Versement de l'indemnité inflation aux travailleurs transfrontaliers de Moselle
Question de :
Mme Nicole Trisse
Moselle (5e circonscription) - La République en Marche
Mme Nicole Trisse attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics, sur le versement de la prime inflation aux travailleurs dits transfrontaliers. Afin de faire face aux hausses généralisées des prix de l'énergie, le Gouvernement a mis en place une indemnité inflation d'une valeur de 100 euros versée aux salariés, indépendants ou retraités percevant moins de 2 000 euros par mois à compter du mois de décembre 2021. Pour ce faire, les entreprises effectueront à l'avance le versement de l'indemnité aux salariés éligibles et seront ensuite remboursées par l'État. Cependant, à ce jour, on n'a pas obtenu de précisions pour les travailleurs français transfrontaliers, qui ont la particularité de résider en France et de travailler dans une entreprise étrangère située dans un pays voisin de la France. Ces salariés, qui perçoivent moins de 2 000 euros par mois, sont ainsi pénalisés alors qu'ils effectuent de longs trajets en voiture pour se rendre sur leur lieu de travail. Il s'agit d'un motif d'inquiétude important au sein de la communauté des 16 500 travailleurs transfrontaliers de Moselle-est, qui subit par ailleurs la hausse des prix du carburant dans les pays limitrophes et notamment l'Allemagne et n'a donc pas de gains de pouvoir d'achat à se rendre aux stations-services allemandes. Ainsi, dans la circonscription de Mme la députée, le prix du litre de diesel ou de sans-plomb est similaire voire plus élevé à Saarbrücken qu'à Sarreguemines. Aussi, elle l'interroge sur les mesures que le Gouvernement entend mettre en œuvre afin de garantir aux travailleurs transfrontaliers éligibles le versement de l'indemnité inflation.
Réponse en séance, et publiée le 8 décembre 2021
VERSEMENT DE L'INDEMNITÉ INFLATION AUX TRAVAILLEURS TRANSFRONTALIERS DE MOSELLE
M. le président. La parole est à Mme Nicole Trisse, pour exposer sa question, n° 1574, relative au versement de l'indemnité inflation aux travailleurs transfrontaliers de Moselle.
Mme Nicole Trisse. Madame la ministre déléguée, je souhaite appeler l'attention sur la situation des travailleurs frontaliers de Moselle par deux questions très précises et concrètes. J'y associe ma collègue Hélène Zannier, voisine de circonscription, présente dans l'hémicycle et qui partage mes préoccupations.
La prime inflation est octroyée à 38 millions de Français percevant moins de 2 000 euros nets par mois. Le mode d'attribution de cette prime est désormais bien compris pour nos étudiants, actifs et retraités résidant en France. Il l'est moins pour les 16 500 travailleurs français employés dans des entreprises allemandes, qui sont pourtant les premiers concernés par la hausse du prix du carburant car la voiture est bien souvent le seul moyen de transport pour aller travailler en Allemagne. En outre, nombreux sont ceux qui font quotidiennement de longs trajets pour se rendre à leur travail. Pourriez-vous préciser les modalités de versement de cette prime inflation pour nos travailleurs frontaliers qui y seraient éligibles ?
D'autre part, j'aimerais vous alerter sur le problème de la double imposition que subissent les chômeurs français licenciés économiques d'une entreprise basée en Allemagne. Une partie des indemnités de chômage auxquelles ils ont droit est indûment prélevée par le fisc allemand, ce qui réduit d'autant le montant de l'allocation qui est, ensuite, fiscalisée en France.
Il s'agit non pas d'une double, mais d'une triple peine. Outre la perte de son emploi, notre travailleur frontalier subit une double imposition contraire aux conventions fiscales passées entre la France et l'Allemagne. Quels moyens comptez-vous mettre en œuvre pour mettre un terme rapidement à cette situation absurde ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'industrie.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée chargée de l'industrie. Selon le projet du Gouvernement, l’indemnité inflation est une aide exceptionnelle et individuelle de 100 euros à la charge de l’État, qui sera versée aux personnes résidant en France afin de préserver leur pouvoir d’achat, sous condition de percevoir un revenu net annuel inférieur à un certain seuil.
Le versement sera assuré par les employeurs pour les salariés travaillant en France. Pour des raisons opérationnelles, il n’est en revanche pas envisageable que l’indemnité inflation soit versée par les employeurs étrangers pour les travailleurs frontaliers.
Par conséquent, pour les personnes domiciliées en France au sens du 1. a. de l'article 4 B du code général des impôts et ne percevant au titre des traitements, salaires ou pensions que des revenus de source étrangère imposables en France, dont les frontaliers, le versement de l'indemnité sera effectué par la direction générale des finances publiques (DGFIP). Il devrait intervenir en février 2022 et être adressé aux usagers éligibles sans intervention de leur part, directement par virement sur leur compte bancaire ou par l'envoi d'une lettre-chèque pour ceux d'entre eux n'ayant pas communiqué leurs coordonnées bancaires à l'administration fiscale. Toutes les personnes qui rempliraient les conditions d'octroi de cette indemnité mais n'auraient pas été sélectionnées par la DGFIP auront naturellement la possibilité de se rapprocher de leur service des impôts aux particuliers pour signaler leur situation afin d'obtenir le virement de l'indemnité.
Concernant les indemnités de chômage partiel, vous avez tout à fait raison. Ces indemnités versées à des résidents français travaillant en Allemagne font l’objet d’un prélèvement forfaitaire en Allemagne contraire tant à la convention fiscale entre nos deux pays qu’au droit européen.
La pratique allemande paraît en outre méconnaître le principe de libre circulation des travailleurs consacré par les traités européens, et plusieurs contentieux individuels ont été engagés par les travailleurs concernés devant les juridictions compétentes en Allemagne.
Pleinement conscient des difficultés que cette situation engendre pour les travailleurs concernés, le Gouvernement a saisi le gouvernement allemand de ce sujet dès l’été 2020. La France insiste sur le préjudice causé aux travailleurs frontaliers et la nécessité de ne pas remettre en cause les équilibres trouvés dans la convention fiscale avec l’Allemagne, car la solution ne saurait passer par une renonciation à nos droits d’imposer. À ce stade, les autorités françaises restent dans l'attente d'un retour des ministères sociaux allemands, et ce dans un contexte particulier car le gouvernement allemand est en cours d'installation. Soyez assurée de notre très grande implication dans cette question.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Trisse.
Mme Nicole Trisse. Merci, madame la ministre déléguée, pour vos deux réponses. La première est très claire, et je vais la transmettre. En ce qui concerne la double imposition, je remercie le Gouvernement de relancer la discussion avec les Allemands : nous ne pouvons qu'attendre une concrétisation de ce que suggère le traité d'Aix-la-Chapelle, signé par la chancelière Merkel et le président Macron, sur l'harmonisation des règles fiscales entre nos deux pays.
Auteur : Mme Nicole Trisse
Type de question : Question orale
Rubrique : Frontaliers
Ministère interrogé : Comptes publics
Ministère répondant : Comptes publics
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 30 novembre 2021