Question orale n° 1034 :
L'accompagnement de l'industrie du décolletage dans la vallée de l'Arve

15e Législature

Question de : M. Xavier Roseren
Haute-Savoie (6e circonscription) - La République en Marche

M. Xavier Roseren interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur l'accompagnement, à moyen terme, des entreprises de décolletage présentes dans la vallée de l'Arve. Ce secteur - chaînon essentiel de l'industrie manufacturière - produit des composants spécifiques, de faible diamètre, qui ont vocation à être assemblés dans des produits très divers : M. le député pense à l'horlogerie, aux produits électroniques, aux automobiles, à l'aéronautique ou encore au domaine médical. Cet écosystème stratégique - qui exporte massivement et produit aussi à l'étranger - mène donc une activité de haute technicité industrielle, extrêmement innovante et réactive, composée essentiellement de PME, de TPE et d'entreprises unipersonnelles. C'est également un secteur d'investissements massifs, notamment dans les moyens de production, et dont le capital humain est doté d'une réelle différenciation compétitive. En 2017, sur les 2 402 millions d'euros réalisés par 635 entreprises de décolletage en France, 437 d'entre elles se trouvent dans la vallée de l'Arve, berceau historique du décolletage en France. Ces dernières génèrent, à elles seules, 1 657 millions d'euros et regroupent plus de 70 % des emplois du secteur. M. le ministre le mentionnait, lors de débats en séance des dernières semaines : la crise sanitaire et économique que connaît le pays a notoirement impacté et fragilisé ces acteurs. Le secteur avait déjà connu une crise historique en 2009, avec une baisse de près de 40 % de son activité. Il est pourtant parvenu, grâce à une expertise et une technicité de pointe, à rebondir. Aujourd'hui, malgré un très large recours aux mesures d'urgences, le secteur reste inquiet quant à sa capacité à parvenir à une reprise de l'activité à court et moyen terme. Le 5ème rapport de l'Observatoire de la santé des entreprises de Mont-Blanc industries du 6 mai 2020 précisait à ce titre que parmi les entreprises encore en activité, 87,3 % d'entre elles ont recours au chômage partiel et 44,4 % aux emprunts de trésorerie. Quel accompagnement est prévu, à court terme, par le plan de relance, pour les acteurs d'une filière extrêmement compétitive? À moyen terme, de quelle manière les entreprises pourront-elles saisir les opportunités pour renforcer l'investissement, l'innovation et la transformation technologique si nécessaire au secteur ? Avant la crise du covid-19, le Gouvernement prévoyait la présentation d'un plan de relance de l'industrie liée à l'automobile en Haute-Savoie. Ce fonds de soutien et de transition est-il remis en cause ou modifié par la crise que connaît le pays ? Il souhaite connaître son avis sur ces sujets et le remercie.

Réponse en séance, et publiée le 9 décembre 2020

INDUSTRIE DU DÉCOLLETAGE DANS LA VALLÉE DE L'ARVE
M. le président. La parole est à M. Xavier Roseren, pour exposer sa question, n°  1034, relative à l'industrie du décolletage dans la vallée de l'Arve.

M. Xavier Roseren. Je souhaite vous interroger, monsieur le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics, à propos de l'accompagnement, à moyen terme, des entreprises industrielles de la vallée de l'Arve, en particulier celles du décolletage. Comme le ministre de l'économie et des finances, Bruno Le Maire, l'a mentionné ce matin en commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, ce secteur produit des composants spécifiques, de faible diamètre, destinés à être assemblés dans des produits appartenant à des domaines très divers, comme l'horlogerie, l'automobile, l'aéronautique et le domaine médical. C'est donc un écosystème stratégique, intervenant dans un secteur d'activité de haute technicité, extrêmement innovant et qui exporte massivement ; il est constitué essentiellement de PME et de TPE, employant un capital humain doté de compétences susceptibles d'une réelle différenciation compétitive.

En 2017, la France comptait plus de 600 entreprises de décolletage, qui ont réalisé 2,4 milliards d'euros de chiffre d'affaires ; 437 d'entre elles se trouvent dans la vallée de l'Arve, berceau historique de l'activité, que M. Le Maire connaît bien. Ces dernières engendrent, à elles seules, 1,6 milliard d'euros et regroupent plus de 70 % des emplois du secteur. Or, déjà largement fragilisé par la mutation de la filière automobile, il est gravement touché par une baisse brutale de l'activité liée à la crise sanitaire. Malgré un large recours aux mesures d'urgences, il reste inquiet quant à sa capacité à parvenir à une reprise de l'activité à court ou moyen termes. Le cinquième rapport de l'Observatoire de la santé des entreprises du pôle de compétitivité Mont-Blanc industries, publié le 8 mai dernier, précisait que, parmi les entreprises encore en activité, 87 % ont recours au chômage partiel et 44 % aux emprunts de trésorerie.

