Question au Gouvernement n° 2393 :
situation en Bolivie

15e Législature

Question de : Mme Mathilde Panot
Val-de-Marne (10e circonscription) - La France insoumise

Question posée en séance, et publiée le 13 novembre 2019


SITUATION EN BOLIVIE

M. le président. La parole est à Mme Mathilde Panot.

Mme Mathilde Panot. Monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, avez-vous vu les images qui nous viennent de Bolivie ces derniers jours ? Avez-vous vu la maire de Vinto, Patricia Arce, kidnappée, le crâne rasé, traînée sur 5 kilomètres couverte de peinture rouge ? Avez-vous vu la police tirer à balles réelles sur les partisans du président ? Avez-vous vu le directeur de la radio du syndicat des travailleurs paysans ligoté à un arbre ? Avez-vous vu le dirigeant d'extrême droite Camacho, cet évangéliste fondamentaliste, prier sur le drapeau de l'État plurinational de Bolivie pendant que les symboles indigènes étaient brûlés ?

L'intégrité physique de plusieurs élus, poussés à la démission par l'armée, est en jeu. La vie de milliers de militants et des populations autochtones dans le pays est menacée par une opposition fasciste et une oligarchie nostalgique des privilèges perdus depuis l'arrivée au pouvoir du premier président amérindien de Bolivie. (Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR. – M. Jean Lassalle applaudit également.)

Evo Morales a été poussé à la démission par l'armée et il a dû trouver l'asile politique au Mexique. La France se serait honorée de la lui proposer également. Evo Morales a été expulsé du pouvoir par la force, la sédition et la menace sur la vie de ses proches. Soucieux de garantir la paix civile, il avait même accepté la convocation de nouvelles élections après celles qu'il avait gagnées.

Se taire sur la Bolivie, c'est préparer de nouveaux Bolsonaro. C'est approuver passivement les tweets pathologiques de Donald Trump, qui rêve de putschs permanents contre ses adversaires et de républiques andines où seuls les agents de la CIA pourraient voter. (« Exactement ! » et applaudissements sur les bancs du groupe FI, ainsi que sur les bancs du groupe GDR. – M. Jean Lasalle applaudit également.)

Monsieur le ministre, vous vous souvenez du Chili assassiné par Pinochet et de l'immense vague de solidarité qui venait alors de France. Nous devons être à la hauteur de notre histoire. Nous vous demandons d'ouvrir l'ambassade et les consulats pour les opposants persécutés. (Mêmes mouvements.)

Le Président Macron doit assurer le président Morales de la solidarité de la France. Nous vous demandons de suspendre toute relation diplomatique avec les putschistes. L'honneur international de la France est en jeu – et pour nous, il pèse plus lourd que quelques mines de lithium que convoitent les Étasuniens ! Monsieur le Ministre,…

M. le président. Merci, madame la députée. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des affaires européennes.

La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des affaires européennes.

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État chargée des affaires européennes. Notre honneur est de défendre partout la démocratie. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

M. Laurent Saint-Martin. Très bien !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État . Depuis les élections générales du 20 octobre dernier, la Bolivie vit effectivement une crise politique accompagnée de troubles et de violences qui ont débouché, dimanche, sur la démission du président Morales. Ces élections générales, il faut le rappeler, se sont déjà tenues dans un climat tendu, à la suite du référendum constitutionnel organisé par Evo Morales en 2016 pour l'autoriser à se présenter une troisième fois à l'élection présidentielle – il avait perdu ce référendum mais cela ne l'avait pas empêché de se représenter à l'époque.

M. Bruno Millienne. Eh oui !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État . L'Organisation des États américains a réalisé un audit des résultats électoraux, dont M. Morales avait accepté de suivre les recommandations. Or la mission d'audit a révélé de sérieuses irrégularités dans le scrutin et a recommandé l'organisation de nouvelles élections.

M. Jean-Luc Mélenchon. Vous approuvez le putsch, quoi !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État . L'Union européenne a également appelé le gouvernement bolivien à accepter un second tour. Ces recommandations n'ont pas été suivies, et nous le regrettons. Regardez où nous en sommes aujourd'hui :…

M. Éric Coquerel. Vous approuvez donc le putsch ! Vous vous alignez sur M. Trump !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État . …le pays est en proie à la violence et le président a démissionné.

Plusieurs députés du groupe FI . Non, on ne peut pas dire qu'il a démissionné !

M. Éric Coquerel. Cela s'appelle un putsch !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État . Il n'y a qu'une solution : organiser le plus rapidement possible un processus démocratique qui recrée de la confiance dans cette démocratie qu'il nous faut protéger.

Mme Mathilde Panot. La population se fait massacrer !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État . Nous voulons que de nouvelles élections se tiennent le plus rapidement possible. L'Union européenne enverra bien évidemment des experts sur le terrain. Nous appelons désormais toutes les autorités de transition au calme et à la retenue (Exclamations sur les bancs du groupe FI)

Mme Mathilde Panot. Tous ceux qui s'opposent à l'armée sont en prison !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État . …pour qu'elles respectent la Constitution de ce pays, les droits civils et politiques. (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe FI.)

M. le président. S'il vous plaît, mes chers collègues !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État . Arrêtons d'alimenter la confrontation entre les différentes composantes de la société bolivienne. Nous n'acceptons en rien les manifestations violentes.

M. Éric Coquerel. C'est un putsch militaire !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État . Nous cherchons à protéger la démocratie dans un pays où des élections doivent se tenir.

M. Éric Coquerel. C'est lamentable !

Mme Mathilde Panot. Honteux !

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État . Nous sommes également vigilants quant à la situation des ressortissants français présents dans ce pays, qui doivent rester en lien avec notre ambassade pour rester en sécurité. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM.)

M. André Chassaigne. Vous justifiez donc le putsch !

Données clés

Auteur : Mme Mathilde Panot

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Affaires européennes

Ministère répondant : Affaires européennes

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 13 novembre 2019

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