Réunion de la section française mardi 28 mai 2024 à 17 heures

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APF 28.5.2024_DZielinski | Copyright : Assemblée nationale

Mme Amélia Lakrafi, députée, présidente déléguée de la section française, Mme Béatrice Bellamy, députée, M. Yannick Haury, député, Mmes Elsa Schalck, Catherine Belrhiti, Corinne Féret, Michelle Gréaume, sénatrices, ont échangé avec M. Daniel Zielinski, Délégué ministériel à la francophonie au ministère des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques-Haut fonctionnaire à la langue française pour le sport, lors d’une réunion de la section française de l’APF, mardi 28 mai 2024, à 17 heures, à l’Assemblée nationale.

Avant de donner la parole au délégué ministériel, Mme Amélia Lakrafi, présidente déléguée de la section française, a partagé plusieurs éléments d’information et questions.

La défense du français est un sujet majeur pour tous les parlementaires. C’est d’ailleurs dans ce cadre que l’Assemblée nationale a adopté, le 2 mai 2024, une résolution qui contient plusieurs recommandations sur l’usage du français aux Jeux olympiques et paralympiques de Paris. Les jeux olympiques et paralympiques organisés en France sont un événement dont la résonance sera mondiale. Au-delà de l’aspect sportif, il s’agit d’une opportunité sans pareille pour faire découvrir notre pays, notre culture, et notre langue.

Alors que son poste a été créé en septembre 2023 et que les Jeux olympiques et paralympiques débuteront au début de l’été prochain, les missions du délégué ministériel et leurs implications concrètes intéressent les parlementaires, de même que les moyens mis en œuvre pour résister à l’utilisation exclusive de l’anglais dans les médias et sur les réseaux sociaux notamment. Au niveau national, les préconisations concernant les termes et expressions proposés par la commission d’enrichissement de la langue française en vue de remplacer certaines expressions anglaises entrées dans notre vocabulaire et largement utilisées par les commentateurs sportifs méritent d’être partagées.

Par ailleurs, si la défense de l’usage du français pour les jeux organisés en France est importante, elle l’est aussi pour ceux de 2028 qui se tiendront à Los Angeles.

Enfin, le délégué ministériel pourrait faire part de son expérience alors qu’il était chef de la délégation française aux Jeux de la Francophonie, organisé en août 2023 à Kinshasa, par la République démocratique du Congo. L’organisation de cet événement avait suscité plusieurs polémiques, notamment en raison de tensions entre le Rwanda et la République démocratique du Congo, et des pays avaient refusé d’envoyer une délégation de sportifs.

M. Daniel Zielinski, délégué ministériel à la francophonie, a apporté les éléments d’information suivants.

S’agissant des Jeux de la Francophonie organisés à Kinshasa, le principal écueil est dû au fait que le Nouveau-Brunswick a renoncé à les organiser deux ans avant la date prévue et que seule la République démocratique du Congo, du fait de la volonté politique très forte du président Félix Tshisekedi, s’est proposée pour les accueillir, alors que ce pays n’avait jamais organisé un événement d’une telle ampleur : 3 600 personnes accueillies pendant 15 jours sur 24 sites différents. Il a fallu constituer une équipe pour cette organisation, mettre en œuvre le cahier des charges des Jeux et solliciter l’appui notamment de la France en matière de sécurité et de plan blanc. Il est à noter qu’en matière d’appui du secteur privé, une seule entreprise française s’est impliquée pour organiser les services de restauration alors que les entreprises turques, chinoises et indiennes étaient plus nombreuses.

Le deuxième écueil, lié au premier, est dû aux hésitations à participer de plusieurs pays en raison de l’absence d’expérience congolaise en la matière et des retards pris dans la réalisation des infrastructures nécessaires, comme les pistes d’athlétisme par exemple. Conséquence de ce découragement, les délégations sportives ont été plus réduites qu’à l’accoutumée.

Une autre difficulté est liée à l’absence de reconnaissance internationale, notamment par les fédérations internationales comme la FIFA. Il faudrait aussi former davantage d’arbitres et assurer un continuum des échanges culturels après la fin de chaque édition des Jeux.

Mais, en définitive, la grande force des Jeux de la Francophonie réside dans le mélange du sport et de la culture. L’OIF développe la francophonie sportive via l’organisation de ces jeux qui sont un moyen de sa stratégie dans un espace constitué de 320 millions de locuteurs, en augmentation de 22 millions en quatre ans et estimé à 650 millions en 2025 grâce à la démographie africaine.