Le secteur se mobilise et vous a réclamé un prolongement de ces mesures. Quel accompagnement spécifique est prévu, à court terme, pour les acteurs de la filière, soumise à une forte concurrence internationale ? L'État prévoit-il des prises de participation temporaires au capital des ETI et PME de cette filière stratégique ? Avant la crise du covid-19, le Gouvernement prévoyait la présentation d'un plan de relance de l'industrie liée à l'automobile en Haute-Savoie. Ce fonds de soutien et de transition se trouve-t-il remis en cause ou modifié ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'action et des comptes publics. Monsieur Roseren, la vallée de l'Arve, vous l'avez rappelé, concentre 800 entreprises industrielles, principalement des PME et des TPE familiales, dont une très large part sont spécialisées dans les domaines du décolletage et de la mécanique de précision. Environ 55 % du chiffre d'affaires de l'industrie du décolletage est lié au secteur automobile, en grande partie aux véhicules thermiques, dont le diesel ; viennent ensuite, à parts plus ou moins égales, l'aéronautique, les biens d'équipement, le médical, le sport et les loisirs.

Cette industrie a été fortement affectée par la crise de 2008-2009, vous êtes particulièrement bien placé pour le savoir. La vallée de l'Arve avait su rebondir, mais la décroissance du marché du diesel à partir de 2015 a mis en évidence les problèmes structurels du secteur : forte dépendance aux véhicules thermiques ; vieillesse relative d'une partie du système de production ; recherches de diversification encore trop modestes. C'est pourquoi a été évoquée à plusieurs reprises la nécessité d'un plan d'accompagnement pour la reconversion de la vallée.

La crise du covid-19 frappe très fortement les acteurs de la vallée de l'Arve : les entreprises tournent au ralenti, les incertitudes sont grandes, et une part très importante des entreprises ont fait appel au dispositif d'activité partielle ainsi qu'au report de charges sociales, fiscales et bancaires. La plupart anticipent une probable baisse de leur chiffre d'affaires annuel, de l'ordre de 20 à 40 %.

Si la crise actuelle aggrave encore la situation pour la vallée de l'Arve, elle ne doit pas faire oublier des considérations de moyen et long terme. C'est la raison pour laquelle, en complément d'un plan de relance du secteur automobile, nous poursuivons l'élaboration d'un plan d'action spécifique pour soutenir cette vallée, en relation avec l'ensemble des acteurs locaux. L'objectif est de proposer des mesures concrètes à prendre rapidement, qui permettront dès la sortie de crise de s'attaquer aux problèmes structurels de la vallée de l'Arve. Ce plan doit permettre de soutenir le repositionnement stratégique des acteurs, tout en identifiant des perspectives de diversification.

Pour répondre à la crise actuelle, qui touche plus durement cette industrie que d'autres secteurs de notre économie, les dispositions des deux projets de loi de finances rectificatives que vous avez adoptés continuent de s'appliquer.

Mme la ministre du travail a indiqué que la sortie du chômage partiel serait progressive, en fonction du niveau d'activité et des difficultés rencontrées. Nous avons aussi instauré différents dispositifs : le fonds de solidarité ; un fonds permettant à l'État de prendre des participations dans les entreprises les plus stratégiques quand c'est nécessaire ; le programme de prêts garantis par l'État permettant à toutes les entreprises qui rencontrent des difficultés de trésorerie d'être accompagnées par l'État, afin d'accéder à un financement bancaire – d'ores et déjà, plus de 70 milliards d'euros de prêts ont ainsi été accordés. Chacun de ces outils est évidemment mobilisé et mobilisable par les acteurs de la vallée de l'Arve, en attendant que le plan de relance de l'automobile annoncé par Bruno Le Maire et le plan spécifique pour la vallée de l'Arve soient prêts – ce devrait être le cas rapidement.

Les élus locaux, dont vous êtes un des représentants de tout premier ordre, seront évidemment associés à la définition de ce plan, et nous serons attentifs à vos propositions, parce qu'elles s'appuient sur votre expérience du terrain.

Données clés

Auteur : M. Xavier Roseren

Type de question : Question orale

Rubrique : Industrie

Ministère interrogé : Économie et finances

Ministère répondant : Économie et finances

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 mai 2020

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