Question au Gouvernement n° 2699 :
Violences sexuelles dans le sport

15e Législature

Question de : M. Régis Juanico
Loire (1re circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 12 février 2020


VIOLENCES SEXUELLES DANS LE SPORT

M. le président. La parole est à M. Régis Juanico.

M. Régis Juanico. Madame la ministre des sports, alors que la parole glaçante des victimes se libère dans de nombreuses disciplines sportives, bien au-delà du patinage artistique, je veux d’abord dire que vous nous trouverez toujours à vos côtés pour renforcer les politiques publiques permettant de mieux prévenir les violences sexuelles et de lutter contre elles. (Applaudissements sur de nombreux bancs.) Je pense au travail de prévention exemplaire auprès des jeunes sportives et sportifs, mené depuis avril 2019 par le ministère des sports avec l’association Colosse aux pieds d’argile.

Les pouvoirs publics doivent aujourd’hui rassurer les nombreux parents qui se posent légitimement des questions sur l’accueil de leurs enfants dans les clubs.

Madame la ministre, vous avez déclaré : « Plus que jamais on a besoin d’une présence de l'État au sein des fédérations ». Je partage ce point de vue. Nous avons besoin d’un État fort dans le sport, fort dans ses missions de régulation et de contrôle, pour veiller notamment à l’intégrité morale et physique des sportifs.

En ce qui concerne la gouvernance des fédérations, la loi du 1er mars 2017, dite loi Braillard, oblige les fédérations sportives à se doter d’une charte éthique et de déontologie, mais aussi d’un comité chargé de veiller au respect de ces règles d’éthique. Or, ces comités d'éthique ne se réunissent pas ou très peu. Par ailleurs, la vérification du casier judiciaire n’est pas obligatoire pour qui veut être entraîneur ou encadrant bénévole dans un club sportif, pas plus que l’examen du fichier automatisé des auteurs d’infractions sexuelles et violentes.

Si nous voulons pouvoir contrôler les antécédents des bénévoles encadrants, il est nécessaire de faire évoluer la loi rapidement. Pouvez-vous nous assurer que le projet de loi « sport et société » sera bien examiné en 2020 ?

Pour un contrôle effectif des quelque 300 000 clubs sportifs de nos territoires, nous avons besoin d’agents de l'État disponibles, car il s'agit d'un véritable travail de proximité. Les 1 600 conseillers techniques et sportifs peuvent être mobilisés, à condition qu’ils restent bien des agents de l'État, mais aussi les personnels « jeunesse et sports » des services déconcentrés. Or ces derniers seront absorbés par l'éducation nationale à partir du mois de juin prochain et se consacreront principalement au service national universel.

Madame la ministre, pouvez-vous nous garantir que des moyens humains suffisants seront bien mobilisés au niveau de l'État pour traiter la question des violences sexuelles dans le sport ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Jean-Paul Dufrègne applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des sports.

Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports. Monsieur le député, la présence des cadres d'État au sein des fédérations et l'organisation territoriale d'un ministère des sports avec une mission de protection des publics est une spécificité du modèle sportif français. Je le dis clairement : c'est une chance dans l'actualité du sport telle qu'elle survient aujourd'hui. Cela donne en effet au monde fédéral, au monde associatif, la possibilité de veiller à la lutte contre la pédocriminalité dans le sport.

Vous vous doutez bien que les témoignages des victimes, la gravité des crimes, leur nombre, leur persistance dans le temps et l'impunité dans laquelle ils se sont déroulés sont aussi choquants et bouleversants pour le grand public et le mouvement sportif que pour l'État et ses agents, en particulier ceux de mon ministère. Je remercie ces derniers pour leur mobilisation en urgence pour recueillir la parole qui se libère chaque jour.

Le 21 février prochain, avec Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé, et Marlène Schiappa, secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations, nous réunissons tous les acteurs, dont les parlementaires, pour une convention nationale de prévention des violences dans le sport. La pédocriminalité n'est pas un sujet spécifique au sport. Un enfant sur cinq en est victime en Europe, et le sport doit apporter sa pierre à l'édifice d'une société plus sûre pour nos enfants.

Au-delà de la mobilisation des fonctionnaires, tout le monde doit pratiquer une vigilance de chaque instant et s'approprier le pilotage des actions à mener main dans la main avec les collectivités et le mouvement sportif. Cette appropriation devra passer par la « loi sport » que vous évoquez s'agissant du contrôle de l'honorabilité des bénévoles, mais aussi d'un renforcement des contrats de délégation passés avec les fédérations délégataires affinitaires et agréées.

Elle devra aussi passer par des actions éducatives, de formation et de prévention ; sensibiliser les enfants sur le rapport à leur corps ; former les éducateurs sur les limites à poser et à respecter dans les relations particulières qui les lient inévitablement aux athlètes dans la recherche de performance ; agir pour dire qu'il est important de parler, de dénoncer, de signaler, de se coordonner pour un processus de signalement efficace à la justice entre les associations spécialisées, les familles, les municipalités, les service et les agents de l'État et les fédérations. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Données clés

Auteur : M. Régis Juanico

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Sports

Ministère interrogé : Sports

Ministère répondant : Sports

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 12 février 2020

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