Question orale n° 1648 :
Prévention et lutte contre l'illettrisme dans l'enseignement scolaire

15e Législature

Question de : Mme Béatrice Piron
Yvelines (3e circonscription) - La République en Marche

Mme Béatrice Piron attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports sur la prévention et la lutte contre l'illettrisme dans l'enseignement scolaire. Depuis quatre ans, la maîtrise des savoirs fondamentaux à la sortie de l'école primaire, « lire, écrire, compter, respecter autrui », est une priorité de l'action du ministère. C'est en ce sens que les classes de grande section, de CP et de CE1 ont été limitées à 24 élèves et à 12 élèves en réseau d'éducation prioritaire, que la formation des enseignants a été renforcée et que des références communes en matière d'approche pédagogique des apprentissages ont été privilégiées. Ces réformes, qui concernent prioritairement les élèves de l'école primaire, contribueront indéniablement à prévenir l'illettrisme et le décrochage scolaire. Toutefois, des élèves n'ont pas pu bénéficier de ces réformes, notamment des collégiens et des lycéens actuels et des études montrent l'urgence de la situation : les résultats du test de fluence organisé à l'entrée en 6ème indiquaient en 2021 que 15 % des élèves n'avaient pas le niveau attendu en fin de CE2 et les résultats de la journée défense et citoyenneté de 2019 ont permis de détecter 14,46 % des jeunes appelés en difficulté de lecture. Ces difficultés se répercutent tout au long de la vie professionnelle et il est par ailleurs très difficile d'y remédier après la scolarité. Or l'écriture et la lecture deviennent des compétences professionnelles de plus en plus indispensables du fait de la digitalisation et 76 % des employeurs seraient aujourd'hui confrontés à des lacunes en français selon une enquête de l'institut IPSOS. Aussi, elle l'interroge sur les dispositifs particuliers qui ont été mis en œuvre ou qu'il entend déployer au profit des collégiens ou des lycéens qui ont d'importantes difficultés avec les savoirs fondamentaux et notamment les jeunes appelés à la journée défense et citoyenneté qui sont encore scolarisés.

Réponse en séance, et publiée le 2 février 2022

LUTTE CONTRE L'ILLETTRISME DANS L'ENSEIGNEMENT
M. le président. La parole est à Mme Béatrice Piron, pour exposer sa question, n°  1648, relative à la lutte contre l'illettrisme dans l'enseignement.

Mme Béatrice Piron. Depuis quatre ans, la maîtrise des savoirs fondamentaux – lire, écrire, compter et respecter autrui – est une priorité de notre action. C’est en ce sens que nous avons concentré nos efforts sur l’école primaire et limité à vingt-quatre élèves les classes de grande section de maternelle, CP et CE1, classes qui ont en outre été dédoublées en REP et en REP+.

Ces réformes, madame la ministre, étaient indispensables, et les résultats des évaluations nationales en CP et en CE1 montrent qu'elles portent leurs fruits. Sur le long terme, elles contribueront à prévenir ou au moins à limiter l’illettrisme, qui concerne actuellement 7 % des adultes ayant été scolarisés en France. Certains élèves, parmi les collégiens ou les lycéens actuels, n’ont toutefois pas pu bénéficier de ces réformes : ils poursuivent leur scolarité avec d’importantes difficultés pour lire et pour écrire, et se trouvent en conséquence dans une grande souffrance. Malheureusement, trop nombreux sont les élèves qui décrochent en cours.

Les résultats des tests de fluence de la rentrée dernière indiquent qu’environ 15 % des élèves de sixième n’ont pas le niveau attendu en CE2, et même si le dédoublement des classes en REP et en REP+ peut nous faire espérer une baisse de ce chiffre, je me permets de vous rappeler qu’il y a de nombreux autres enfants en difficulté dans des classes hors REP. Je rappelle aussi qu'actuellement, on identifie chez 14 % des jeunes appelés à la JDC – journée défense et citoyenneté – des difficultés de lecture, difficultés qui se répercuteront tout au long de leur vie personnelle et professionnelle.