Cet espace francophone, dont les membres partagent certaines valeurs, de nouveaux pays veulent y entrer ou, pour ceux qui sont déjà membres, changer pour un statut supérieur, ce qui montre une vraie dynamique, notamment économique. C’est le cas du Ghana et de la Gambie par exemple.

Depuis un an, dans la perspective des Jeux olympiques et paralympiques de Paris, toutes les forces, notamment ministérielles et médiatiques, sont réunies pour affirmer le français comme langue du sport et de l’olympisme. A cet effet, quatre groupes de travail ont été créés. Le premier porte sur l’influence économique sportive et regroupe un réseau de près de 200 personnes dans 35 pays et a permis la réalisation d’un guide linguistique pour les acteurs du sport. Le deuxième groupe traite des ressources pédagogiques pour appuyer le français par le sport, via la création d’une centaine d’outils dédiés. Le troisième groupe s’adresse aux collectivités territoriales pour lancer des partenariats sportifs au sein de la francophonie. Le quatrième groupe se consacre à la terminologie via des outils numériques et s’intéresse notamment aux nouvelles disciplines toutes issues du monde anglo-saxon. L’objectif est de trouver rapidement le vocabulaire français correspondant et de le communiquer aux journalistes. Un « lexicosport » a été créé de concert avec le comité d’organisation des Jeux olympiques pour créer un dialogueur (application chat bot) permettant de trouver les sites des JO tout en expliquant quels sont les termes correspondants en français. En outre, le comité a signé une convention avec l’OIF pour développer la francophonie, notamment en matière de signalétique, pour chaque olympiade.

Faisant référence aux travaux du collège de terminologie pour identifier les équivalents français du vocabulaire des quatre nouvelles disciplines des JO, Mme Michèle Gréaume, sénatrice, a demandé si ces nouveaux éléments de langage traduits en français ont été adoptés par les enseignants sportifs, d’une part, et, d’autre part, comment amplifier la promotion des Jeux de la Francophonie en France et notamment dans les territoires ruraux.

Mme Elsa Schalck, sénatrice, a insisté sur la nécessité de mieux communiquer pour faire connaître les Jeux de la Francophonie et mieux impliquer les jeunes, acteurs de la mobilité citoyenne, notamment dans la perspective des prochains jeux prévus à Erevan, en Arménie, en 2027. Elle a également indiqué que se développe dans les communes françaises la mise en place de parcours de bosses (pump tracks) pour répondre à une pratique très en vogue chez les jeunes. Les collectivités devraient être appelées à utiliser le terme français en la matière.

Mme Brigitte Bellamy, députée, a souligné l’intérêt réel à associer le sport et la culture, à raconter une histoire comme le font les Jeux de la Francophonie et à développer ainsi la pratique du sport. Il faut transmettre cet héritage et le faire connaître notamment auprès des jeunes et des associations des territoires et des collectivités.

M. Daniel Zielinski a répondu aux interrogations des parlementaires.

Les Jeux de la Francophonie à Kinshasa ayant été organisés à la suite de deux années de report, il s’est avéré difficile de communiquer sur un événement qui peinait à être concrétisé. En outre, il faut travailler avec les fédérations sportives en vue d’inscrire les Jeux de la Francophonie dans le calendrier international des événements sportifs. Pour permettre d’engager des actions de communication, il faudrait créer dans chaque pays un comité de pilotage trois ans avant la date des Jeux et, pour la France, communiquer à l’occasion du Sommet de Villers-Cotterêts par exemple.

Concernant la terminologie, les travaux ont été menés en concertation avec les autorités belges, suisses et québécoises pour adopter un langage francophone et non pas français. Malheureusement tous les journaux sportifs n’ont pas la même sensibilité à ces questions et la loi Toubon ne s’applique qu’à la sphère publique. Or les associations sportives relèvent de la loi de 1901. Rien ne peut être imposé à ces acteurs, on ne peut que les sensibiliser et émettre des préconisations comme accoler systématiquement le mot anglais et le mot francophone qui doit être le plus proche possible du mot anglais. Il est également important de travailler auprès des communautés pour ces nouvelles disciplines sportives dont on sait qu’elles sont pratiquées par des personnes qui consomment de manière identique (vêtements, alimentation…).

