Question au Gouvernement n° 3007 :
Politique d'aménagement des peines

15e Législature

Question de : M. Éric Diard
Bouches-du-Rhône (12e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 20 mai 2020


POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DES PEINES

M. le président. La parole est à M. Éric Diard.

M. Éric Diard. Madame la garde des Sceaux, comme tous les autres services publics, l'administration pénitentiaire a dû, elle aussi, se réorganiser. Je souhaite appeler votre attention sur l'ordonnance du 25 mars dernier, qui autorise notamment l'octroi de remises de peines supplémentaires de deux mois. À ce jour, plus de 13 500 détenus ont ainsi été libérés. Bien sûr, vous l'avez rappelé, en sont notamment exclus les criminels, les personnes condamnées pour terrorisme ou encore pour violences conjugales. Cependant, je déplore que les détenus radicalisés ne soient pas exclus, eux aussi, du dispositif,…

M. Fabrice Brun. Tout à fait !

M. Éric Diard. …quand bien même ils seraient détenus de droit commun. Lors de son audition par la commission des lois, le directeur de l'administration pénitentiaire a admis que 130 détenus inscrits au FSPRT, le fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste, pouvaient, eux aussi, bénéficier de cette remise de peine.

Vous avez par ailleurs contesté le nombre de 20 000 personnes ayant bénéficié d'une réduction de peine en application de ladite ordonnance. Ce chiffre est certes faux à l'heure actuelle, mais l'ordonnance prévoit que cette remise supplémentaire pourra être accordée jusqu'au 10 août prochain. Dans ce cas, si le texte n'est pas modifié, nous en serons bien à 20 000 détenus libérés prématurément.

Maintenant que la justice reprend son cours, quand comptez-vous mettre fin à ce dispositif et à cette ordonnance ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Vous savez que la surpopulation carcérale constituait une difficulté majeure pour lutter contre la pandémie du covid en prison. Dès lors, plusieurs mesures ont été prises pour faire baisser cette surpopulation. Je vous rappelle qu'il y avait le 16 mars, à la veille du confinement, 72 575 personnes détenues pour 61 109 places opérationnelles, ce qui représentait une densité carcérale de 119 %, tous établissements confondus.

Votre présentation est erronée car s'il y a bien 13 500 détenus en moins, cela provient principalement du fait que le confinement a conduit à une réduction considérable de la délinquance de rue. À côté de cette diminution des décisions d'incarcération, mon ministère a certes pris des mesures volontaristes pour réduire la durée d'incarcération, mais elles n'ont concerné que 5 400 personnes. Le différentiel réel n'est donc pas celui que vous exposez. J'ajoute que ces 5 400 détenus en moins étaient pour la plupart en toute fin de leur peine et, vous l'avez vous-même rappelé, j'avais exclu de ces mesures les détenus condamnés pour crime, terrorisme ou violences intrafamiliales.

Cette période montre que la surpopulation carcérale n'est pas fatale et que les outils que votre assemblée a adoptés dans le cadre de la loi de programmation et de réforme pour la justice vont permettre de continuer à aller dans le sens que j'ai évoqué. Mais, je l'ai déjà dit, ces mesures s'inscrivent dans l'ensemble de celles visant à lutter contre la pandémie, et sont à ce titre provisoires. Voilà ce qu'il faut en retenir, malgré ma volonté de continuer à lutter contre la surpopulation carcérale. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)

M. le président. La parole est à M. Éric Diard.

M. Éric Diard. Malheureusement, pendant le confinement, la radicalisation et le terrorisme ne sont pas, eux, restés confinés : je rappelle l'attentat commis à Romans-sur-Isère le 4 avril, et le passage en force d'un barrage par une personne armée, un fichier S libéré par anticipation, à Vannes le 5 mai.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Cela n'a aucun lien !

M. Éric Diard. Vous n'avez pas répondu à ma question. Il est déraisonnable d'avoir laissé sortir les détenus radicalisés. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Il n'était pas en prison !

Données clés

Auteur : M. Éric Diard

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 mai 2020

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