Question orale n° 683 :
Suppression du péage de Nice-Saint-Isidore

15e Législature

Question de : M. Éric Ciotti
Alpes-Maritimes (1re circonscription) - Les Républicains

M. Éric Ciotti attire l'attention de Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports, sur la suppression du péage de Nice-Saint-Isidore, placé sur l'autoroute A8 et géré par ESCOTA, filiale du groupe VINCI Autoroutes. La question de la suppression de la barrière de péage de Nice-Saint-Isidore est évoquée après chaque accident dramatique qui y survient. Ce péage se trouve mal placé et mal équipé. Les barrières sont situées après une pente en forte déclivité qui met à rude épreuve les freins des véhicules, notamment des poids lourds. Sans réelle voie d'urgence sur les derniers mètres et avec des délais de passage n'apportant pas les garanties de fluidité attendues sur un axe de trafic intense, la barrière de péage Nice-Saint-Isidore constitue un redoutable danger. Ses caractéristiques très accidentogènes ne sont plus à démontrer après une série noire de cinq accidents mortels en sept ans et de plusieurs dizaines d'accidents corporels. Au-delà de cet aspect prioritaire de sécurité, la légitimité même du péage de Nice-Saint-Isidore est injustifiée puisqu'il fait de Nice la seule grande métropole française où les usagers doivent acquitter 1,50 euro pour se rendre d'un quartier à un autre de la ville. Alors que Paris, Marseille, Lyon, Bordeaux, Lille, Toulouse, Strasbourg possèdent des autoroutes urbaines en libre accès, les usagers de la voie de contournement de la cinquième ville de France se voient imposer par ESCOTA une politique tarifaire qui va à l'encontre de la notion de service public, tout en pesant considérablement sur leur pouvoir d'achat. De surcroît, l'acception sociale des hausses des tarifs des péages est des plus limitées, compte tenu des capacités financières flagrantes dont disposent les concessionnaires autoroutiers et dont les excédents financiers ont été pointés à la fois par la Cour des comptes et par l'Autorité de la concurrence. Le Gouvernement dit prendre en considération la colère qu'expriment actuellement les Français qui voient leur pouvoir d'achat s'amoindrir d'année en année, mais aucune mesure n'a été engagée pour supprimer le péage injuste attaché au contournement de la cinquième ville de France. Il lui demande ce que le Gouvernement entend faire pour d'une part, assurer la sécurité des usagers de cet axe autoroutier et d'autre part, pour réparer cette injustice que subissent depuis de trop nombreuses années les habitants des Alpes-Maritimes.

Réponse en séance, et publiée le 3 avril 2019

PÉAGE DE NICE-SAINT-ISIDORE
M. le président. La parole est à M. Éric Ciotti, pour exposer sa question, n°  683, relative au péage de Nice-Saint-Isidore.

M. Éric Ciotti. Je voudrais attirer votre attention sur l'injustice et le danger auxquels sont confrontés les Niçois, les Azuréens et les usagers de l'autoroute A8, dans le département des Alpes-Maritimes, notamment ceux qui fréquentent tous les jours la section de contournement autoroutière de Nice.

Injustice, d'abord, madame la ministre, car Nice est la seule métropole de France à avoir un contournement autoroutier payant. Pour aller d'un quartier à un autre de Nice par l'autoroute, il faut payer 1,5 euro. C'est une situation certes ancienne, mais inacceptable et totalement injuste.

Je souhaite également vous alerter sur le danger que représente le péage autoroutier de Nice-Saint-Isidore. Au cours des dernières années, ce péage a malheureusement été le théâtre d'accidents dramatiques, d'une véritable série noire, comprenant plusieurs accidents mortels, qui a causé des drames irrémédiables. Cette barrière de péage est en effet située au bas d'une très longue descente à la déclivité importante. Des poids lourds s'y sont ainsi retrouvés encastrés après la rupture de leurs freins, heurtant au passage les automobilistes à l'arrêt.

