Question au Gouvernement n° 3089 :
Violences policières

15e Législature

Question de : M. Ugo Bernalicis
Nord (2e circonscription) - La France insoumise

Question posée en séance, et publiée le 10 juin 2020


VIOLENCES POLICIÈRES

M. le président. La parole est à M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Monsieur le premier ministre, je suis satisfait que vous ayez enfin pris conscience des rapports dégradés et préoccupants entre la police et la population, et du péril que cela constitue pour l’unité du peuple Français.

Le groupe La France insoumise tient d’abord à remercier celles et ceux qui, en se mobilisant à travers le monde et en France contre les violences policières et les discriminations, ont permis cette prise de conscience (Applaudissements sur les bancs du groupe FI). Trop souvent, la mobilisation pour que les victimes obtiennent justice et que la vérité soit faite se tient dans l’indifférence et l’opprobre. Il faut remercier particulièrement les policiers qui, petit à petit, brisent l’omerta et font connaître leurs collègues racistes, lesquels n’ont rien à faire dans la police républicaine.

Vous semblez désormais partager notre objectif de rétablir une police républicaine.

M. Christophe Castaner, ministre. Elle l'est déjà !

M. Ugo Bernalicis. La police ne doit pas être crainte, elle doit être respectée. Or, pour cela, elle doit être respectable, donc débarrassée de ses éléments violents, racistes et antirépublicains. Une police a de l’autorité quand elle est respectée ; et elle est respectée quand elle est légitime, c’est-à-dire quand elle agit avec proportionnalité et déontologie. Alors finissons-en une bonne fois pour toutes avec les forces de l’ordre, et rétablissons les gardiens de la paix ! (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)

Nous avons proposé d'instaurer un récépissé de contrôle d’identité, d'interdire les LBD – les lanceurs de balles de défense – et les grenades explosives, d'interdire aussi, comme dans d'autres pays, les techniques de pliage et de plaquage ventral, qui peuvent tuer : vous avez tout rejeté. Nous vous les proposons donc à nouveau.

Deux autres réformes sont indispensables.

D’abord, le contrôle interne de l'IGPN doit être rendu indépendant et le contrôle externe du défenseur des droits, renforcé. En effet, seules 36 des 4 000 saisines du Défenseur des droits aboutissent à une demande de sanction : il s'agit donc déjà d'un filtre très fin, avec aucune sanction à la clé. C’est inacceptable.

Ensuite, voilà trois ans que je vous demande de rouvrir les écoles de polices, que Nicolas Sarkozy a fermées en son temps. Afin de les armer intellectuellement pour répondre aux attentes de la population, il faudrait que les policiers suivent au minimum un an de formation initiale. (Mme Caroline Fiat applaudit.)

En 2017, le candidat Macron déclarait qu'il n'était pas acceptable qu'aucune sanction hiérarchique ne soit prononcée quand une violence policière était commise, car, au-dessus du policier, il y a un commissaire de police, un directeur départemental de la sécurité publique, un préfet, un ministre.

Pour rétablir la confiance du peuple en sa police, je vous demande donc solennellement de démettre ceux qui, à la tête de la hiérarchie, ont couvert pendant trop longtemps cette réalité, notamment le ministre Christophe Castaner et le préfet Didier Lallement. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – Mme Elsa Faucillon applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur.

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur. Après vous avoir écouté, monsieur Bernalicis, je ne peux que commencer par vous indiquer qu'il n'est pas question de rétablir la police républicaine, car la police française est une police républicaine. (Approbations et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

M. Hervé Berville. Eh oui !

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État . Votre question touche directement à la relation entre la police et la population. Vous le savez, cette relation de confiance est essentielle : les policiers et les gendarmes sont des piliers de la République, ce sont eux qui luttent contre la délinquance. Personne, je dis bien personne, ne nie la qualité de leur action dans ce pays.

M. Marc Le Fur. Vous ne dites pas la même chose que M. Castaner !

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État . Si cette relation s'érode, c'est peut-être aussi en partie parce que, quand les forces de l'ordre ont été prises à partie lors de certaines manifestations, certains, sur vos bancs, ont prétendu que la police était utilisée par le pouvoir politique pour réprimer des manifestations, pour réprimer une expression. Les propos de ce type érodent la relation de confiance entre la police et la population !

Par ailleurs, dans certains territoires, l'implication moindre de certains acteurs pourtant importants pour le partenariat de sécurité que nous souhaitons développer, comme les communes, les bailleurs, les transporteurs, fait trop souvent de nos forces de police et de gendarmerie le seul réceptacle des problèmes de sécurité.

Mme Cécile Untermaier. Très juste !

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État . C'est un problème que nous sommes en train de résoudre, avec la création d'une police de sécurité du quotidien, afin que policiers et gendarmes ne soient pas seuls face aux difficultés engendrées par la gestion des incivilités, ce qui génère souvent une dégradation de la relation entre les forces de l'ordre et la population.

Enfin, vous avez raison – le ministre de l'intérieur et moi, nous ne le nions pas –, la dégradation de la relation est également due au comportement d'un certain nombre de policiers et gendarmes, à qui il arrive de commettre des fautes. Heureusement, ces fautes restent minoritaires,…

Mme Caroline Fiat. Mais elles font mal !

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État . …et heureusement, elles donnent toujours lieu à des enquêtes judiciaire et administrative, et elles entraînent toujours une sanction.

M. Ugo Bernalicis. Vous mentez, et vous le savez parfaitement !

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État . Non, monsieur le député, je ne mens pas ! Je vous rappelle que près de 1 500 enquêtes judiciaires ont été engagées en 2019, et presque autant de sanctions administratives prononcées. Il y en a même eu près de 2 000 pour les gendarmes !

M. le président. Il faut conclure, monsieur le secrétaire d'État.

M. Laurent Nunez, secrétaire d'État . Vous ne pouvez donc pas dire que les forces de l'ordre travaillent dans l'impunité : c'est faux. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Données clés

Auteur : M. Ugo Bernalicis

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Police

Ministère interrogé : Intérieur (M. le secrétaire d'État auprès du ministre)

Ministère répondant : Intérieur (M. le secrétaire d'État auprès du ministre)

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 juin 2020

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