organisation du Grand débat en Polynésie Française
Question de :
M. Moetai Brotherson
Polynésie Française (3e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
Question posée en séance, et publiée le 7 février 2019
ORGANISATION DU GRAND DÉBAT EN POLYNÉSIE FRANÇAISE
M. le président. La parole est à M. Moetai Brotherson.
M. Moetai Brotherson. Monsieur le Premier ministre, à Takume, Reao, Taha'a, Huahine, Raiatea, Bora Bora, Ra'ivavae et dans toutes les îles de la Polynésie, la télévision et quelques journaux ont fait connaître l'existence d'un grand débat national. S'en est suivi un cafouillage de « com' » : nous en avons été successivement exclus en raison de notre statut spécifique, puis inclus, puis invités sans pour autant être attablés, puis à nouveau exclus, comme nous l'avons été de la grande soirée des outre-mer à l'Élysée où les collectivités du Pacifique n'étaient pas conviées.
Ce grand débat est-il national, hexagonal ou à géométrie variable ? Nos îles ne l'abordent pas de la même manière, notamment sur les archipels éloignés où les transports peuvent être rares et où il faut naviguer plusieurs heures ou emprunter des pistes dignes du rallye Paris-Dakar pour se rendre à sa mairie. Pour autant, les Polynésiens aussi veulent exprimer leurs vœux et donner leur vision de la société qu'ils souhaitent voir émerger.
Ils demandent à vivre dans un environnement sain, et leurs inquiétudes portent toujours sur Mururoa, Fangataufa, Hao, où se trouvent encore des déchets nucléaires. Les outre-mer exigent de participer plus directement à la démocratie et, pourquoi pas, à travers la voie du référendum d'initiative citoyenne. Il faudrait alors veiller à ce que ce dernier ne serve pas uniquement à entendre les questions et réponses du seul Hexagone.
Sur la citoyenneté, le débat existe aussi chez nous, mais nous l'abordons d'une manière différente. Par exemple, nous souhaitons construire une identité citoyenne avec des institutions et une éducation en Français et, en même temps, dans nos langues polynésiennes, au même niveau. Certains réclament aussi une évolution constitutionnelle menant à un statut de Pays ou d'État associé à la République. En 2019, de grâce ne balayons pas tout cela sous le tapis comme il était de coutume dans l'ancien monde !
J'ai deux questions : avez-vous conscience des difficultés que rencontrent les collectivités du Pacifique pour participer à ce grand débat – si tant est qu'elles en soient toutes informées – et comment comptez-vous y remédier ? Deux des quatre thèmes relèvent de la compétence exclusive de l'État, comme l'organisation des institutions, de la démocratie et de la citoyenneté. Expliquez-nous alors pourquoi le toilettage du statut de la Polynésie…
M. le président. Je vous remercie.
La parole est à M. le ministre chargé des collectivités territoriales.
M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Votre question me permet tout d'abord de saluer la mobilisation massive de nos concitoyens, puisque des cahiers de citoyenneté ou de contributions ont été ouverts dans 9 000 mairies (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM),…
M. Sébastien Jumel. Ce n'est pas la question !
M. Sébastien Lecornu, ministre. …que 700 000 contributions sont en ligne, monsieur le député Jumel, dont une bonne part en provenance de nos concitoyens d'outre-mer, et que presque 4 000 réunions d'initiative locale ont été organisées.
Mme Marie-Christine Dalloz. Qui dit mieux ?
M. Christian Hutin. Enfumage !
M. Fabien Di Filippo. Il faudra en tenir compte, ce n'est pas une collection !
M. Sébastien Lecornu, ministre. L'organisation de ce débat en outre-mer, vous avez raison, possède des caractéristiques particulières et ses enjeux sont spécifiques, majeurs.
Première particularité : la situation géographique, bien sûr. Vous l'avez rappelée ; nous n'y pouvons pas grand-chose mais il faut en tenir compte.
Deuxième particularité : les assises de l'outre-mer, menées par Annick Girardin – qui vous prie de l'excuser de ne pas pouvoir répondre à votre question, étant en déplacement à Saint-Pierre-et-Miquelon – se sont terminées depuis plusieurs semaines. Elles ont déjà permis d'organiser une vaste consultation de nos concitoyens ultramarins sur différents sujets qui les concernent. Un chiffre : 25 000 contributions directes ont été recueillies.
D'autres particularités sont évidemment au cœur de la mobilisation dans les territoires ultramarins. Il convient, notamment, de tenir compte des statuts spécifiques. La répartition des compétences des territoires de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie française est différente. Lors de la réunion qui s'est récemment tenue à l'Élysée avec le Président de la République et l'ensemble des élus locaux d'outre-mer, les thématiques fléchées relevaient, sur votre territoire, de la collectivité, en l'occurrence, du gouvernement de Polynésie française.
Plusieurs choses sont nécessaires pour relever ce défi. D'abord, nous allons remobiliser les préfets – dans le cas d'espèce, le Haut-commissaire de votre territoire. Ensuite, j'ai reçu hier le Président de la Polynésie française, Édouard Fritch, afin qu'il puisse lui-même se mobiliser dans le cadre du Grand débat national. Enfin, vous-même, en tant que représentant de la nation, pouvez organiser un débat sur votre territoire. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Auteur : M. Moetai Brotherson
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Collectivités territoriales
Ministère répondant : Collectivités territoriales
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 février 2019