Question orale n° 496 :
Situation des jeunes réunionnais

15e Législature

Question de : M. Jean-Hugues Ratenon
Réunion (5e circonscription) - La France insoumise

M. Jean-Hugues Ratenon alerte M. le Premier ministre sur la situation des jeunes à La Réunion. Les jeunes réunionnais connaissent une situation extrêmement difficile et sont touchés de plein fouet par les inégalités qui séparent La Réunion de l'Hexagone. Ainsi, en 2013, seulement 36 % des 16-29 ans de La Réunion sont scolarisés, contre 42 % dans l'Hexagone. Un tiers des jeunes réunionnais quittent le système scolaire sans avoir obtenu de diplôme. Évidemment, ceux-là sont encore plus touchés par le chômage puisqu'ils sont plus de 80 % à chercher un emploi. De plus, seulement 43 % des jeunes réunionnais ont le bac, contre 63 % en province. Chaque année, 2 200 étudiants partent de La Réunion avec le bac pour aller vivre et étudier dans l'Hexagone. Ces étudiants sont alors souvent livrés à eux-mêmes : ils enchaînent les galères d'inscription, de logement et de vie, à 9 500 km de toute attache familiale. Et lorsqu'ils restent sur leur île natale ou qu'ils y reviennent, trouver un travail est plus compliqué pour les jeunes réunionnais que dans l'Hexagone. Ainsi, 30 % des jeunes diplômés réunionnais trouvent un emploi la première année qui suit leurs études alors qu'ils sont 62 % à trouver un travail dans le même délai dans une région hexagonale (hors Île-de-France). Cette situation n'a fait qu'empirer en 2018 : le chômage chez les jeunes a augmenté de 4 points. La jeunesse se désespère, elle ne croit plus en une classe politique installée depuis plusieurs dizaines d'années qui n'a jamais réussi à régler les problèmes qui pourrissent la société. La politique du Gouvernement n'a rien arrangé. En 2018, le territoire a vu disparaître 3 600 contrats aidés. L'instauration de la sélection à l'entrée de l'université, l'augmentation des frais d'inscription ou encore la dérégulation de l'apprentissage, vont continuer à amplifier les problèmes de l'île. Il lui demande quand le Gouvernement va mettre en place une politique économique réellement créatrice d'emplois et une vraie politique d'insertion des jeunes.

Réponse en séance, et publiée le 17 janvier 2019

SITUATION DES JEUNES RÉUNIONNAIS
M. le président. La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour exposer sa question, n°  496, relative à la situation des jeunes Réunionnais.

M. Jean-Hugues Ratenon. Bonne année 2019 à vous tous ici présents dans cet hémicycle !

Madame la ministre des outre-mer, nos jeunes Réunionnais connaissent une situation extrêmement difficile et sont touchés de plein fouet par les inégalités qui séparent La Réunion de l'Hexagone. Ainsi, en 2013, seuls 36 % des 16-29 ans étaient scolarisés à La Réunion, contre 42 % dans l'Hexagone. Un tiers de nos jeunes quittent le système scolaire sans avoir obtenu de diplôme. Aujourd'hui, la situation reste inchangée. Comment comptez-vous régler cela, madame la ministre ?

Autre préoccupation : chaque année, environ 2 200 étudiants quittent La Réunion avec le bac pour aller étudier dans l'Hexagone. Arrivés ici, ces étudiants sont souvent livrés à eux-mêmes : ils enchaînent les galères d'inscription, de logement et de vie à 9 500 kilomètres de toute attache familiale. Les parents sont totalement désemparés. Madame la ministre, êtes-vous prête à étudier l'instauration d'un guichet unique afin que chaque jeune et chaque parent soit accompagné de A à Z, quelle que soit la situation sociale de la famille ?

Qu'ils soient restés sur leur île natale ou qu'ils y reviennent, la recherche d'un travail est plus compliquée pour les jeunes Réunionnais que pour les jeunes vivant dans l'Hexagone. Ainsi, 30 % de nos jeunes diplômés trouvent un emploi dans l'année suivant la fin de leurs études, alors qu'ils sont 62 % – le double – à trouver un travail dans le même délai dans une région hexagonale. Cette situation n'a fait qu'empirer l'an dernier : en effet, le chômage des jeunes a augmenté de 4 points.

Madame la ministre, notre jeunesse se désespère. Elle ne croit plus en une classe politique qui n'a jamais réussi à régler les problèmes qui pourrissent notre société. Depuis que vous êtes ministre, rien n'a vraiment changé. L'an dernier, selon l'INSEE, notre territoire a vu disparaître 14 000 contrats aidés. Dites ce que vous voulez, pensez ce que vous voulez de ces emplois, mais sachez que chez nous, ils assurent une véritable mission de service public dans différents domaines et apportent à nos jeunes une première expérience professionnelle. L'instauration de la sélection à l'entrée de l'université, l'augmentation des frais d'inscription et la dérégulation de l'apprentissage vont continuer à amplifier les problèmes de notre île.

