Question au Gouvernement n° 4615 :
Moyens pour la justice

15e Législature

Question de : M. Ugo Bernalicis
Nord (2e circonscription) - La France insoumise

Question posée en séance, et publiée le 15 décembre 2021


MOYENS POUR LA JUSTICE

M. le président. La parole est à M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Trois mille : c'est le nombre de magistrats qui ont signé une tribune le mois dernier à la suite du suicide d'une de leurs collègues, pour alerter sur le manque de moyens dans l'institution judiciaire. Aujourd'hui, ils sont plus de 7 000 à avoir signé cette même tribune, sur les 9 000 magistrats que compte le pays. C'est « historique » et je m'énerve par avance de la réponse que va nous donner le garde des sceaux, qui nous parlera, dans ses éléments de langage, des 8 % d'augmentation de son budget en 2022, etc.

Je m'interroge. Vous, monsieur le garde des sceaux, qui avez rencontré les magistrats qui ont les mains dans le cambouis, vous qui connaissez la justice charnellement, intimement, vous semblez découvrir les audiences de nuit, la justice d'abattage des comparutions immédiates. Or vous ne pouvez pas dire que vous êtes étonné par la situation, vous, le grand avocat.

M. le président. Vous avez terminé ?

M. Erwan Balanant. Il n'y a pas de question !

Plusieurs députés des groupes LaREM et Dem . Quelle est la question ?

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Je répondrai donc à cette brève question. Tout d'abord, je constate que vous me faites dire des choses que je n'ai pas dites, mais je suis habitué à cela de votre part.

J'ai entendu les acteurs du monde judiciaire qui expriment leur mal-être. Je les ai écoutés, les ai entendus, les ai reçus à la chancellerie et je les rencontre tous les jours dans mes déplacements. Mieux, je les invite à faire entendre leur voix dans le cadre de cet exercice tout à fait particulier que sont les états généraux de la justice. Ces états généraux sont faits pour cela, ils permettront de dégager des propositions pour améliorer la justice de ce pays pour nos concitoyens, pour les magistrats, les greffiers, les avocats, les agents pénitentiaires, les services administratifs.

Ma réponse à votre brève question n'est pas encore tout à fait terminée. Il est vrai que nous aurions pu durant ce quinquennat recruter plus de 650 magistrats et 870 greffiers. Il est vrai que nous aurions pu durant ce quinquennat augmenter de plus de 33 % le budget du ministère de la justice. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Agir ens. – M. Erwan Balanant applaudit également.) Il est vrai que nous aurions pu durant ce quinquennat augmenter le budget des services judiciaires autant que ce que la gauche et la droite réunies ont fait en dix ans. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.) Il est vrai que nous aurions pu durant ce quinquennat augmenter drastiquement l'aide juridictionnelle. La vérité, monsieur Bernalicis, c'est que tout cela, nous l'avons fait, et que c'est cette majorité qui l'a fait. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LaREM et Dem.)

Le problème, c'est qu'avec vous, c'est la politique du crocodile : une très grande bouche, de tout petits bras. (Mêmes mouvements. - Exclamations sur les bancs du groupe FI.)

M. le président. La parole est à M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Quelle morgue, quel mépris (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM), mais on finit par s'y habituer. Leur voix, monsieur le ministre, les magistrats la font entendre en dehors des états généraux de la justice. Ils la feront entendre demain dans tout le pays, notamment ici à Paris, dans leur manifestation devant Bercy, car ce sont bien les moyens qui manquent à l'institution judiciaire.

Vous êtes un maroufle. (Exclamations sur de nombreux bancs des groupes LaREM et Dem.) La pluie de soutiens, de la conférence des procureurs, de la conférence des procureurs généraux, de la Cour de cassation, du Conseil supérieur de la magistrature, vous ne pouvez la nier. Elle traduit votre incompréhension, vous qui poursuivez, après Mme Belloubet, un modèle de justice qui considère tout cela comme de la gestion de flux. La précarisation que vous perpétuez est précisément ce que dénonce la tribune des magistrats. Vous ne le comprenez pas et pourtant une justice maltraitée est une justice maltraitante.

Comme le disait ma grand-mère avec le bon sens des gens du Nord : grand diseux, petit faiseux.

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux. Je ne veux pas répondre aux injures mais je rappellerai que ce budget en nette augmentation, monsieur Bernalicis, vous ne l'avez pas voté ! (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.)

Données clés

Auteur : M. Ugo Bernalicis

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Justice

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 décembre 2021

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