Question au Gouvernement n° 2127 :
remboursement de l'homéopathie

15e Législature

Question de : M. Michel Fanget
Puy-de-Dôme (4e circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 3 juillet 2019


REMBOURSEMENT DE L'HOMÉOPATHIE

M. le président. La parole est à M. Michel Fanget.

M. Michel Fanget. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la Santé.

Dans quelques semaines, madame la ministre, vous devrez statuer sur le maintien ou la suppression du remboursement de l'homéopathie. Cette décision fera suite à un avis de la Haute Autorité de santé, laquelle a été saisie après la publication d'une tribune cosignée par 124 médecins.

Avant que vous preniez votre décision, madame la ministre, il me paraissait utile de préciser devant la représentation nationale les enjeux qu'emporterait la fin du remboursement de l'homéopathie.

Je n'évoquerai pas les conséquences qu'une telle décision aurait pour les entreprises de cette filière et leurs sous-traitants, pas plus que je n'évoquerai les milliers de salariés qui risqueraient de perdre leur emploi. Je n'évoquerai pas non plus les pertes de cotisations qui s'ensuivraient pour la sécurité sociale, les caisses de retraite et l'assurance chômage. Je ne commenterai pas davantage les pertes de recettes fiscales que cette décision entraînerait pour l'État.

En ma qualité de médecin cardiologue, je préfère aborder ce sujet sous l'angle de la santé publique et des patients. En 2018, 70 % des Français disaient avoir déjà eu recours à l'homéopathie, et 74 % la jugeaient efficace. Nos compatriotes sont 71 % à la considérer comme un complément aux médicaments conventionnels allopathiques, susceptible de réduire les effets secondaires des traitements traditionnels. En déremboursant les médicaments homéopathiques, vous risqueriez de provoquer un report de ces traitements vers les médicaments conventionnels, notamment vers les psychotropes dont les Français sont déjà parmi les plus grands consommateurs – avec les conséquences que cela peut avoir pour leur santé. (M. Gérard Menuel applaudit.)

Le déremboursement des médicaments homéopathiques permettrait tout au plus de réaliser une économie de 0,06 % sur le budget des dépenses de santé, sans même parler du surcoût qu'induirait pour l'assurance maladie un report vers les médicaments traditionnels.

Madame la ministre, il n'y a aucune urgence à statuer sur le déremboursement de l'homéopathie. Gardons-nous d'agir dans la précipitation. Avant de statuer, ne serait-il pas opportun de mettre en œuvre avec l'ensemble des acteurs de la filière une véritable stratégie d'évaluation qui tienne compte des spécificités des médicaments homéopathiques ? (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM ainsi que sur quelques bancs des groupes LaREM et SOC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé.

Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé. C'est grâce à la réévaluation des stratégies thérapeutiques remboursables que nous pouvons garantir des soins pertinents aux patients français. Comme de nombreux pays européens, la France s'est dotée d'un principe fort en matière de remboursement des médicaments : celui-ci est réservé aux traitements ayant un effet scientifiquement prouvé. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM et du groupe MODEM. – M. Joachim Son-Forget applaudit également.)

La Haute Autorité de santé, instance indépendante à caractère scientifique, est en charge de ces évaluations.

Il me paraît justifié de procéder à une évaluation de l'homéopathie. En effet, cette dernière dispose depuis les années 1960 d'un statut et d'un régime dérogatoires. Historiquement, l'homéopathie n'a jamais été évaluée au même titre que les autres produits de santé mis sur le marché et remboursés. C'est la raison pour laquelle il y a un an, j'ai demandé qu'elle fasse l'objet d'une évaluation.

La question qui se pose aujourd'hui n'est pas celle de l'interdiction de l'homéopathie, mais celle de son remboursement par la solidarité nationale. De nombreux Français recourent déjà à l'homéopathie sans prescription médicale ni demande de remboursement.

J'ai pris connaissance ce week-end de l'avis de la Haute Autorité de santé.

M. Laurent Furst. Ce n'est qu'un avis !

Mme Agnès Buzyn, ministre. Cet avis résulte de l'analyse de nombreuses données issues de la littérature scientifique, d'éléments fournis par les trois laboratoires pharmaceutiques concernés en France et d'auditions de multiples parties prenantes : associations de patients et d'usagers, sociétés savantes, syndicats professionnels, collèges de spécialités et conseils nationaux des professionnels de santé. Au vu de cet éclairage, je m'engage à prendre une décision prochainement. Cet avis est en cours d'examen par mes services, et ma décision sera rendue publique dans les prochains jours. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Données clés

Auteur : M. Michel Fanget

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Assurance maladie maternité

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 juillet 2019

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