Question orale n° 1198 :
Validation des trimestres de retraite pour les commerces non essentiels fermés

15e Législature

Question de : M. Jean-Paul Dufrègne
Allier (1re circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Jean-Paul Dufrègne attire l'attention de M. le secrétaire d'État auprès de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, chargé des retraites et de la santé au travail, sur la situation des artisans et commerçants indépendants. Du fait de la fermeture exceptionnelle des commerces non essentiels qui a pris fin il y a peu, ces derniers ont bénéficié de reports ou d'allégements de cotisations. Cependant, rien n'a été fait pour valider malgré tout les trimestres nécessaires pour le calcul de leur retraite. Pour beaucoup, les trimestres de cotisation pour l'année 2020 ne seront donc pas validés et ne pourront être comptabilisés dans le calcul des retraites, ce qui causera une perte indéniable pour une situation qui n'est pas de leur ressort. Il lui demande quelles mesures sont envisagées pour répondre aux artisans et commerçants indépendants.

Réponse en séance, et publiée le 13 janvier 2021

RETRAITE DES COMMERÇANTS FERMÉS PENDANT LE CONFINEMENT
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour exposer sa question, n°  1198, relative à la retraite des commerçants fermés pendant le confinement.

M. Jean-Paul Dufrègne. J'adresse tous mes vœux à chacune et à chacun d'entre vous. Monsieur le secrétaire d’État chargé des retraites et de la santé au travail, il est une question qui, pour le moment, a été absente de nos débats : celle de la validation des trimestres de retraite des commerçants dont l’activité a été touchée par une fermeture administrative. L’année 2020 a connu deux confinements, dont l'une des conséquences a été la fermeture administrative de nombreux commerces dits « non essentiels ». C’est le cas d’un libraire de ma circonscription qui a dû baisser rideau. Au-delà de l’incompréhension de devoir renoncer à vendre des livres et des risques majeurs pour la pérennité de son activité, il ne pourra valider qu’un seul trimestre de retraite pour 2020.

Pour mémoire, dans le calcul de la retraite d’un commerçant, seuls les trimestres cotisés sont retenus. Les cotisations sont calculées sur la base d’un revenu brut correspondant à 150 fois le SMIC horaire, soit 10,15 euros en 2020. Pour valider quatre trimestres en 2020, il fallait donc cotiser sur la base d’un revenu de 6 090 euros par an. Or de nombreux petits commerçants n’ont pas pu atteindre ce revenu en 2020 ; ils constatent amèrement qu’en plus d’un coup dur économique, les fermetures administratives et les mesures sanitaires prises pour lutter contre la propagation de la covid-19 auront aussi un impact sur leurs retraites.

Ce problème se pose pour 2020, mais aussi pour 2021, puisque l’évolution de l’épidémie de ce début d’année fait craindre le retour pour les uns, la poursuite pour les autres, de mesures lourdes avec les conséquences économiques que l’on connaît sur certaines activités. Des dispositions spéciales ont été prises pour les salariés en chômage partiel, afin qu’ils continuent à valider des trimestres, mais rien n’a été prévu pour les petits commerçants qui ont été – ou sont toujours – frappés par une fermeture administrative. Le Gouvernement compte-t-il instaurer un dispositif similaire pour les commerçants qui subissent des pertes de droits sociaux qui ne sont pas de leur ressort ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail.

M. Laurent Pietraszewski, secrétaire d'État chargé des retraites et de la santé au travail. Permettez-moi de vous souhaiter à tous une bonne année, puisque nous sommes encore dans les délais pour le faire. Vous appelez mon attention, monsieur Dufrègne, sur le risque que des artisans et des commerçants, du fait des décisions de fermeture exceptionnelle pour raison sanitaire, n'aient pas suffisamment cotisé en 2020 pour valider des trimestres. Vous avez même évoqué l'année 2021, compte tenu de la situation actuelle.

Vous avez pris un exemple précis et j'en profite pour rappeler quelques éléments concernant les travailleurs indépendants, et donc le libraire dont vous avez parlé. Ils sont soumis à des cotisations minimales, qui leur permettent de valider trois trimestres pour leur retraite, quel que soit leur niveau de revenu. Ce dispositif, dont nous avons discuté en d'autres temps, est parfois critiqué en raison des charges qu'il crée pour les travailleurs indépendants ayant des revenus modestes ; il démontre aujourd'hui sa pertinence pour sécuriser les droits sociaux en période de crise.

Par ailleurs, les travailleurs indépendants touchés par les mesures sanitaires bénéficient d'exonérations de cotisations. Plus précisément, l'article 65 de la troisième loi de finances rectificative pour 2020 prévoit des exonérations de cotisations pouvant atteindre 1 400 euros pour les travailleurs indépendants relevant des secteurs S1 – un restaurateur par exemple –, S1 bis – un boucher dont le chiffre d'affaires aurait diminué de 80 % par exemple – et S2, qui inclut les libraires. Ces exonérations permettent de maintenir la constitution de droits à la retraite comme si les cotisations étaient effectivement versées par le travailleur indépendant. Compte tenu des montants d'exonérations mentionnés pour les travailleurs indépendants relevant des secteurs évoqués, la cotisation minimale en 2020 est intégralement prise en charge par la collectivité. Tous les travailleurs indépendants des secteurs concernés par les mesures sanitaires ont ainsi la garantie de valider trois trimestres en 2020, même si leur chiffre d'affaires est nul, et ce, sans avoir à verser les cotisations afférentes.

Malgré cette importante protection, des problèmes demeurent, notamment ceux que vous soulevez dans votre question ; sachez qu'avec Alain Griset, ministre délégué en charge des petites et moyennes entreprises, nous y travaillons afin d'identifier, compte tenu de la situation tout à fait exceptionnelle que traverse la France, des solutions à même de garantir, dans le respect des principes de notre système de retraite, le maintien des droits en cas de difficultés liées aux mesures de protection sanitaire.

Données clés

Auteur : M. Jean-Paul Dufrègne

Type de question : Question orale

Rubrique : Retraites : régimes autonomes et spéciaux

Ministère interrogé : Retraites et santé au travail

Ministère répondant : Retraites et santé au travail

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 5 janvier 2021

partager