Protection de la forêt méditerranéenne
Question de :
M. Pierre Dharréville
Bouches-du-Rhône (13e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine
M. Pierre Dharréville interroge M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur la protection de la forêt méditerranéenne.
Réponse en séance, et publiée le 6 juin 2018
PROTECTION DE LA FORÊT MÉDITERRANÉENNE
M. le président. La parole est à M. Pierre Dharréville, pour exposer sa question, n° 334, relative à la protection de la forêt méditerranéenne.
M. Pierre Dharréville. Madame la ministre, la saison estivale approche et je voudrais vous faire part de ma préoccupation concernant les risques d'incendie de forêt. En 2017, 3 000 feux ont dévasté 24 500 hectares de forêts partout en France. En raison de ses conditions climatiques et de sa végétation, la région méditerranéenne est particulièrement exposée à ce risque, et le réchauffement climatique n'arrange rien. 7 millions d'hectares de forêt sont concernés en France, dont 4,2 millions en région méditerranéenne.
Le bilan Prométhée a recensé 2 320 feux sur la zone méditerranéenne en 2017, dont 733 pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et 637 pour la Corse. La Haute-Corse, la Corse-du-Sud et les Bouches-du-Rhône détiennent les records des incendies, avec respectivement 319, 318 et 257 feux. Au total, 9 687 hectares de forêt ont été détruits en 2017 sur ces trois départements, sur les 19 693 hectares brûlés dans toute la zone méditerranéenne. Prométhée a déjà recensé, pour l'année 2018, 196 feux et 2 111 hectares brûlés dans la même zone.
Certes, la question se pose de savoir si la sécurité civile dispose de moyens suffisants pour faire face à ces risques élevés, mais la lutte contre les feux de forêt repose aussi sur la maîtrise des facteurs naturels : cela suppose la mobilisation de tous les acteurs publics concernés par la protection de nos forêts. C'est là l'objet de ma question.
Depuis 2000, l'ONF – Office national des forêts – a perdu un tiers de ses effectifs, et un nouveau projet de réorganisation vient aggraver la situation. Ce projet prévoit le changement de statut de l'établissement public, une nouvelle baisse des effectifs et la réorientation de ses missions selon les critères de rentabilité, au détriment de l'entretien et de la gestion durable des forêts. Il convient au contraire de renforcer l'ONF et de repenser la politique forestière au bénéfice de notre filière bois, qui est riche de multiples savoir-faire et créatrice d'emplois.
J'en profite pour vous signaler que Météo-France aussi est en proie à un rétrécissement.
J'appelle par ailleurs votre attention sur le pastoralisme, activité indispensable à nos massifs méditerranéens, qui est elle aussi menacée par les modes de calcul des aides de la PAC, qui ne tiennent pas compte des spécificités de nos territoires, où les parcours de pâturage se font dans des zones de résineux et d'épineux, qui sont peu ou pas mécanisables. Dans ces zones, il est particulièrement utile de soutenir les éleveurs et le travail préventif de leurs troupeaux.
Enfin, nous savons qu'il ne faut pas relâcher l'effort sur la prévention : de nombreux incendies, d'origine involontaire, sont le résultat de négligences. Il n'y a pas de fatalité, nous ne sommes pas condamnés à regarder brûler nos forêts avec les larmes aux yeux.
Madame la ministre, l'été est bientôt là et nos concitoyens s'inquiètent : comment l'État entend-il se hisser à la hauteur des enjeux ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des transports.
Mme Élisabeth Borne, ministre chargée des transports. Monsieur le député, votre question s'adresse à Stéphane Travert. Il me prie de vous transmettre ses excuses : étant retenu en Bulgarie pour une réunion du Conseil de l'Union européenne « Agriculture et pêche », qui a lieu à Sofia, il ne peut vous répondre lui-même.
Votre question porte sur la protection de la forêt méditerranéenne, dont les spécificités requièrent des réponses adaptées. Dans ce continuum végétal, caractérisé par de nombreuses interfaces entre la forêt et l'habitat, une urbanisation et des flux touristiques croissants, les risques d'incendie augmentent.
Pour la gestion et la protection de la forêt méditerranéenne, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation agit principalement selon deux axes : les plans régionaux forêt-bois et la défense des forêts contre l'incendie. Le programme national de la forêt et du bois engagé en 2016 doit être décliné dans chaque région d'ici 2019. À partir de l'analyse de la ressource forestière, de la structuration de la propriété forestière, les plans régionaux forêt-bois méditerranéens cibleront les différents enjeux de gestion, de biodiversité et les enjeux socio-économiques.
L'effort de prévention contre les incendies de forêt doit aussi être maintenu et la défense des forêts contre l'incendie, encouragée. Pour ce faire, le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a renforcé le rôle de la délégation à la protection de la forêt méditerranéenne – DPFM. Cette structure de mission, placée sous l'autorité du secrétaire général de la zone de défense et de sécurité Sud, est chargée, auprès du préfet de zone, de la protection de la forêt méditerranéenne.
La compétence territoriale de la DPFM s'étend sur les quinze départements de l'arc méditerranéen et met en œuvre la stratégie de l'État en matière de protection de la forêt méditerranéenne. Elle veille à son articulation avec la lutte contre les incendies et assure le partenariat avec les collectivités territoriales. Au-delà des aspects liés à la gouvernance, la DPFM, par sa vision zonale, permet de hiérarchiser les objectifs dans les zones géographiques les plus exposées et d'améliorer l'évaluation de la politique de défense des forêts contre l'incendie.
À l'approche de la saison estivale, il faut garder à l'esprit que la majorité des départs de feux sont d'origine humaine. Ces feux démarrent le plus souvent le long de voies de communication ou depuis des constructions. L'action publique de défense des forêts permet de limiter les risques d'incendie, mais la clé de la préservation de notre patrimoine forestier réside dans le comportement prudent et responsable de chaque citoyen.
M. le président. La parole est à M. Pierre Dharréville.
M. Pierre Dharréville. Madame la ministre, je vous remercie, mais M. le ministre de l'agriculture ne vous a pas transmis d'éléments de réponse concernant l'ONF, et je le regrette parce que c'est un point important.
Deuxièmement, concernant l'urbanisation et les flux touristiques croissants évoqués dans votre réponse, il ne faudrait pas qu'ils soient encore accrus par les dispositions du projet de loi ELAN visant à des aménagements de la loi littoral. Je suis intervenu en séance pour interpeller le Gouvernement sur ce sujet.
Enfin, je terminerai par une proposition : pourquoi ne pas organiser des États généraux de la forêt méditerranéenne, rassemblant tous les acteurs ? Cela permettrait de mobiliser toutes les forces disponibles.
Auteur : M. Pierre Dharréville
Type de question : Question orale
Rubrique : Bois et forêts
Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire
Ministère répondant : Transition écologique et solidaire
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 29 mai 2018