Réforme de la politique agricole commune
Question de :
M. Nicolas Forissier
Indre (2e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 7 avril 2021
RÉFORME DE LA POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE
M. le président. La parole est à M. Nicolas Forissier.
M. Nicolas Forissier. Monsieur le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, je souhaite vous interroger encore une fois sur la réforme de la politique agricole commune (PAC), qui est en cours de discussion. Vous allez présenter en juin 2021 le plan stratégique national devant la Commission européenne. Or, vous le savez, son élaboration inquiète profondément le monde agricole.
Si j'ai bien conscience qu'à ce jour, les arbitrages ne sont pas définitifs, comment ne pas être inquiet lorsqu'on entend dire que la France pourrait consacrer 20 % de ses paiements directs à des écorégimes, alors même que 70 % des agriculteurs n'auraient pas la possibilité d'en bénéficier ? Comment ne pas être inquiet lorsqu'est évoquée une baisse des aides couplées animales, qui pourrait être de l'ordre de 16 %,…
M. Fabrice Brun. Catastrophe !
M. Nicolas Forissier. …alors même que la survie de nos éleveurs, qui vivent pour beaucoup avec moins de 700 euros par mois, en dépend entièrement ? (M. Jean-Paul Dufrègne applaudit.)
Le ministère envisagerait aussi de fusionner les enveloppes destinées aux vaches laitières et aux vaches allaitantes, ce qui aurait des conséquences encore plus graves pour l'élevage bovin allaitant, pourtant très vertueux mais déjà très fragilisé. Au total, les aides spécifiques à l'élevage bovin allaitant pourraient passer de 610 millions à 360 millions d'euros, c'est-à-dire une baisse de 250 millions. Monsieur le ministre, vous n'avez pas contesté ce chiffre, qui a été avancé par la Fédération nationale bovine. Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas reçu de réponse claire à ce sujet.
S'y ajoute une autre interrogation – je sais que vous en êtes conscient – qui concerne la juste répartition des aides de la PAC sur l'ensemble de notre territoire national, et en particulier sur les zones intermédiaires qui en couvrent une large partie, notamment en région Centre-Val de Loire – je peux en témoigner. Ce sont des zones déjà très désavantagées structurellement par la qualité de leur sol, des rendements plus faibles et des systèmes d'exploitation plus diversifiés. Qu'allez-vous faire ? Allez-vous simplement entendre ou allez-vous agir pour les aider ?
M. Fabrice Brun. Il faut agir, monsieur le ministre !
M. Nicolas Forissier. C'est un sujet vieux de trente ans et qui n'a toujours pas été résolu ; je pense que c'est le moment de le faire.
Quelles réponses concrètes et déterminées allez-vous apporter au monde agricole et plus généralement à la communauté nationale sur ces questions majeures ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, UDI-I et LT.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Vous l'avez dit, la politique agricole commune est en cours de discussion avec la profession agricole. Comme vous, j'entends ici ou là des chiffres. Mais, vous le savez, j'ai fait le choix de travailler à livre ouvert, c'est-à-dire de donner accès à tous les scénarios et à toutes les options envisagés. Il est ensuite assez facile de reprendre telle ou telle ligne et de faire en sorte que tel montant soit divulgué un peu partout.
Je prends ce risque parce que je considère que si l'on veut travailler en confiance et de concert, il faut le faire à livre ouvert. En revanche, quand certains sélectionnent les mauvaises lignes et les additionnent toutes sans que cela corresponde à un seul des scénarios réellement envisagés, cela crée une tension – je le constate ; cette tension repose sur de fausses informations.
Je prends un exemple dont vous avez parlé, celui de l'écorégime, qui est très important et constitue une victoire française. Nous avons obtenu que ce nouveau mécanisme d'agroécologie soit obligatoire pour tous les États membres et pas seulement pour la France, afin d'enfin lutter contre cette compétition déloyale qui faisait que les principales pratiques vertueuses étaient respectées dans notre pays sans l'être dans d'autres.
Vous avez dit que 70 % des agriculteurs n'auraient pas accès à l'écorégime. Or, alors que les discussions sont toujours en cours – la prochaine réunion se tient demain à mon ministère –, la première évaluation dit strictement l'inverse.
M. Fabrice Brun. Ce sont vos chiffres, pas les nôtres !
M. Julien Denormandie, ministre . Au niveau national, 70 % des agriculteurs sont éligibles à ce dispositif. C'est très concret. Vous le voyez, si certains chiffres peuvent être diffusés, voici la réalité, et nous continuons à adopter une démarche de consultation et de concertation.
S'agissant des zones intermédiaires, il y a un deuxième élément à mettre en avant. Je l'ai dit, un débat est ouvert concernant le transfert entre les territoires. Je veux préserver les zones intermédiaires, donc ne pas réitérer les transferts qui ont eu lieu lors des deux précédentes réformes de la politique agricole commune. Je m'y engage. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe Dem.)
Auteur : M. Nicolas Forissier
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Agriculture
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 avril 2021