Troisième séance du jeudi 24 octobre 2024
- Présidence de Mme Nadège Abomangoli
- 1. Projet de loi de finances pour 2025
- Première partie (suite)
- Rappels au règlement
- Mme Mathilde Panot
- M. Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics
- M. David Amiel
- Mme Stella Dupont
- M. Jean-Philippe Tanguy
- Mme Mathilde Panot
- Mme Danielle Simonnet
- M. Philippe Brun
- M. Erwan Balanant
- Mme Véronique Louwagie
- M. Éric Woerth
- M. Sébastien Chenu
- M. Nicolas Sansu
- M. Laurent Saint-Martin, ministre
- Après l’article 3 (suite)
- Amendements nos 2205, 3471
- Sous-amendement no 3692
- Suspension et reprise de la séance
- M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- Amendements nos 3477, 1569, 3078, 3389, 3556, 3561, 242, 1885, 35, 1886, 475, 3072, 1887, 1890, 476, 1254 et 2915
- M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- Suspension et reprise de la séance
- Rappels au règlement
- Première partie (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de Mme Nadège Abomangoli
vice-présidente
Mme la présidente
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
1. Projet de loi de finances pour 2025
Première partie (suite)
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2025 (nos 324, 468).
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant aux amendements identiques nos 2205 et 3471 portant article additionnel après l’article 3. Ils ont été défendus et un scrutin public a été annoncé sur ces amendements identiques, qui ont reçu un avis favorable de la commission, le Gouvernement s’en remettant à la sagesse de l’Assemblée.
Rappels au règlement
Mme la présidente
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour un rappel au règlement.
Mme Mathilde Panot
Il se fonde sur l’article 100, relatif à la bonne tenue de nos débats.
Nous sortons d’une conférence des présidents lors de laquelle il a été décidé que nos débats se poursuivraient samedi. Si nous n’y voyons pas d’inconvénient, il se trouve qu’il reste 2 500 amendements et qu’on nous a expliqué que la discussion reprendrait, ensuite, le 5 novembre. Donc soit le Gouvernement essaie de jouer la montre pour dépasser la limite de quarante jours, soit il essaiera d’aller au vote.
Or, comme il est soutenu par une minorité de députés, vous savez très bien, monsieur le ministre chargé du budget et des comptes publics, que la première partie du projet de loi de finances pour 2025 (PLF) sera rejetée. Ainsi, notre hémicycle n’aura aucune occasion de débattre des dépenses prévues, c’est-à-dire de la suppression de 4 000 postes de professeurs, des services publics locaux, de l’emploi ou de l’écologie. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Il est gravissime pour le débat démocratique que les députés ne puissent pas discuter un seul moment des dépenses, alors même que le Gouvernement a préparé le budget le plus austéritaire de la Ve République !
Je demande d’abord que les groupes du socle commun soutenant le gouvernement macroniste retirent leurs amendements, seul moyen de terminer nos débats samedi soir, puisque ces groupes sont à l’origine de 45 % des amendements du projet de loi – un record historique. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI-NFP.)
Ensuite, monsieur le ministre, laissez-moi vous dire droit dans les yeux qu’à un moment où à un autre, dans tous les cas, votre gouvernement tombera.
M. Maxime Laisney
Voilà !
Mme Mathilde Panot
En effet, que vous appliquiez ou non l’article 49.3, nous censurerons le Gouvernement en vertu de l’article 49.2.
Reste, je le répète, qu’il n’est pas acceptable que les dépenses ne fassent l’objet d’aucun débat démocratique. (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent pour applaudir.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre du budget et des comptes publics.
M. Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics
Je ne comprends pas très bien ce que vous attendez de moi.
Mme Mathilde Panot
Parlez au groupe parlementaire dont vous êtes issu !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Vous m’avez interpellé, permettez que je vous réponde directement. Le jour de ma prise de fonction, on m’a demandé quand le Gouvernement appliquerait l’article 49.3.
Mme Mathilde Panot
Mais oui !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Ce n’est pas franchement l’idée que je me fais de la démocratie et du respect du Parlement (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP),…
Mme Mathilde Panot
Avez-vous compté combien de députés siègent ce soir sur les bancs du socle commun ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
…ayant été moi-même député et rapporteur général du budget.
Mme Mathilde Panot
Votre idée de la démocratie n’est donc pas partagée par les députés de votre groupe !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je ne comprends pas bien ce que vous attendez de plus, de ma part et de celle du Gouvernement, que de respecter les débats du Parlement, à commencer par ceux de l’Assemblée nationale. Je le fais depuis le premier jour d’examen du PLF et je n’ai pas manqué une seule minute du débat dans l’hémicycle.
M. Aurélien Le Coq
Et le débat sur les dépenses ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je prends le soin de répondre de manière argumentée et brève, pour que les échanges puissent avancer, mais ce n’est certainement pas de mon fait si certains débats débordent.
Mme Mathilde Panot
Si, si !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je continuerai à agir ainsi, par respect pour le Parlement, aussi longtemps que possible.
Mme la présidente
La parole est à M. David Amiel, pour un rappel au règlement.
M. David Amiel
Il se fonde aussi sur l’article 100 de notre règlement.
Je rappelle à la présidente Panot que nous avons déposé moins d’amendements par député que le groupe La France insoumise et que les différents groupes qui composent le Nouveau Front populaire. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme Karen Erodi
C’est faux !
Plusieurs députés du groupe LFI-NFP
Menteur !
M. David Amiel
Je lui rappellerai également que nous avons décidé, cet après-midi, de retirer une centaine d’amendements. D’ailleurs, nous en avons discuté avec le président Coquerel plus tôt dans l’hémicycle. Ces échanges sont publics, trêve de faux procès.
Mme la présidente
La parole est à Mme Stella Dupont, également pour un rappel au règlement.
Mme Stella Dupont
Il se fonde sur l’article 100, relatif à la bonne tenue de nos débats. À mon tour, je m’inquiète de la lenteur de nos débats et de la faible fréquentation des différents bancs. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Non-inscrite aujourd’hui, je n’interviens pas plus en soutien qu’en opposition radicale au Gouvernement : j’essaie d’être constructive.
Mme Farida Amrani
Le « en même temps ».
Mme Stella Dupont
Je suis inquiète car le front républicain qui a prévalu lors des élections législatives n’est pas reflété par le Gouvernement aujourd’hui en responsabilité. Toutefois, on est responsable et on est au travail.
De plus, si la première partie du PLF pour 2025 venait à être rejetée, les dépenses ne seraient pas examinées par l’Assemblée.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Trouvez une majorité pour cela !
Mme Stella Dupont
Ainsi, après avoir été entachée une première fois, notre démocratie le serait une seconde fois et ce serait la négation totale de l’Assemblée nationale et du vote de nos concitoyens.
Nous avons donc l’importante responsabilité d’être présents, de travailler et d’aboutir à un budget aussi équilibré que possible, mais aussi, je l’espère, de voter ce projet de loi et d’être présents la semaine prochaine. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy, pour un rappel au règlement.
M. Jean-Philippe Tanguy
Il est également fondé sur l’article 100, relatif à la bonne tenue de nos débats et à la bonne information du Parlement.
