Effondrement des habitations à Oye-Plage
Question de :
M. Pierre-Henri Dumont
Pas-de-Calais (7e circonscription) - Les Républicains
M. Pierre-Henri Dumont attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement, sur la situation de la commune de Oye-Plage, dans la 7ème circonscription du Pas-de-Calais et dont les habitations semblent directement impactées par la carrière de sable implantée sur la commune depuis 1989. En effet, des dommages importants au sein d'habitations situées à 500 mètres de la carrière de sable ont été constatés dès 1995 : fissures sur les murs, les sols ainsi qu'un effondrement dans les jardins. Ces dommages semblent être causés par un effondrement du sous-sol qui serait constitué par du sable pissard. Cependant, malgré de nombreuses sollicitations des citoyens auprès de leur commune ainsi qu'auprès des services de l'État, aucune réponse ne leur a été apportée. Par ailleurs, plusieurs tentatives de mise en cause de la sablière ont été avortées, faute de preuves et d'études couteuses à la charge des seuls propriétaires. M. le député, conscient du risque patent de mise en danger de la vie d'autrui, s'est saisi du problème à bras le corps en se rendant sur place. Il a proposé d'une part aux citoyens de la commune de se constituer en association afin de répertorier tous les logements endommagés. Il a d'autre part provoqué une réunion avec la sous-préfecture en 2017 et avec les élus locaux mais aucune suite n'a été donnée à ce jour par services de l'État. Aujourd'hui, M. le député souhaite que les services de l'État prennent toute la mesure de ce dossier et du désespoir engendré par cette situation pour les habitants concernés. Il demande à l'État de déployer l'ensemble des moyens nécessaires et de nature à déterminer l'existence ou non de veines sableuses causant l'effondrement et les fissures au sein des habitations de la commune d'Oye Plage. Il demande également à ce que des réponses adéquates soient apportées pour rassurer les habitants qui vivent dans la peur et mettre ainsi fin à cette mise en danger manifeste de la vie d'autrui. Enfin, il est important de trouver une solution quant à la perte de capital immobilier pour les habitants qui constatent la baisse de la valeur vénale de leur maison, laquelle représente les fruits du travail de toute une vie. Il souhaiterait donc connaître ses intentions sur ces questions.
Réponse en séance, et publiée le 29 mai 2019
EFFONDREMENT D'HABITATIONS À OYE-PLAGE
M. le président. La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour exposer sa question, n° 745, relative à l'effondrement d'habitations à Oye-Plage.
M. Pierre-Henri Dumont. Dans la commune de Oye-Plage, à la frontière du littoral entre le Nord et le Pas-de-Calais, des centaines de maisons se fissurent et personne ne sait pourquoi. Le maire de la commune vous a écrit, comme il avait écrit à vos prédécesseurs, sur ce sujet. Je vous ai moi-même écrit, comme j'avais écrit à vos prédécesseurs. Pourtant, aucune réponse concrète ne nous est parvenue et les Ansériens vivent dans l'angoisse et la crainte de voir leur maison s'effondrer. Ce sont les habitations de 120 ménages, réparties dans un rayon de 3 kilomètres, qui sont concernées par ces fissures ; 120 couples qui ont travaillé toute leur vie pour s'acheter une maison et qui voient leurs économies s'évaporer à mesure que les fissures lacérant leurs murs s'agrandissent, rendant leur bien invendable, inhabitable.
Ces habitants, réunis en association, ne peuvent plus attendre que l'État, muet, se défausse, une fois de plus. Par trois fois, l'état de catastrophe naturelle demandé n'a pas été accordé. Aujourd'hui, ils veulent des réponses concrètes à leur malheur, malheur qui détruit leur moral, leur santé, leur vie et pas simplement leurs habitations.
Les acteurs locaux pointent du doigt l'exploitation d'une gravière de sable à proximité immédiate de la zone touchée. Depuis 1989, ce sont 2 millions de mètres cubes qui en ont été extraits. Beaucoup pensent que cette gravière est alimentée par des veines de sable pissard, sable qui a la particularité de toujours revenir au même niveau lorsqu'on l'extrait. Cette gravière serait donc alimentée, au fur et à mesure de son extraction, par du sable des alentours, par exemple du sable qui proviendrait de sous les fondations des maisons fissurées, fondations qui reposeraient donc, dorénavant, sur du vide. Les victimes ansériennes veulent savoir pourquoi leur maison se fissure, et l'hypothèse de l'impact de la gravière sur cette catastrophe ne peut être validée que par une étude du Bureau de recherches géologiques et minières – BRGM.
