Publicité sur l'alcool à La Réunion
Question de :
M. Jean-Hugues Ratenon
Réunion (5e circonscription) - La France insoumise
M. Jean-Hugues Ratenon attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la publicité faite pour les boissons alcoolisées. Durant la période des fêtes, le nombre de publicités pour l'alcool a augmenté en nombre et en surface d'affichage. Á La Réunion, ce fait a été tel que la presse s'est saisie du sujet. En 2018, les alcooliers ont dépensé à La Réunion entre 7 et 10 millions d'euros pour faire la publicité pour leurs boissons. En parallèle, ce ne sont que 200 000 à 300 000 euros qui ont été dépensés dans la prévention sur les dangers de l'alcool. C'est une disproportion inquiétante qui entraîne une surconsommation notamment d'alcools forts dans le territoire. Chaque année, ce sont environ 250 Réunionnais qui meurent par la faute de l'alcool. Et les jeunes sont particulièrement victimes de comportements à risques vis-à-vis de cette consommation addictive. Par ailleurs, on constate aujourd'hui qu'un certain nombre d'affichages publicitaires en faveur de l'alcool ne respecte pas l'interdiction d'affichage à moins de 200 mètres des établissements scolaires. M. le député a déposé en juillet 2019 une proposition de loi pour l'interdiction pure et simple de toute publicité sur l'alcool. Mme la ministre connaît aussi bien que lui les ravages de ces boissons et l'impact important qu'elles ont sur la santé publique. Il lui demande comment elle va enfin faire respecter la loi qui interdit l'affichage publicitaire pour l'alcool aux abords des établissements scolaires et quand elle va agir pour protéger réellement la santé des Français, et particulièrement celle des jeunes, plutôt que de céder aux lobbies de l'alcool.
Réponse en séance, et publiée le 29 janvier 2020
PUBLICITÉ SUR L'ALCOOL À LA RÉUNION
M. le président. La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon, pour exposer sa question, n° 889, relative à la publicité sur l'alcool à La Réunion.
M. Jean-Hugues Ratenon. Madame la secrétaire d'État, ma question s'adresse à Mme la ministre des solidarités et de la santé. Comme vous le savez, la consommation d'alcool en France constitue un véritable problème. Deuxième cause de mortalité après le tabac, elle est responsable de plus de 49 000 décès par an en France, plus de 130 morts par jour, soit un décès toutes les dix minutes environ. L'île de La Réunion figure parmi les départements et régions de France où l'alcool fait le plus de victimes, derrière les Hauts-de-France et la Bretagne.
Madame la secrétaire d'État, nous savons que la loi restreint la publicité sur l'alcool, laquelle a pourtant augmenté en nombre d'annonces et en surface d'affichage durant la période des fêtes. À La Réunion, ce fait a été tel que la presse s'est saisie du sujet. En 2018, les alcooliers y ont dépensé entre 7 et 10 millions d'euros pour promouvoir leurs boissons alors qu'en parallèle, seuls 200 à 300 000 euros ont été consacrés à la prévention sur les dangers de l'alcool.
Cette disproportion inquiétante entraîne une surconsommation, notamment d'alcool fort, dans notre territoire. Chaque année, l'alcool est responsable de la mort d'environ 250 Réunionnais. C'est une des premières causes des accidents de la route. En plus du taux de mortalité, l'alcool est aussi associé aux violences, aux viols, aux actes d'incivilité, à la destruction des foyers, et j'en passe. Nos jeunes sont particulièrement sujets à des comportements à risques liés à cette consommation addictive.
Par ailleurs, nous constatons aujourd'hui que certains affichages publicitaires en faveur de l'alcool ne respectent pas l'interdiction de figurer à moins de 200 mètres des établissements scolaires. Cette publicité est perverse et dangereuse car elle favorise l'alcoolisme précoce. Nos marmailles sont en danger, il est urgent d'agir.
Madame la secrétaire d'État, j'ai déposé en juillet dernier une proposition de loi visant à interdire purement et simplement toute publicité sur l'alcool. Vous connaissez aussi bien que moi les ravages de ces boissons et leur impact important sur la santé publique. Ma proposition a été transmise à l'ensemble des députés, mais aucun des parlementaires de votre majorité En marche n'a souhaité la soutenir.
Dès lors, mes questions sont simples : êtes-vous prête, madame la secrétaire d'État, à étudier ma proposition de loi ? Allez-vous enfin faire respecter la loi qui interdit l'affichage publicitaire pour l'alcool aux abords des établissements scolaires ? Quand allez-vous enfin agir pour protéger réellement notre santé, et particulièrement celle des jeunes, plutôt que de céder aux lobbies de l'alcool ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.
Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. Je ne peux pas vous laisser dire que le ministère des solidarités et de la santé serait à la main des lobbies sur la question de l'alcool. La prévention des consommations à risque est au contraire l'une des priorités du Gouvernement, et plusieurs mesures fortes en direction des jeunes sont appliquées dans ce cadre.
Vis-à-vis des mineurs, ces plans prévoient notamment le renforcement de l'application des interdits protecteurs. Cela passe entre autres par l'amélioration de la formation des exploitants, mais aussi par un travail avec les professionnels de la distribution sur la réduction de l'accessibilité de l'alcool aux mineurs.
D'autres mesures sont prévues en faveur des jeunes : je pense en particulier au programme de déploiement des programmes de développement des compétences psychosociales, à l'amélioration de la prise en charge par les urgences des intoxications éthyliques aiguës ou encore au renforcement des consultations pour les jeunes consommateurs.
Grâce à la création, en 2019, du fonds de lutte contre les addictions liées aux substances psychoactives, un effort inédit a été consenti qui permet de financer des actions innovantes et structurantes pour améliorer la prévention des conduites addictives en mobilisant aussi bien les acteurs nationaux que régionaux. Dès 2018, les agences régionales de santé des territoires ultramarins consacraient près de 1,2 million d'euros à des actions de prévention des pratiques addictives. En 2019, ces crédits ont été considérablement augmentés grâce au fonds de lutte contre les addictions qui a permis de financer des appels à projets régionaux adaptés aux besoins des territoires. Un bilan en la matière est attendu pour le premier semestre de 2020.
Le lien entre l'exposition à la publicité et l'augmentation de la consommation d'alcool a été mis en avant par de nombreuses études. C'est pour cette raison que la publicité en faveur de l'alcool est spécifiquement encadrée et qu'elle est interdite dans la presse et sur les sites internet principalement dédiés à la jeunesse. En outre-mer, la loi prévoit des zones de protection exemptes de toute publicité d'alcool à proximité des écoles. Tout contrevenant s'expose à des sanctions administratives et pénales. Je vous invite, monsieur le député, à diffuser ces informations.
M. le président. La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon.
M. Jean-Hugues Ratenon. Madame la secrétaire d'État, nous devons agir très rapidement. Vous affirmez que la prévention est l'une de vos priorités, j'entends bien. Dans ce cas, je vous invite à étudier ma proposition de loi, car elle énonce clairement qu'il faut interdire la publicité pour les boissons alcoolisées si nous voulons véritablement protéger notre population, en particulier les plus jeunes d'entre nous.
Auteur : M. Jean-Hugues Ratenon
Type de question : Question orale
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Solidarités et santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 janvier 2020