Crise de l'eau à Mayotte
Question de :
M. Mansour Kamardine
Mayotte (2e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 24 novembre 2021
CRISE DE L'EAU À MAYOTTE
M. le président. La parole est à M. Mansour Kamardine.
M. Mansour Kamardine. Monsieur le ministre des outre-mer, les Mahorais sont confrontés à une crise de l'eau. Depuis cinq ans, l'accès continu à l'eau courante n'est plus assuré. En ce moment même, les habitants de Mayotte n'ont de l'eau courante que cinq jours par semaine, et n'ont accès à l'eau potable que trois jours par semaine. Pire, l'eau courante n'est plus potable pour les enfants de moins de quatre ans dans plusieurs parties du territoire.
Pourtant, un plan d'urgence eau fut élaboré en 2017. Il prévoyait la construction en urgence, à Petite-Terre, d'une usine de dessalement produisant 6 000 mètres cubes d'eau par jour et d'une retenue collinaire. Cinq ans après, malgré mes multiples alertes, notamment dans cet hémicycle,…
M. Jean-Luc Mélenchon. C'est vrai !
M. Mansour Kamardine. …l'usine de dessalement n'est toujours pas fonctionnelle et l'État n'a toujours pas lancé la déclaration d'utilité publique (DUP) réclamée depuis trois ans pour la retenue collinaire.
Monsieur le ministre, le Gouvernement porte la responsabilité de la crise de l'eau à Mayotte (Applaudissements sur les bancs du groupe FI), car c'est l'État qui a tordu le bras du syndicat mixte d'eau et d'assainissement de Mayotte (SMEAM), pour confier 9 millions d'euros de fonds européens à un opérateur privé du CAC40 incapable de respecter ses engagements concernant l'usine de dessalement. (Mêmes mouvements.)
L'État est responsable car rien ne justifie les trois ans de retard pris pour lancer la DUP. La précipitation du Gouvernement à accabler les responsables locaux dans le secteur de l'eau n'a d'égal que sa lenteur à respecter ses engagements.
M. Maxime Minot. Il a raison !
M. Mansour Kamardine. Quand l'usine de dessalement produira-t-elle les 6 000 mètres cubes d'eau promis depuis 2018 ? Quand la DUP pour la troisième retenue collinaire sera-t-elle lancée ? Voilà les questions majeures qui se posent. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et FI.)
M. Jean-Luc Mélenchon. Bravo, Mansour !
M. le président. La parole est à M. le ministre des outre-mer.
M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer. Je ne vous rejoins pas sur un certain nombre d'éléments de forme, mais je vous rejoins bien volontiers sur l'urgence et sur le fond. L'évolution démographique de Mayotte crée un besoin : il s'agit d'augmenter la production d'eau de pratiquement 5 % chaque année ; l'enjeu est donc de taille. À la différence de la Guadeloupe – où, pour le dire vite, il y a un problème de tuyauterie –, à Mayotte, nous sommes bel et bien confrontés à un problème de production.
Je vous trouve dur concernant le rôle de l'État dans cette affaire. Vous êtes vous-même élu local et vous savez que c'est une compétence décentralisée depuis toujours. Nous sommes attachés aux prérogatives du bloc communal et aux compétences du SMEAM. Il est donc logique d'accompagner le SMEAM sans se substituer à lui – nous pourrons en reparler. Quoi qu'il en soit, l'État met de l'argent : 67 millions d'euros dans le plan d'urgence et 13 millions pour les années 2021 et 2022 au titre du plan de relance que vous allez adopter.
Monsieur le député, pour aller dans votre sens, il y a deux dossiers sur lesquels je vous propose d'avancer plus vite. Le premier, c'est cette fameuse usine de dessalement de Petite-Terre. Je le dis comme je le pense : le compte n'y est pas de la part du délégataire Vinci. Les représentants de l'entreprise ont été reçus récemment à deux reprises par mon cabinet. Malheureusement, le dossier n'avance pas assez vite. Je les ai donc enjoints par écrit de nous fournir un calendrier précis. Ils semblent nous indiquer une date fixée à la fin de 2022, ce qui me paraît trop éloigné. Je vous rendrai compte rapidement des avancées des discussions sur ce dossier.
Second sujet sur lequel je souhaite que nous avancions : la troisième retenue collinaire. Voilà un dossier ancien que vous connaissez bien. L'État a proposé plusieurs fois aux élus du territoire de se substituer à eux afin d'assurer la maîtrise d'ouvrage ; nous n'avons toujours pas de réponse. Là aussi, je prends l'engagement devant vous de continuer à avancer. Si les autorités locales souhaitent assurer la maîtrise d'ouvrage, l'État répondra présent pour financer non seulement les études mais également les travaux. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.)
M. le président. La parole est à M. Mansour Kamardine.
M. Mansour Kamardine. Je note que nous avançons ; je m'en réjouis et je vous en remercie. La difficulté qui s'est posée tient au fait qu'à côté de la décentralisation, il existe en sommeil une forme de recentralisation. Libérez les énergies des élus de Mayotte pour construire cet ouvrage et cela se fera ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.) Vous l'avez dit : vous voulez décentraliser et, en même temps, contrôler la construction !
Auteur : M. Mansour Kamardine
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Outre-mer
Ministère répondant : Outre-mer
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 novembre 2021