Question au Gouvernement n° 3810 :
Délinquance des mineurs

15e Législature

Question de : M. Robin Reda
Essonne (7e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 3 mars 2021


DÉLINQUANCE DES MINEURS

M. le président. La parole est à M. Robin Reda.

M. Robin Reda. Monsieur le Premier ministre, je souhaite à mon tour revenir sur les événements de la semaine dernière, à Saint-Chéron et à Boussy-Saint-Antoine, en Essonne, où deux adolescents ont été tués dans d'atroces affrontements de bandes. En pensant aux victimes et à leurs familles, je veux d'abord saluer les réactions instantanées et collectives des élus locaux et de l'État, qui, en responsabilité, ont fait face à l'émotion et à l'urgence, en prévenant toute réplique vengeresse.

Au moins soixante-dix bandes sont recensées en Île-de-France – c'est malheureusement une évaluation minimale. Avec la force des réseaux sociaux, la fureur narcissique de la bande est accessible à tous. Chacun peut facilement fédérer, revendiquer, regrouper, intimider et se laisser entraîner par la démesure, jusqu'à commettre l'irréparable. L'Essonne est l'un des départements les plus touchés par ce phénomène, en raison de la jeunesse de ses habitants, mais aussi de la sédimentation de rivalités idiotes entre quartiers. C'est là aussi qu'il y a cinq ans, des policiers étaient violemment pris pour cible, notamment par des mineurs, à Viry-Chatillon. Comme d'autres territoires, ce département connaît un réel décrochage régalien. Malgré les efforts de nombreux maires pour déployer police municipale et vidéoprotection, les moyens de l'État restent insuffisants pour combattre la violence débridée et l'escalade de l'impunité.

Mais ne soyons pas dupes, avec ces affrontements de bande d'enfants, la société paye ses lâchetés. Nous avons trop longtemps laissé prospérer l'idée que toute affirmation de l'autorité était une brutalité, surtout quand elle s'exerce sur des enfants qui cumulent difficultés sociales, familiales et scolaires. C'est pourtant précisément quand l'environnement familial est défaillant, que la République doit être forte, exigeante et poser un cadre à respecter.

Le plan de lutte contre les bandes, ou plan rixe, que le Gouvernement a réactivé hier, a été lancé il y a dix ans. Pourtant, la situation ne cesse de s'aggraver. Monsieur le Premier ministre, depuis des mois, les actes de violence résonnent partout dans notre pays. Cette violence se banalise, se rajeunit et les Français finissent par l'intégrer à leur quotidien ; ils attendent de vous des réponses fortes sur les plans éducatif, sécuritaire et judiciaire. En aurez-vous seulement l'envie ? En aurez-vous seulement le temps ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. Pierre Cordier. Ça, c'est envoyé !

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Pierre Cordier. Il n'aura pas le temps !

M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur. Monsieur Reda, après vous et Mme Guévenoux, je veux redire l'émotion que le Gouvernement partage avec les élus locaux, comme vous le savez, je me suis rendu en Essonne, avec Mme de Montchalin.

Comme vous, je considère que ces drames appellent une réponse de l'État, que vous n'attendez pas en vain. Si le renforcement des effectifs de police que vous avez bien voulu souligner ne réglera pas tout, il est important ; je constate d'ailleurs qu'il concerne tant les zones gendarmerie que les zones police, tant le milieu rural que le milieu urbain.

Comme vous, je veux aussi noter la grande différence entre la situation actuelle et celle qui prévalait en 2010, voire au début de ce quinquennat. Les soixante-dix bandes d'Île-de-France que vous évoquez représentent 95 % de celles présentes sur le territoire national ; c'est donc un phénomène très francilien. En outre, ces bandes n'ont rien à voir avec celles d'il y a trois, cinq ou dix ans : elles regroupent désormais de jeunes enfants, de 10, 11, 12, 13 ou 14 ans, comme vous l'avez dit, et elles ne s'inscrivent pas dans les guerres de territoires pour la drogue ou les armes d'il y a quelques années. Tard le soir, pour des raisons parfois très futiles, comme de mauvais comportements dans les transports en commun, ou un regard trop appuyé, ces jeunes sortent un couteau, un opinel, et assassinent une personne de leur âge.

Comme vous l'avez dit, la réponse ne concerne donc pas seulement la police ou la justice, mais aussi l'autorité parentale, et la façon dont la société prend des dispositions pour rappeler celle-ci.

M. Éric Ciotti. Et les allocations ?

M. Gérald Darmanin, ministre . Il y a par ailleurs, comme nous l'avons vu avec le ministre de l'éducation nationale et celui de la justice, certains petits trous dans la raquette, notamment concernant la continuité de la réponse pénale. D'un côté, comme vous le savez, la garde à vue de quarante-huit heures est interdite – et c'est heureux – pour les mineurs de moins de 16 ans ; de l'autre, il faut du temps pour les soumettre à une interdiction de paraître. Le garde des sceaux et moi-même proposerons donc au Premier ministre des solutions dans les prochains jours. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)

Données clés

Auteur : M. Robin Reda

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Sécurité des biens et des personnes

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 mars 2021

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