Le Parlement n’a pas vocation à être le théâtre d’une mauvaise version de la série Baron noir. Ce qui m’inquiète, depuis le début de nos débats, c’est qu’à part le ministre, il n’y a pas de soutiens du Gouvernement dans l’hémicycle.
Plusieurs députés du groupe LFI-NFP
Si, vous ! (Plusieurs députés du groupe LFI-NFP désignent les députés du groupe RN.)
M. René Pilato
Vous êtes d’astreinte !
M. Jean-Philippe Tanguy
Ridicule, pas au niveau, aucun intérêt.
La réalité, c’est que des partis de gouvernement font obstruction au budget, le texte central de n’importe quelle république et de n’importe quelle démocratie. Le Parlement existe avant tout pour voter les impôts et pour voter les dépenses, de sorte que les groupes qui soutiennent le Gouvernement devraient prendre leurs responsabilités et être présents.
Mme Farida Amrani
Mais c’est vous, les soutiens du Gouvernement !
M. Jean-Philippe Tanguy
Ils ne devraient pas se livrer à l’obstruction, en déposant un nombre considérable d’amendements et en signifiant par là qu’ils ne sont pas d’accord avec le projet du Gouvernement.
En fait, nous sommes baladés par un pouvoir qui n’existe plus.
M. Emmanuel Taché de la Pagerie
Où est la Macronie ?
M. Jean-Philippe Tanguy
Nous sommes baladés par des personnes de mauvaise foi, qui font croire qu’ils veulent négocier mais ne négocient rien ; qui font croire qu’ils veulent parlementer mais ne parlementent sur rien ; qui exposent enfin notre pays à de graves difficultés.
M. Louis Boyard
Alors votez la censure !
M. Jean-Philippe Tanguy
En effet, on ne peut pas imposer à la France 20 à 40 milliards d’euros d’impôts supplémentaires sur un malentendu. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) On ne peut pas imposer à la France 10, 15, 20 milliards d’euros de dépenses en moins sur un malentendu. Enfin, on ne peut pas, après les élections que nous avons connues, user les institutions jusqu’à la corde, dans l’intérêt non de la France, mais d’une clique ! (Mêmes mouvements.)
M. Jean-François Coulomme
Censurez le Gouvernement alors !
M. Emeric Salmon
Peut-être, on verra bien !
Mme la présidente
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour un nouveau rappel au règlement.
Mme Mathilde Panot
Je m’appuie toujours sur l’article 100.
Nous, nous siégeons, contrairement aux soutiens du Gouvernement, qui ne sont pas là. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Aurélien Le Coq
Ils sont six ! (M. Aurélien Le Coq fait le geste de compter les députés)
M. Erwan Balanant
Merci madame Panot !
Mme Mathilde Panot
Nous sommes tout à fait d’accord pour siéger samedi mais je le redis : il ne s’est jamais vu, dans un débat budgétaire, que les députés qui soutiennent le Gouvernement signent 45 % des amendements déposés.
M. Maxime Laisney
Eh oui !
Mme Mathilde Panot
En commission, le président Éric Coquerel et le rapporteur général ont fait leur part du travail, puisque 1 800 amendements ont été retirés. Nous en avons nous-mêmes retiré, mais ça suffit : monsieur le ministre, vous avez certainement des liens avec les groupes politiques qui vous soutiennent…
M. René Pilato
Où sont leurs députés ?
Mme Mathilde Panot
…et vous devez au moins leur demander de retirer leurs amendements, afin que nous puissions achever l’examen de la première partie du PLF.
Monsieur Saint-Martin, vous êtes ministre du gouvernement qui imposera le budget le plus violent de l’histoire de la Ve République,…
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Ça, c’est vous qui le dites !
Mme Mathilde Panot
…mais nous ne discuterons pas, nous députés, une seule seconde, des coupes budgétaires énormissimes que vous voulez imposer au pays.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Mais non !
Mme Mathilde Panot
Vous êtes minoritaires, et quel spectacle lamentable que l’absence de vos soutiens et que le rôle d’assurance vie que joue à votre profit le groupe Rassemblement national ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Protestations sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour un rappel au règlement.
Mme Danielle Simonnet
C’est également un rappel au règlement au titre de l’article 100.
Ce qui se passe est très grave. Parce qu’ici, chacun, chacune, sait que vous créez les conditions de l’absence d’un véritable débat et de l’absence de vote.
Pour la troisième année consécutive, le budget de l’État pourrait ne pas avoir été voté par la représentation nationale. Elle est volée et la souveraineté populaire est piétinée !
La situation est très grave car parmi les 40 milliards d’euros de coupes, de saignées se trouvent 1 million d’euros de moins pour la rénovation thermique, 4 000 postes d’enseignants en moins, dont 3 000 dans le premier degré.
M. Jean-René Cazeneuve
Ce n’est pas un rappel au règlement !
Mme la présidente
Vous sortez du cadre du rappel au règlement !
Mme Danielle Simonnet
Non, car la représentation nationale doit pouvoir délibérer. (Protestations sur les bancs du groupe Rassemblement national.)
M. Emmanuel Taché de la Pagerie
Vous avez été élue grâce à Macron !
Mme la présidente
Laissez Mme Simonnet terminer.
Mme Danielle Simonnet
Les soutiens officiels du Gouvernement ont encore le temps de retirer leurs amendements, tout comme ses soutiens officieux – le Rassemblement national étant l’éternelle béquille de l’exécutif.
M. Emmanuel Taché de la Pagerie
Vous avez voté pour Macron !
Mme Danielle Simonnet
Les différents groupes du Nouveau Front populaire ont assumé le fait de retirer 25 % de leurs amendements, pour permettre au débat d’aller à son terme. En appliquant l’article 47, alinéa 2, de la Constitution, vous réalisez silencieusement les effets d’un article 49.3 : c’est inacceptable, c’est un piétinement de la démocratie ! (Mme Cyrielle Chatelain applaudit.)
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Mais arrêtez !
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Brun, pour un rappel au règlement.
M. Philippe Brun
Il se fonde sur l’article 100 de notre règlement, dont j’ai compris qu’il permettait à chaque groupe une prise de parole liminaire : il n’y a pas de raison que le groupe Socialistes et apparentés fasse exception.
Chers collègues, je relève au moins un point positif ce soir : nous voulons tous aller au bout de la discussion, c’est en tout cas ce que nous affirmons tous. Faisons-le ! Nous souhaitons que le Parlement légifère et vote le budget, faisons-le !
Jusqu’à preuve du contraire, c’est au Parlement qu’on vote le budget en démocratie et c’est à ses membres de consentir à l’impôt au nom de leurs concitoyens. Je vous propose donc de débuter sans plus tarder l’examen des amendements ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
M. David Amiel
Bravo !
Mme la présidente
J’ai reçu de la part de MM. Chenu et Woerth des demandes de rappels au règlement. En y faisant droit, j’aurais permis à leurs groupes de s’exprimer deux fois. Je vous proposerai donc d’en rester là.
M. Sébastien Chenu
Le rappel au règlement est de droit !
