Question au Gouvernement n° 2666 :
Bilan des 35 heures

15e Législature

Question de : M. Olivier Dassault
Oise (1re circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 5 février 2020


BILAN DES 35 HEURES

M. le président. La parole est à M. Olivier Dassault.

M. Olivier Dassault. Madame la ministre du travail, les 35 heures, du haut de leurs vingt ans, sont devenues l'un des symboles de la France. Symbole certes moins glorieux que la tour Eiffel, l'invention du cinéma, du TGV ou de la carte à puce.

Un député du groupe GDR . Et le Rafale ! Le Rafale !

M. Olivier Dassault. Personne ne nous jalouse ; personne ne nous copie. Sur le papier, les 35 heures devaient permettre de partager le travail sans affecter la compétitivité, et de lutter contre le chômage. Mathématique ! Or la vie n’est pas une simple équation, ni un gâteau à partager.

Vingt ans plus tard, dans la réalité, le pouvoir d'achat s’est-il amélioré ? (« Non ! » sur les bancs du groupe LR.) Non. La compétitivité a-t-elle explosé ? (Mêmes exclamations.) Non. Le chômage a-t-il chuté ? (Mêmes exclamations.) Non. (Protestations sur les bancs du groupe LaREM.) Non, mes chers collègues, pas ces vingt dernières années !

Le marché du travail est encore plus dur et plus injuste qu'à l'époque. Les jeunes ont du mal à y entrer. Vous me direz que ç'aurait pu être pire : à force d'assouplissements, de contournements, de détricotages décidés par les gouvernements successifs, les entreprises ont en effet fini par s’adapter. L'histoire est plus triste pour la fonction publique, qui souffre encore de cette désorganisation.

Les 35 heures ont tué les services de proximité, contraints de faire autant avec moins. Elles ont créé de la précarité, de la complexité, des difficultés. Quand il y a beaucoup de malades, les hôpitaux travaillent plus, sans plus d'effectifs. Quand il y a beaucoup de conflits, la justice travaille plus, sans plus d’effectifs. (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.) Et comme il y a beaucoup de manifestations, surtout depuis un an et demi, les pompiers, les policiers, les gendarmes travaillent plus, même lorsque leurs heures supplémentaires ne sont ni payées intégralement ni récupérées.

Aujourd’hui, à l’heure de la révolution digitale, la question du rapport au travail se pose de nouveau dans toutes ses dimensions. Les Français sont courageux, valeureux, volontaires : le « travailler plus pour gagner plus » les avait séduits. Alors, madame la ministre, que proposez-vous maintenant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.

Mme Muriel Pénicaud, ministre du travail. À l'occasion du vingtième anniversaire des 35 heures, leurs résultats sont fortement débattus. Les analyses et les controverses se multiplient. Mais la vérité, que j'aimerais partager avec vous, c'est que les 35 heures ne constituent plus pour notre pays un enjeu de performance économique. Savez-vous que les salariés, en France, travaillent en moyenne 37,2 heures par semaine, contre 36,5 en Allemagne et 34,9 au Royaume-Uni ?

M. Jean-Paul Lecoq. Et ils sont moins payés !

Mme Muriel Pénicaud, ministre. La question s'est réglée par des assouplissements successifs, par des accords entre les partenaires sociaux, par des systèmes d'heures supplémentaires, par l'adaptation au terrain. La réforme du code du travail, il y a deux ans et demi, y a grandement contribué en apportant bien plus de souplesse sous réserve d'un accord d'entreprise ou de branche.

Avec Bruno Le Maire et Agnès Pannier-Runacher, qui font beaucoup en faveur de l'attractivité de notre pays, nous avons constaté que parmi les investisseurs, parmi les PME que nous rencontrons depuis deux ans et demi dans le cadre des sommets Choose France, quasiment plus personne ne nous parle des 35 heures. Ce n'est plus le sujet d'aujourd'hui ; c'est du passé.

M. Alain Bruneel. Passez aux 32 heures !

Mme Muriel Pénicaud, ministre . Poursuivre en matière de compétitivité, accélérer en matière de compétences, être plus attractifs, voilà les sujets de demain. Grâce à ces mesures, la France est devenue le premier pays d'Europe lorsqu'il s'agit d'attirer des investissements étrangers, ce qui n'avait encore jamais été le cas. Nous sommes sur la bonne voie. Ne revenons pas à des débats du passé, lestés par les idéologies ; allons pragmatiquement vers l'avenir. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Dassault.

M. Olivier Dassault. Madame la ministre, vos propos rendent tout bonnement hommage aux ouvriers français, qui travaillent très bien, certainement mieux que les Anglais ou les Allemands.

M. Jean-Paul Lecoq. Augmentez les salaires !

M. Olivier Dassault. Mais cela reste de la théorie. En théorie, tout se passe toujours bien. Je vous en supplie : écoutez, apprenez et agissez. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.)

Données clés

Auteur : M. Olivier Dassault

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : Travail

Ministère répondant : Travail

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 février 2020

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