Question au Gouvernement n° 4363 :
pénurie de praticiens dans les hôpitaux

15e Législature

Question de : Mme Josiane Corneloup
Saône-et-Loire (2e circonscription) - Les Républicains

Question posée en séance, et publiée le 6 octobre 2021


PÉNURIE DE PRATICIENS DANS LES HÔPITAUX

M. le président. La parole est à Mme Josiane Corneloup.

Mme Josiane Corneloup. Ma question s'adresse à M. le Ministre des solidarités et de la santé. La situation de notre système hospitalier est grave et elle inquiète l'élue d'un territoire rural que je suis.

Dans ma circonscription, et plus largement en Saône-et-Loire, je suis alertée par des élus, des médecins, des personnels soignants et des directions d'hôpitaux qui s'alarment d'un manque de praticiens. Celui-ci est tel que c'est l'activité même de certains services qui risque d'être supprimée à court terme. À Chalon-sur-Saône ou à Mâcon, c'est la carence en anesthésistes-réanimateurs qui oblige à déprogrammer nombre d'interventions chirurgicales, à l'instar de ce que nous avons connu au cœur de la crise sanitaire. À Bourbon-Lancy, le centre hospitalier ne fonctionne plus qu'avec un seul médecin, alors qu'il en faudrait quatre pour répondre aux besoins des malades et garantir la continuité des soins.

Hier, le maire de Paray-le-Monial et député honoraire Jean-Marc Nesme entamait une grève de la faim pour dénoncer l'entrée en vigueur d'une directive visant à plafonner la rémunération des médecins intérimaires de façon uniforme, sans tenir compte de la situation réelle des hôpitaux. Le fait de tarir délibérément des ressources médicales par un blocage de l'intérim médical est constitutif d'une non-assistance à la personne en danger qu'est le patient potentiel.

Il en résulte, pour le centre hospitalier de Paray-le-Monial, une grande difficulté à recruter des praticiens pour des missions d'intérim, qui compromet la prise en charge des patients se présentant aux urgences et risque, à terme, de remettre en cause le statut d'établissement MCO – médecine, chirurgie, obstétrique – de l'hôpital. Nous ne pouvons l'accepter.

Monsieur le ministre, il faut rapidement venir en aide aux hôpitaux intermédiaires ou de proximité qui sont au bord de l'implosion, en mettant fin au plafonnement national de la rémunération des médecins intérimaires, qui devrait être modulé en fonction des besoins médicaux de chaque établissement. Votre ministère prévoit l'instauration d'une prime de solidarité territoriale. Quelles seront les conditions et les modalités de sa mise en œuvre ? Par ailleurs, quelles mesures structurelles proposerez-vous pour lutter contre la fracture médicale territoriale qui ne cesse de s'aggraver au fil des années et interdit aux Français et Françaises d'être égaux devant l'offre et la qualité des soins ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Véran, ministre des solidarités et de la santé. Je suis plutôt d'accord avec le constat que vous faites. D'ailleurs, comment pourrions-nous ne pas être d'accord ? De nombreux hôpitaux manquent d'anesthésistes et d'urgentistes. Non pas qu'il y ait une carence – même si on peut considérer que si le numerus clausus supprimé par cette majorité l'avait été dix ans plus tôt, vous ne seriez pas en train de me poser cette question aujourd'hui ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem. – Vives exclamations sur les bancs du groupe LR.) Mais peu importe, l'objet n'est pas de polémiquer, même si nous avons perdu quelques années précieuses.

Madame la députée, aujourd'hui il y a des hôpitaux…

M. Pierre Cordier. Marisol Touraine aurait pu le faire !

M. Olivier Véran, ministre. Pardon, monsieur le député ? Je vous ai entendu dire « Véran », en hurlant ! Expliquez-moi mais remettez votre masque avant de hurler s'il vous plaît, pour vos collègues. (Vives exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. le président. Un peu de silence s'il vous plaît, chers collègues.

M. Olivier Véran, ministre . Ma réponse n'a rien de polémique ; je sens que vous êtes un peu nerveux. La majorité parlementaire a eu la possibilité de voter, dans le cadre de la proposition de loi déposée par la députée Stéphanie Rist, une mesure plafonnant le recours à l'intérim médical en termes de pratiques tarifaires. Je fais d'ailleurs erreur en parlant de la majorité : vous avez voté cette proposition de loi, madame la députée, et aujourd'hui vous me demandez de ne pas appliquer la loi que vous avez votée. Je vous répondrai de façon très pragmatique : je vais organiser une consultation de l'ensemble des fédérations afin de déterminer les conditions dans lesquelles on peut, ou pas, appliquer le décret dans les délais impartis, compte tenu de l'obligation vaccinale et de la pression sanitaire.

Sur le fond, il convient tout de même de souligner que certains médecins demandent à un hôpital public 3 000 euros nets pour vingt-quatre heures de travail, en menaçant de ne pas venir travailler s'ils ne les obtiennent pas !

Un député du groupe LaREM . C'est scandaleux !

M. Jean-Paul Lecoq. C'est votre système qui permet ça !

M. Olivier Véran, ministre . Voilà ce dont nous sommes en train de parler ! Quant au plafonnement que vous évoquez, en fonction des réalités territoriales, je rappelle qu'il est prévu à hauteur d'un SMIC par jour – excusez du peu ! Voilà la dérive dont souffrent nos hôpitaux : certains médecins n'exercent plus que de façon intérimaire et parviennent ainsi, en trois jours et trois nuits, à gagner l'équivalent d'un mois de salaire de leurs collègues praticiens hospitaliers…

M. Jean-Paul Lecoq. Qui gouverne dans ce pays ?

M. Olivier Véran, ministre . …qui sont à leur tour tentés par ce mode d'exercice nomade ! Tout cela nuit aux hôpitaux ! Certains hôpitaux de Bretagne - vous me pardonnerez de dépasser le temps imparti pour les évoquer, monsieur le président… - enregistrent une dette équivalente au surcoût du seul intérim médical. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)

Données clés

Auteur : Mme Josiane Corneloup

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Professions de santé

Ministère interrogé : Solidarités et santé

Ministère répondant : Solidarités et santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 octobre 2021

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