M. Emeric Salmon
Mme Panot a pu prendre deux fois la parole !
Mme la présidente
C’était une simple proposition. La parole est à M. Erwan Balanant, pour un rappel au règlement.
M. Erwan Balanant
Le groupe Les Démocrates avait déposé peu d’amendements car ses membres avaient envie du débat.
M. Emmanuel Taché de la Pagerie
Et où sont-ils ce soir ?
M. Jean-François Coulomme
Où sont les débatteurs ?
M. Erwan Balanant
Je serai bref : pendant que tout le monde glosait sur le règlement, nous aurions pu discuter au moins trois ou quatre amendements, peut-être même six. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et RN. – Brouhaha.) C’est un peu l’hôpital qui se fout de la charité. Madame Panot, vous avez offert une logorrhée d’amendements lors de l’examen des précédents PLF, pour faire de l’obstruction.
Mme Mathilde Panot
C’est faux !
M. Erwan Balanant
Vos leçons, vous pouvez donc vous les garder et, s’il vous plaît, arrêtons les rappels au règlement et commençons à travailler !
M. Inaki Echaniz
Libérez Balanant !
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour un rappel au règlement.
Mme Véronique Louwagie
Vous dites qu’il ne s’est jamais vu que 45 % des amendements émanent de la majorité. Mais il ne s’est jamais vu non plus qu’un gouvernement soit nommé à quelques semaines, à peine, du dépôt d’un projet de loi de finances. Les circonstances sont exceptionnelles, ne l’oublions pas.
Il est vrai que le groupe Droite républicaine a déposé beaucoup d’amendements (« Ah ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP), mais cela fait partie de notre culture…
Mme Dieynaba Diop, M. Inaki Echaniz et Mme Sabrina Sebaihi
Mais c’est votre budget !
Mme Véronique Louwagie
…et nous en avons déposé beaucoup moins que l’année dernière,…
M. Jean-Paul Lecoq
Le Premier ministre est issu de vos rangs !
Mme Véronique Louwagie
…aussi bien en commission qu’en séance. M. le président de la commission des finances pourrait l’attester.
M. Inaki Echaniz
Vous êtes deux ce soir ! Où sont les députés du groupe DR ?
Mme Véronique Louwagie
Le droit d’amendement est un droit individuel. En tant que députés, vous ne devriez pas le réduire car, ce faisant, vous réduisez aussi la démocratie. (Protestations sur les bancs des groupes LFI-NFP et SOC.)
M. Inaki Echaniz
Et c’est vous qui dites ça ?
Mme Véronique Louwagie
Le député n’est que le représentant des citoyens de son territoire, le représentant de la nation. Sachez en tout cas que le groupe Droite républicaine a demandé à ses membres de retirer certains de leurs amendements. (Mme Pascale Bay applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à M. Éric Woerth, pour un rappel au règlement.
M. Éric Woerth
Je m’appuie sur les mêmes articles que mes collègues. Cette discussion est assez étonnante et on voit bien que vous perdez un peu vos nerfs. (Exclamations prolongées sur les bancs des groupes LFI-NFP, GDR, EcoS et SOC.) D’un côté, la gauche reproche à la majorité – certes relative, mais tout de même majoritaire – de faire adopter des amendements ou d’obtenir des victoires grâce au groupe Rassemblement national…
Mme Dieynaba Diop et M. Inaki Echaniz
Regardez autour de vous ! Combien êtes-vous ? Il n’y a personne !
M. Éric Woerth
…et, d’un autre côté, M. Jean-Philippe Tanguy passe son temps, depuis quatre jours, à nous dire que nous faisons adopter des amendements grâce aux voix de la gauche. Il doit y avoir un équilibre là-dedans…
M. Emmanuel Taché de la Pagerie
Un peu de dignité, monsieur Woerth !
M. Maxime Laisney
En quoi est-ce un rappel au règlement ?
M. Éric Woerth
Tout ce que je sais, c’est que les conditions de fabrication de ce PLF imposaient de déposer beaucoup d’amendements. Le Gouvernement nous y a d’ailleurs incités… (« Ah ! » sur plusieurs bancs des groupes RN et LFI-NFP.)
M. Inaki Echaniz
Vous êtes au Gouvernement !
M. Maxime Laisney
Vous êtes complices !
M. Éric Woerth
…lorsqu’il a dit qu’il faudrait trouver 5 milliards d’euros d’économies au cours du débat parlementaire. C’est la première fois qu’une telle chose se produit et cela montre bien que le Gouvernement souhaite associer étroitement le Parlement à l’élaboration de ce budget de combat. Je vous invite donc à vous calmer.
Mme Mathilde Panot
Oh, ça va !
Mme Dieynaba Diop
Vous avez vidé les caisses !
M. Éric Woerth
En réalité, vous essayez de préparer la fin du débat, de jeter de la confusion dans la fin du débat. Nous, nous sommes là pour débattre et je propose que nous le fassions.
Mme Dieynaba Diop
Vos collègues ne sont pas là !
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Chenu, pour un rappel au règlement.
M. Sébastien Chenu
Il se fonde sur l’article 100.
Vous avez dit, monsieur Woerth – peut-être votre langue a-t-elle fourché –, que c’est le Gouvernement qui vous a incités à déposer autant d’amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Cette immixtion du Gouvernement dans les travaux du législateur est très intéressante.
Le bloc dit majoritaire – ou la minorité gouvernementale, pour être plus précis – a déposé 500 amendements, ce qui fait environ 30 amendements pour chacun des 18 députés du bloc central présents ce soir. Il est évident que cela crée un embouteillage et que cela a été fait à dessein.
Vous êtes 18 députés ce soir pour soutenir ce budget. Et s’il n’y avait pas les 60, 80 ou 100 députés des groupes RN et UDR ce soir, la France s’écroulerait sous les taxes de La France insoumise. (Applaudissements prolongés sur les bancs des groupes RN et UDR. – Exclamations et rires sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Exclamations sur les bancs des groupes SOC, EcoS et GDR.) La France ploierait sous les « taxmen » que sont les députés d’extrême gauche !
Mme Dieynaba Diop
Vous n’êtes pas dans l’opposition !
M. Inaki Echaniz
Vous êtes la béquille de la Macronie !
M. Sébastien Chenu
Par notre présence, nous sommes en train de sauver l’épargne, le travail et les efforts des Français, au moment où vous, vous fichez le camp pour déclencher un 49.3, parce que vous n’assumez même pas ce budget honteux. Heureusement que les députés du RN sont là ! (« Bravo ! » et vifs applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour un rappel au règlement.
M. Nicolas Sansu
Je le fais également sur le fondement de l’article 100.
J’arrive dix minutes en retard et c’est déjà le bazar, ce qui m’inquiète. (Sourires.) Ne soyons pas naïfs : chacun sait que la stratégie du bloc central est de faire en sorte que la première partie du PLF ne soit pas votée, pour que nous ne puissions pas examiner la deuxième,…
M. Erwan Balanant
Mais non !
M. Emmanuel Taché de la Pagerie
Bravo !
