Élections municipales
Question de :
Mme Valérie Boyer
Bouches-du-Rhône (1re circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 5 février 2020
ÉLECTIONS MUNICIPALES
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer.
Mme Valérie Boyer. « Il existe un doute sérieux quant à la légalité de la circulaire litigieuse », laquelle « ne présente pas de garantie d'objectivité » : c'est par ces mots sévères, monsieur le Premier ministre, que le Conseil d'État a rejeté la circulaire de votre ministre de l'intérieur, qui, au lieu de s'occuper de la sécurité des Français, s'attelle à des petites manœuvres politiciennes.
Le ministre visait un double objectif : premièrement, pas d'étiquette politique pour les communes de moins de 9 000 habitants, c'est-à-dire pour 96 % des villes où vivent 54 % des Français ; deuxièmement, l'apparition d'une nouvelle catégorie politique « liste divers centre » regroupant non seulement des listes investies par votre majorité, mais également des listes plus ou moins soutenues par votre parti, La République en marche – pour faire simple, des candidats soutenus malgré eux en 2020.
M. Damien Abad. Quelle magouille !
Mme Valérie Boyer. Vous gonflez les résultats parce que votre majorité n'est pas capable de gagner des mairies ; vous revendiquez des victoires là où vous n'avez même pas eu un candidat ; bref, vous opérez un coup de force démocratique et punissez la France des territoires car elle n'est pas la France macroniste ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LR.)
Après avoir inventé « balance ton maire », vous persévérez avec « efface ton maire » ! Grâce aux Républicains notamment, la supercherie a été révélée, et le Conseil d'État vient de vous infliger un véritable camouflet, second désaveu en quelques jours après celui, très sévère, qui a porté sur le projet de réforme des retraites. Comme l'affirmait l'homme politique Émile de Girardin, « il n'est jamais trop tard pour reconnaître qu'on a commis une faute : car finir par la reconnaître, c'est commencer à la réparer ».
Alors, monsieur le Premier ministre, allez-vous reconnaître vos torts, ceux-là mêmes qu'a dénoncés le Conseil d'État ? Pouvez-vous garantir une information véritable et sincère quant à l'expression du vote des Français ? Pouvez-vous nous garantir, concrètement, que la nouvelle circulaire ne cherchera pas, comme la précédente, à fausser la démocratie en maquillant le vote des Français ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LR.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Pierre-Henri Dumont. Et du tripatouillage !
M. Christophe Castaner, ministre de l'intérieur. Réparons, madame Boyer, puisque vous m'y invitez,…
M. Pierre Cordier. Vous n'avez pas le choix !
M. Christophe Castaner, ministre . …ce que vous avez raison de faire. Du reste, c'est déjà réparé : la nouvelle circulaire, publiée – je l'ai souhaité – ce matin, intègre l'ensemble des remarques du Conseil d'État. La première, qui concernait la question du seuil, était liée à une objection très courante chez les maires, dans la ruralité.
M. Pierre Cordier. En dessous de 9 000 habitants, ce n'est pas la ruralité !
M. Christophe Castaner, ministre . En tant qu'élu des Alpes-de-Haute-Provence, je me souviens de tous les maires qui ont râlé, comme leurs associations – en particulier l'Association des maires ruraux de France – contre le nuançage d'office que les préfets effectuaient de façon certes objective, mais sans concertation avec les candidats devenus maires.
M. Pierre Cordier. « Râlé » ?
M. Christophe Castaner, ministre . J'ai finalement fixé le seuil à 3 500 habitants – soit un seuil en faveur duquel votre groupe a eu l'occasion de se prononcer lors de la discussion d'un amendement dans cet hémicycle et d'un amendement identique au Sénat.
Par ailleurs, conformément à la demande de précision du Conseil d'État, j'ai fait évoluer le nuançage : il distinguera les listes divers gauche, divers droite et divers centre.
Mme Valérie Boyer et M. Jean-Pierre Door . C'est quoi, « divers centre » ?
M. Christophe Castaner, ministre . Enfin, nous avions considéré que l'aspiration de M. Nicolas Dupont-Aignan à être le Premier ministre de Mme Marine Le Pen permettait de situer son parti à l'extrême droite de notre hémicycle.
M. Sébastien Chenu. Ah, la tambouille !
M. Christophe Castaner, ministre . Le Conseil d'État en a jugé autrement ; aussi avons-nous prévu une catégorie politique spécifique pour la liste de Debout la France.
M. Pierre Cordier. Tu vois, quand tu veux !
M. Christophe Castaner, ministre. Notre volonté est bien d'écouter les remarques du Conseil d'État, de les prendre pleinement en considération et de chercher à formuler des propositions conformes aux aspirations qui s'y expriment. La nouvelle circulaire est publiée sur le site du ministère de l'intérieur depuis ce matin ; si besoin, je suis prêt à vous la communiquer, madame la députée. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer.
Mme Valérie Boyer. Nous examinerons la circulaire et en tirerons les conséquences, peut-être par un nouveau recours.
M. Patrick Hetzel. Très bien !
Mme Valérie Boyer. Nous refusons en tout cas que le vote des Français soit effacé ou maquillé – manœuvre à laquelle vous vous êtes livré. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LR.) Le Conseil d'État vous a remis dans le droit chemin de la démocratie ; nous verrons ce qu'il en est dans ce second exercice. (Mêmes mouvements.)
Auteur : Mme Valérie Boyer
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Élections et référendums
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 février 2020