Sommet "choose France"
Question de :
Mme Danièle Obono
Paris (17e circonscription) - La France insoumise
Question posée en séance, et publiée le 24 janvier 2018
SOMMET « CHOOSE FRANCE »
M. le président. La parole est à Mme Danièle Obono, pour le groupe La France insoumise.
Mme Danièle Obono. Ma question s'adresse au Premier ministre, qui, j'en suis sûr, se fera un plaisir de nous répondre. Hier, à Versailles, le Président Macron a réuni 140 dirigeants de multinationales pour les convaincre de l'attractivité de la France lors d'un événement élégamment intitulé « Choose France ». Vous-même, monsieur le Premier ministre, ainsi qu'un grand nombre des membres de votre gouvernement, étiez présents à ce grand raout, qui rassemblait à huis clos le gratin de la finance prédatrice. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe REM.)
Parmi vos illustres invités, un certain nombre sont en effet éminemment remarquables. Prenons Lloyd Blankfein, patron de Goldman Sachs, dont l'établissement s'est notamment fait remarquer avant 2008 en maquillant les comptes de la Grèce, puis, après 2008, en pariant sur sa faillite, ce qui lui a rapporté une brochette de milliards. On pourrait aussi évoquer Jamie Dimon, patron de JPMorgan, qui a été jugé en 2014 par la justice française pour fraude fiscale, ou les dirigeants d'Axa, d'Apple ou d'Amazon, qui entretiennent des rapports plus que troubles avec les paradis fiscaux.
M. Jean-Luc Mélenchon. Très juste !
Mme Danièle Obono. Ces belles personnes font également partie d'un club de happy few, spécialistes en accaparement des richesses. Dans un rapport paru hier, l'organisation non gouvernementale Oxfam révélait en effet que 82 % des richesses créées dans le monde l'année dernière ont bénéficié aux 1 % le plus riche. En France, les 10 % les plus riches détiennent plus de la moitié des richesses quand les 50 % les plus pauvres se partagent à peine 5 % du gâteau.
Un député du groupe LR . Staline, reviens !
Mme Danièle Obono. Puisque le Président Macron a jugé bon de réunir quelques-unes et surtout quelques-uns des champions du monde de l'irresponsabilité financière, nous souhaiterions avoir des détails sur la teneur de vos discussions.
Avez-vous profité de l'occasion pour demander à l'auguste assemblée réunie à grands frais à la cour de Versailles de faire preuve du même sens des sacrifices et des responsabilités que vous exigez des salariés, fonctionnaires ou chômeurs de notre pays ?
Plus précisément, le groupe La France insoumise, la société civile, mais aussi, je crois, un grand nombre de nos concitoyens et concitoyennes souhaiteraient savoir si vous avez enfin demandé des comptes aux délinquants fiscaux patentés invités avec les plus grands honneurs, et quelles mesures immédiates vous comptez prendre pour enfin lutter efficacement contre ces inégalités et cette injustice fiscale qui, rappelons-le, coûte chaque année entre 60 milliards et 80 milliards d'euros à notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.
M. Éric Coquerel. Pourquoi n'est-ce pas le Premier ministre qui répond ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Madame Obono, votre question sur le creusement des inégalités et la politique fiscale de la France pourrait être intéressante si vous n'aviez pas sombré dans la caricature qui vous est familière, sinon quotidienne. (Exclamations sur les bancs du groupe FI. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM et sur quelques bancs du groupe MODEM.)
M. Alexis Corbière. Taisez-vous !
M. Pierre Cordier. Il y a deux mois, il disait la même chose que Mme Obono !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État. Madame la députée, que Google fasse le choix d'investir en France, que Facebook développe l'intelligence artificielle en France, que des entreprises européennes et internationales viennent prendre des participations dans le capital de nos entreprises, qui, elles-mêmes, vont exporter et investir à l'étranger, ce doit être un motif de fierté. Quand l'attractivité du territoire se développe, ce doit être un motif de fierté. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM.)
Être fier de l'attractivité du territoire, cela ne signifie pas baisser la garde, cela ne signifie pas accepter les comportements qui ne sont pas éthiques. À aucun moment, vous ne trouverez dans la politique du Gouvernement la moindre tentation de baisser la garde face aux fraudeurs et à celles et ceux qui se comportent comme des prédateurs.
M. Fabien Di Filippo. Il parle avec la foi du converti !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État . Nous savons mener la politique avec ces deux piliers : l'attractivité du pays et la volonté de toujours lutter contre les comportements les plus inappropriés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.) Le Premier ministre et l'ensemble du Gouvernement sont mobilisés contre la fraude fiscale, et nous n'avons pas attendu vos leçons. (Mêmes mouvements.)
M. Alexis Corbière. Quel culot !
M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État . Ni ce gouvernement ni d'ailleurs les précédents : tous ont musclé les dispositifs de lutte contre la fraude fiscale. Je vous invite donc à un seul exercice, madame Obono. La loi PACTE va bientôt venir en discussion. Impliquez-vous dans les discussions et faites en sorte que l'opportunité de la croissance soit aussi une opportunité pour la cohésion sociale ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe REM. – Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.)
Auteur : Mme Danièle Obono
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique économique
Ministère interrogé : Action et comptes publics (M. le SE auprès du ministre)
Ministère répondant : Action et comptes publics (M. le SE auprès du ministre)
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 24 janvier 2018