Soutien aux entreprises en Martinique
Question de :
M. Jean-Philippe Nilor
Martinique (4e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
Question posée en séance, et publiée le 30 octobre 2019
SOUTIEN AUX ENTREPRISES EN MARTINIQUE
M. le président. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.
M. Jean-Philippe Nilor. Monsieur le ministre de l'économie et des finances, pendant les dix dernières années, la Martinique a subi une saignée démographique sans précédent, perdant plus de 10 % de sa population. À ce rythme, elle sera, à l’horizon 2030, confrontée à un ratio affolant de trois inactifs pour un actif. Il est donc urgent d’agir en nous appuyant sur nos points forts.
L’un d'entre eux est sans conteste notre tissu économique, composé à près de 90 % de TPE – très petites entreprises –, qui souffrent pourtant des effets pervers de politiques publiques hors sol. La réforme de la CFE – cotisation foncière des entreprises – privera nos chambres de métiers de plus de 30 % de leur budget, compromettant ainsi davantage encore l’accompagnement des professionnels et l’apprentissage.
Les artisans, les TPE et les travailleurs indépendants ne sont jamais soutenus par le système bancaire. Les crédits de l’ADIE – association pour le droit à l'initiative économique – et de Bpifrance, la banque publique d'investissement, demeurent anecdotiques et inaccessibles.
Enfin, les délais légaux de paiement ne sont jamais respectés, ni par les collectivités territoriales, ni par l’État : ils dépassent cent jours, condamnant les entreprises à la disparition pure et simple.
Aucune situation comparable n'existe dans l'hexagone. La réalité insupportable dont je viens de citer quelques exemples décourage les initiatives, conduit à démanteler les entreprises et favorise l'exclusion et le départ massif de nos forces vives. Le décret no 2018-919 du 26 octobre 2018, qui encadre l'expérimentation par Bercy de la fonction de médiateur des entreprises pour traiter les problèmes administratifs – dont les retards de paiement –, ne concerne que quatre régions de France, oubliant une fois de plus nos territoires ultramarins.
Où est le fameux « réflexe outre-mer » lorsqu'il s'agit d'appliquer de telles mesures positives ? Monsieur le ministre, acceptez-vous clairement ma proposition de corriger cette discrimination en étendant le dispositif de médiation à la Martinique, à la Guadeloupe et à la Guyane ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances. Vous l'avez dit, la loi pour un État au service d'une société de confiance, dite loi ESSOC, vise à créer une nouvelle relation de confiance entre l'administration et les Français. C'est dans ce cadre que le décret du 26 octobre 2018 étend la possibilité de saisir la médiation des entreprises aux cas de conflit entre l'administration et les entreprises. Il s'agit d'une expérimentation, réalisée dans quatre régions pendant trois ans, à l'issue desquels nous pourrons évaluer ce dispositif et, bien entendu, en faire bénéficier l'ensemble des régions – dont la Martinique et la Guyane – si nous établissons la preuve de son efficacité.
M. Jean-Philippe Nilor. C'est dès maintenant qu'il faut le faire !
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. Je comprends la frustration créée par le sentiment que les problèmes propres à la Martinique ne sont pas correctement traités.
M. Jean-Philippe Nilor. Ils ne le sont jamais !
Mme Agnès Pannier-Runacher, secrétaire d'État. S'agissant des sujets que vous mentionnez, des leviers existent déjà. Je vous propose que nous les utilisions ensemble.
Comme vous le savez, la DGCCRF – direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – et l'Observatoire des délais de paiement travaillent à améliorer ces délais. Il est en effet inadmissible que les entreprises ne soient pas payées à temps. Voilà pourquoi, dans le cadre de la loi dite PACTE – relative à la croissance et à la transformation des entreprises –, nous avons favorisé les systèmes d'affacturage inversé permettant aux TPE d'être payées immédiatement, sans attendre que les collectivités soient argentées. Nous pourrons travailler plus spécifiquement sur ce sujet avec la Martinique.
Je veux également vous dire que les services de médiation de chaque ministère peuvent d'ores et déjà être saisis de tout conflit avec l'administration. C'est tout le sens de la loi ESSOC.
Enfin, plus généralement, les dispositifs tels que l'initiative territoires d'industrie ou que la stratégie nationale pour l'artisanat et le commerce de proximité doivent servir de leviers dans votre territoire. Je vous propose donc une réunion avec mes services sur ces sujets. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Auteur : M. Jean-Philippe Nilor
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Économie et finances (Mme la secrétaire d'État auprès du ministre)
Ministère répondant : Économie et finances (Mme la secrétaire d'État auprès du ministre)
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 octobre 2019