Efforts des communes pour l'application de la loi SRU
Question de :
M. Éric Diard
Bouches-du-Rhône (12e circonscription) - Les Républicains
M. Éric Diard interroge M. le ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé des collectivités territoriales, sur les modalités d'application de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbain (SRU). En effet, si cette loi prévoit des prélèvements sur ressources fiscales des communes ne respectant pas les seuils de mixité sociale, elle permet de diminuer, voire de supprimer, l'effet de ces prélèvements par la prise en compte des dépenses engagées par les communes en faveur du logement locatif social. Pour autant, M. le député attire l'attention de M. le ministre sur le cas des communes qui ont pris des engagements, notamment en signant un contrat de mixité sociale ou en modifiant leur plan local d'urbanisme (PLU) afin d'accroître leur nombre de logements, notamment sociaux. À compter de la modification du PLU, il faut attendre souvent plusieurs années avant que les terrains ne fassent place à des logements sociaux, afin que la ville puisse respecter la loi. De plus, les communes doivent de plus en plus faire face à des injonctions contradictoires de l'État, entre construire pour avoir plus de logements sociaux, tout en étant contraintes par les zones inondables, protégées ou agricoles. M. le député prend l'exemple d'une commune de sa circonscription, qui a signé un contrat de mixité sociale. En attendant d'être conforme à la législation, elle doit, pour ne pas à payer les pénalités de la loi SRU, adapter de nouveaux services publics en finançant ces efforts sur sa capacité d'autofinancement. Or les coûts de ces aménagements coûteraient à cette commune autant que les pénalités SRU. Dans un cas comme dans l'autre, les capacités d'autofinancement de cette commune tomberaient à zéro. Malheureusement, les communes qui font des efforts et signent des contrats de mixité sociale sont autant pénalisées que celles qui passent au travers de la loi, sans même signer de tels contrats. Il attire donc son attention sur les aménagements qu'il pourrait mettre en œuvre dans l'application de cette loi, notamment afin de mieux inciter financièrement les communes qui font des efforts importants en faveur de la mixité sociale qui pèsent sur leur capacité d'autofinancement.
Réponse en séance, et publiée le 27 novembre 2019
APPLICATION DE LA LOI SRU
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Diard, pour exposer sa question, n° 813, relative à l'application de la loi SRU.
M. Éric Diard. Je souhaite attirer l'attention du Gouvernement sur les modalités d'application de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbain, dite loi SRU.
En effet, si cette loi prévoit des prélèvements sur les ressources fiscales des communes ne respectant pas le taux minimal de logements sociaux, elle permet de diminuer, voire de supprimer, l'effet de ces prélèvements par la prise en compte des dépenses engagées par les communes en faveur du logement locatif social.
Cependant, certaines communes se sont engagées, par exemple en signant un contrat de mixité sociale ou en modifiant leur plan local d'urbanisme – PLU –, à accroître leur nombre de logements, notamment sociaux. À compter de la modification du PLU, il faut attendre souvent plusieurs années avant que les terrains ne fassent place à des logements sociaux, afin que la ville puisse respecter la loi.
En outre, les communes font de plus en plus face à des injonctions contradictoires de l'État : elles doivent construire davantage pour proposer plus de logements sociaux, tout en étant contraintes par les zones inondables, protégées ou agricoles. Gignac-la-Nerthe, commune de ma circonscription, a par exemple signé un contrat de mixité sociale. En attendant d'être en conformité avec la législation, elle doit, pour ne pas payer les pénalités de la loi SRU, créer des services publics adaptés, ces efforts étant financés par sa capacité d'autofinancement. Or ces aménagements coûtent à la commune autant que les pénalités SRU. Dans un cas comme dans l'autre, la capacité d'autofinancement de cette commune sera donc nulle.
Monsieur le ministre, quels aménagements à l'application de cette loi prévoyez-vous afin de mieux inciter financièrement les communes qui font des efforts importants en faveur du logement social ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre chargé des collectivités territoriales.
