Situation en Syrie
Question de :
M. Joaquim Pueyo
Orne (1re circonscription) - Socialistes et apparentés
Question posée en séance, et publiée le 4 mars 2020
SITUATION EN SYRIE
Mme la présidente. La parole est à M. Joaquim Pueyo.
M. Joaquim Pueyo. Monsieur le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, depuis 2011, la Syrie est plongée dans une guerre civile qui déchire le pays et a causé la mort d'au moins 600 000 personnes, dont la moitié sont des civils. Plus de 10 millions de Syriens ont dû fuir les combats, et 4 millions d'entre eux ont quitté leur pays.
Voici plusieurs semaines que se joue ce qui est peut-être l'un des derniers épisodes de cette effroyable tragédie. Les troupes du régime syrien ont entamé la reconquête de la région d'Idlib, dernier territoire où s’entassent des forces d'opposition au régime, des groupes djihadistes et plusieurs millions de personnes déplacées au gré des événements de la guerre civile.
Depuis le début de cette offensive, en décembre dernier, 900 000 civils ont fui les combats. Le bilan provisoire fait état de plusieurs centaines de tués, dont certains seraient morts de froid. L'escalade des affrontements dans la région d'Idlib accroît fortement les risques d'un conflit d'ampleur et menace les populations civiles. Selon le haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés, des sites de déplacés et des hôpitaux ont été visés par des frappes. Une nouvelle fois, nous devons condamner avec la plus grande fermeté toute attaque, délibérée ou non, de populations civiles.
La Turquie accueille sur son sol plus de 3,5 millions de réfugiés, ce qui représente, reconnaissons-le, un défi pour ce pays membre de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, l'OTAN. Dans le même temps, plus de 15 000 réfugiés se sont massés à la frontière gréco-turque, dans des conditions particulièrement difficiles. La situation humanitaire y est désastreuse. La communauté internationale doit se mobiliser pour faire face à cette crise humanitaire aux portes de l'Europe, mais également pour mettre un terme aux affrontements meurtriers en Syrie. Au-delà de la réunion des ministres européens de l’intérieur, c’est toute la diplomatie européenne qui doit se mobiliser, car seule une solution politique associant les pays concernés peut mettre fin à cette situation.
Face à ce constat, quelles mesures très concrètes notre pays et ses alliés européens comptent-ils engager pour faire cesser les combats et la catastrophe humanitaire à Idlib ? Qu'en est-il du sommet qui devait se tenir cette semaine entre la France, l'Allemagne, la Turquie et la Russie ? Il m'apparaît indispensable.
Mme la présidente. Merci…
M. Joaquim Pueyo. Quelles mesures les États européens comptent-ils prendre pour faire face à la crise des réfugiés à la frontière grecque et pour aider… (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC. – M. Florian Bachelier applaudit également.)
Mme la présidente. Merci, mon cher collègue.
La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Vous avez bien fait, monsieur le député, de replacer l'ensemble des questions qui se posent dans le contexte historique et dans le contexte actuel. Je l'ai dit tout à l'heure en répondant à d'autres députés qui m'interrogeaient à ce sujet : la cause profonde de la situation est bien le pilonnage engagé par le régime syrien, avec l'appui de la Russie, pour récupérer le territoire d'Idlib.
M. Jean Lassalle. Ils n'ont pas le choix !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Il faut dire la vérité ! C'est cela, la cause profonde !
M. Jean-Paul Lecoq. Et la souveraineté syrienne ?
M. Fabien Roussel. Et les terroristes qui sont là-bas, vous n'en dites rien ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Dès lors, les conditions dans lesquelles se trouvent les populations de la zone concernée deviennent dramatiques : 1 million de personnes sont de nouveau déplacées après l'avoir été une première fois ; la population est soumise à des bombardements ; les centres d'accueil sont saturés ; les déplacés s'entassent dans des conditions terribles à proximité de la frontière turque, à la merci du froid, de la faim et des épidémies. On observe aussi une recrudescence des violences contre les femmes et les filles. L'offensive du régime syrien, rendue possible par le soutien aérien russe, est également marquée par des violations systématiques du droit international humanitaire.
M. Jean-Paul Lecoq. Les terroristes s'appellent Daech, au cas où vous l'auriez oublié !
M. Jean-Yves Le Drian, ministre . Nous estimons – je m'adresse à vous, monsieur Pueyo, mais aussi à M. Lecoq – que ces violations sont potentiellement susceptibles d'être considérées comme des crimes de guerre ; en tout cas, nous allons les documenter.
M. Jean-Paul Lecoq. Et pour l'Arabie Saoudite au Yémen, vous allez faire la même chose ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Parallèlement, un accord a été conclu entre les Russes et les Turcs en vue de préserver un cessez-le-feu minimal dans la zone d'Idlib. Il n'est pas respecté, ce qui se traduit par une grave conflictualité entre la Turquie et la Russie. Nous voulons que l'on revienne à l'accord de Sotchi, pour que le cessez-le-feu soit respecté.
Concernant la Turquie, nous considérons – je l'ai dit à deux reprises tout à l'heure – que le fait d'utiliser les réfugiés comme des otages pour faire pression sur l'Europe est parfaitement inacceptable, et nous le refusons. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Auteur : M. Joaquim Pueyo
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères
Ministère répondant : Europe et affaires étrangères
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mars 2020