taxation des entreprises du numérique
Question de :
M. Benoit Potterie
Pas-de-Calais (8e circonscription) - La République en Marche
Question posée en séance, et publiée le 4 décembre 2019
TAXATION DES ENTREPRISES DU NUMÉRIQUE
M. le président. La parole est à M. Benoit Potterie.
M. Benoit Potterie. Monsieur le ministre de l'économie et des finances, le gouvernement américain a menacé hier d'imposer des droits de douane additionnels, allant jusqu'à 100 %, pour un ensemble de produits français. La liste inclut notamment les vins pétillants, les fromages, les produits cosmétiques ou encore les sacs à main, représentant au total près de 2,4 milliards de dollars de produits. Cette annonce fait suite à l'adoption par notre Parlement d'une taxe sur les services numériques, à laquelle l'administration Trump est opposée.
Monsieur le ministre, la réaction du gouvernement américain est disproportionnée et inacceptable. En effet, la taxe sur les services numériques que nous avons votée ne vise pas spécifiquement les entreprises américaines. Il n'y a donc aucune raison d'imposer des mesures de rétorsion.
Par ailleurs, il s'agit d'une mesure de justice fiscale. Il est normal que les entreprises du numérique paient leur juste part d'impôt et contribuent au financement des services publics et des infrastructures dont elles bénéficient par ailleurs. C'est l'objectif du texte que nous avons voté cette année à la quasi-unanimité.
Enfin, ne perdons pas de vue, face à ces menaces, que les géants du numérique, quelle que soit leur nationalité, détruisent tous les jours en Europe plus d'emplois qu'ils n'en créent, en raison notamment d'une distorsion fiscale que nous avons souhaité corriger grâce à ce texte.
Les annonces du gouvernement américain sont d'autant plus injustifiées que nous nous sommes engagés à retirer cette taxe en cas d'accord fiscal à l'échelle de l'OCDE. Les États-Unis participent d'ailleurs à ces négociations internationales. Monsieur le ministre, quelle réponse le gouvernement français compte-t-il apporter à ces menaces infondées ?
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie et des finances.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. Tant que les géants du numérique, qu'ils soient américains, européens ou chinois, continueront de payer quatorze points d'impôts de moins qu'une PME française ou européenne, nous nous battrons pour instaurer une taxation internationale du numérique. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
M. Pierre Cordier. Bon courage ! Il y a du travail !
M. Bruno Le Maire, ministre. C'est une question de justice mais aussi d'efficacité économique. C'est d'ailleurs ce qui vous a déterminés à adopter à la quasi-unanimité la mesure de taxation des grandes entreprises du numérique, qu'elles soient américaines, européennes ou chinoises. La réaction américaine n'a pas tardé : ils nous menacent de prendre des sanctions fortes, discriminantes, qui toucheront des produits emblématiques de la culture et de la puissance économique de la France, qu'il s'agisse du champagne ou des produits de luxe.
J'ai eu l'occasion de dire hier au représentant américain au commerce, Robert Lighthizer, ce que je pensais, avec le Président de la République et l'ensemble du Gouvernement, de ce projet de sanctions, inacceptables et indignes de la part d'un allié comme les États-Unis d'Amérique. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
M. Pierre Cordier. Donald Trump a peur !
M. Bruno Le Maire, ministre . Deux options s'offrent à nous.
Soit les États-Unis maintiennent leur projet de sanction et l'Union européenne, comme la Commission européenne l'a annoncé, prendra des mesures de rétorsion. Je m'entretiendrai demain avec le commissaire européen au Commerce, Phil Hogan, pour envisager toutes les mesures de riposte que l'Union européenne pourrait prendre si les États-Unis persistaient dans cette voie. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
Une autre voie est possible, celle de la raison et de la responsabilité, que je défends depuis des mois avec le Président de la République : prendre des mesures pour taxer au niveau international les géants du numérique au sein de l'OCDE.
J'aurai une simple question pour Washington : acceptez-vous, comme la France, cette proposition pour taxer au niveau international les géants du numérique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à M. Benoit Potterie.
M. Benoit Potterie. Quelle que soit l'option retenue, la majorité sera avec vous, monsieur le ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
M. Frédéric Reiss. Comme c'est touchant !
Auteur : M. Benoit Potterie
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Impôts et taxes
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 décembre 2019