M. Sébastien Lecornu, ministre chargé des collectivités territoriales. M. Julien Denormandie, ministre chargé de la ville et du logement, vous prie de l'excuser de son absence. Il m'a chargé de vous faire part de sa réponse.
Vous appelez l'attention du Gouvernement sur les difficultés d’application de l’article 55 de la loi dite SRU, en particulier dans les communes engagées dans la production de logements sociaux via la signature d’un contrat de mixité sociale. Ces communes, selon vous, seraient autant pénalisées que celles qui n'ont fait aucun effort en faveur du logement social.
Qu'en est-il réellement ? Tout d'abord, je vous rappelle que les contrats de mixité sociale définissent un cadre opérationnel d’actions – identification de fonciers disponibles, révision du PLU, entre autres – permettant aux communes de s’engager dans une démarche volontaire pour remplir leurs obligations légales.
L’atteinte des objectifs triennaux de rattrapage, favorisée par la mise en œuvre des actions de ces contrats, permet d’éviter l’application de sanctions, notamment financières. Aussi une différenciation est-elle opérée entre les communes engagées dans une démarche volontariste de rattrapage de leur retard et les communes les plus récalcitrantes.
Ensuite, le dispositif en vigueur, qui permet de déduire les dépenses exposées par les communes en vue de produire du logement social du prélèvement SRU, est bien équilibré et incitatif à l’égard des communes. Ainsi, à l’échelle nationale, près de 130 millions d'euros de dépenses ont été déduites des prélèvements bruts de 2019, annulant le prélèvement pour 30 % des 1 062 communes soumises à un rattrapage.
Le législateur a en outre veillé à ce que les prélèvements SRU opérés au nom de la solidarité ne soient pas de nature à bouleverser l’équilibre des finances locales, et les a ainsi plafonnés à 5 % des dépenses de fonctionnement communales pour les communes déficitaires, et à 7,5 % pour les communes carencées.
Enfin, en ce qu'elle entend à la fois préserver les espaces protégés ou agricoles et poursuivre les objectifs de mixité sociale de la loi SRU, la politique du Gouvernement n’est en rien contradictoire. Développement de l’offre sociale ne signifie pas forcément construction neuve, consommation d’espace et développement de l’espace urbanisé. En effet, dans les communes où le foncier est rare, les objectifs de rattrapage peuvent tout aussi bien être satisfaits par l’acquisition-amélioration de logements existants ou anciens que par la mobilisation du parc privé à des fins sociales, notamment à travers le conventionnement avec l'ANAH, l'Agence nationale de l'habitat.
En conclusion, monsieur Diard, le Gouvernement n’envisage pas de modifier le dispositif SRU : il est équilibré et la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite ELAN, lui a apporté les ajustements nécessaires pour renforcer son efficacité et sa crédibilité sur l’ensemble du territoire. Le Gouvernement réaffirme son souhait de voir les communes concernées s’engager fermement dans la mise en œuvre de la loi SRU en amplifiant leurs efforts en faveur du développement d’une offre de logements abordables.
Mme la présidente. La parole est à M. Éric Diard.
M. Éric Diard. Merci de cette réponse, monsieur le ministre.
Je trouve la loi SRU particulièrement injuste. La commune de Sausset-les-Pins, dont j'ai été maire pendant dix-sept ans, a été littéralement étranglée par cette loi, subissant même des menaces de reprise en main du PLU. Elle construisait pourtant des logements sociaux, mais pas assez vite.
Je comprends très bien l'objectif de 25 % de logements sociaux mais, pour éviter toute injustice, il devrait s'entendre à partir de la date d'entrée en vigueur de la loi : remonter à l'Antéchrist, c'est-à-dire à la date de création de la commune, le rend totalement inapplicable pour les plus petites communes.
Auteur : M. Éric Diard
Type de question : Question orale
Rubrique : Communes
Ministère interrogé : Collectivités territoriales
Ministère répondant : Ville et logement
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 19 novembre 2019