Question orale n° 1227 :
Projet de rachat de Suez par Veolia

15e Législature

Question de : M. Bruno Millienne
Yvelines (9e circonscription) - Mouvement Démocrate (MoDem) et Démocrates apparentés

M. Bruno Millienne attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance sur le projet de rachat de Suez par Veolia. M. le député souhaiterait en effet avoir des clarifications sur la position du Gouvernement quant à cette démarche. En effet, alors que le Premier ministre évoquait début septembre 2020 un « mariage qui fait sens », l'État s'est finalement opposé à la vente par Engie de ses parts dans Suez, rappelant, après avoir été mis en minorité au sein du CA d'Engie et toujours par la voix du Premier ministre, que le Gouvernement avait quatre exigences sur ce dossier, à savoir : le maintien de l'emploi, la logique industrielle du projet, le respect des règles de concurrence et le maintien du groupe sous pavillon national. Alors que Veolia vient de transmettre à Suez sa proposition d'offre publique et que celle-ci semble toujours travailler à une offre alternative, M. le député est conscient que le processus sera encore long et réservera sans doute encore des surprises. Il souhaiterait cependant connaître l'avis du ministre sur les quatre objectifs fixés par le Gouvernement et, en l'état actuel, sur les garanties apportées quant à leur atteinte. Par exemple, concernant la sauvegarde de l'emploi, comment l'État pourra-t-il s'assurer, si l'offre d'achat aboutit, que les emplois seront conservés ? En effet, pour passer l'obstacle des autorités de concurrence, Veolia avait pour projet de céder l'activité Suez Eau France au fonds Meridiam, avant que Suez ne décide de placer cette activité dans une fondation - décision actuellement suspendue par la justice -, et on peut s'interroger sur l’impact en termes d’emplois. La question se pose aussi d'ailleurs pour ce qui concerne l'activité « déchets » pour laquelle les acquéreurs potentiels ne sont pas encore connus. Pour rappel, le DG adjoint de Suez, Jean-Marc Boursier, évoquait en septembre 2020 une perte potentielle de 4 000 à 5 000 emplois en France ; le ministre partage-t-il cette analyse ? M. le député souhaiterait citer un autre exemple, pour revenir sur une autre des exigences fixées par le Gouvernement : alors qu'une grande partie des collectivités en France travaillent avec l'une ou l'autre de ces entreprises, comment le Gouvernement pourra-t-il s'assurer, au-delà bien sûr du travail qui sera effectué par les autorités de la concurrence, que ces changements majeurs dans les filières « gestion des eaux » et « gestion des déchets » en France n'auront pas un impact négatif sur les prix des prestations pour les collectivités ? Des interrogations subsistent sur ce projet, alors même que de nombreux salariés de Suez sont inquiets et attendent des réponses, à commencer par ceux du site exemplaire de Flins-sur-Seine, dans les Yvelines. Il lui demande des éclairages qui pourraient à ce titre être très utiles.

Réponse en séance, et publiée le 27 janvier 2021

PROJET DE RACHAT DE SUEZ PAR VEOLIA
Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Millienne, pour exposer sa question, n°  1227, relative au projet de rachat de Suez par Veolia.

M. Bruno Millienne. Je souhaiterais avoir des clarifications sur la position du Gouvernement quant au rachat de Suez envisagé par Veolia.

Alors que le Premier ministre évoquait début septembre 2020 un « mariage qui fait sens », l'État s'est finalement opposé à la vente par Engie de ses parts dans Suez. Après avoir été mis en minorité au sein du conseil d'administration d'Engie, il a rappelé, toujours par la voix du Premier ministre, que le Gouvernement avait quatre exigences sur ce dossier : le maintien de l'emploi, la logique industrielle du projet, le respect des règles de concurrence et le maintien du groupe sous pavillon national.

