Question au Gouvernement n° 1277 :
sécurité en Seine-Saint-Denis

15e Législature

Question de : M. Jean-Christophe Lagarde
Seine-Saint-Denis (5e circonscription) - UDI, Agir et Indépendants

Question posée en séance, et publiée le 18 octobre 2018


SÉCURITÉ EN SEINE-SAINT-DENIS

M. le président. La parole est à M. Jean-Christophe Lagarde, pour le groupe UDI, Agir et indépendants.

M. Jean-Christophe Lagarde. Monsieur le ministre de l'intérieur, vous vous êtes rendu, dès votre nomination, aux Lilas, dans ce que l'on appelle le « premier district policier » de la Seine-Saint-Denis où, malheureusement, des affrontements entre bandes, qui se généralisent dans ce département et interviennent malheureusement trop régulièrement, venaient d'avoir lieu, entraînant le décès que l'on sait. Quand on est aux Lilas, on se trouve juste de l'autre côté du périphérique, soit en face de Paris. Mais, à Paris, il y a quatre fois plus de policiers qu'en Seine-Saint-Denis. Même en tenant compte des contraintes particulières de la Ville de Paris, liées notamment à la surveillance de bâtiments officiels, il y a au moins deux à trois plus de policiers par habitant à Paris qu'en Seine-Saint-Denis. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.) Je veux vous dire, monsieur le ministre de l'intérieur – bien que vous ne soyez pas responsable de cette situation, puisque vous venez de prendre vos fonctions – que ce n'est pas le seul endroit de France où la répartition des effectifs est inadaptée et n'offre pas l'équité nécessaire pour garantir une véritable égalité à nos concitoyens.

J'imagine que vous avez entendu que, dans ce premier district de la Seine-Saint-Denis, les citoyens ne peuvent plus porter plainte le week-end dans leur commissariat, faute d'officier de police judiciaire, et doivent se rendre à un commissariat situé à plusieurs kilomètres de chez eux. En réalité, ils n'ont plus accès à la même sécurité. Pire, les brigades anticriminalité de ce district n'opèrent plus par commissariat mais ont été regroupées, les effectifs étant en chute libre. De surcroît, il y a quelques semaines, la préfecture de police expliquait qu'on allait supprimer des commissariats et les regrouper.

Dans l'endroit le plus criminogène de notre pays, on a le droit à la sécurité et à la présence policière, comme partout ailleurs en France. C'est ce que j'attends du nouveau ministre de l'intérieur comme, sans doute, beaucoup de parlementaires, et assurément les citoyens de notre département. Pourriez-vous nous apporter la garantie, monsieur le ministre, qu'à Paris comme en tout point du territoire, les citoyens bénéficieront du même niveau de sécurité et d'une présence équivalente de policiers ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir et sur plusieurs bancs des groupes SOC et GDR ainsi que sur quelques bancs du groupe LR et parmi les députés non inscrits.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président Lagarde, comme c'est l'usage, je réponds à la question posée par un président de groupe. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM et UDI-Agir.)

M. Christian Jacob. Et il y en a de plus en plus ! (Sourires.)

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Comme vous le savez, le 25 septembre dernier, j'ai eu l'occasion de recevoir à Matignon l'ensemble des députés et des sénateurs de Seine-Saint-Denis, toutes tendances politiques confondues, pour étudier avec eux le rapport rédigé par M. Cornut-Gentille et M. Peu et faire le point sur la situation, leurs attentes et les sujets d'inquiétude qu'ils souhaitaient évoquer. Je dois dire, monsieur le président Lagarde, que j'ai apprécié cet échange, au cours duquel a été réaffirmée notre très lourde responsabilité collective pour apporter des réponses crédibles et efficaces à la concentration de difficultés dans le département dont vous êtes élu. J'ai relevé – je le dis d'emblée, sans aucune naïveté – que tous les parlementaires, quels que soient les groupes et assemblées auxquels ils appartiennent, après avoir reconnu que la Seine-Saint-Denis concentre des difficultés, en matière d'éducation, de pauvreté, d'accès aux soins et de sécurité, ont tous considéré que ce département offrait un potentiel, une chance considérable pour notre pays (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – M. Peu applaudit également), et je partage cette conviction.

Vous évoquez la question plus spécifique de la sécurité. Nous savons tous que cette question s'incarne, en Seine-Saint-Denis, dans des conditions très particulières. Vous relevez le fait, curieux et insatisfaisant, que la densité des forces de l'ordre est inférieure, dans un département qui connaît beaucoup de difficultés, à celle qui prévaut dans d'autres départements, notamment Paris. C'est malheureusement une donnée ancienne – vous avez d'ailleurs eu l'honnêteté de le souligner – sur laquelle nous devons travailler.

M. Jean-Christophe Lagarde. Merci de le reconnaître !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Je voudrais aller dans votre sens en rappelant que le développement des effectifs de la police nationale trouvera en Seine-Saint-Denis un champ naturel d'expansion. D'ores et déjà, depuis le mois de septembre, des effectifs supplémentaires ont été affectés à un certain nombre de commissariats de ce département. Bien entendu, au fur et à mesure des recrutements, nous continuerons, non pas à rattraper complètement un retard ancien, mais, en tout cas, à compenser cette sous-densité.

Par ailleurs, car cette question ne peut pas entièrement sécuritaire, la Seine-Saint-Denis bénéficie à plein, ce qui est très juste, des mesures prises pour le dédoublement des classes en CP et en CE1. C'est une excellente mesure dont nous savons que, si elle ne produit pas un résultat immédiat, elle permet la construction de l'avenir. Vous n'ignorez pas non plus que le département de la Seine-Saint-Denis bénéficie, dans sa totalité – ce qui est un cas unique –, de l'expérimentation sur les emplois francs. J'espère que les résultats en termes d'accès à l'emploi seront au rendez-vous. Nous devons faire connaître ce dispositif, qui est extrêmement avantageux et parfaitement adapté à la réalité et aux difficultés d'accès à l'emploi dans ce département.

M. Fabien Di Filippo. Il ne fonctionne pas !

M. Edouard Philippe, Premier ministre. Enfin, j'ai pris, à la fin de ce déjeuner, un engagement auprès de l'ensemble des parlementaires de Seine-Saint-Denis : travailler avec les parlementaires et, bien entendu, les collectivités territoriales, pour aborder concrètement et de façon crédible ces questions. Avec la ministre de la cohésion des territoires et l'ensemble des ministres concernés – l'intérieur, la santé, l'éducation –, nous aurons l'occasion de vous faire des propositions sur une méthode nous permettant d'avancer et de mesurer dans le temps nos résultats en Seine-Saint-Denis. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM et UDI-Agir. – M. Peu applaudit également.)

Données clés

Auteur : M. Jean-Christophe Lagarde

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Sécurité des biens et des personnes

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 octobre 2018

partager