La communication des Jeux de la Francophonie passe essentiellement par la couverture médiatique de TV5 Monde, de RFI et de France 24, qui sont peu regardées en France. Leur impact devrait être amélioré. Il faudrait également imaginer des solutions d’avenir comme des retransmissions via les réseaux sociaux et d’autres moyens que la télévision.

Développer la participation des sportifs à ces jeux s’avère plus simple que pour la partie culturelle. Il suffit de s’adresser aux présidents des fédérations sportives qui composent assez facilement les délégations et peuvent les élargir. En matière culturelle c’est plus compliqué car il n’existe pas de fédération des sculpteurs, des conteurs, des danseurs, etc. Il faut contacter les conservatoires, les établissements scolaires, les associations culturelles, etc.

Parmi les préconisations en la matière figure l’organisation tous les deux ans de mini tournois de qualification dans chaque pays, avec l’appui des collectivités territoriales notamment. Il faut commencer dès maintenant en vue des Jeux de 2027 en Arménie et profiter des Jeux de Paris et du Sommet de Villers-Cotterêts. Parallèlement, il faut mettre en place la formation des cadres arméniens via l’université Senghor notamment.

S’agissant de l’utilisation de l’anglais, la loi Toubon s’applique aux collectivités locales et des outils peuvent leur être recommandés pour la respecter en matière sportive, même si certains vocables comme « skate park » sont entrées dans les mœurs et un retour en arrière s’avère difficile.

Des information complémentaires peuvent être obtenue en consultant le site du ministère à l’adresse suivante : https://www.sports.gouv.fr/developper-la-francophonie-sportive-et-valoriser-la-langue-francaise-dans-le-sport-2544.

Deux autres points figuraient à l’ordre du jour de la réunion.

Le premier point concernait une proposition de M. Jocelyn Dessigny, député, d’organiser prochainement un débat au sein de la section sur le thème de l’écriture inclusive. Les parlementaires ont unanimement rejeté cette proposition après avoir avancé plusieurs arguments. Il s’agit d’un sujet franco-français alors que la section constitue la délégation du parlement français à l’APF, assemblée parlementaire internationale où le français, langue commune, recouvre plusieurs réalités. Le français de France n’est pas le français parlé à Québec, à Kinshasa, à Bruxelles, ou ailleurs dans l’espace francophone. Par ailleurs, ce sujet relève de la commission des affaires culturelles et de l’éducation qui s’est prononcée sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à protéger la langue française des dérives de l’écriture dite inclusive. L’Académie française s’est également prononcée sur le sujet en 2021. Enfin, la question de l’écriture inclusive fait l’objet de deux circulaires, une circulaire du Premier ministre du 21 novembre 2017 qui définit l'écriture inclusive et l'interdit dans les actes administratifs publiés au Journal officiel et une circulaire du 5 mai 2021 qui proscrit le recours à l’écriture inclusive dans l’enseignement.

Le second point portait sur la prochaine promotion dans l’ordre de la Pléiade de l’APF. Les parlementaires se sont mis d’accord sur les candidatures suivantes présentées par la section française :

- pour le grade de chevalier, M. Carles Diaz, écrivain et poète franco-chilien d’expression française, Mme Juliette Fievet, journaliste et animatrice de radio et de télévision, présentatrice de Légendes urbaines sur Radio France Internationale et France 24, Mme Hoda Al-Helaissi, député saoudienne, professeure de français, M. Slimane Nebchi, dit Slimane, auteur-compositeur-interprète et acteur français, qui a terminé à la quatrième place du dernier concours de l’Eurovision, M. Hervé Diaz, universitaire, magistrat et président du groupe Ecole de commerce de Lyon, qui développe de nombreuses actions de coopération en Afrique,

-  pour le grade de commandeur, les anciennes secrétaires d’Etat à la Francophonie Mmes Annick Girardin et Chrysoula Zacharopoulou et M. Ali Bin Fetais Al Marri, procureur général du Qatar, président du lycée français Voltaire de Doha, à l’origine du cursus universitaire francophone avec l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

Pour finir, Mme Amélia Lakrafi a indiqué qu’elle demandera prochainement que soit créée, sur le site du Festival de la Francophonie 2024 (https://festivalfrancophonie2024.org/), une page dédiée aux actions organisées par les parlementaires de la section française, conformément à son souhait que soient organisés 150 événements dans les circonscriptions des 150 parlementaires de la section française.