Alors que de nouveaux acteurs, Ardian et GIP – Global Infrastructure Partners –, viennent d'entrer dans la partie, je suis conscient que nous ne sommes qu'au début d'un processus qui sera long et qui nous réservera sans doute encore des surprises. Je souhaiterais cependant connaître l'avis du ministre de l'économie, des finances et de la relance sur les quatre objectifs fixés par le Gouvernement et sur les garanties actuellement apportées pour qu'ils soient atteints.

Par exemple, concernant la sauvegarde de l'emploi, si l'offre d'achat aboutit, comment l'État pourra-t-il s'assurer que les emplois seront conservés ? Pour passer l'obstacle des autorités de concurrence, Veolia avait pour projet de céder l'activité Suez Eau France au fonds Meridiam, avant que Suez ne décide de placer cette activité dans une fondation – cette décision est actuellement suspendue par la justice. Quel en sera l'impact en matière d’emploi ?

La question se pose aussi concernant l'activité de gestion des déchets, pour laquelle les acquéreurs potentiels ne sont pas encore connus.

Je tiens à rappeler que le directeur général adjoint de Suez, Jean-Marc Boursier, évoquait en septembre 2020 une perte potentielle de 4 000 à 5 000 emplois en France : le ministre partage-t-il cette analyse ?

Pour revenir sur une autre des exigences fixées par le Gouvernement, je donnerai un autre exemple : alors qu'une partie des collectivités françaises travaille avec l'une ou l'autre de ces entreprises, comment le Gouvernement pourra-t-il s'assurer, au-delà bien sûr du travail qui sera effectué par les autorités de la concurrence, que ces changements majeurs dans les filières de la gestion des eaux et des déchets en France n'auront pas un effet négatif sur les prix des prestations qui leur sont fournies ?

Des interrogations subsistent à propos de ce projet ; de nombreux salariés de Suez sont inquiets et attendent des réponses, à commencer par ceux du site exemplaire de Flins-sur-Seine, dans ma circonscription. Les éclairages que vous pourrez nous apporter à ce sujet pourraient être très utiles.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises.

M. Alain Griset, ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises. Dans cette opération, la position de l'État a été constante. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance, Bruno Le Maire, a eu l'occasion de la présenter à plusieurs reprises devant vous : elle a conduit l'État à voter contre le rachat par Veolia de la participation d'Engie dans Suez.

En effet, comme vous l'avez dit, monsieur le député, l'État avait fixé des conditions à son vote en faveur de ce rachat : d'abord la pérennité de l'emploi, naturellement, alors que nous traversons une crise économique sans précédent et que les salariés de Suez, notamment les plus de 30 000 femmes et hommes employés en France, ont été en première ligne durant la crise pour garantir le bon fonctionnement de services publics essentiels, comme le traitement des déchets ou l'accès à l'eau ; ensuite la logique industrielle, notamment pour s'assurer que les acteurs susceptibles de reprendre les activités de Suez en France soient crédibles, robustes et engagés à long terme ; enfin, la préservation d'une offre concurrentielle et de qualité, afin que les missions essentielles qui relèvent de ces opérateurs soient remplies.

Bruno Le Maire a toujours été clair sur le fait que cette opération, si elle était effectuée, devait être amicale, c'est-à-dire acceptée par le conseil d'administration de Suez et par l'ensemble des parties prenantes. Cette condition n'a clairement pas été remplie. Or une opération hostile et contre-productive serait préjudiciable pour tous.

Ainsi, nous le répétons, il est important de trouver une solution à l'amiable, concertée et consensuelle. Avec Bruno Le Maire, nous nous réjouissons des offres de dialogue exprimées des deux côtés. Nous appelons les deux parties à s'en saisir pour trouver un accord qui soit satisfaisant pour tous et, surtout, en mesure de faire respecter les objectifs que nous avons fixés depuis le départ.

Données clés

Auteur : M. Bruno Millienne

Type de question : Question orale

Rubrique : Entreprises

Ministère interrogé : Économie, finances et relance

Ministère répondant : Économie, finances et relance

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 janvier 2021

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