Gestion des flux migratoire à Calais
Question de :
M. Pierre-Henri Dumont
Pas-de-Calais (7e circonscription) - Les Républicains
Question posée en séance, et publiée le 1er décembre 2021
GESTION DES FLUX MIGRATOIRES À CALAIS
M. le président. La parole est à M. Pierre-Henri Dumont.
M. Pierre-Henri Dumont. Mercredi dernier, vingt-sept personnes ont perdu la vie dans la Manche. Le Calaisis, la France et l'Europe sont endeuillés. Le drame que nous, élus locaux et citoyens de ma circonscription, redoutions s'est produit, malgré les efforts surhumains des forces de l'ordre, des sauveteurs en mer, des pompiers, qui, chaque jour, repoussaient l'échéance fatidique. Nous avons tous une pensée pour les disparus et leurs proches.
Il y a trois semaines, ici même, je lançais pourtant un cri d'alerte. Votre ministre déléguée, Marlène Schiappa, préférait alors nier la réalité, me répliquant que « non, l'État ne perd pas le contrôle de la situation à Calais, bien au contraire ». (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
À l'image de cette phrase, la réponse de votre Gouvernement à la détresse des migrants et des habitants de Calais est médiocre : une opération de communication sous couvert d'un sommet européen qui n'aboutit qu'au déploiement d'un avion de Frontex – comme je le réclamais depuis trois ans –, un courrier envoyé à votre homologue britannique, quelques moyens humains supplémentaires, et c'est tout.
Cette nuit encore, des trafiquants de mort ont organisé des traversées, et demain, nous pleurerons de nouveaux noyés. Votre absence de courage politique fait du Calaisis un terrain de jeu pour extrêmes et de la Manche un cimetière marin.
La réalité est simple : une fois à Calais, c'est trop tard ! Après avoir parcouru 5 000 kilomètres, ni les murs, ni les barbelés, ni les patrouilles n'empêcheront les migrants de rejoindre le Royaume-Uni et les passeurs continueront leur macabre business. Dès lors, pour éviter de nouveaux drames humains, vous devez faire du littoral de la Manche, du Calaisis en particulier, un territoire « zéro migrant ».
Cela doit se faire en transférant, si besoin par la contrainte (Protestations sur les bancs du groupe GDR), les étrangers en situation irrégulière dans les centres d'accueil et d'examen des situations, où des centaines de places sont disponibles, afin qu'ils puissent y trouver du repos et réfléchir à leur avenir.
Et cela doit se faire en entamant un bras de fer avec Boris Johnson, afin d'ouvrir une voie de passage sécurisée pour les migrants au Royaume-Uni. Avec le Brexit, les Britanniques ont voulu reprendre le contrôle : qu'ils reprennent donc leurs frontières ! Ce n'est pas à la France et aux Calaisiens de subir les conséquences d'une économie britannique basée sur le travail illégal dans un pays communautarisé.
Combien de drames dans la Manche vous faudra-t-il encore pour agir concrètement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur. Je ne sais pas exactement à quelle prise de parole des élus du Calaisis vous faites allusion, parce que Mme la maire de Calais s'est publiquement déclarée très satisfaite de la réunion de dimanche et chacun sait qu'elle combat ce Gouvernement. Il me semble qu'elle a pris des positions courageuses, elle qui gère tous les jours, depuis bien longtemps, la situation à Calais.
Elle a d'ailleurs pu s'exprimer pour la première fois lors d'un sommet international consacré à ce sujet, en l'occurrence devant l'ensemble des ministres européens de l'intérieur concernés et la Commission européenne. Elle a reçu des mots de soutien de sa population, fait part de propositions et salué le travail accompli par le Gouvernement pour essayer de résoudre ce problème vieux de plus de vingt ans.
En revanche, je n'ai pas tellement entendu vos propositions à vous, monsieur le député. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Ce que vous proposez, c'est la criminalisation des migrants. J'ai entendu qu'ils devaient être placés dans des centres d'accueil pour réfléchir sur leur avenir : depuis le 1er janvier, ce sont 14 400 personnes qui ont été ainsi relogées. Or, vous le savez mieux que personne, ces personnes ne veulent pas rester en France ni réfléchir à leur avenir dans notre pays : elles veulent aller au Royaume-Uni ! Pourquoi ? Parce qu'elles sont 60 % à être éligibles à l'asile dans ce pays, alors qu'elles ne sont que 3 % à déposer une demande sur notre territoire.
Vous pouvez les éloigner à Lons-le-Saunier ou encore à Tourcoing, où quatre-vingt-douze migrants ont encore été reçus de Calais la semaine dernière, ils voudront toujours aller au Royaume-Uni et, pour cela, retourner en Calaisis. En effet, la géographie fait que, au moins depuis Jules César, Boulogne-sur-Mer et Calais sont les meilleurs endroits pour le faire.
Soyons solidaires, monsieur le député, soyons Français ensemble face au Royaume-Uni ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.) Ne leur offrons pas de bisbilles. Évitons de formuler des propositions plus loufoques les unes que les autres. Cela fait vingt ans que tous les gouvernements gèrent cette difficulté – vingt ans ! Il y a eu des gens courageux : Nicolas Sarkozy à Sangatte, Bernard Cazeneuve dans la jungle de Calais et, je le crois, le Président de la République aujourd'hui. (Mêmes mouvements.) Montrez-vous digne de la responsabilité qui incombe à un parti de gouvernement et ne disons pas n'importe quoi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
M. Jean-Marie Sermier. Il faut écouter Xavier Bertrand !
Auteur : M. Pierre-Henri Dumont
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : Intérieur
Ministère répondant : Intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er décembre 2021