Question au Gouvernement n° 2078 :
lutte contre l'excision

15e Législature

Question de : Mme Annie Chapelier
Gard (4e circonscription) - La République en Marche

Question posée en séance, et publiée le 20 juin 2019


LUTTE CONTRE L'EXCISION

M. le président. La parole est à Mme Annie Chapelier.

Mme Annie Chapelier. Ma question, à laquelle j'associe les membres de la délégation aux droits des femmes, s'adresse à Mme la secrétaire d'État Marlène Schiappa.

Pourquoi poser une question sur l’excision ? Pourquoi parler de mutilations génitales féminines dans cet hémicycle ? Mais parce que, aujourd’hui, en France, 60 000 femmes vivent excisées… Je dis bien 60 000. Chaque année, à l’arrivée des grandes vacances, des fillettes, des adolescentes, sont envoyées dans leur pays d’origine, et ce qui aurait dû être un simple séjour dans la famille se transforme en cauchemar : piégées, ces fillettes, qui sont aussi les nôtres, reviennent abîmées, diminuées. L’excision, c’est cette mutilation aux graves conséquences physiques et médicales. L’excision, c’est une dignité arrachée, l’amputation du plaisir féminin qu’elles ne connaîtront jamais. Une femme excisée est une femme mutilée à vie. Pourquoi ? « La tradition, la coutume », voilà ce qui est invoqué pour justifier cette barbarie. Aujourd’hui, dans le monde, près de 200 millions de femmes vivent excisées, et trois millions sont menacées de l’être chaque année.

Les mutilations sexuelles sont un marqueur fort de l’inégalité entre les sexes et traduisent le contrôle exercé par une société sur les femmes. Puisqu’il n’y a aucun relativisme qui puisse expliquer qu'on réduise ou qu'on mutile, la France porte ce combat culturel de la lutte contre l'excision et le traduit par une véritable politique et par une véritable volonté d’éradication de cette barbarie. La tradition, si elle va à l’encontre de la dignité humaine, ne mérite pas d'être perpétuée.

Mme Cécile Untermaier. Très bien !

Mme Annie Chapelier. Vous l’avez dit, madame la secrétaire d'État, ceux qui excisent les petites filles ne doivent avoir aucun répit, ni en France ni dans le monde. (Mmes et MM. les députés se lèvent sur tous les bancs et applaudissent longuement) Il y a un an et demi, j’avais posé une question au Gouvernement ici même, et aujourd’hui, je réitère par cette question notre engagement dans cette lutte ! Aussi, madame la secrétaire d'État, je vous demande d'expliquer combien il est essentiel de porter ce combat au niveau international, notamment lors du G7 2019, qui sera, par la volonté présidentielle, un G7 féministe. Et pouvez-vous nous décliner les principales lignes du grand plan Excision que vous aviez annoncé en mars et qui sera présenté au début de l’été ? (Applaudissements sur tous les bancs.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations.

Mme Marlène Schiappa, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations. Je voudrais commencer en saluant votre engagement sans faille et de longue date sur ce sujet, ainsi que celui de vos collègues de la délégation aux droits des femmes.

Vous l'avez rappelé : environ 60 000 femmes vivent excisées sur le sol français. Et cette réalité, qui n'évolue pas année après année, est inacceptable. C'est pour cette raison que le Premier ministre m'a demandé de conduire un plan anti-excision, plus précisément un plan anti-mutilations génitales féminines, qui sera présentée ce vendredi à la Maison des femmes en Seine-Saint-Denis. Ce plan a été construit avec les associations de terrain, avec le GAMS – Groupe pour l’abolition des mutilations sexuelles, des mariages forcés et autres pratiques traditionnelles néfastes à la santé des femmes et des enfants –, avec « Excision, parlons-en ! », Equipop, l'ensemble des ONG concernées, ainsi qu'avec le collège des gynécologues-obstétriciens qui mène un travail important de sensibilisation et de prévention.

C'est un plan profondément interministériel comportant des mesures allant du repérage des jeunes filles déscolarisées à la sensibilisation et à l'information des primo-arrivants sur la réalité du droit français et des valeurs de la République, lesquelles passent par la dignité de la personne. Il comporte également un volet international très fort, sous l'autorité de Jean-Yves Le Drian et de Jean-Baptiste Lemoyne puisque l'Agence française de développement a comme objectif de financer des projets qui, pour la moitié d'entre eux, intègrent une dimension d'égalité filles-garçons, notamment par la lutte contre l'excision. C'est pour cette raison que j'étais le mois dernier au Burkina-Faso, où j'ai rencontré le Président de la République burkinabé et mon homologue pour pouvoir travailler avec les ONG, notamment UNICEF, dans les villages afin d'éradiquer ces pratiques néfastes.

La France rappelle qu'aucune tradition, quelle qu'elle soit, ne peut justifier que l'on mutile et que l'on torture des adolescentes et des femmes ; il n'y a rien, jamais, qui le justifie. C'est pourquoi le Gouvernement soutient et encourage les pays qui mettent en place des politiques publiques très fortes, lesquelles consistent par exemple, symboliquement, à engager les chefs de village pour enterrer les outils de mutilation et planter un arbre par-dessus afin que jamais personne ne puisse les déterrer. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM ainsi que sur plusieurs bancs des groupes FI et GDR. –  M. Mansour Kamardine applaudit également.)  

Données clés

Auteur : Mme Annie Chapelier

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Femmes

Ministère interrogé : Égalité femmes hommes

Ministère répondant : Égalité femmes hommes

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 juin 2019

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