Question au Gouvernement n° 1544 :
violences policières lors des manifestations

15e Législature

Question de : M. Ugo Bernalicis
Nord (2e circonscription) - La France insoumise

Question posée en séance, et publiée le 16 janvier 2019


VIOLENCES POLICIÈRES LORS DES MANIFESTATIONS

M. le président. La parole est à M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Au nom du groupe de la France insoumise, je souhaiterais d'abord rendre hommage aux pompiers qui sont morts durant l'explosion de la rue de Trévise, à ceux qui se font caillasser par des idiots, comme au pompier gilet jaune de Bordeaux, qui est actuellement dans le coma. (M. et Mmes les députés du groupe FI se lèvent et applaudissent. - Plusieurs députés sur les bancs des groupes LaREM, MODEM et GDR applaudissent.)

Monsieur le Premier ministre, comment M. Castaner peut-il encore être ministre de l'intérieur avec, comme bilan provisoire, plus de 2 000 blessés chez les gilets jaunes, plus de 1 050 blessés parmi les forces de l'ordre, et un total de 12 morts depuis le début de la mobilisation ?

Il menace même les manifestants en énonçant le délit imaginaire de complicité de manifestation violente. J'ai d'ailleurs déposé une plainte contre lui devant la Cour de justice de la République, pour entrave à la liberté de manifester. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)

Il récidive hier en affirmant qu'il ne connaît « aucun policier […] qui ait attaqué de gilets jaunes ». On croit rêver, alors même que l'Inspection générale de la police nationale, l'IGPN, a été saisie par de nombreux signalements, y compris par le ministère lui-même.

L'utilisation des Flash-Ball et des grenades entraîne des blessures graves et des mutilations chez les manifestants. Comme le demande le Défenseur des droits, interdisons-les !

Inacceptable aussi, les journalistes blessés, empêchés de faire leur travail, que ce soit par les policiers ou des violents. (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.) Nous condamnons les violences, d'où qu'elles viennent, des manifestants ou des forces de l'ordre.

M. Bruno Millienne. Qui appelle à l'insurrection, si ce n'est vous ? Un peu de décence !

M. le président. Mes chers collègues, seul M. Bernalicis a la parole !

M. Ugo Bernalicis. Pour autant, un homme d'État devrait dire, comme le préfet de Paris, Maurice Grimaud en 1968 : « Frapper un manifestant tombé à terre, c'est se frapper soi-même en apparaissant sous un jour qui atteint toute la fonction policière ». (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)

Les gilets jaunes respectent l'ordre public et scandent parfois : « La police avec nous ! ». Les casseurs et les violents sont une infime minorité.

Alors que les forces de l'ordre doivent garantir la liberté de manifester pacifiquement, on leur demande d'entraver ce droit, comme le démontrent les arrestations arbitraires, les violences illégitimes, les ordres irrationnels voire les interpellations pour port de sérum physiologique ! (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) Les policiers obéissent simplement aux ordres du politique.

À cela s'ajoute la violence judiciaire, selon les instructions de fermeté de Mme Belloubet. Être gilet jaune est devenu systématiquement une circonstance aggravante, au mépris du code pénal.

Triste ambiance, le jour de la reprise de la discussion sur le projet de loi de réforme de la justice, qui accroît la répression.

L'écoute des revendications doit succéder à la surdité de la matraque. Il n'y aura pas d'ordre public sans justice sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI – Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, je voudrais d'abord vous remercier d'avoir pensé à Simon et à Nathanaël, emportés dans l'explosion dramatique qui a eu lieu, samedi matin, dans le IXe arrondissement de Paris. J'étais ce matin, avec leurs parents, aux côtés de leurs compagnes.

Ils sont, avec d'autres, les représentants de ce service public de secours, d'assistance, de sécurité, des femmes et des hommes qui portent une parcelle de la République parce que, monsieur Bernalicis, il n'y a pas de liberté, sans ordre public. L'ordre public est même une condition sine qua non de la liberté. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM ainsi que sur quelques bancs du groupe LR.)

Mme Danièle Obono. Ça n'a rien à voir !

M. Christophe Castaner, ministre . Je vous le dis, monsieur le député, je ne connais aucun policier, aucun gendarme, aucun pompier, aucun journaliste qui ait attaqué volontairement des manifestants, quels qu'ils soient. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

À l'inverse, je connais aujourd'hui 700 policiers et 350 gendarmes qui, eux, ont été attaqués et blessés.

M. Éric Coquerel. Et cela les autorise à répondre par un tir tendu, comme l'a fait un policier à Toulon ?

M. Christophe Castaner, ministre . J'étais hier à Carcassonne, où j'ai rencontré le préfet. J'ai aussi rencontré le sous-préfet de Narbonne ainsi que les forces de sécurité, notamment celles de l'escadron de gendarmerie, présentes au péage de Narbonne nord, qui ont été incendiées, attaquées. En reculant, après avoir sauvé leurs armes, elles ont vu la totalité des locaux de la gendarmerie incendiés, brûlés, comme le péage. Telle est la réalité à laquelle ces forces doivent faire face. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

M. Éric Coquerel. Et que dit l'IGPN ?

M. le président. Monsieur Coquerel, veuillez laisser M. le ministre répondre !

M. Christophe Castaner, ministre . Et elles font toujours face avec proportionnalité, avec discernement. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

M. Ugo Bernalicis. Ce n'est pas vrai, monsieur le ministre !

M. Christophe Castaner, ministre . Et si des fautes doivent être établies, alors nous devons la transparence, parce que nous devons l'exemplarité.

Mme Danièle Obono. Où est la transparence ?

M. Christophe Castaner, ministre . Mais ne faites pas d'amalgame, ni de confusion, monsieur le député : il n'y a pas, d'un côté, des policiers casseurs et de l'autre, des manifestants gentils. (De nombreux députés du groupe LaREM et plusieurs députés des groupes MODEM et UAI se lèvent et applaudissent longuement. – Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

M. Éric Coquerel. Ce n'est pas ce qu'a dit Ugo Bernalicis !

Données clés

Auteur : M. Ugo Bernalicis

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Police

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 janvier 2019

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