M. Nicolas Sansu
…pour que nous ne puissions pas parler des 4 000 postes d’enseignants supprimés (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR), des 3 milliards d’euros qui vont être retirés aux crédits de la mission Travail, des coupes qui sont faites dans le budget de la recherche.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Alors avançons !
M. Nicolas Sansu
Monsieur Chenu, je vous remercie pour votre aveu extraordinaire : vous venez de nous expliquer que vous étiez la béquille de la Macronie et de la droite. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS.) C’est formidable, mais allons jusqu’au bout, et que le bloc central assume.
Le groupe Droite républicaine a déposé des centaines d’amendements et, madame Louwagie, il n’est pas vrai que cela a toujours fait partie de votre culture quand vous étiez dans la majorité. Lorsque M. Sarkozy était président, vous déposiez très peu d’amendements, tout simplement parce que vous n’aviez pas le droit de le faire !
Mme Dieynaba Diop
Exactement !
M. Nicolas Sansu
Normalement, quand on est dans la majorité, on défend son gouvernement. Et si vous ne le faites pas, c’est parce que vous ne voulez pas que la première partie du PLF soit votée. C’est tout ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS.)
M. Erwan Balanant
Nous aurions déjà eu le temps d’examiner quarante amendements depuis le début de la séance !
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je crois que la meilleure chose à faire serait de reprendre nos débats sans tarder, car c’est tout ce qui compte. (M. David Amiel et Mme Véronique Louwagie applaudissent.)
J’aimerais toutefois dissiper une confusion. Je suis, par définition, à la disposition du Parlement et je serai avec vous pour débattre autant que nécessaire : je serai là samedi, et même au-delà, s’il le faut.
Mme Mathilde Panot
Ne faites pas semblant !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Cela ne me pose aucune difficulté.
Mme Mathilde Panot
Il y a une limite de quarante jours, vous le savez très bien, cela s’appelle la Constitution !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
La Constitution, précisément, mais aussi le respect du Parlement. Je serai là autant qu’il le faudra, pour que nous puissions examiner l’ensemble des amendements et qu’il y ait un vote. C’est mon souhait, en tant que membre du Gouvernement.
Le mauvais procès en pourrissement des débats que vous nous faites n’a aucun sens. Je souhaite que tous les amendements puissent être examinés, je serai là aussi longtemps qu’il le faudra, je le répète, mais croyez aussi que si cela peut se faire avant le week-end, j’en serai le premier ravi. Je souhaite que nous arrivions au terme de nos débats dès cette fin de semaine. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme Sabrina Sebaihi
Que font vos députés ?
Mme Dieynaba Diop
Où sont-ils ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Ne confondons pas les questions de calendrier – je souhaite, comme vous, que le débat reprenne le plus rapidement possible – avec l’issue du vote, qui est un autre sujet et qui ne dépend, de façon souveraine, que de l’Assemblée nationale. (M. David Amiel et Mme Véronique Louwagie applaudissent.)
Après l’article 3 (suite)
Mme la présidente
Nous en revenons aux amendements identiques nos 2205 et 3471.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, pour soutenir le sous-amendement no 3692, à l’amendement no 3471.
M. Jean-René Cazeneuve
Mme la vice-présidente Clémence Guetté, qui présidait la séance en fin d’après-midi, a fait preuve de beaucoup de souplesse, puisqu’elle a accepté de ne pas mettre aux voix ces amendements avant la levée de séance, afin que nous puissions y retravailler durant la pause.
Je retire l’amendement no 2205 et vous propose de sous-amender l’amendement no 3471 de M. David Amiel, en ciblant exclusivement les enfants et petits-enfants de conjoint – pour lesquels, je le rappelle, je propose d’introduire un abattement de 31 865 euros.
Puisque ce sous-amendement concerne beaucoup moins de personnes que l’amendement no 2205, je propose aussi d’abaisser de 49 à 47 % le seuil d’imposition de la tranche supplémentaire qu’il s’agirait de créer pour les successions supérieures à 3 611 354 euros. J’espère que ce sous-amendement, qui crée de nouveaux droits, sera voté à l’unanimité.
(L’amendement no 2205 est retiré.)
M. Philippe Brun et Mme Sandra Regol
Madame la présidente, nous n’avons pas reçu le sous-amendement !
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente
Je vais suspendre la séance, le temps de régler ce problème informatique.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt et une heures cinquante-cinq, est reprise à vingt-deux heures.)
Mme la présidente
La séance est reprise.
La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission sur le sous-amendement.
M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Ce sous-amendement exclut du dispositif les neveux, nièces, frères et sœurs et se concentre exclusivement sur les enfants et petits-enfants de conjoint, afin de répondre aux évolutions de la société. Il baisse en outre de 49 à 47 % le seuil d’imposition de la nouvelle tranche créée.
Prévoir un dispositif unique pour les beaux-enfants et les petits-beaux-enfants me paraît problématique. Le plafond serait le même pour ces deux catégories, ce qui n’est pas le cas pour les enfants et petits-enfants en ligne directe.
Mme Sabrina Sebaihi
Vous nous avez perdus !
M. Emmanuel Grégoire
Il faudrait recommencer…
M. Charles de Courson, rapporteur général
Actuellement, les donataires en ligne directe bénéficient d’un abattement beaucoup plus faible dans le cas des petits-enfants que des enfants. Le sous-amendement prévoit la création, pour les donataires en ligne indirecte – les enfants et petits-enfants de conjoint, autrement dit les beaux-enfants et les enfants des beaux-enfants – un abattement qui n’existe pas encore. C’est un peu compliqué ? (« Non ! » sur plusieurs bancs. – Sourires.)
D’autre part, tout le système des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) se fonde sur les liens de parenté tels qu’ils sont définis par le droit civil, lequel n’ouvre aucun droit aux enfants de conjoint – sauf si le conjoint procède à une adoption plénière.
M. Jean-Paul Mattei
Même s’il procède à une adoption simple !
M. Charles de Courson, rapporteur général
Si c’est un notaire qui le dit, je corrige.
Mme Véronique Louwagie
Nous avions fait l’erreur en commission.
M. Charles de Courson, rapporteur général
Quoi qu’il en soit, tout cela manque de cohérence.
Mme Dieynaba Diop
Que se passe-t-il si les conjoints divorcent ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
On ne sait pas trop… (Brouhaha.)
Mme la présidente
La discussion n’est pas entre M. de Courson et Mme Diop !
M. Charles de Courson, rapporteur général
D’autre part, pour financer la mesure, le seuil d’imposition serait relevé à 49 % pour les successions supérieures à 3 611 354 euros. C’est beaucoup trop ! Vous me suivez ? (« Non ! » sur plusieurs bancs.)
À titre personnel, je suis défavorable au sous-amendement. Il dénature complètement l’amendement.
M. Jean-René Cazeneuve
Mais non !
M. Charles de Courson, rapporteur général
Si, puisqu’il tend à exclure du dispositif les nièces, neveux, frères et sœurs qui étaient ciblés par l’amendement. Je ne peux pas émettre d’avis favorable, car ce taux de 49 % est encore trop élevé. Il faut retravailler le dispositif, mais il ne faut surtout pas voter le sous-amendement du collègue Cazeneuve bricolé à la va-vite. (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe EPR.) Vous avez tous compris ? (« Oui ! » sur plusieurs bancs. – Sourires.)