Ainsi, madame la ministre, en tant que présidente du groupe d'études « Illettrisme et illectronisme », je souhaite vous interroger sur ce qui pourrait être entrepris pour mieux prévenir l’illettrisme et pour accompagner les élèves, collégiens ou lycéens, en la matière. Quel accompagnement spécifique pourrait-on leur apporter pour qu'ils reprennent pied avant de se retrouver en situation de décrochage ? Quelle action systématique pourrait-on entreprendre pour aider les jeunes diagnostiqués en grande difficulté lors de la JDC ou du SNU – service national universel –, lorsqu'ils sont encore scolarisés ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.

Mme Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation. Vous l'avez rappelé, l’une des missions fondamentales de l’école de la République est de donner à chaque élève les mêmes chances de réussir. C’est pourquoi le Gouvernement a fait de la maîtrise des savoirs fondamentaux – lire, écrire et compter –, dès le plus jeune âge, une de ses priorités. Comme vous le rappelez, et je connais votre mobilisation sur le sujet, prévenir l'illettrisme et lutter contre ce phénomène est un enjeu fondamental qui requiert une attention de l’ensemble de la communauté éducative, et ce dès le plus jeune âge.

Les premiers effets des mesures déployées depuis 2019 pour répondre à cette exigence commencent à se faire sentir à l’entrée en sixième, comme le montrent les évaluations de la rentrée 2021. Mais nous devons poursuivre les efforts au collège et au lycée, en particulier pour les élèves qui n'ont pas bénéficié de la réforme. Pour cela, l’action du ministère est double : elle vise à renforcer le goût et la pratique de la lecture chez tous les élèves, et à faire progresser ceux qui rencontrent encore des difficultés d’apprentissage, notamment grâce à l’accompagnement personnalisé et au dispositif « Devoirs faits ». Le test de fluence, proposé dans le cadre des évaluations de sixième, est un indicateur important qui permet aux équipes d'identifier les élèves rencontrant des difficultés.

Un partenariat a été noué avec le ministère de la culture pour encourager l’implantation d’espaces consacrés spécifiquement à la lecture dans les écoles et dans les collèges. Les partenariats entre bibliothèques publiques, collèges et lycées sont désormais systématiques. L’opération « Lecture, grande cause nationale 2021-2022 » est également l’occasion de développer trois grandes actions : la généralisation du « quart d'heure lecture », la valorisation de la lecture à voix haute et la multiplication des rencontres avec des auteurs et des illustrateurs.

La pratique de la lecture à voix haute et le développement des compétences orales, notamment dans la perspective du grand oral prévu par la réforme du baccalauréat, font également l'objet d'une attention particulière. Le concours « Si on lisait à voix haute », destiné aux collégiens et aux lycéens et créé en partenariat avec Lumni et « La Grande Librairie », permet de valoriser ce type d'apprentissage.

Enfin, les référents académiques « illettrisme » encouragent la mutualisation des outils et des pratiques, sensibilisent les acteurs au phénomène, rendent plus lisibles les actions déjà engagées et encouragent l’ensemble de la communauté éducative à contribuer aux initiatives menées en faveur de la lecture.

Le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports est membre fondateur du GIP – groupement d'intérêt public – de l'ANLCI, l'Agence nationale de lutte contre l’illettrisme ; il a mis en œuvre une collaboration renforcée avec les membres de l’Agence. En 2022, il s’appuiera sur le plan d’activité et sur les nouvelles orientations stratégiques pour définir des actions prioritaires qui seront déclinées conjointement, dans le cadre d’une feuille de route partagée.

M. le président. La parole est à Mme Béatrice Piron.

Mme Béatrice Piron. Je vous remercie d'avoir rappelé toutes les mesures qui ont déjà été prises, et je reste évidemment au service de toutes les personnes qui souhaitent travailler à la lutte contre l'illettrisme. J'aurai plaisir à rencontrer les référents illettrisme dans les académies, pour essayer d'analyser la situation et pour voir quelles expérimentations pourraient être faites afin d'aider vraiment les jeunes concernés.

Données clés

Auteur : Mme Béatrice Piron

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement secondaire

Ministère interrogé : Éducation nationale, jeunesse et sports

Ministère répondant : Éducation nationale, jeunesse et sports

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 janvier 2022

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