Question au Gouvernement n° 2762 :
Coronavirus

15e Législature

Question de : M. Hervé Saulignac
Ardèche (1re circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 4 mars 2020


CORONAVIRUS

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Saulignac.

M. Hervé Saulignac. Monsieur le Premier ministre, notre pays fait face à un risque sanitaire sans précédent avec la propagation du coronavirus. Je tiens à souligner combien le personnel soignant a toute notre confiance dans l'épreuve qui, probablement, nous attend. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe GDR.) Loin de nous l'idée de vouloir nourrir d'obscènes polémiques, à l'instar de celles qui émaillent la campagne des élections municipales à Paris. Sur ce sujet, l'heure est à l'unité nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – Mme Catherine Fabre applaudit également.)

Dès lors qu'un péril menace la nation, c'est la République qui nous commande de dépasser nos clivages pour protéger les Français et l'ensemble de la population présente sur notre sol. À cet égard, monsieur le Premier ministre, j'appelle votre attention sur les règles d'accès aux soins pour les personnes d'origine étrangère en situation irrégulière ou demandeuses d'asile.

Le décret du 30 décembre 2019 prévoit un délai de quatre-vingt-dix jours avant que ne leur soit accordée l'aide médicale d'État – AME. Quatre-vingt-dix jours pendant lesquels, en refusant leur prise en charge médicale, nous les abandonnons à leur sort tout en faisant courir un risque insensé à la population. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR et sur quelques bancs du groupe FI. – M. Bertrand Pancher applaudit également.)

Monsieur le Premier ministre, il ne peut pas y avoir de protection sélective face à la menace d'une épidémie. Dans un contexte sanitaire inédit, cette règle est une folie. L'Académie de médecine a dit hier sa très grande préoccupation à ce sujet. De même, et à l'initiative de notre collègue Jean-Michel Clément, de nombreux parlementaires ont demandé l'abrogation de ce décret. Cette abrogation s'impose à la fois pour les personnes concernées, mais aussi dans l'intérêt de la population française que nous avons à protéger.

Monsieur le Premier ministre, je vous demande donc de vous prononcer sans délai en faveur de cette abrogation. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, FI et GDR. – M. Bertrand Pancher et Mme Bénédicte Pételle applaudissent également.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Votre question me permet de vous apporter une réponse très factuelle, s'agissant du coronavirus et du lien que vous faites avec les populations les plus fragiles, notamment celles qui ont quitté leur pays et franchi des frontières dans des conditions souvent très difficiles pour arriver en France.

M. Christian Hutin. Merci, nous avions compris la question !

M. Olivier Véran, ministre. Pas plus aujourd'hui qu'hier, qu'avant-hier, qu'avant l'existence même de l'aide médicale d'État, aussi loin que nous puissions remonter dans le temps, à savoir au moment de la création du système d'assurance maladie, de la création de la sécurité sociale, il n'a été question de priver les personnes malades - et souffrant notamment d'une maladie infectieuse en période épidémique - du moindre soin. (M. Florian Bachelier applaudit.)

M. Christian Hutin. Et le décret du 30 décembre 2019 ?

M. Olivier Véran, ministre. Même avant la création de l'aide médicale d'État – et vous savez mon attachement à l'AME…

M. Christian Hutin. Et le décret ?

Mme la présidente. Monsieur Hutin, s'il vous plaît…

M. Olivier Véran, ministre. …et à la protection sociale des plus fragiles, vous connaissez mes engagements en la matière et je connais les vôtres, monsieur Saulignac -, quand une personne avait besoin de soins, qu'elle souffre de syndrome infectieux, de syndrome fébrile pouvant laisser soupçonner une épidémie, de quelque nature qu'elle soit, ces soins lui ont toujours été prodigués. (« Et le décret ? » sur plusieurs bancs du groupe SOC.)

Aussi, monsieur Saulignac, je ne peux pas imaginer qu'un médecin de ville ou d'hôpital,…

M. Christian Hutin. Le décret du 30 décembre 2019, allez-vous l'abroger, oui ou non ?

M. Olivier Véran, ministre . …quand bien même il n'y aurait pas de couverture de soins – alors que cette couverture est bien réelle, l'ensemble des examens et des soins étant couverts par les dispositifs en vigueur –, je ne peux pas imaginer une seconde, disais-je, qu'une blouse blanche refuse de soigner quelqu'un en période d'épidémie, ou hors période d'épidémie, qui présenterait un syndrome fébrile ou des troubles respiratoires.

M. Christian Hutin. Nous ne savons toujours pas si vous avez l'intention d'abroger le décret !

M. Olivier Véran, ministre. Soyez donc pleinement rassuré, monsieur Saulignac (Exclamations sur les bancs du groupe SOC), l'ensemble de nos concitoyens, quelle que soit leur origine, quelle que soit leur situation sociale, sont protégés par notre système de santé et peuvent être soignés tant en ville qu'à l'hôpital.

M. Christian Hutin. Il vous reste dix-huit secondes pour nous dire si vous allez abroger le décret du 30 décembre 2019 !

M. Olivier Véran, ministre. J'ajoute que sur la question particulière des mineurs non accompagnés, des migrants et des personnes logées en hébergement d'urgence,…

M. Christian Hutin. Dix secondes ! (Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

Mme la présidente. Monsieur Hutin, s'il vous plaît !

M. Olivier Véran, ministre. …sujet que j'ai évoqué avec Julien Denormandie…

M. Christian Hutin. Sept secondes !

Mme la présidente. Monsieur Hutin !

M. Christian Hutin. Cinq secondes !

M. Olivier Véran, ministre. Il me semble que le sujet est sérieux…

M. Christian Hutin. Trois secondes !

Mme la présidente. Monsieur Hutin, s'il vous plaît !

M. Christian Hutin. Mais le ministre ne répond pas !

M. Olivier Véran, ministre. Je réponds à un collègue de vos bancs, c'est dommage. Je disais donc que je me suis entretenu avec le ministre Denormandie pour m'assurer que tout était fait pour que l'ensemble des tests de dépistage, des soins et des examens (« Et le décret ? » sur plusieurs bancs du groupe SOC) puissent être réalisés pour n'importe quel citoyen sur le territoire français, quelle que soit sa situation. (Applaudissements sur de très nombreux bancs du groupe LaREM.)

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Saulignac.

M. Hervé Saulignac. Vous comprendrez, monsieur le ministre, que je ne sois qu'à moitié rassuré. Je le serai pleinement le jour où vous abrogerez le décret du 30 décembre 2019. En attendant, je souhaite par-dessus tout qu'on n'ait pas à constater qu'il y a des porteurs du coronavirus parmi les populations au nom desquelles j'ai pris la parole. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, FI et GDR.)

Données clés

Auteur : M. Hervé Saulignac

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Santé

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mars 2020

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