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Le rapporteur général a tout expliqué.
M. Michel Guiniot
Est-ce qu’il peut recommencer ? (Sourires.)
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Il faudra affiner le dispositif durant la navette, nous sommes d’accord, madame Diop, afin qu’il soit en adéquation avec le code civil. J’émettrai un avis favorable sur le principe. Néanmoins, entre beaux-enfants et beaux-petits-enfants – ou petits-beaux-enfants, je ne sais pas comment les désigner –, l’abattement ne doit pas être du même montant, comme il ne l’est pas entre les enfants et les petits-enfants.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve.
M. Jean-René Cazeneuve
Le sous-amendement simplifie et clarifie l’amendement, en restreignant un dispositif initialement plus large. L’amendement sous-amendé vise à créer des droits pour des enfants et des petits-enfants de conjoint qui sont actuellement dépourvus de droits parce que les nouvelles formes de famille ne sont pas reconnues. Ce dispositif est autofinancé par la création d’une tranche supplémentaire d’imposition : la tranche maximale, qui s’établit actuellement à 47 %, passerait ainsi à 49 % pour les successions supérieures à 3,6 millions d’euros.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei
Par cet amendement vous assumez d’augmenter les droits de succession en ligne directe, qui passeraient de 45 à 47 % pour la dernière tranche. Que les neveux et nièces soient exclus du dispositif me choque un peu, car on peut vouloir les aider comme ses propres enfants. Quant à la notion de « conjoint », désigne-t-elle les personnes pacsées ou les personnes mariées ?
Mme Sabrina Sebaihi
Ne rajoutez pas une difficulté !
M. David Amiel
Les deux !
M. Jean-Paul Mattei
Je voudrais savoir, car si ce sont les deux, il serait plus juste, juridiquement, de parler d’enfants de « partenaire ». Je comprends qu’on veuille faire bénéficier des proches d’un abattement mais ce dispositif nécessite d’être retravaillé car, sauf erreur, « conjoint » désigne la personne mariée et « partenaire » la personne pacsée.
Mme la présidente
Je mets aux voix le sous-amendement no 3692.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 169
Nombre de suffrages exprimés 167
Majorité absolue 84
Pour l’adoption 80
Contre 87
(Le sous-amendement no 3692 n’est pas adopté.)
(Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 3471.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 170
Nombre de suffrages exprimés 165
Majorité absolue 83
Pour l’adoption 22
Contre 143
(L’amendement no 3471 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 3477 de M. David Amiel a déjà été présenté au cours de la séance précédente.
(L’amendement no 3477, accepté par la commission, le Gouvernement s’en remettant à la sagesse de l’Assemblée, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements, nos 1569, 3078 et 3389, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 3078 et 3389 sont identiques.
La parole est à M. Hubert Ott, pour soutenir l’amendement no 1569.
M. Hubert Ott
Il s’agit de porter de 100 000 à 150 000 euros l’abattement des donations en ligne directe effectuées par des donateurs âgés de moins de 80 ans, afin d’encourager la transmission anticipée du patrimoine par les parents et les grands-parents – permettant ainsi une meilleure gestion de ce patrimoine, sur plusieurs générations. De telles transmissions entre vifs permettront d’éviter les difficultés qui naissent de l’absence d’anticipation. Encourager les donations anticipées contribue en outre à stimuler la consommation et l’investissement des jeunes générations,…
M. Aurélien Le Coq
Quels jeunes ?
M. Hubert Ott
…lesquelles seront ainsi encouragées à démarrer leurs projets : premier achat immobilier, arrivée d’un enfant, création d’une entreprise. Enfin, la disposition contribuera à réduire les écarts de richesse entre générations, alors que les jeunes peinent à accéder à la propriété, notamment.
Mme la présidente
Sur l’amendement n° 3078, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Gérault Verny, pour soutenir l’amendement no 3078.
M. Gérault Verny
Distribuer l’épargne des Français permettrait d’augmenter le pouvoir d’achat des jeunes générations. Actuellement, l’âge moyen des héritiers est de 52 ans. Il faut déstocker l’épargne pour qu’elle rejoigne l’économie réelle. Pour ce faire, je propose de relever jusqu’à 120 000 euros l’abattement des donations en ligne directe.
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie-Laurence Roy, pour soutenir l’amendement no 3389.
Mme Sophie-Laurence Roy
J’ajouterai que l’abattement actuel de 100 000 euros avait été fixé sous le premier gouvernement de M. Hollande. Augmenter ce montant ne devrait donc présenter aucune difficulté, d’autant qu’une hausse de 20 000 euros correspond simplement à l’inflation depuis 2012. Un patrimoine est à disposition. Une telle mesure n’aurait rien d’extraordinaire. Elle permettrait aux jeunes d’être mieux à même de consommer et d’investir, et, ainsi, de relancer la croissance – dont nous avons tous besoin. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
L’amendement no 1569 a été rejeté par la commission car il existe déjà un abattement sur les dons intrafamiliaux – aux petits-enfants – faits avant 80 ans, à hauteur de 31 865 euros, renouvelable tous les quinze ans. Augmenter l’abattement à 100 000 euros pour ces donations serait énorme ! D’autant que le coût d’une telle mesure est inconnu. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
En ce qui concerne les amendements identiques nos 3078 et 3389, augmenter de 20 000 euros l’abattement en ligne directe créerait un écart avec les transmissions aux collatéraux ou aux non-parents. Toutes les propositions consistant à abaisser tout ou partie des DMTG en jouant sur le barème, le montant des abattements ou la durée du rappel fiscal, seraient nécessairement coûteuses.
M. Gérault Verny
Cela génère de la croissance, monsieur le rapporteur !
M. Charles de Courson, rapporteur général
Je rappelle que les DMTG représentent 19 milliards d’euros de recettes. Si nous aspirons à une réforme équilibrée et ambitieuse, nous devons avoir une approche globale. J’émettrai donc un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Également défavorable. Le régime en vigueur est avantageux : je rappelle qu’il s’agit d’un abattement de 100 000 euros par parent et par enfant, ce qui est déjà important.
Mme la présidente
La parole est à M. Mathieu Lefèvre.
M. Mathieu Lefèvre
Je souhaite interroger le groupe Rassemblement national : quelqu’un tient-il le compte de toutes les dépenses créées par vos amendements ? (Mme Christine Pirès Beaune et M. Charles Sitzenstuhl applaudissent.) Je ne vois aucune piste de financement, mais il est vrai que nous n’en sommes pas encore à l’aide médicale de l’État ni à la contribution au budget de l’Union européenne.
M. Emeric Salmon
Voilà, vous les avez !
M. Mathieu Lefèvre
Amendement après amendement, le Rassemblement national creuse le déficit. (Protestations sur les bancs du groupe RN.) Voilà un parti irresponsable, qui ne fait que dépenser sans compter – cela vaut la peine d’être noté. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
M. Frédéric Boccaletti
Ne nous donnez pas de leçons !
Mme la présidente
La parole est à M. Matthias Renault.