J'ai deux questions : allez-vous accorder au BRGM les fonds nécessaires pour lancer une étude à Oye-Plage afin de comprendre cette situation de péril et ainsi infirmer ou confirmer l'hypothèse de la responsabilité de la gravière ? Que proposez-vous aux propriétaires des biens atteints par ces fissures pour compenser leur perte financière ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire.
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire. Vous avez appelé l'attention du Gouvernement sur la situation de certains logements dans la commune de Oye-Plage, dans le Pas-de-Calais, situés à proximité d'une exploitation de carrière de sable, qui ont subi des dommages importants.
Vous m'interrogez sur les possibles liens de causalité entre cette carrière et les dommages. Je tiens à préciser que ce dossier est connu de longue date des services de l'État dans le Pas-de-Calais. Ces derniers ont réuni, à de très nombreuses reprises, les différents protagonistes pour tenter de trouver l'origine des troubles, rechercher une solution particulière pour certains citoyens en grande difficulté, mettre en œuvre des outils de surveillance de l'évolution des dommages ou accompagner les acteurs locaux dans le montage de dossiers de reconnaissance de catastrophe naturelle.
Au début du mois d'avril 2019, le sous-préfet a réuni ses services pour identifier la faisabilité d'une nouvelle étude complète qui intégrerait une étude des sols au droit des maisons les plus impactées, analyserait les caractéristiques géotechniques des sables, et approfondirait les recherches d'une éventuelle causalité entre l'activité de la carrière et les dommages. Un échange a ensuite eu lieu, la semaine dernière, entre les services de l'État et les collectivités, mairie et communauté de communes. Les différentes études et expertises, qu'elles aient été commanditées par l'État ou dans le cadre des procédures judiciaires engagées, n'ont pas permis, à ce stade, d'établir de lien de causalité entre l'exploitation de la carrière et les dommages causés aux maisons.
Ainsi, l'origine identifiée des dommages pendant les premières années pourrait être naturelle en raison de l'évolution de la nappe phréatique et du défaut de structure de certaines habitations. En revanche, s'agissant des dégâts ayant débuté à partir des années 2000, l'origine de la modification de l'état géologique du sous-sol n'a pu être établie à l'heure où je vous parle, et les incertitudes restent importantes.
L'autorisation d'exploitation de la carrière arrive à échéance en mai 2020, et les six derniers mois seront consacrés à sa remise en état. Le sous-préfet de Calais a rappelé ses obligations à l'exploitant, au mois de décembre dernier, ainsi que les échéances prévues. Par ailleurs, la dernière inspection, réalisée au mois d'octobre 2018, par l'inspection des installations classées de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement – DREAL – Hauts-de-France n'avait pas mis en évidence de non-conformité.
Dans le cas où elle déterminerait l'origine des troubles causés aux habitations, la nouvelle étude permettrait de résoudre le problème de la perte de capital immobilier des propriétaires des maisons endommagées. En effet, soit l'origine anthropique est identifiée, et la responsabilité de l'exploitant sera alors engagée, soit l'origine naturelle est identifiée, et il conviendra, dans ce cas, de reconduire une demande de reconnaissance de catastrophe naturelle. Comme vous le constatez, les services de l'État se sont fortement mobilisés pour trouver une solution, et ils le sont toujours.
La parole est à M. Pierre-Henri Dumont.
M. Pierre-Henri Dumont. Qu'on soit bien d'accord sur le problème : des maisons construites depuis près d'un siècle, qui n'ont jamais bougé avant l'exploitation de la gravière, ont commencé à se fissurer dès le début de son exploitation. D'où mes deux questions essentielles. Le BRGM sera-t-il mandaté pour effectuer les études et, si oui, à quelle échéance ? Que les dégâts aient été causés par la gravière ou par des phénomènes plus naturels, les habitants se verront-ils tous proposer une solution, que ce soit le rachat de leur bien ou leur relogement ? À ces deux questions, qui me paraissent légitimes, je n'ai pas encore de réponse, et que dire des habitants qui les attendent depuis de très nombreuses années et vivent dans l'angoisse de ne pas savoir de quoi leur avenir sera fait.
Auteur : M. Pierre-Henri Dumont
Type de question : Question orale
Rubrique : Aménagement du territoire
Ministère interrogé : Ville et logement
Ministère répondant : Ville et logement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 mai 2019