Question au Gouvernement n° 3150 :
Procédure judiciaire

15e Législature

Question de : M. Éric Ciotti
Alpes-Maritimes (1re circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 1er juillet 2020


PROCÉDURES JUDICIAIRES

M. le président. La parole est à M. Éric Ciotti.

M. Éric Ciotti. Monsieur le Premier ministre, notre justice est aujourd'hui malade de sa politisation. Le poison de la suspicion gagne chaque jour du terrain. Cette suspicion s'est nourrie des déclarations récentes de Mme Houlette faisant état de pressions fortes de sa hiérarchie dans l'affaire Fillon. Elle trouve également sa source dans la procédure ahurissante diligentée dans le total secret, au mépris de tous les droits de la défense, par le Parquet national financier à l'encontre de Nicolas Sarkozy et de dizaines d'avocats surveillés de façon scandaleuse. Cela est extrêmement grave !

La question de la motivation politique de procédures, conduites en marge du cadre juridique habituel, est posée. Le cours, sans doute, et le visage, peut-être, de notre démocratie en ont été changés.

Le Parquet national financier s'apparente de plus en plus à une juridiction d'exception. Cela n'est pas sain. Créé pour traiter les affaires financières complexes, il s'est transformé en lieu de traque politique avec une prédilection et une célérité particulières pour les opposants et une clémence et une lenteur constantes pour les amis du pouvoir actuel et passé. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Alexis Corbière applaudit également.)

Qu'entendez-vous faire pour que ne se fabriquent plus dans des officines des scandales d'État ? Avez-vous l'intention de faire droit à la demande du président Sarkozy qui réclame la saisie de l'Inspection générale de la justice pour faire la lumière sur des pratiques indignes d'un État de droit ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR ainsi que parmi les députés non inscrits.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Fabien Di Filippo. La dernière séance ! Bientôt les vacances !

M. Aurélien Pradié. Plus que quarante-huit heures !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Je comprends le trouble qu'ont suscité les propos de l'ancienne procureure du Parquet national financier devant la commission d'enquête. Vous le savez, dès le 20 juin, le Président de la République a saisi le Conseil supérieur de la magistrature puisqu'il est le garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire.

M. Fabien Di Filippo. Hypocrisie !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Quant à l'affaire des fadettes que vous mentionnez et qui a été révélée récemment par un hebdomadaire, j'ai demandé à Mme la procureure générale de Paris un rapport qui devrait m'être adressé de manière imminente. Si des dysfonctionnements sont relevés, je n'hésiterai pas à saisir l'inspection générale de la justice pour faire la lumière.

Pour autant, il serait périlleux de vouloir aujourd'hui supprimer le Parquet national financier. Celui-ci est devenu un instrument majeur de notre souveraineté judiciaire. Les succès obtenus dans les négociations sur Airbus, Google – je pourrais citer bien d'autres dossiers – en font aujourd'hui un acteur incontournable, à la légitimité et l'expertise reconnues en France comme à l'étranger.

Il importe de rappeler que le Gouvernement auquel j'appartiens n'a jamais donné d'instructions dans les affaires particulières. D'abord, cela est interdit par la loi ; ensuite, cela est proscrit par l'éthique que nous observons.

M. Christian Jacob. Alors saisissez l'Inspection générale de la justice si vous êtes si sûre de vous !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Je l'ai dit, monsieur Jacob, selon les éléments que me donnera Mme la procureure générale, je solliciterai l'inspection si des dysfonctionnements apparaissent.

Il ne faut pas faire d'amalgame entre les instructions individuelles qui n'ont pas lieu d'être et les demandes d'information que je peux légitimement adresser pour conduire la politique pénale du Gouvernement.

M. Maxime Minot. Pipeau !

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux . Il aurait été anormal que dans l'affaire des fadettes, je ne sollicite pas Mme la procureure générale. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)

Données clés

Auteur : M. Éric Ciotti

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er juillet 2020

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