Question orale n° 1486 :
Situation des étudiants et repas à 1 euro

15e Législature

Question de : M. Yannick Favennec-Bécot
Mayenne (3e circonscription) - UDI et Indépendants

M. Yannick Favennec-Bécot attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation sur les conséquences de la crise sanitaire sur les étudiants, et notamment ceux en situation de précarité. En effet, depuis le début du confinement, alors que près de la moitié des jeunes financent leurs études grâce à des petits boulots, nombreux sont ceux qui, n'ayant plus la possibilité de travailler, sont confrontés à d'importantes difficultés financières. Bien que le dispositif du repas à 1 euro, dans les restaurants universitaires, mis en place par le Gouvernement, soit accessible, en principe, à l'ensemble des étudiants, tous ceux qui sont éloignés des grands campus ne peuvent y avoir accès et cette situation renforce le sentiment de déclassement territorial. Il lui demande donc quelles mesures compensatoires elle entend mettre en œuvre rapidement permettant de rétablir une certaine équité entre les étudiants.

Réponse en séance, et publiée le 26 mai 2021

SITUATION DES ÉTUDIANTS
M. le président. La parole est à M. Yannick Favennec-Bécot, pour exposer sa question, n°  1486, relative la situation des étudiants.

M. Yannick Favennec-Bécot. Madame la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, à l'initiative de Jean-Pierre Le Scornet, maire de la ville de Mayenne qui est le chef-lieu de ma circonscription, plusieurs parlementaires dont deux députés de la Mayenne, Guillaume Garot et moi-même, vous ont alertée le 4 mars dernier sur la situation particulière des étudiants qui préparent un BTS – brevet de technicien supérieur – dans un lycée de la ville. En effet, ils ne peuvent bénéficier ni du dispositif de deux repas par jour au prix de 1 euro ni des autres services à la disposition des étudiants des métropoles : service universitaire de médecine préventive et de promotion de la santé, accès au sport et à la documentation spécifique par la bibliothèque universitaire (BU), activités culturelles proposées sur les campus.

Votre réponse, reçue un mois et demi plus tard, est assez édifiante en matière de langue de bois. Après avoir lu de longues généralités qui ne concernent nullement l'objet de notre interpellation, il faut attendre les dernières lignes pour obtenir une demi-réponse qui revient à dire que vous vous en lavez les mains. Pour les élus locaux et nationaux que nous sommes, mais aussi et surtout pour les étudiants, cette réponse n'est ni audible ni acceptable, notamment dans le contexte actuel de crise sanitaire. Ces jeunes qui étudient dans des établissements secondaires au sein des territoires ruraux sont des étudiants à part entière. Pourtant, en leur refusant l'accès au dispositif des repas à 1 euro dont bénéficient les étudiants des métropoles, vous créez une discrimination qui aggrave leur sentiment d'injustice. Ainsi, aux termes de votre courrier, ils sont étudiants pour les droits d'inscription mais pas pour les repas ; s'ils veulent déjeuner pour 1 euro, il faut qu'ils parcourent les trente kilomètres qui les séparent du restaurant universitaire. Je vous invite, madame la ministre, à prendre leur place le temps d'un déjeuner ; vous comprendrez alors que cela n'est absolument pas réalisable.

Opposer une fin de non-recevoir à leur demande d'égalité de traitement en matière de repas et ne pas répondre à leur demande d'accès aux autres services universitaires revient à dire à tous les étudiants de France qu'il vaut mieux ne pas suivre des études supérieures en milieu rural, sous peine d'être considérés comme des étudiants par intermittence. Pour vous, ils ont un statut étudiant qui s'arrête à la pause déjeuner, moment où ils redeviennent des lycéens pour ensuite être à nouveau étudiants – pourvu qu'ils ne cherchent pas à accéder à la bibliothèque universitaire, car ils redeviendraient alors des lycéens, n'ayant accès qu'au CDI, le centre de documentation et d'information.

Aussi, madame la ministre, les étudiants de la ville de Mayenne ainsi que tous les étudiants qui choisissent de poursuivre leurs études supérieures dans le monde rural attendent-ils de votre part une réponse concrète à leur situation en cette période de crise sanitaire. Ils vous demandent aussi de les considérer comme des étudiants à part entière et de leur donner accès à l'ensemble des services auxquels les étudiants de France ont droit. Madame la ministre, la France universitaire ne se résume pas aux métropoles.

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Vous prêchez une convaincue, monsieur le député. Bien sûr que la France de l'enseignement supérieur ne s'arrête pas aux métropoles ! D'ailleurs, quel Gouvernement a fait en sorte que s'installent dans les territoires des campus où les étudiants ont accès aux documentations de la BU…

M. Yannick Favennec-Bécot. Pas partout !

Mme Frédérique Vidal, ministre . … et que des conventions soient passées entre les CROUS – centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires – et les villes ? Vous savez bien, monsieur le député, que la restauration dans les lycées ne dépend ni des CROUS ni de l'État, mais des régions. À chaque fois que des collectivités l'ont demandé, les CROUS ont signé des conventions afin que l'État puisse subventionner les repas des étudiants, mais nous ne pouvons malheureusement pas faire ce qui est à la charge d'autres collectivités. Vous savez qu'un système de guichet a été mis en place pour les étudiants. Dans ce cadre, nous avons permis que chacun d'entre eux, où qu'il se trouve en France, puisse contacter les CROUS, les psychologues, les assistantes sociales – y compris de façon dématérialisée s'il ne peut pas se déplacer –, afin de ne pas se sentir isolé.

Il est vrai qu'il reste encore des endroits dans lesquels le nombre d'étudiants ne nous permet pas d'implanter une bibliothèque ou un restaurant universitaire. Mais nous nous efforçons toujours de trouver des solutions pour ces endroits. Nous allons même beaucoup plus loin car lorsque nous implantons des campus connectés dans de très petites villes, grâce au numérique, nous donnons accès à une majorité d'étudiants à l'enseignement supérieur et à tout ce qui l'accompagne. C'est un combat sans relâche qui doit être mené, et qui concerne aussi les mentalités : oui, on peut étudier partout en France. On pourra même de plus en plus le faire et réussir, et ce ne sera en aucun cas des études au rabais comme le prétendent certains.

M. le président. La parole est à M. Yannick Favennec-Bécot.

M. Yannick Favennec-Bécot. Votre réponse écrite ne m'avait pas convaincu, madame la ministre. Je dois dire que la réponse orale ne me convainc pas davantage. J'ai envie de vous conseiller de traverser le périphérique parisien…

Mme Frédérique Vidal, ministre. C'est à moi que vous dites cela !

M. Yannick Favennec-Bécot. … et de venir rencontrer les étudiants du monde rural. Je vous invite officiellement ce matin à venir à Mayenne ; je suis sûr que les jeunes femmes et les jeunes hommes qui étudient dans cette ville seraient particulièrement heureux de vous expliquer de vive voix leurs difficultés quotidiennes et la discrimination dont ils se sentent l'objet.

Données clés

Auteur : M. Yannick Favennec-Bécot

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement supérieur

Ministère interrogé : Enseignement supérieur, recherche et innovation

Ministère répondant : Enseignement supérieur, recherche et innovation

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 mai 2021

partager