M. Matthias Renault
Chiche ! Nous ferons la somme des dépenses que nous avons proposées ; d’ailleurs, nous l’avons déjà faite dans un contre-budget présenté à la presse. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) En revanche, nous aimerions bien chiffrer le coût de vos 500 amendements, ainsi que de ceux du groupe Droite républicaine. Hier, nous avons adopté sur la proposition de ce dernier la défiscalisation des heures supplémentaires,…
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Avec vos voix !
M. Matthias Renault
…ce qui est une très bonne mesure ; mais elle représente un certain coût. (Mêmes mouvements.)
(L’amendement no 1569 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 3078 et 3389.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 174
Nombre de suffrages exprimés 170
Majorité absolue 86
Pour l’adoption 88
Contre 82
(Les amendements identiques nos 3078 et 3389 sont adoptés.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le ministre.
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Pour la bonne tenue de nos compteurs : la disposition que vous venez d’adopter coûtera un peu plus de 2 milliards d’euros.
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 3556.
Mme Véronique Louwagie
Cet amendement du groupe Droite républicaine, lui, ne coûte rien. (« Ah ! » sur plusieurs bancs.) Je vois que cela intéresse tout le monde. Il vise à procéder à une transmission par anticipation des primes versées sur un contrat d’assurance vie – je vous rappelle qu’avant les 70 ans du titulaire d’un tel contrat, ces primes peuvent être versées au moment du décès avec un abattement de 152 500 euros par bénéficiaire.
L’amendement vise à permettre cette transmission par anticipation, par un rachat du contrat, de toutes les primes versées avant le 1er octobre 2024, afin d’éviter les effets d’aubaine, uniquement par les titulaires qui auront 70 ans ou moins en 2025 – qui est la seule année concernée par le dispositif. L’abattement utilisé dans ce cadre, d’un montant de 152 500 euros, serait alors déduit de l’abattement de même nature s’appliquant à la date du décès. Il ne s’agit donc que d’une anticipation de l’utilisation de cet abattement, qui permettrait de relancer la consommation des ménages et d’aider certaines générations.
Mme la présidente
Sur les amendements no 3556 et 3561, je suis saisie par le groupe Droite républicaine d’une demande de scrutins publics. Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale. (« Ils sont trois députés présents ! » les bancs du groupe RN.)
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La mesure proposée est intéressante mais les abattements existants sur la transmission des contrats d’assurance vie – 152 500 euros pour les versements effectués avant 70 ans et 30 500 euros pour ceux effectués après cet âge – sont applicables en cas de décès de l’assuré et ont été conçus à cet effet. En conséquence, si vous sortez 152 500 euros d’un contrat d’assurance vie, les gains seront soumis à l’impôt sur le revenu (IR) et aux prélèvements sociaux, dans des conditions variables selon la date d’ouverture du contrat. La portée du dispositif proposé sera donc réduite par cette imposition qui diminuera la somme disponible pour une donation ; il vaut donc mieux se tourner vers les abattements applicables en cas de donation. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei
Je soutiens cet amendement qui permettra de rendre liquides certaines sommes qui auraient été de toute façon débloquées et soumises à l’abattement de 152 500 euros – beaucoup plus élevé que celui qui s’applique lors d’une donation en ligne directe. Cela réinjectera de l’argent dans l’économie et le coût fiscal sera ainsi largement amorti par la TVA prélevée sur la consommation. C’est un amendement pertinent et de bon sens, qui permet à l’argent de circuler et de relancer le moteur économique.
M. Nicolas Sansu
Cela permet surtout d’échapper à l’impôt !
M. Jean-Paul Mattei
La justice fiscale est importante mais il ne faut pas critiquer ceux qui ont de l’argent : il est là, il faut faire avec et le faire circuler.
Mme Christine Arrighi
Le faire circuler comment, affranchi d’impôt ?
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie.
Mme Véronique Louwagie
Je regrette, monsieur le ministre, que vous n’ayez pas formulé d’observations. Monsieur le rapporteur général, vous évoquez à tort l’impôt sur le revenu et les contributions sociales qui seraient prélevées, car ce n’est pas le sujet. En revanche, j’ai circonscrit le dispositif : pour éviter les effets d’aubaine, il concerne uniquement les primes versées avant le 1er octobre 2024 ; de plus, il se limite à l’année 2025 et uniquement pour les personnes ayant 70 ans ou moins, dont les bénéficiaires seraient de toute façon concernés par l’abattement de 152 500 euros. Au lieu d’attendre le décès, j’en fais bénéficier les personnes concernées avant. Cela introduit de l’argent dans le circuit économique et profite à des générations qui en ont besoin pour financer par exemple leur logement, des travaux ou les études de leurs enfants.
M. Erwan Balanant
Mme Louwagie a raison ! Elle est de gauche !
Mme la présidente
La parole est à M. Éric Woerth.
M. Éric Woerth
Je suis favorable à cet amendement : il est temporaire – cela correspond assez bien à l’esprit de ce budget. Il permet de relâcher un peu d’argent dans l’économie…
Mme Farida Amrani
Vous avez donné un hippodrome pour 1 euro, vous !
M. Éric Woerth
…et d’augmenter éventuellement les recettes de l’État. Cela va dans le bon sens, dans un contexte où des mesures générales provoqueront sans doute moins de croissance qu’espéré. Nous voterons pour.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 3556.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 177
Nombre de suffrages exprimés 175
Majorité absolue 88
Pour l’adoption 110
Contre 65
(L’amendement no 3556 est adopté.)
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DR et sur quelques bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 3561.
M. Philippe Juvin
Au sein du groupe Droite républicaine, nous croyons qu’on doit pouvoir transmettre le fruit de son travail à ses enfants, mais aussi aux enfants de son conjoint. Cet amendement vise ainsi à adapter la fiscalité à l’évolution des familles. Le droit de transmettre est un facteur essentiel de stabilité sociale. Que vous n’aimiez pas la transmission à tel point que vous vouliez la taxer tous azimuts, cela vous regarde, mais nous, nous aimons la transmission parce que nous aimons la liberté : la propriété privée – qui inclut le droit de la transmettre – est la garantie la plus importante de la liberté individuelle. (Mme Véronique Louwagie applaudit.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Nous devons mener une réflexion globale afin de moderniser les successions et les donations. Modifier un seul paramètre déstabilise la cohérence de l’ensemble.
M. Philippe Juvin
Un amendement, un paramètre !
M. Charles de Courson, rapporteur général
C’est vrai qu’il est difficile de concevoir un amendement équilibré sur l’ensemble des paramètres. La mesure proposée serait coûteuse. Nous ne pouvons pas modifier un élément pris isolément ; il faut, j’y insiste, avoir une approche globale si nous voulons faire une réforme ambitieuse. Avis défavorable.
M. Philippe Juvin
Donc on ne fera rien !
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je tâcherai de me montrer cohérent avec les propos tenus à l’égard de MM. Amiel et Cazeneuve : sur le principe, je suis ouvert à votre amendement, qui est dans la même veine. En revanche, le montant de l’abattement – 100 000 euros – est trop important. Je vous demande de retirer cet amendement afin de pouvoir le retravailler.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 3561.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 183
Nombre de suffrages exprimés 181
Majorité absolue 91
Pour l’adoption 15
Contre 166
(L’amendement no 3561 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 242.