Il existe donc aujourd'hui une double urgence à supprimer ce péage : d'une part pour réparer l'injustice tarifaire et sociale que représente ce prélèvement minorant le pouvoir d'achat des automobilistes ; d'autre part pour assurer la sécurité des automobilistes fréquentant cette section autoroutière.

Madame la ministre, quelles mesures entendez-vous prendre pour imposer au concessionnaire, Escota, la suppression de la barrière de péage de Nice-Saint-Isidore ? Une telle suppression garantirait une meilleure sécurité et préserverait la liberté de circulation des automobilistes azuréens et niçois, qui acquittent depuis de trop longues années ce qui s'apparente à un impôt supplémentaire.

M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des transports.

Mme Élisabeth Borne, ministre chargée des transports. Monsieur le député, vous appelez mon attention sur la dangerosité de la barrière de pleine voie de Nice-Saint-Isidore. À la suite du dramatique accident du 29 octobre 2015, le bureau d'enquêtes sur les accidents de transport terrestre a effectué une analyse d'ensemble. Il a conclu que le drame avait été provoqué par un problème mécanique affectant le véhicule et par une succession de choix inappropriés de la part du conducteur. Le bureau d'enquêtes a par ailleurs préconisé la mise en place de mesures techniques dans la descente en amont de la gare de péage. La société Escota a déjà engagé les études pour appliquer ces conclusions et renforcer ainsi la sécurité des usagers.

S'agissant de l'existence même du péage, l'autoroute A8 étant la seule voie de contournement rapide de la ville de Nice, il est prévu par le contrat de concession entre l'État et Escota. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le souligner à plusieurs reprises, toute modification ne peut être obtenue qu'en indemnisant la société du manque à gagner correspondant aux recettes non perçues jusqu'à la fin de la concession. Les surcoûts d'exploitation et d'entretien de l'infrastructure liés au trafic induit par la mise en gratuité devraient aussi être couverts. Les montants en jeu peuvent représenter plusieurs dizaines de millions d'euros, la fin de la concession étant fixée à février 2032.

J'ajoute que, juridiquement, toute modification doit être approuvée par décret en Conseil d'État, après avis de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières, l'ARAFER. Les décisions récentes, tant du Conseil d'État que de l'ARAFER, indiquent qu'il ne serait pas envisageable de mettre cette indemnisation à la charge des autres usagers de l'autoroute par des hausses tarifaires ou via l'allongement de la durée de la concession.

Cependant des mesures sont prises sous l'impulsion du Gouvernement. Le montant du péage de Saint-Isidore n'a pas évolué depuis 2011 et son tarif kilométrique est inférieur au reste du réseau Escota. Une formule préférentielle, négociée par le Gouvernement en janvier dernier, permet de bénéficier d'une réduction de 30 % au-delà de dix allers et retours mensuels. Enfin, je rappelle que le contrat prévoit la gratuité pour les trafics internes entre les diffuseurs de Saint-Laurent-du Var et de Nice-Saint-Augustin, ainsi qu'entre ceux de Nice-nord et de Nice-est.

M. le président. La parole est à M. Éric Ciotti.

M. Éric Ciotti. Madame la ministre, votre réponse me déçoit parce qu'elle traduit le manque de volontarisme dont l'État continue à faire preuve. Quant aux conclusions du bureau d'enquêtes, qui renvoie la responsabilité de l'accident à un problème technique affectant le camion et excluent toute modification physique de la barrière de péage, elles me laissent tout à fait sceptique. La barrière est pourtant située dans une zone extrêmement dangereuse. Il y a d'ailleurs eu plusieurs dizaines d'accidents, dont la gravité s'explique par le fait que l'installation se situe en bas d'une grande descente.

Pour le reste, il faut que l'État prenne enfin ses responsabilités à l'égard d'un département et d'une ville qui sont les seuls à subir une telle situation. L'État peut assurer la compensation dans l'attente de la fin de la concession ou engager une modification du contrat de concession : c'est cela, le volontarisme ! C'est celui auquel je vous invite.

Données clés

Auteur : M. Éric Ciotti

Type de question : Question orale

Rubrique : Transports routiers

Ministère interrogé : Transports

Ministère répondant : Transports

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mars 2019

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