Question au Gouvernement n° 3550 :
Évacuation de migrants Place de la République

15e Législature

Question de : M. Éric Coquerel
Seine-Saint-Denis (1re circonscription) - La France insoumise

Question posée en séance, et publiée le 25 novembre 2020


ÉVACUATION DE MIGRANTS PLACE DE LA RÉPUBLIQUE

M. le président. La parole est à M. Éric Coquerel.

M. Éric Coquerel. Ma question s'adresse à M. Darmanin. Hier soir, place de la République à Paris, une répression totalement disproportionnée s'est abattue sur des réfugiés et des bénévoles d'associations humanitaires. Ceux qui ont parfois tout perdu, ceux qui n'ont rien, pas même un toit, se sont abrités symboliquement sous la statue de la République pour exiger des droits fondamentaux. Ils étaient pacifiques. L'ordre a été donné de les évacuer, « quoi qu'il en coûte », alors qu'ils ne représentaient aucune menace. La police a molesté des élus, dont j'étais, dans le seul but de nous empêcher de protéger ces gens. (Exclamations sur divers bancs.) La police a frappé des journalistes dans le seul but de les empêcher de dire la vérité.

Cela fait deux ans que les mouvements sociaux sont confrontés à une doctrine qui ne vise plus à maintenir la paix, mais à maintenir l'ordre, votre ordre injuste. Mais ces huit derniers jours, un cap a été franchi. Mardi dernier déjà, la presse a été empêchée de couvrir la manifestation contre votre proposition de loi relative à la sécurité globale, au point que des journalistes se sont retrouvés en garde à vue pour avoir fait leur travail – ce que vous avez cru bon justifier en prétextant qu'ils ne s'étaient pas accrédités auprès de la préfecture. Tout cela n'a rien d'un procès d'intention : ce sont des faits. Cette fois, vous vous êtes ému des nouvelles images de violences policières survenues hier soir.

Vous confirmez donc que les images sont utiles, je le note (Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur quelques bancs du groupe GDR) mais je vous invite à en tirer des conclusions, car ces événements découlent directement de votre politique, dont la proposition de loi relative à la sécurité globale. En effet, les policiers se sentent maintenant légitimes à procéder à des interdictions de filmer. Vous devez arrêter l'escalade tout de suite, sinon cela va mal finir, monsieur le ministre.

Je vous demande donc trois choses. Premièrement, êtes-vous prêt à autoriser l'ouverture d'un espace pour ces réfugiés…

M. Sébastien Chenu. Ben voyons !

M. Éric Coquerel. …ce que dit souhaiter la Ville de Paris, qui s'en verrait empêchée par la préfecture ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur quelques bancs du groupe GDR.) Deuxièmement, qu'attendez-vous pour limoger le préfet Lallement, incarnation à Paris de cette répression illégitime ? (Mêmes mouvements.) Troisièmement, sur les libertés… (Mêmes mouvements.)

…un domaine où savoir reculer est parfois une force, je vous demande d'annoncer que le Gouvernement ne soutiendra pas en l'état la proposition de loi relative à la sécurité globale, une loi de surveillance généralisée, liberticide et autoritaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – Mme Elsa Faucillon applaudit aussi.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur. Que s'est-il passé hier ? Des centaines de personnes se sont installées avec des tentes place de la République. Cette manifestation était-elle autorisée, était-elle légale ?

M. Pierre Cordier. Non !

M. Gérald Darmanin, ministre . La réponse est non. Fallait-il laisser sur la place de la République des centaines de tentes, des centaines de personnes sans les évacuer ?

M. Pierre Cordier. Non !

M. Gérald Darmanin, ministre . La réponse est non. Est-ce que, comme vous ou d'autres personnes, j'ai pu être choqué de certaines images que nous avons tous pu voir sur les réseaux sociaux – ce qui montre bien, au passage, que l'information est libre dans notre pays ?

Plusieurs députés du groupe FI . Pour l'instant !

M. Gérald Darmanin, ministre . Oui, j'ai pu être choqué par ces images et, dès hier soir, j'ai contacté le préfet de police et je lui ai demandé de me rendre pour ce matin un rapport circonstancié - car, contrairement à vous, monsieur Coquerel, je ne souhaite pas juger selon la vox populi, mais sur des faits. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.)

Le préfet de police m'a rendu son rapport circonstancié, qui fait effectivement état de plusieurs comportements que vous et moi pouvons qualifier de graves. Sur sa proposition, j'ai immédiatement saisi l’inspection générale de la police nationale – IGPN –,…

M. Jean-Luc Mélenchon. L'IGPN !

M. Gérald Darmanin, ministre . …à qui j'ai demandé de me faire un rapport sous quarante-huit heures, que je rendrai public. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)

J'ai constaté, notamment parce que je suis intervenu publiquement, que M. le procureur de la République de Paris a ouvert une enquête sur l'un des faits évoqués, et je me réjouis personnellement que la justice fasse son travail. Cependant, si je suis là pour condamner fermement tous les policiers qui ne respectent pas la déontologie, je voudrais également dire mon profond soutien à l'immense majorité des forces de l'ordre qui risquent leur vie pour nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.)

Données clés

Auteur : M. Éric Coquerel

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Ordre public

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 novembre 2020

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