Question orale n° 633 :
Logement social

15e Législature

Question de : Mme Elsa Faucillon
Hauts-de-Seine (1re circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

Mme Elsa Faucillon attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement, sur le logement social.

Réponse en séance, et publiée le 27 mars 2019

LOGEMENT SOCIAL
M. le président. La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour exposer sa question, n°  633, relative au logement social.

Mme Elsa Faucillon. La loi ELAN – portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique – ainsi que la réduction du loyer de solidarité, la RLS, constituent à mes yeux une remise en cause de la politique du logement social et menacent directement l'avenir financier des OPH, les offices publics de l'habitat.

La RLS, inscrite à l'article 126 de la foi de finances pour 2018, constitue en effet une menace catastrophique pour l'avenir de tous les bailleurs sociaux. Elle accompagne en outre la baisse de l'aide personnalisée au logement – l'APL – perçue par les locataires du parc social et a pour objet d'en effacer l'impact en diminuant d'autant leur loyer.

La RLS permet à l'État d'économiser 800 millions d'euros en 2018, 1,2 milliard d'euros en 2019 et 1,5 milliard d'euros à partir de 2020. Pour les OPH, la conséquence directe de cette décision est une baisse de 8 à 10 % de leur budget annuel. Par exemple, dans ma circonscription, cette mesure représente 5 millions d'euros en moins pour les opérations de réhabilitation et de construction de logements de l'OPH de Gennevilliers, alors que la ville compte 3 000 demandeurs de logements.

Cette mesure est fondée sur le mythe de la supposée richesse des organismes et sur le coût, jugé excessif par certains, du logement social pour le budget de l'État. Les bailleurs vont subir de plein fouet l'impact de la RLS.

Le dispositif s'ajoute à un ensemble de mesures conduisant à limiter les ressources des bailleurs, comme la fin de la contribution de l'État aux aides à la pierre, la hausse de la contribution des bailleurs à la Caisse de garantie du logement locatif social, le gel des loyers dans le parc social en 2018 et le relèvement, dont vous venez de parler, de 5,5 à 10 %, du taux de TVA applicable aux opérations immobilières dans le secteur du logement social.

Ces réformes sont inacceptables car elles organisent l'affaiblissement des organismes HLM et accélèrent la privatisation du logement social. Elles entraîneront une précarisation des plus démunis parmi les locataires et les demandeurs de logement, et signent la fin du modèle HLM français. Cela revient à renoncer à conserver un haut niveau de production de logements sociaux. Cette mesure va conduire à la mise en faillite des OPH.

Monsieur le ministre, dans la loi de finances pour 2020, comment allez-vous tirer les conclusions de son impact financier désastreux ?

M. le président. La parole est à M. le ministre chargé des collectivités territoriales.

M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. Madame Faucillon, je vous prie d'excuser à nouveau mon collègue Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement, qui a préparé les éléments de réponse que je vais vous communiquer. Cette réponse me permettra en outre de compléter les propos que j'ai tenus en réponse à M. Acquaviva.

Il est crucial, dans ce débat, de rappeler un chiffre : la France consacre près de 40 milliards d'euros au financement de la politique du logement, soit environ 2 % de sa richesse intérieure. C'est un niveau très important par rapport à nos voisins européens.

Nous avons mis en œuvre une mesure importante de rétablissement des comptes publics, en réduisant les aides au logement dans le parc social, à hauteur de 800 millions d'euros pour 2018 et 2019, tout en préservant le pouvoir d'achat de tous les locataires concernés, puisque cette baisse d'APL prévue, vous le savez, est compensée par une diminution de loyer. Le Gouvernement ne méconnaît néanmoins pas l'effort qu'il a ainsi demandé aux bailleurs sociaux. C'est pourquoi nous avons mis en place plusieurs mesures.

D'abord, comme je le rappelais tout à l'heure, un plan de 10 milliards d'euros apportés par la Caisse des Dépôts et consignations et une réforme du taux du livret A doivent les soutenir dans leurs investissements comme dans leurs réformes de productivité.

Ensuite, pour les bailleurs qui se trouveraient fragilisés malgré ces mesures d'accompagnement, nous avons prévu un dispositif de péréquation via la Caisse de garantie du logement locatif social.

Nous avons en outre impulsé un mouvement de consolidation du secteur, favorisant ainsi l'adossement des bailleurs aux acteurs les plus dynamiques et les plus solides. Il n'y aura donc pas d'organismes en faillite, madame la députée.

Enfin, comme je vous l'ai déjà indiqué, une concertation est actuellement menée sous l'autorité du Premier ministre avec les représentants des bailleurs sociaux. Les échanges entre le Gouvernement et le secteur HLM n'ont donc jamais cessé. La prochaine étape, l'objectif, d'ici à quinze jours – nous y arriverons – est d'aboutir à un pacte avec l'ensemble des fédérations de bailleurs sociaux. Celui-ci devra préserver les objectifs de réduction de dépenses publiques tout en fixant un haut niveau d'ambition en matière de rénovation et de production de logements sociaux.

M. le président. La parole est à Mme Elsa Faucillon.

Mme Elsa Faucillon. Je remercie M. Denormandie de vous avoir transmis cette réponse. Ceci dit, sans vous faire offense, j'éprouve, un petit regret : celui qu'il n'ait pas pu être présent, parce qu'il est vrai que des discussions sont en cours, notamment avec des bailleurs et des élus locaux, et ma question participe de cet échange.

Je souhaite répondre sur un seul point : encore heureux que vous viendrez au secours des bailleurs, comme d'ailleurs certains d'entre eux sont parfois venus au secours des banques après les grandes crises !

La question n'est pas simplement de savoir si les organismes HLM seront ou non en faillite demain, mais de savoir quelles seront les possibilités qui s'offriront à eux. Je pense notamment à celui de Gennevilliers, qui, grâce à l'efficacité de sa gestion, se montre capable, même si c'est au prix de nouvelles difficultés, de rénover des logements et d'offrir un habitat digne, tout en continuant à produire du logement social et du logement en accession sociale à la propriété. Dans les projections qu'il fait compte tenu des mesures annoncées, il disposera de moins de moyens pour remplir ses missions, alors même que Gennevilliers compte 3 000 demandes de logement et que la faiblesse au niveau national de la lutte contre la spéculation conduit à ce que le logement privé devienne inabordable.

Ce qui manque, ce sont des logements de qualité abordables. Or force est de constater que c'est le secteur HLM qui apporte une réponse en la matière. Il ne demandait justement que de pouvoir encore mieux répondre. Or les mesures prises depuis deux ans rendent plus improbable cette éventualité, alors que l'urgence reste de pouvoir construire des logements sociaux.

Données clés

Auteur : Mme Elsa Faucillon

Type de question : Question orale

Rubrique : Logement

Ministère interrogé : Ville et logement

Ministère répondant : Ville et logement

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 mars 2019

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