Question au Gouvernement n° 2659 :
Réforme des retraites

15e Législature

Question de : Mme Valérie Rabault
Tarn-et-Garonne (1re circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 5 février 2020


RÉFORME DES RETRAITES

M. le président. La parole est à Mme Valérie Rabault.

Mme Valérie Rabault. Monsieur le Premier ministre, le 11 décembre dernier, lors de votre discours sur les retraites, vous avez indiqué que les personnes nées avant 1975 ne seraient pas concernées par votre réforme. Mais un mois plus tard, nous avons lu votre étude d'impact. Il y est écrit : « Bien que les assurés nés avant le 1er janvier 1975 ne soient pas concernés par le système universel de retraite, ils seront redevables du même niveau de cotisations que les salariés qui en relèvent. »

Plusieurs députés du groupe SOC . Eh oui !

Mme Valérie Rabault. Pour parler simplement, cela signifie que tous les Français, même ceux nés avant 1975, vont être concernés par la réforme des retraites du fait de régimes de transition.

Plusieurs députés du groupe SOC . Eh oui !

Mme Valérie Rabault. Pour comprendre cette contradiction, nous avons interrogé à quinze reprises, hier soir, M. le secrétaire d'État chargé des retraites, et nous n'avons obtenu aucune réponse. C'est pour cela que je m'adresse à vous, monsieur le Premier ministre.

Oui ou non, votre réforme des retraites va-t-elle concerner, via son régime transitoire, tous les Français, y compris les 11 millions de Français nés entre 1963 et 1975 ?

Deuxième question : oui ou non, tous les assurés vont-ils voir leurs cotisations retraite augmenter à partir de 2025 ? L'étude d'impact précise qu'un fonctionnaire au SMIC né en 1974 qui partirait à la retraite à 65 ans aura vu ses cotisations retraite augmenter de 4 608 euros sur les quatorze années entre 2025 et 2039 sans acquérir aucun droit nouveau pour sa pension.

M. Boris Vallaud. Absolument !

Mme Valérie Rabault. Enfin, monsieur le Premier ministre, au nom du principe d'universalité que vous revendiquez, prévoyez-vous des compensations partielles à cette augmentation ? Dans ce cas, pourquoi abandonnez-vous les artisans, les indépendants et les non-salariés, qui devront s'en remettre à d'hypothétiques tiers pour compenser cette surcotisation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LR, FI et GDR.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame la présidente Valérie Rabault, vous me posez trois questions techniques sur la réforme des retraites et le système universel que nous voulons mettre en œuvre, alors que la commission spéciale a commencé hier des travaux qui la conduiront à examiner la soixantaine d'articles et les très nombreux amendements qui ont été déposés par les députés et les groupes composant cette assemblée.

C'est vrai, nous avons indiqué que les Français qui se trouvent en 2020 à moins de dix-sept ans de l'âge légal auquel ils devraient partir en retraite compte tenu du système actuel – c'est la règle de transition si on la définit de la façon la plus précise possible – n'étaient pas concernés par le calcul et la liquidation dans le nouveau régime universel de retraites.

M. Maxime Minot. C'est incompréhensible !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Ceux qui sont nés avant 1975 ne sont par définition pas concernés par ce système alors que ceux qui sont nés après 1975, s'agissant du régime général, sont concernés par le système universel.

M. Jean-Luc Reitzer. L'usine à gaz !

M. Maxime Minot. Répondez oui ou non, ça n'est pas compliqué…

M. Édouard Philippe, Premier ministre. S'agissant des taux de cotisation, par exemple dans le régime général, vous savez qu'ils n'ont pas vocation à évoluer. La question que vous posez est celle de l'évolution des taux de cotisation à partir du moment où on entre dans la réforme, donc à partir de 2025, date où les effets de l'entrée dans le système universel vont se produire. Les cotisations, s'agissant de l'ancien régime général, n'ont pas vocation à bouger puisqu'elles resteront à 28,12 % – je parle sous le contrôle de M. le secrétaire d'État. Votre question ne se pose donc pas pour le régime général, soit pour 80 % des Français. Je me permets de l'indiquer parce que je crois qu'il est plus clair de rappeler la réalité des faits et des masses.

Pour le reste, il est vrai qu'un certain nombre de Français vont voir leur taux de cotisation augmenter mais d'autres le verront descendre, madame la présidente.

Mme Valérie Rabault. Je n'ai pas dit le contraire !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je sais bien que vous n'avez pas dit le contraire, mais vous avez oublié de préciser ce point et c'est pourquoi je me permets de compléter votre propos. (Rires et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) C'est un fait : toutes les personnes concernées bénéficieront de cette diminution.

Il nous est apparu plus logique et probablement beaucoup plus sain de faire en sorte que, durant la période de transition, les Français qui exerceraient le même métier et qui continueraient à être soumis au même régime ne soient pas traités différemment, notamment au regard du principe d'égalité – et la question que vous posez a beaucoup à voir avec l'égalité au regard du régime. Si nous ne voulons pas méconnaître ce principe d'égalité, il faut bien que cela se fasse progressivement – j'insiste sur ce point, madame la présidente, parce que cette évolution des taux de cotisation n'est acceptable que si elle s'inscrit dans une durée assez longue.

C'est la raison pour laquelle nous insistons sur le fait que les transitions doivent être lentes. Ce n'est pas du tout parce que nous aurions peur du résultat ou que nous ne serions pas convaincus du bien-fondé du système universel, au contraire, mais si l'on veut qu'elle soit acceptable dans la durée, il faut que la progression soit lente. Nous avons toujours dit, madame la présidente, et vous le savez parfaitement, que nous étions déterminés à faire en sorte que le système universel s'applique le plus rapidement possible mais que les périodes de transition seraient lentes, justement pour qu'elles soient acceptables.

Voilà les éléments que je souhaitais soumettre à votre réflexion aujourd'hui. Vous aurez beaucoup plus de temps au cours de la semaine qui vient en commission spéciale et au cours des semaines qui suivront dans l'hémicycle d'évoquer toutes ces questions techniques car, si j'ai bien compris, les débats seront longs et intenses. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

Données clés

Auteur : Mme Valérie Rabault

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Retraites : généralités

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Premier ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 février 2020

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