protestations sur les bancs des groupes LR et FI.)

Mme Danièle Obono. Ce n'est pas vrai !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . L'Assemblée nationale pourra hurler ; cela ne transformera pas la réalité. Un comportement inacceptable décelé le 1er mai et une sanction prise le 4 mai : c'est une réponse immédiate.

M. Éric Straumann. Vous avez mis deux mois à déclencher les sanctions !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . Une procédure judiciaire et une commission d'enquête déclenchées la semaine des révélations…,

M. Damien Abad. Vous n'en vouliez pas !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . …c'est quelque chose d'exemplaire. Je me souviens, monsieur le député, d'une affaire que nous avons eu à connaître lorsque vous et moi étions députés ; vous n'y étiez pour rien et moi non plus, ce n'est pas une mise en cause personnelle !

Mme Frédérique Meunier. Mais c'était l'ancien monde !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . J'observe néanmoins que lorsque M. Cahuzac a fait l'objet de révélations… (Vives protestations sur plusieurs bancs. – « Hors sujet ! » sur les bancs du groupe LR.) Monsieur Faure, écoutez-moi, cela ne vous portera pas préjudice ! Alors que les faits ont été révélés le 4 décembre, la commission d'enquête ne s'est réunie qu'en mai. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) Cela a pris cinq mois. Là, l'ensemble des décisions ont été prises dans la semaine, et c'est bien ainsi. Je fais confiance aux procédures qui ont été engagées, aux commissions des lois…,

M. Éric Straumann. Cahuzac n'a jamais été couvert !

M. Edouard Philippe, Premier ministre . …aux procédures judiciaires, aux sanctions administratives.

M. Michel Herbillon. Et les privilèges de M. Benalla ?

M. Edouard Philippe, Premier ministre . C'est ainsi qu'on peut bâtir une République, non en jetant l'opprobre sur tous, non en faisant état d'un système qui n'existe pas – qui n'existe en absolument rien ! Non en disant que les copinages malsains, évoqués par le préfet de police, entre des agents qui ont en effet un comportement inacceptable, jetteraient l'opprobre sur tout un système, sur le Président de la République, sur tout l'Élysée ou sur l'ensemble de l'exécutif. Je ne le crois pas, et contrairement à ce que vous dites, nous ne couvrons rien du tout. Toute la lumière sera faite sur cette affaire. Nul n'est au-dessus de la loi et je prendrai les décisions une fois le rapport de l'IGPN rendu, qui permettront d'éviter que de tels dysfonctionnements puissent se reproduire. Monsieur Faure, je me désole qu'alors que j'ai écouté votre question avec attention, vous écoutiez avec moins d'attention ma réponse ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Données clés

Auteur : M. Olivier Faure

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Ordre public

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 juillet 2018

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