Référendum d'initiative partagée
Question de :
M. Boris Vallaud
Landes (3e circonscription) - Socialistes et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 23 mai 2019
RÉFÉRENDUM D'INITIATIVE PARTAGÉE
M. le président. La parole est à M. Boris Vallaud.
M. Boris Vallaud. Monsieur le Premier ministre, le 10 avril dernier, 248 parlementaires ont déposé une proposition de loi visant à soumettre à référendum la privatisation des aéroports de Paris. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC, LR et GDR.) Vous n'avez pas ménagé vos efforts pour vilipender cette initiative parlementaire en l'accusant de faire le lit du populisme ou d'affaiblir la démocratie représentative, là où vous auriez pu vous interroger sur le sens qu'il convenait de donner à cet arc républicain inédit et, sans doute, singulier, au sens premier du terme.
M. Fabrice Brun. Saisissez l'opportunité du référendum !
M. Éric Straumann. On aurait aussi pu le faire pour les grandes régions !
M. Boris Vallaud. Vous n'avez pas non plus ménagé vos efforts pour faire échec à cette initiative, jusqu'à chercher à lier la promulgation de la loi PACTE, la loi relative à la croissance et à la transformation des entreprises, et l'interdiction du RIP, le référendum d'initiative partagée, au point d'agacer le Conseil constitutionnel - qui, chose inédite, a tenu à vous rappeler que « nul ne saurait ignorer la lettre de la Constitution et de la loi organique que le Conseil constitutionnel a pour mission de faire respecter ». Le Conseil ne saurait être le corps docile de l'exécutif. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC. - M. Fabien Roussel applaudit également.)
Aujourd'hui, l'initiative est valide, nul ne saurait la discuter et elle doit être mise en œuvre sans délai et dans le respect du droit. Mais encore faudrait-il pour cela que votre ministre de l'intérieur, qui a refusé de rencontrer cinq présidents de groupes parlementaires, se décide à mettre à la disposition des Français les outils de recueil de leur expression. C'est en effet lui qui doit « mettre en œuvre, sous le contrôle du Conseil constitutionnel, le recueil des soutiens ».
Monsieur le Premier ministre, les textes sont clairs : le ministre de l'intérieur ne peut se contenter de répondre qu'il dépend du Conseil constitutionnel. Ces manœuvres dilatoires doivent cesser. Il y va du respect de la loi et de la loyauté de la procédure. (Approbations et applaudissements sur les bancs des groupes SOC, GDR et LR. - Mme Fiat applaudit aussi.)
Afin de permettre l'expression de la souveraineté populaire, le Gouvernement pourrait-il enfin se conformer à notre Constitution et à nos lois, et agir ? Accorderez-vous à Mme Rabault, à M. Kanner et aux présidents des groupes associés à cette initiative le rendez-vous que le ministre de l'intérieur leur a refusé ? (Applaudissements sur les bancs des groupe SOC et GDR. – Mmes Fiat et Panot applaudissent également, de même que M. Nadot.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, de quoi parlez-vous ? Parlons plutôt de la Constitution : elle est très claire. (Protestations sur les bancs du groupe SOC.) Laissez-moi répondre, si le sujet vous intéresse ! (Mêmes mouvements.)
M. Sébastien Jumel. Le référendum !
M. Pierre Cordier. L'homme le mieux informé de France !
M. Christophe Castaner, ministre . Ce dont nous parlons, c'est de la mise en œuvre d'une initiative parlementaire et de sa traduction par un référendum, qui doit être organisé et doit permettre de rassembler 4 717 396 électeurs, lesquels doivent, notamment au moyen d'un site internet, y répondre. Sachez, monsieur le sénateur… Pardon : monsieur le député ! (Exclamations et rires sur divers bancs.)
M. Aurélien Pradié. Il ne s'est pas remis du Macumba !
M. Christophe Castaner, ministre . Le fait qu'il s'agisse d'une saisine multi-groupes et bicamérale peut justifier cette réponse… (Mêmes mouvements.)
Sachez donc que, bien avant la décision de validation par le Conseil constitutionnel, le ministère de l'intérieur s'était employé à faire en sorte que nous disposions d'un site pour recenser cela. Conformément à la Constitution,… (Exclamations sur les bancs des groupes SOC et LR.)
M. Pierre Cordier. Ce n'est pas normal !
M. Christophe Castaner, ministre . Laissez-moi répondre, monsieur le député. Soyez serein ! (Protestations sur les bancs des groupes SOC et LR.)
M. Pierre Cordier. Il y a trois semaines, vous étiez moins serein ! Vous ne faisiez pas le malin !
M. Christophe Castaner, ministre . Conformément à la Constitution, le ministère de l'intérieur, sous l'autorité du Conseil constitutionnel, dispose d'un mois pour mettre en place l'outil nécessaire. Comme je vous l'ai dit, nous avons travaillé avec le Conseil constitutionnel avant même qu'il ne nous saisisse. Nous poursuivons nos travaux et nous devons réaliser cela sous le contrôle du Conseil constitutionnel.
M. Thibault Bazin. On ne donne pas de leçons quand on va au Macumba !
M. Christophe Castaner, ministre . J'ai reçu la lettre des présidents de groupe et je l'ai immédiatement transmise au président du Conseil constitutionnel,…
M. Fabrice Brun. Quel enthousiasme !
M. Patrick Hetzel. Le rendez-vous a été proposé et vous l'avez refusé ! C'est dilatoire !
M. Christophe Castaner, ministre . …en lui indiquant que le ministère se tenait à sa disposition s'il souhaitait, en sa qualité de garant du contrôle, que nous puissions le présenter à l'Assemblée nationale et au Sénat.
Vous voyez, monsieur le sénateur – Pardon : monsieur le député ! – (Exclamations sur divers bancs) qu'il n'y a sur ce sujet aucune ambiguïté.
Le ministère de l'intérieur mettra en œuvre tous les outils et tous les moyens pour que cette consultation se déroule dans les meilleures conditions. Le ministère de l'intérieur entend respecter le troisième alinéa de l'article 11 de la Constitution. Je me tiens à la disposition du président pour vous rencontrer. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
M. le président. Monsieur le ministre, je transmettrai au président Larcher l'attachement que vous portez au Sénat. (Sourires.)
Auteur : M. Boris Vallaud
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : État
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 mai 2019