M. Philippe Juvin
Cela a été dit en commission des finances : l’épargne des Français a atteint un niveau historique ; il s’agit de trouver les moyens de la débloquer. Pour ce faire, l’amendement vise à prendre une mesure, de manière transitoire,…
Mme Sabrina Sebaihi
On sait ce que c’est le transitoire, avec vous !
M. Philippe Juvin
…afin d’augmenter considérablement le montant des donations pour une seule année – la mesure, applicable uniquement en 2025, serait affranchie de la limite des quinze ans fixée par le code général des impôts.
Mme Christine Pirès Beaune
Cela coûte combien ?
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
L’amendement propose un triplement de l’abattement de 100 000 euros sur les transmissions en ligne directe et une multiplication par près de dix de l’abattement de 31 865 euros sur les dons aux petits-enfants, qui peut déjà être répliqué avec un abattement similaire sur les dons intrafamiliaux. Cette mesure est certes temporaire – applicable durant un an – mais elle aurait un coût considérable et risquerait de créer des effets d’aubaine. De plus, elle fait l’économie d’une réflexion d’ensemble sur les droits de succession et leur cohérence. Par ailleurs, je suis personnellement défavorable aux mesures temporaires, qui ne suffisent pas à créer de la confiance. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Il faut être raisonnable ! La mesure proposée coûterait encore plusieurs milliards d’euros aux finances publiques. Avis défavorable.
(L’amendement no 242 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Mathilde Feld, pour soutenir l’amendement no 1885.
Mme Mathilde Feld
Cet amendement vise à comptabiliser la totalité de l’héritage reçu tout au long d’une vie pour calculer les droits de succession.
Sur une période de trente et un ans, un couple avec trois enfants peut léguer 1,8 million d’euros sans payer un sou au fisc. Nous devenons peu à peu une société d’héritiers.
M. Aurélien Le Coq
C’est vrai !
Mme Mathilde Feld
Les patrimoines sont issus pour 60 % de l’héritage (« Ah ! » sur les bancs du groupe RN), contre seulement 35 % au début des années 1970.
M. Hervé de Lépinau
On ne va pas tuer les riches, c’est bon !
Mme Mathilde Feld
Cette société d’héritiers ne profite désormais plus qu’aux riches car, au regard du fisc, les millionnaires et les classes moyennes sont traités de la même façon. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) La règle est que la très grande majorité des Français n’héritent pas, ou très peu. Cinquante pour cent d’entre eux n’héritent de rien, quand l’immense majorité de ceux qui héritent ne paye pas de droits de succession – je vous renvoie au rapport d’Oxfam sur le sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission des finances a donné un avis défavorable à cet amendement.
M. Marc Fesneau
Ah !
M. Charles de Courson, rapporteur général
Il instaure en effet un rappel fiscal à vie sur toutes les donations et toutes les successions, ce qui aurait pour effet d’accroître très rapidement la fiscalité.
Mme Dieynaba Diop
Nous ne sommes pas censés faire rentrer de l’argent dans les caisses ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Certes – mais tel est en tout cas l’avis de la commission.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Il est défavorable : outre que je ne souhaite pas alourdir la fiscalité des transmissions, cet amendement introduit une incroyable complexité.
(L’amendement no 1885 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Vincent Trébuchet, pour soutenir l’amendement no 35.
M. Vincent Trébuchet
Il vise à ramener à cinq ans le délai du rappel fiscal des donations, actuellement fixé à quinze ans. Comme l’indiquait notre excellent collègue Verny, l’âge moyen des héritiers est de 52 ans. Les Français n’ont pas conscience du pouvoir économique de cette part considérable de l’épargne, qu’il est urgent de réintégrer à l’économie réelle.
J’entends déjà les arguments de ceux qui disent tenir les comptes du groupe ciottiste sur les dépenses – mais tenons-les ! (Mme Julie Ozenne s’exclame.) Nous espérons pouvoir en débattre en séance, et nous pourrons dans tous les cas le faire en commission : vous verrez alors que les amendements que nous défendrons permettront de compenser largement les abattements fiscaux que nous souhaitons, afin de redynamiser l’économie française. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)
M. Inaki Echaniz
Encore faudrait-il que vous soyez présents en commission !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La durée du délai de rappel fiscal est fixée à quinze ans depuis 2012. Cet amendement propose de la réduire à cinq ans. Mais toute réforme devrait procéder d’une analyse plus fine du rythme des transmissions de patrimoine entre les générations. Une telle analyse ne conduirait d’ailleurs pas nécessairement à modifier la durée du délai de rappel, car il est aussi possible de maintenir ce point de repère en ajoutant au cas par cas des dispositifs exceptionnels de donations non rapportées à la succession.
En l’état, la réforme que vous proposez bénéficierait aux plus gros patrimoines, pour un coût important. Évitons, de manière générale, de proposer des mesures particulières sur tel ou tel aspect des DMTG, pour préférer une approche globale – faute de quoi on ne pourra que s’exposer à des incohérences dans le dispositif. La commission donne un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Avis défavorable, en raison du coût pour les finances publiques.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei
La durée du délai de rappel fiscal a varié : on a connu six ans, quinze ans, dix ans. La première transmission a lieu aujourd’hui vers 55 ans. Si on ajoute quinze ans, pour la deuxième, nous sommes à 70 ans. Une autre donation nous mènerait à 85 ans. L’expérience nous montre que la deuxième finit par rentrer dans la succession : le dispositif ne marche donc qu’une seule fois. On peut le regretter mais c’est comme ça. Comme le dit le rapporteur général, il faut de la stabilité et de la visibilité. Ce n’est pas un outil d’optimisation fiscale considérable.
M. Hervé de Lépinau
Ça sert à libérer du cash !
M. Jean-Paul Mattei
Dans une vie, on peut le faire une fois – deux fois, c’est très rare.
Mme la présidente
La parole est à M. Sébastien Huyghe.
M. Sébastien Huyghe
Pendant longtemps, ce délai a en effet été de dix ans. Sous la présidence de Nicolas Sarkozy, il est passé à six ans, avant de revenir à dix, jusqu’à ce que, sous la présidence de François Hollande, il passe à quinze ans. Cinq ans, c’est bien trop peu, mais il serait de bonne politique de faire revenir cette durée à dix ans.
La plupart de nos concitoyens attendent ce délai de quinze ans pour faire leur deuxième donation : le ramener à dix ans permettrait de refaire circuler beaucoup d’argent dans l’économie, pour un faible coût.
Mme la présidente
La parole est à M. Vincent Trébuchet.
M. Vincent Trébuchet
Merci d’avoir rappelé que ce sont là des paramètres qui peuvent varier en fonction de la conjoncture économique. Ce délai a en effet été de six ans sous la présidence de Nicolas Sarkozy : passer à cinq ne serait donc pas complètement nouveau. Une épargne improductive s’est considérablement accumulée et il est urgent de la réintégrer dans l’économie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDR et sur quelques bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Sansu.
