cannabis thérapeutique
Question de :
Mme Caroline Janvier
Loiret (2e circonscription) - La République en Marche
Question posée en séance, et publiée le 11 avril 2019
CANNABIS THÉRAPEUTIQUE
M. le président. La parole est à Mme Caroline Janvier.
Mme Caroline Janvier. Ma question s'adresse à Madame Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé.
Un député du groupe LR . Elle n'est pas là !
Mme Caroline Janvier. Madame la ministre, depuis des années le sujet du cannabis est une arlésienne du débat public en France. Utilisé pendant des siècles, il avait été retiré de la pharmacopée des pays développés avant que la recherche scientifique, et bien souvent aussi le bon sens, amènent nombre de nos partenaires occidentaux à faire marche arrière. Nous pourrions évoquer les bénéfices économiques de la légalisation du cannabis thérapeutique – je salue au passage les travaux de mon collègue Jean-Baptiste Moreau pour le territoire de la Creuse et son engagement pour que soient étudiées les conclusions du comité scientifique de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, mais je voudrais aborder ici l'enjeu sanitaire.
Les chiffres du baromètre de Santé publique-France et de l'Observatoire des drogues montrent qu'en 2017 près d'un Français sur deux l'a expérimenté et que plus d'un jeune sur quatre déclare avoir fumé dans l'année, soit les chiffres les plus élevés depuis 25 ans. Sur le plan sanitaire, nous devons acter l'hypocrisie de notre système où la réponse principale est répressive. C'est vrai, le cannabis comporte de nombreux risques qu'il conviendrait de mieux prévenir par un encadrement de la consommation. Mais cette approche répressive nous empêche également d'objectiver la réalité des bénéfices médicaux du cannabis pour de nombreux malades.
M. Fabien Di Filippo. La majorité plane déjà bien assez !
Mme Caroline Janvier. Des patients atteints de cancer, de polyarthrite, de sclérose en plaque, sont obligés aujourd'hui de se fournir à l'étranger ou sur le darknet. Pourtant, le cannabis représente un palier intermédiaire avant le recours aux opioïdes comme la morphine pour lutter contre les douleurs. Il adoucit les effets secondaires d'une chimiothérapie et favorise la reprise de poids. Il peut aussi calmer efficacement les tremblements dus à la maladie de Parkinson.
Je crois profondément, madame la ministre, qu'il est temps pour la France d'avancer en ce qui concerne l'usage thérapeutique du cannabis. L'expérimentation menée à Marseille sur des malades de Parkinson est un premier pas. Je souhaiterais savoir quelle feuille de route vous comptez adopter afin de construire un cadre de concertation élargi.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Votre question me permet d'aborder le sujet de l'usage thérapeutique du cannabis, qu'il convient de distinguer de son usage récréatif. Des spécialités pharmaceutiques à base de cannabinoïdes ont obtenu une autorisation de mise sur le marché dans le cadre de la procédure rigoureuse du médicament et de l'appréciation du rapport bénéfices-risques qu'elle implique.
Certains États ont autorisé, pour certaines pathologies et sur prescription médicale, l'accès au cannabis en tant que plante, produit par des entreprises légales ou cultivé à domicile. Vous avez raison, des études ont montré une efficacité pour lutter contre certains symptômes ou certaines pathologies, avec des niveaux de preuve hétérogènes. Cependant il manque des études contrôlées et rigoureuses pour évaluer formellement l'efficacité, les risques et les effets indésirables associés ainsi qu'une comparaison avec l'arsenal thérapeutique existant.
Actuellement, le cannabis thérapeutique auquel vous faites référence recouvre des formes et des circuits de production, de prescription et de contrôle très variés selon les pays. Agnès Buzyn a saisi l'ANSM afin de disposer d'un état des lieux mais aussi d'un bilan des connaissances. À cette fin, cette agence a constitué en septembre 2018 un comité scientifique spécialisé temporaire pour l'évaluation de la pertinence et de la faisabilité de la mise à disposition en France du cannabis thérapeutique en tant que plante. Le comité a exclu d'emblée la voie d'administration fumée compte tenu de ses risques pour la santé.
En décembre 2018, ce comité s'est prononcé en faveur de l'autorisation de l'usage du cannabis à visée thérapeutique dans certaines situations cliniques précises et limitées. Les travaux relatifs aux modalités de la mise en œuvre d'une mise à disposition du cannabis sous forme de plante se poursuivent en 2019. Il appartiendra ensuite au Gouvernement de se prononcer, sur la base de cet avis sur les indications, les modalités d'un usage thérapeutique du cannabis, ainsi que de déterminer le cas échéant la filière de production.
Auteur : Mme Caroline Janvier
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Pharmacie et médicaments
Ministère interrogé : Solidarités et santé (Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre)
Ministère répondant : Solidarités et santé (Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre)
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 11 avril 2019