Évaluation des politqiues publiques
Question de :
M. Philippe Bolo
Maine-et-Loire (7e circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 15 mai 2019
ÉVALUATION DES POLITIQUES PUBLIQUES
M. le président. La parole est à M. Philippe Bolo.
M. Philippe Bolo. Ma question, à laquelle j'associe mon collègue Jean-Noël Barrot, s'adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, les sujets les plus simples révèlent parfois, au détour de leur analyse, une complexité inattendue. Ainsi, une situation apparemment ordinaire m'amène aujourd'hui à vous interroger autant sur la réponse à lui apporter que sur les enseignements à en tirer en matière de mise en œuvre des lois. (Brouhaha.)
Cette situation est celle d'une habitante de Segré-en-Anjou Bleu, nièce d'une dame de 86 ans, résidente en EHPAD – établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes. Après s'être réjouie de l'attribution d'un chèque énergie à sa tante il y a un an, son enthousiasme s'est rapidement altéré face à l'impossibilité de s'en servir. Les résidents des EHPAD sont éligibles, comme tout Français, aux chèques énergie, mais ils ne peuvent les utiliser que si l'établissement répond à certains critères. Et on entre là dans un labyrinthe menant de la banque à l'établissement hospitalier en passant par le Trésor public, sans qu'aucune issue ne soit trouvée.
M. Gilles Lurton. C'est vrai ! Il a raison.
M. Philippe Bolo. Par-delà la complexité, la surprise a été grande lorsque la nièce de l'octogénaire a découvert que ce même chèque était accepté par d'autres établissements du même groupement de résidences. Cette situation apparaît d'autant plus paradoxale que de trop nombreux EHPAD connaissent des tensions financières : l'utilisation par leurs résidents des chèques énergie apporterait à ces organismes un appréciable ballon d'oxygène.
La rigueur administrative, qui se veut vertueuse et égalitaire, n'atteint pas ses objectifs et induit une perte de sens. Cette situation révèle comment nos lois peuvent savamment compliquer les situations les plus simples, en oubliant de faire confiance au terrain. Elle nous révèle également la nécessité et l'urgence de moderniser les processus de production des lois.
Cette modernisation passe notamment par la généralisation de l'évaluation, condition essentielle de la reconquête de la confiance des citoyens envers leurs élus nationaux. L'évaluation est aussi un engagement à mieux légiférer, en prenant soin d'examiner les conséquences des lois pour savoir les faire évoluer.
Monsieur le Premier ministre, au-delà de la réponse concrète à apporter aux EPHAD, l'évaluation vous paraît-elle un outil incontournable ? Dans l'affirmative, comment pouvez-vous permettre aux parlementaires de mener pleinement l'évaluation de l'action publique en cohérence avec leur fonction de contrôle ? (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à M. le ministre chargé des relations avec le Parlement, que je vous demande de bien vouloir écouter dans le silence, mes chers collègues.
M. Marc Fesneau, ministre chargé des relations avec le Parlement. Monsieur Bolo, au travers d'un exemple concret, vous m'interrogez sur les moyens permettant au Parlement de mieux assurer sa mission constitutionnelle d'évaluation des politiques publiques.
Beaucoup a été fait en la matière depuis de nombreuses années, au Sénat comme à l'Assemblée nationale, dans le cadre des commissions mais aussi de la mission d'évaluation et de contrôle, de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, ainsi que de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques. À la suite de la dernière révision constitutionnelle, l'Assemblée s'est également dotée d'un comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques. De même, la Cour des comptes remet chaque année au Parlement entre 70 et 100 rapports abordant les politiques publiques sous différents angles.
Récemment encore, le bureau de l'Assemblée nationale a adopté plusieurs mesures pour améliorer les moyens conférés aux parlementaires en matière d'évaluation. Le Gouvernement entend apporter au Parlement tout son concours dans la mise en œuvre de cette orientation.
J'en veux pour preuve le développement conjoint, avec la direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l’État, du projet LexImpact, outil permettant de simuler l'effet sociofiscal des projets d'amendement, ou encore l'accès des parlementaires au logiciel Chorus du ministère de l'économie et des finances. (Brouhaha.)
M. Gilles Lurton. Répondez à la question !
M. Marc Fesneau, ministre. S'agissant plus précisément de la possibilité, pour reprendre votre exemple concret, que le bénéficiaire d'un chèque énergie l'utilise pour acquitter les sommes dues à l'EHPAD dans lequel il réside, elle avait été prévue par la loi de transition énergétique du 17 août 2015 et témoignait de la volonté de prendre en compte la situation des résidents qui ne paient pas eux-mêmes leur facture. Cette possibilité était toutefois assortie d'une condition : l'établissement devait avoir signé une convention APL – aide personnalisée au logement. Peut-être faut-il voir la situation de l'établissement dans lequel est hébergée la résidente dont vous parlez.
L'évaluation des politiques publiques n'a de sens que si elle participe d'un chaînage vertueux et débouche sur des améliorations législatives et réglementaires. Comme vous le dites à juste raison, il nous appartiendra de vérifier, pour cette disposition comme pour toute autre, si l'intention du législateur a été respectée. (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. le président. Mes chers collègues, un certain brouhaha règne ici. Si vous avez des conversations à conduire, il y a de la place hors de l'hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.)
Auteur : M. Philippe Bolo
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : État
Ministère interrogé : Relations avec le Parlement
Ministère répondant : Relations avec le Parlement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 mai 2019