Madame la ministre, quand allez-vous mettre en place une réelle politique économique créatrice d'emplois et, plus globalement, une vraie politique d'insertion de nos jeunes ? S'il vous plaît, sur ces sujets, répondez-moi honnêtement et franchement, car les Réunionnaises et les Réunionnais ont le sentiment que vous leur avez menti lors de votre dernier passage dans notre île. Rien sur la transparence sur les emplois aidés !

M. le président. Mon cher collègue, si vous voulez que Mme la ministre vous apporte une réponse, il faut qu'elle dispose d'un petit peu de temps de parole.

M. Jean-Hugues Ratenon. Je termine, monsieur le président.

Je disais donc, madame la ministre, que vous avez fait un certain nombre d'annonces mais que nous avons le sentiment que vous nous avez menti. J'aurai l'occasion de revenir sur ces mensonges, mais les Réunionnaises et les Réunionnais veulent maintenant vous entendre parler de la jeunesse. Merci de votre réponse.

M. le président. La parole est à Mme la ministre des outre-mer.

Mme Annick Girardin, ministre des outre-mer. La jeunesse est notre priorité. Vous le savez, la lutte contre le décrochage scolaire et contre toutes les inégalités de destin est au cœur du projet du Président de la République. Si le Gouvernement a décidé de dédoubler certaines classes et si le ministre de l'éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, a mis en œuvre le dispositif « Devoirs faits », c'est justement pour apporter des réponses concrètes en la matière.

Mais l'école n'est pas tout. C'est pourquoi M. le secrétaire d'État Gabriel Attal a souhaité que le service civique soit accessible à tous les jeunes, notamment aux plus éloignés de la formation et de l'emploi. Cet accompagnement est une priorité. D'ailleurs, près de 2 750 places « garantie jeunes » seront offertes cette année à La Réunion.

En outre-mer, nous disposons aussi d'un outil puissant : le service militaire adapté, qui permet à près de 6 000 jeunes de suivre des formations professionnelles, avec un taux d'insertion exceptionnel, qui atteint 77 %.

Faisant de l'information un outil essentiel pour que chacun soit libre, nous avons aussi annoncé plusieurs mesures dans le cadre du Livre bleu. La ministre du travail, Muriel Pénicaud, s'est engagée à financer à hauteur de 253 millions d'euros, à La Réunion, le programme d'investissements dans les compétences.

Il faut certes former, mais il faut aussi que les entreprises embauchent – vous avez raison de le rappeler. Ma priorité est de mener et de gagner la bataille de l'emploi. La réforme que j'ai menée dans le but de parvenir à zéro charge pour une majorité de salariés devra porter ses fruits. À La Réunion, j'ai pris l'engagement d'instaurer un compteur d'emplois en face du soutien apporté aux entreprises. Nous allons investir dès cette année près de 1,9 milliard d'euros par an et il faut obtenir des résultats en termes d'emploi.

Je comprends et je connais les difficultés que rencontrent nos jeunes lorsqu'ils viennent s'installer en métropole. C'est la raison pour laquelle j'organise chaque année, dans la continuité de ce qui a été fait précédemment, le Forum des étudiants des outre-mer et c'est aussi pour cela que l'opérateur qu'est l'Agence de l'outre-mer pour la mobilité – LADOM – accompagne 1 000 jeunes réunionnais dans le cadre du passeport mobilité pour la formation professionnelle. Il nous faut, là aussi, retravailler pour que LADOM puisse faire plus aux côtés des collectivités territoriales, qui ont aussi leurs programmes.

Comme vous le savez, nous avons également signé la semaine dernière une convention avec EDF en vue de créer un vivier de futurs techniciens spécialisés qui reviendront dans leurs territoires. Monsieur le député, le premier contrat signé l'a été avec un Réunionnais.

Pour ce qui est des contrats aidés, je serai très claire : vous savez très bien que La Réunion est un territoire dynamique en la matière, avec 11 000 contrats aidés qui seront disponibles cette année, comme l'an dernier. J'avais du reste annoncé, à La Réunion, 1 000 nouveaux contrats. C'est aujourd'hui chose faite : en l'espace de quatre semaines, ces 1 000 emplois ont bien été attribués par l'intermédiaire de Pôle emploi, comme je l'avais également annoncé.

Vous m'interpellez enfin à propos du désenclavement.

M. le président. Madame la ministre, nous avons dépassé le temps alloué à cette question.

Mme Annick Girardin, ministre . Monsieur le député, je serai chez vous dans trois mois et je rendrai des comptes sur toutes mes annonces. Comme vous le savez, je travaille dans la transparence et dans la confiance.

Données clés

Auteur : M. Jean-Hugues Ratenon

Type de question : Question orale

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Premier ministre

Ministère répondant : Outre-mer

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 janvier 2019

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