Question au Gouvernement n° 3354 :
Protection de l'enfance pendant le confinement

15e Législature

Question de : M. Guillaume Chiche
Deux-Sèvres (1re circonscription) - Écologie Démocratie Solidarité

Question posée en séance, et publiée le 30 septembre 2020


PROTECTION DE L'ENFANCE PENDANT LE CONFINEMENT

M. le président. La parole est à M. Guillaume Chiche.

M. Guillaume Chiche. Monsieur le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles, la protection de l’enfance est un enjeu fondamental pour notre société. Or, en plongeant les familles dans le confinement, la crise sanitaire a placé tous les enfants à l’isolement, loin de leurs amis, de l’école et des activités extrascolaires. Pour certains de ces enfants, ce fut synonyme d’épanouissement, d’amour et de protection. Pour d’autres, ce fut le théâtre de souffrances psychologiques, de coups, de viols. Le nombre d'appels au numéro d'urgence 119 a fortement augmenté durant cette période, témoignant d’enfants et d’adolescents en grand danger. Les travailleurs sociaux de la protection de l’enfance n’ont pas eu la possibilité d’intervenir dans les familles ni d’accompagner correctement les enfants. Je tiens d’ailleurs à saluer leur détermination – singulièrement dans le territoire que je connais le mieux, celui des Deux-Sèvres – à conduire une action quotidienne et exemplaire auprès d’enfants meurtris par les violences physiques ou psychologiques.

Le confinement que nous avons subi a mis en lumière les difficultés d’un système à bout de souffle. Nous ne pouvons plus accepter que des enfants soient laissés seuls, enfermés dans une chambre d’hôtel ou à la rue, en proie à la drogue, à l’alcool, aux violences ou à la prostitution.

En temps normal, 75 % des appels passés au 119 ne sont pas traités, du fait de leur trop grand nombre. Qu’en a-t-il été durant le confinement ? Comment ont été détectées et traitées les informations préoccupantes, alors que les écoles et les services sociaux, acteurs clés des procédures de signalement, ne pouvaient assurer leur mission ?

L’invisibilité de la protection de l’enfance doit cesser. Malheureusement, la stratégie nationale de prévention et de protection de l’enfance n’a pas permis d’endiguer la détresse des enfants.

Pouvez-vous prendre l’engagement de nous transmettre des données factuelles et chiffrées sur la gestion de la protection de l’enfance durant la période de confinement ? Pouvez-vous nous indiquer les moyens mis en place afin de répondre à un double objectif : résorber les détresses accumulées ; se préparer en cas de reconfinement partiel ou total de la population ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EDS.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État chargé de l'enfance et des familles. Monsieur Chiche, je suis ravi de voir que vous vous investissez désormais sur le sujet de la protection l'enfance. Nous aurons l'occasion d'échanger hors de l'hémicycle car il va m'être difficile de répondre en deux minutes à toutes les questions – profondes et pertinentes – que vous avez soulevées.

Lors du confinement, j'étais très inquiet pour les foyers de l'aide sociale à l'enfance, lieux où des tensions peuvent avoir cours même en temps normal, alors que les écoles fermaient et que les activités et les transferts avaient été annulés.

J'étais très inquiet aussi pour les familles car 80 % des violences faites aux enfants, dans notre pays, ont lieu dans le cercle intrafamilial. Les écoles étant fermées, nous avons renvoyé des enfants dans leur famille, sachant que nous nous privions par là même de nos yeux, l'éducation nationale étant le premier pourvoyeur d'informations préoccupantes.

Sans généraliser et en ayant bien conscience que certaines situations étaient compliquées, je salue, à mon tour, l'engagement et l'implication des travailleurs sociaux, sans lesquels le système n'aurait pas pu tenir.

Les acteurs de terrain, avec lesquels j'ai échangé toutes les semaines durant le confinement et que j'ai encore vus la semaine dernière, m'ont livré des informations contre-intuitives : il y a eu moins de fugues, moins de violences entre les enfants, de même qu'entre les enfants et les éducateurs. Pourquoi ? Parce que les travailleurs sociaux ont passé plus de temps avec les enfants, parce qu'ils en passaient moins à remplir des rapports administratifs, à se déplacer pour aller à droite et à gauche, chez le juge, chez les parents ou à l'école. Ce constat doit nous inspirer et nous conduire à réinterroger nos pratiques et celles des travailleurs sociaux. Nous sommes en train d'en tirer les enseignements, notamment avec le Conseil national de la protection de l'enfance.

Et que s'est-il passé dans les familles ? Durant certaines semaines, il y a eu une augmentation de 80 % du nombre d'appels au 119. Les appels venant de voisins ont augmenté de 40 %, tout comme les appels venant de petits copains, ce qui laisse penser qu'un « réflexe 119 » s'est instauré : pendant le confinement, nous avons tous été plus vigilants à ce qui se passait derrière la paroi de l'appartement. Une fois sortis de cette période, nous devons conserver ce réflexe. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)

Données clés

Auteur : M. Guillaume Chiche

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Enfants

Ministère interrogé : Enfance et familles

Ministère répondant : Enfance et familles

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 septembre 2020

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