Relations franco-algériennes
Question de :
Mme Nathalie Serre
Rhône (8e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 14 avril 2021
RELATIONS FRANCO-ALGÉRIENNES
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Serre.
Mme Nathalie Serre. En 2017, le Président de la République a beaucoup choqué en qualifiant la colonisation de « crime contre l'humanité ». Par ailleurs, le contenu très contestable du rapport Stora sur la colonisation et la guerre d'Algérie a profondément blessé les familles de harkis dont la mémoire a été injustement oubliée. En multipliant ce qu'il considérait comme des gestes d'apaisement vis-à-vis de l'Algérie, le Président de la République a souvent heurté voire ravivé de profonds traumatismes mémoriels.
M. Marc Le Fur. Très bien !
Mme Nathalie Serre. En dépit de ces gestes, les relations franco-algériennes ne se sont absolument pas améliorées, pire, notre pays a été violemment mis en cause par El Hachemi Djaâboub, ministre du travail, de l'emploi et de la sécurité sociale, qui, le 8 avril, a qualifié la France d'« ennemi traditionnel et éternel ».
M. Michel Herbillon. Déclaration inacceptable !
Mme Nathalie Serre. Ces propos, lâchés de façon tout à fait inattendue, sont inacceptables. La France ne peut pas rester sans répondre quand elle subit un tel affront diplomatique.
Qualifier la France d'ennemi est lourd de conséquences. Ces propos sont intervenus au moment même où le chef d'état-major des armées françaises, le général Lecointre, était reçu à Alger par le chef d'état-major de l'armée nationale populaire. Sa visite était un préambule à celle du Premier ministre, laquelle aurait été reportée pour des raisons sanitaires, motif qui semble plutôt diplomatique.
Si l'Algérie considère la France comme un ennemi, quel est l'avenir de notre relation diplomatique avec ce pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des affaires européennes.
M. Clément Beaune, secrétaire d'État chargé des affaires européennes. Un rendez-vous bilatéral extrêmement important était effectivement prévu dimanche dernier à Alger. Le Premier ministre devait y mener une importante délégation ministérielle française pour échanger avec le gouvernement algérien, dans le cadre d'un format très rare, puisqu'il s'agissait de la cinquième édition du comité intergouvernemental de haut niveau. La rencontre a dû être décalée pour des raisons sanitaires.
Un député du groupe LR . Il se porte bien, le ministre !
M. Clément Beaune, secrétaire d'État . Dans les conditions actuelles, la rencontre ne pouvait pas avoir lieu avec le format de délégation souhaité. Le ministre Jean-Yves Le Drian a échangé à plusieurs reprises avec les autorités algériennes, de manière à organiser cette rencontre prochainement, dans des conditions sanitaires et politiques satisfaisantes, compatibles avec le format voulu.
Sur le fond, notre volonté de renforcer la relation bilatérale avec l'Algérie demeure intacte. Nous déplorons les propos que vous avez rapportés et que j'ai condamnés dès dimanche. Ils ne reflètent absolument pas la qualité de nos relations bilatérales actuelles, ni la dynamique que nous essayons patiemment de leur donner, soutenus au plus haut niveau par les autorités de nos deux pays. La France, vous le savez, est attachée à sa relation ancienne avec l'Algérie. Avec toutes les difficultés que vous avez rappelées, cette relation est enracinée dans notre histoire partagée, dans les échanges humains, dans les relations économiques et, aujourd'hui, dans un engagement commun en faveur de la stabilité et de la paix. Ce dernier dépasse d'ailleurs le cadre bilatéral et concerne toute la région ; nous en avons besoin au Sahel et en Libye. Vous l'avez également évoqué, nous menons, de manière assumée, un travail mémoriel qui n'avait pas été accompli. Il ne participe ni de la repentance ni du déni, et il est essentiel pour la jeunesse de nos deux pays.
Nous nous inscrivons dans la ligne que le Président de la République a tracée, notamment avec le rapport Stora : ni repentance ni déni. Le Président de la République et le président Tebboune échangent très régulièrement dans ce cadre et sont bien déterminés à faire évoluer dans le bon sens la relation franco-algérienne, si essentielle ; le ministre, Jean-Yves Le Drian, et moi-même œuvrons également dans cette perspective. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Serre.
Mme Nathalie Serre. Vos propos sont vraiment très diplomatiques,…
Mme Jacqueline Gourault, ministre. C'est son métier !
Mme Nathalie Serre. …mais, comme vous le savez, la diplomatie n'empêche pas, bien au contraire, la fermeté.
Auteur : Mme Nathalie Serre
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : Affaires européennes
Ministère répondant : Affaires européennes
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 avril 2021