Pauvreté
Question de :
M. Jean-Hugues Ratenon
Réunion (5e circonscription) - La France insoumise
Question posée en séance, et publiée le 2 décembre 2020
PAUVRETÉ
M. le président. La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon.
M. Jean-Hugues Ratenon. Monsieur le Premier ministre, non, le Gouvernement n'est pas mobilisé ! Je veux lancer un cri d'alarme et de colère : l'Observatoire des inégalités vient de constater que 5,3 millions de personnes vivent dans la pauvreté ; 22 % des jeunes de 18 à 29 ans sont pauvres. À la fin de l'année 2020, 500 000 personnes supplémentaires vivront du RSA – revenu de solidarité active –, soit une augmentation de 10 % ; c'est un record. Premier ministre en 2002, Jean-Pierre Raffarin parlait d'une « France d'en haut » et d'une « France d'en bas » ; aujourd'hui, c'est la France du sous-sol qui explose au grand jour.
Vos lois de finances ne remédieront pas à cette situation : vos aides ponctuelles, qu'il s'agisse de l'allocation de rentrée scolaire ou du RSA, sont des gouttelettes dans un océan de misère et de souffrance. En outre-mer, on compte 45 % de pauvres, quasiment une personne sur deux. Sur les vingt communes de 20 000 habitants qui enregistrent le taux de pauvreté le plus élevé, neuf se trouvent à La Réunion, dont cinq en tête de ce triste palmarès : Le Port, Saint-Benoît, Saint-Louis, Saint-André et Saint-Joseph. Le taux de pauvreté y avoisine les 50 %.
Chaque année qui passe, les pauvres sont toujours plus pauvres. Votre plan de lutte contre la pauvreté ne produit pas ses effets. Le dire m'a valu des insultes de la part de Mme Agnès Buzyn, lorsqu'elle était ministre : m'insulterez-vous de nouveau aujourd'hui ? Lors de l'examen de la proposition de loi relative à l'expérimentation « territoires zéro chômeur de longue durée », je vous avais demandé de prendre des mesures spécifiques pour les outre-mer ; malheureusement, vous n'en avez rien fait. Pourquoi ? Vos beaux discours, votre démagogie, vos larmes de crocodile n'y changeront rien : l'outre-mer est bien abandonnée. À quand un plan d'éradication de la pauvreté ? Pourquoi refusez-vous une loi de programmation spécifique pour les outre-mer ? (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) Je vous le demande : ne soyez plus les ennemis des pauvres ! (Mêmes mouvements.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.
M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. La démagogie consisterait à considérer que la pauvreté est l'affaire d'un gouvernement ou d'une politique. La pauvreté est l'affaire de tous. Je peux vous rejoindre sur votre constat, car il est factuel : depuis le confinement, il y a dans tout le pays une augmentation du nombre des demandeurs du RSA. C'est d'autant plus regrettable que ce nombre était en baisse depuis février 2019, ce qui correspond à la mise en place de la stratégie de lutte contre la pauvreté.
Vous avez également souligné les besoins accrus en matière d'aide alimentaire. C'est vrai. Ils ont augmenté de plus de 20 % à cause du confinement ; nous en connaissons les raisons. Nous avons rehaussé de plus de 48 % les crédits du budget européen destinés aux associations et élaboré un plan de soutien sans précédent, constitué de 100 millions d'euros. En effet, nous faisons le même constat que vous : il y a un vrai problème de pauvreté dans notre pays. Cependant, ce problème ne date pas d'hier, et n'est pas le fait du Gouvernement actuel, ni du précédent, ni de celui d'avant.
M. Jean-Paul Dufrègne. C'est le fait de la politique libérale !
M. Olivier Véran, ministre . Quand plusieurs millions de personnes dépendent de l'aide alimentaire, il faut regarder au-delà de la question politique et se demander comment poser les jalons d'une lutte structurelle contre la pauvreté.
Un député du groupe LaREM . Absolument !
M. Olivier Véran, ministre . Regardez ce qui a été accompli. Cela nous paraît très loin désormais, après le confinement, mais le rapport de l'Institut national de la statistique et des études économiques – INSEE – pour 2019 constatait, pour la première fois, une régression des indicateurs de la pauvreté. (Protestations sur les bancs des groupes FI et GDR.) Cela ne signifie pas que la situation était belle et qu'il n'y avait pas de pauvres, mais que la stratégie du Gouvernement commençait à porter ses fruits.
M. André Chassaigne. C'est faux ! Ce n'est pas ce que disent le Secours populaire et le Secours catholique !
M. Olivier Véran, ministre . Elle consistait à réduire les inégalités sociales dès l'enfance. (M. Michel Lauzzana applaudit.)
M. Jean-Paul Dufrègne. Et la répartition des richesses ?
M. Olivier Véran, ministre . Le dédoublement des classes mené par Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, participe à lutter contre le déterminisme de la pauvreté chez les enfants.
L'accès à la santé pour tous contribue également à lutter contre la pauvreté. Le 1er janvier, la réforme 100 % santé entrera en vigueur pour tous les soins optiques, dentaires et auditifs, alors que personne ne pouvait y songer il y a quelques années encore. C'est une mesure importante.
La lutte contre la pauvreté passe par la protection des plus fragiles, avec 3,5 milliards d'euros de prestations monétaires versées à plusieurs millions de familles. Le Premier ministre et moi nous sommes rendus dans une caisse d'allocations familiales – CAF – il y a trois jours : 4,7 millions de Français ont reçu une aide de plus de 150 euros par personne.
M. le président. Merci, monsieur le ministre.
M. Olivier Véran, ministre . Enfin, lutter contre la pauvreté, c'est permettre à chacun d'accéder à l'emploi. Telle est la première des solidarités. Le plan… (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
Auteur : M. Jean-Hugues Ratenon
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Pauvreté
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 2 décembre 2020