Question au Gouvernement n° 2381 :
Laîcité

15e Législature

Question de : M. Damien Abad
Ain (5e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 13 novembre 2019


LAÏCITÉ

M. le président. Avant de donner la parole à M. Damien Abad pour poser la première question, je tiens à le féliciter de son élection à la présidence du groupe Les Républicains. Nous lui adressons tous nos vœux pour l'exercice de sa mission. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Vous avez la parole, monsieur le député.

M. Damien Abad. Je vous remercie, monsieur le président.

Monsieur le Premier ministre, où est passée la promesse du Président de la République de réconcilier les Français ? La République n’a jamais été autant fracturée au sein de ses territoires, l'unité de la société n’a jamais été autant attaquée, attaquée par une montée des communautarismes et de l’islamisme radical, comme ce fut encore malheureusement le cas ce dimanche, avec cette manifestation qui est venue défier la République de manière intolérable.

Face à de telles menaces, vous ne pouvez plus tergiverser, vous ne pouvez plus hésiter, vous ne pouvez plus reculer. Vous et le Gouvernement, vous êtes devenus prisonniers de votre propre marque de fabrique, cette politique du « en même temps » qui fait de l’indécision votre principe d’action et de l’inaction votre seul horizon. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

Vous renoncez à réformer notre pays et vous nous plongez dans la paralysie. Vous dîtes vouloir une grande réforme des retraites mais, « en même temps », vous reportez son application aux calendes grecques. Vous dites vouloir baisser les impôts mais, « en même temps », vous augmentez le déficit et la dette, donc les impôts de demain. Vous dites que l’immigration est un problème mais, « en même temps », vous réduisez le budget consacré à la lutte contre l’immigration irrégulière et vous augmentez le nombre de régularisations.

Mme Marine Le Pen. Il a raison.

M. Damien Abad. Toutefois, c’est sur la question de la laïcité que votre obsession du « en même temps » vous paralyse le plus. La lutte contre le fondamentalisme religieux et l’islam politique ne laisse pas de place pour le « en même temps », et nous attendons de vous des actes clairs et des réponses concrètes.

Monsieur le Premier ministre, dites-nous si, oui ou non, vous allez rétablir la laïcité partout sur le territoire de la République. Dites-nous si, oui ou non, vous êtes prêt à interdire les listes communautaristes dès les prochaines élections municipales. Quand renoncerez-vous à votre silence coupable et à vos ambiguïtés permanentes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR, ainsi que sur quelques bancs du groupe UDI-Agir. – Mme Agnès Thill applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président Abad, avant de répondre à vos nombreuses questions, permettez-moi de vous féliciter, à mon tour, pour votre élection à la tête du groupe Les Républicains de l'Assemblée nationale. J'adresse également un message à tous ceux qui s'y sont présentés, ainsi qu'à M. Christian Jacob, qui vous a précédé dans vos fonctions. J'espère que nous aurons l'occasion de travailler ensemble, par-delà nos divergences, dans le cadre d'échanges aussi directs que respectueux, comme nous en avons pris l'habitude.

Au détour d'une de vos nombreuses questions – je ne veux pas jouer sur les mots –, vous m'avez demandé si nous souhaitions réinstaurer – je ne me rappelle plus le mot précis que vous avez employé – la laïcité sur tout le territoire. Eh bien, je ne tergiverse pas sur la question de la laïcité, je ne recule pas : j'explique le droit français et notre conception de la laïcité, laquelle est un principe de liberté et de neutralité, qui exige que, sans aucune naïveté, nous ne fassions pas référence à la confession de tel ou tel citoyen mais bien que nous nous adressions à la communauté nationale dans son ensemble.

Je tiens également à rappeler, même si je sais que cette aspect-là de la question ne peut échapper à un député siégeant sur vos bancs, que la loi de 1905 ne s'applique pas à la totalité du territoire national, les deux départements alsaciens et la Moselle n'y étant pas soumis. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Je ne sache pas, d'ailleurs, que vous vouliez revenir sur cet état de fait. Ou alors, dites-le, ce serait intéressant. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

Nous ne reculons pas et ne voulons pas reculer sur la laïcité. Nous l'entendons clairement : principe de liberté pour les citoyens, principe de neutralité pour les agents publics.

M. Michel Herbillon. Les Français attendent des décisions, monsieur le Premier ministre, pas des explications !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Nous ne cédons rien sur le sujet. Lorsque le Parlement français a adopté le texte issu de la proposition de loi de Mme la sénatrice Françoise Gatel, visant à renforcer le contrôle sur la création des écoles hors contrat et à éviter la radicalisation au sein de l'école ou à côté de l'école, nous avons approuvé ce texte : aujourd'hui, nous l'appliquons.

Lorsque j'affirme vouloir lutter encore plus efficacement contre la déscolarisation, laquelle passe souvent par une scolarisation à domicile, en vérifiant que les obligations éducatives sont bien respectées non seulement par des contrôles physiques sur place mais aussi par un contrôle collectif des connaissances, je m'inscris exactement dans le combat que vous évoquez, celui de l'unité de la communauté nationale et du respect de la loi. C'est une des conditions indispensables de l'existence de notre communauté nationale.

Je le répète, la laïcité ne vient pas en plus, n'est pas un supplément d'âme : elle est la condition qui nous permet de vivre ensemble. Alors que nous ne sommes pas identiques et que nous ne croyons pas à la même chose, nous respectons la loi. L'État et les collectivités territoriales ne se mêlent pas de la religion, ni des confessions. Toute la loi et rien que la loi : telle sera toujours notre position, monsieur le président Abad. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Données clés

Auteur : M. Damien Abad

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Laïcité

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 novembre 2019

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