Question au Gouvernement n° 3528 :
Conflit au Haut-Karabakh

15e Législature

Question de : M. Guy Teissier
Bouches-du-Rhône (6e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 18 novembre 2020


CONFLIT AU HAUT-KARABAKH

M. le président. La parole est à M. Guy Teissier.

M. Guy Teissier. Le 27 septembre dernier, un conflit armé a éclaté dans la région caucasienne du Haut-Karabakh, où l'Azerbaïdjan est entré en guerre contre l'Arménie. Ce territoire est le berceau de la civilisation arménienne. Le président azerbaïdjanais avait eu cette phrase : « J'avais dit qu'on chasserait les Arméniens […] comme des chiens, et nous l'avons fait. » Cela résume aujourd'hui la triste réalité du cessez-le-feu tripartite signé entre l'Arménie, la Turquie et la Russie, dans la nuit du 9 au 10 novembre. Il est accablant pour les Arméniens du Karabakh et la République d'Arménie, qui avaient reconquis de haute lutte leurs terres ancestrales ; en revanche, il est une aubaine pour les Russes, et pour les Turcs, qui renforcent leur influence dans le Caucase. Mais où donc est passé le groupe de Minsk, censé trouver une solution pacifique au conflit ? Où donc est passée la France dans cette négociation ? (Mme Brigitte Kuster applaudit.) Alors que toute cette opération a été froidement orchestrée par un membre de l'OTAN, à savoir la Turquie, vous n'avez rien trouvé à redire ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.) Vous avez laissé la Russie seul maître de gérer le processus de paix. Ce cessez-le-feu consacre ainsi la sortie des Occidentaux de tout processus diplomatique dans le Caucase.

Par votre volonté de rester neutre, quoi qu'il en coûte, vous avez lâchement abandonné les Arméniens, qui attendaient tant de nous, (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Exclamations sur les bancs du groupe La REM)…

M. Pierre Cordier. La Russie va les encercler !

M. Guy Teissier. …les laissant entre les mains de Poutine et d'Erdogan, dont les motivations à peine voilées sont d'affaiblir en profondeur l'Occident pour l'un, et d'anéantir nos valeurs pour l'autre. La réinstallation des populations chassées par les guerres ne peut se faire que sur un territoire qui resterait souverain. La reconstruction de l'Artsakh suppose en premier lieu la reconnaissance sans délai de son indépendance. Il y va de la responsabilité morale et politique du monde libre. Les Occidentaux, dont la France, vont-ils enfin agir, ou préférez-vous que l'histoire porte sur le monde libre le même jugement que Churchill à l'égard de ceux qui fermaient alors les yeux ? Il avait dit : « Vous avez eu à choisir entre la guerre et le déshonneur ; vous avez choisi le déshonneur, vous aurez la guerre. » (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe GDR. – M. David Habib applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Je veux répéter ce que j'ai dit à plusieurs reprises,…

M. Jean-Paul Lecoq. Ça n'en fait pas une vérité !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre . …y compris dans cette assemblée : au cours des…

Une députée du groupe LR . Agissez, au lieu de parler !

M. le président. S'il vous plaît !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre . Merci de me laisser répondre à M. Teissier, qui m'entend et qui m'écoute. Depuis six semaines que cette grave crise entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan dure, nous sommes en relation avec les autorités arméniennes à tout moment ; nous leur parlons plusieurs fois par semaine. Elles demandaient au plus haut niveau que nous tenions notre place dans le groupe de Minsk. Certains semblent l'ignorer. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Jean-Paul Lecoq. Et pour éviter la guerre, qu'avez-vous fait ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre . Je réponds à M. Teissier.

Monsieur Teissier, vous savez comme moi que le cessez-le-feu était indispensable pour sauver des milliers de vies. Chacun en a convenu, y compris le Premier ministre arménien, qui l'a lui-même signé.

M. Guy Teissier. Il le paie cher !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre . En outre, il ne résout pas le problème au fond. La question est de savoir comment y parvenir demain.

M. Guy Teissier. C'est la question que je vous pose !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre . Les discussions ont commencé entre d'une part le Président de la République et le président Poutine, d'autre part entre le secrétaire d'État Mike Pompeo et moi, hier, à Paris. Demain, nous tiendrons à Moscou une réunion avec les ambassadeurs chargés du dossier pour lever les ambiguïtés du cessez-le-feu.

M. Michel Herbillon. Elles sont nombreuses !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre . Merci de me laisser répondre !

M. le président. Arrêtez-vous un peu ! Franchement !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre . Je finirai ma réponse par écrit, monsieur Teissier : nous avons une relation de confiance, qui m'autorise à vous l'exprimer ainsi. Il faut lever les ambiguïtés, qui concernent à la fois les réfugiés, la délimitation du cessez-le-feu, la présence de la Turquie, le retour des combattants et le début de la négociation sur le statut du Haut-Karabakh.

M. le président. Merci, monsieur le ministre.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre. Je lis vos papiers sur le sujet : c'est aussi ce que vous pensez. C'est ce que nous allons essayer de faire. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.)

Données clés

Auteur : M. Guy Teissier

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 novembre 2020

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