M. Nicolas Sansu
C’est l’amendement Paris Country Club.
M. Gérault Verny
Quel cliché !
M. Nicolas Sansu
À part certains de vos amis, personne n’est concerné. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.) Donner 100 000 euros tous les dix ans à chacun de ses enfants – on peut estimer qu’il y en a deux – et bénéficier ensuite d’un abattement sur les droits de succession de 152 000 euros par part, cela finit par faire beaucoup d’argent donné sans jamais générer de l’impôt. C’est un problème – et c’est là un amendement que les habitants de ma circonscription ne comprennent pas ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS. – « Ça c’est certain – nous, on travaille ! » sur les bancs du groupe UDR.)
M. Arthur Delaporte
Le RN et l’UDR sont pour les milliardaires !
(L’amendement no 35 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Élisa Martin, pour soutenir l’amendement no 1886.
Mme Élisa Martin
Nous souhaitons abroger cette niche fiscale totalement injuste qu’est le pacte Dutreil. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) Lors de la transmission d’une entreprise, au motif qu’un héritier direct de son dirigeant ou propriétaire occupera une fonction de dirigeant, 75 % des parts de l’entreprise, en valeur, sont défiscalisées. Le bénéfice de cette niche fiscale ne vient donc pas du fruit du travail mais du hasard de la naissance, raison pour laquelle nous la jugeons injuste en voulons l’abroger. (Mêmes mouvements).
M. Hervé de Lépinau
Ils veulent sortir la guillotine !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Je suis entièrement favorable à l’ouverture d’une réflexion sur le pacte Dutreil, notamment sur son plafonnement et sur son champ.
Mme Christine Arrighi
Ah !
M. Charles de Courson, rapporteur général
Il est également urgent que notre administration évalue de façon fiable son coût, estimé conventionnellement, depuis des années, à 500 millions d’euros, et à 800 millions dans l’analyse des dépenses fiscales de cette année – la réalité étant certainement plus proche des 1 ou 2 milliards.
Cette exonération de 75 % de la valeur des titres de l’entreprise est cependant largement plébiscitée pour permettre, dans de bonnes conditions, la transmission de notre tissu économique et industriel – y compris dans le domaine agricole. Il serait d’autant moins opportun de la supprimer que le nombre de transmissions d’entreprises va croître fortement ces prochaines années.
Ce dispositif est assorti de nombreuses dispositions strictes, qui visent à assurer que les bénéficiaires ont un lien effectif avec une société exerçant une activité économique opérationnelle.
Votre amendement, par ailleurs, n’abroge pas le pacte Dutreil pour les entreprises individuelles, ce qui aboutirait à une rupture d’égalité entre les entreprises au regard de la transmission. La commission des finances donne un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Avis défavorable également : le pacte Dutreil n’est pas uniquement une facilité fiscale, mais un outil pour pérenniser autant qu’il est possible la transmission, dans nos territoires, des PME, assurant qu’elles ne ferment pas quand le gérant ou les dirigeants partent à la retraite. Il s’agit donc aussi par là de préserver de l’activité et des emplois.
Mme la présidente
La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.
M. Charles Sitzenstuhl
Ce qu’on vient d’entendre de la part du groupe qui a déposé cet amendement est consternant, et très blessant pour des dizaines de milliers de chefs d’entreprise, patrons de PME ou d’entreprises de taille intermédiaire, qui font le cœur de l’industrie française. (MM. Aurélien Le Coq et Nicolas Sansu s’exclament.)
L’invention du pacte Dutreil répond à un besoin et le supprimer reviendrait à planter le dernier clou dans le cercueil de l’industrie française. Poursuivez ainsi et vous continuerez à faire fuir de notre pays les investisseurs, les gens qui veulent créer, innover et fabriquer de la valeur. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Il y a une bonne raison pour laquelle le pacte Dutreil n’a pas été remis en cause par les gouvernements de gauche comme de droite. Il faut absolument repousser cet amendement qui est une provocation pour des milliers de chefs d’entreprise.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-François Coulomme.
M. Jean-François Coulomme
Ce dispositif encourage plus qu’il ne faut la transmission par filiation, dans le cas d’entreprises où il serait parfois préférable, pour en garantir la pérennité, de les revendre à des employés méritants et compétents.
M. Hervé de Lépinau
Bah bien sûr !
M. Jean-François Coulomme
Vous risquez de placer à la tête d’une entreprise un héritier crétin qui mettra en péril tous les emplois. Au nom de gains fiscaux, on aura remplacé des acheteurs compétents par une filiation hasardeuse. (Mme Marie Mesmeur applaudit.)
M. Gérault Verny
Il faut vendre à des fonds d’investissement américains !
(L’amendement no 1886 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement no 475.
M. Nicolas Sansu
Je défendrai également l’amendement no 476. Il existe quatre façons d’encadrer le dispositif Dutreil. Il y a la durée de détention – nous examinerons à ce sujet les amendements de notre collègue Eva Sas. Il y a le périmètre – et nous examinerons à ce propos ceux de Mme Pirès Beaune. Restent deux autres leviers qui font l’objet de ces deux amendements : le plafonnement, d’abord, avec un taux différencié au-delà d’un certain montant ; le refus du démembrement, ensuite.
Le plafonnement à 50 millions d’euros, à partir duquel l’abattement passe de 75 % à 50 %, je vous l’assure, ne concerne pas les petits boulangers, mais des entreprises de taille plus importante.
L’interdiction du démembrement, elle, assure que les titres soient détenus en pleine propriété et pas en nue-propriété. On limite de ce fait l’avantage fiscal, en assurant, surtout, que le pacte Dutreil reste fidèle à sa vocation : la transmission, mais sans grever les finances publiques. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Mme la présidente
Sur l’amendement n° 475, je suis saisie par les groupes Rassemblement national et de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Tout d’abord, le seuil pose problème. Comment le justifier ? Pourquoi 50 millions et pas 100 millions, ou tout autre chiffre ? (Mme Farida Amrani s’exclame.) Il faudrait analyser la répartition des patrimoines transmis dans le cadre du pacte Dutreil pour savoir si la cible visée par notre collègue est bien atteinte. Au-delà, je note que M. Sansu, qui est un homme prudent, accepte une exonération de 50 %. Il est donc, implicitement, favorable au pacte Dutreil. (M. Nicolas Sansu sourit.)
Nous devons avoir une réflexion globale, qui porte aussi sur les conditions qui permettent l’application du pacte Dutreil – société exerçant des activités opérationnelles ; engagements de conservation des titres. Toutefois, l’exonération à hauteur de 75 % me semble essentielle. Je ne connais d’ailleurs pas le coût que représenterait l’abaissement du taux à 50 % au-delà de 50 millions, mais peut-être le ministre pourra-t-il nous éclairer sur ce point ?
Mme Christine Arrighi
Ils n’en savent rien !
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je comprends le sens de votre amendement, monsieur Sansu. En définitive, vous êtes favorable au pacte Dutreil,…
M. Nicolas Sansu
Mais bien sûr !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
…mais vous voulez le plafonner, le caper comme on dit. C’est loin d’être inintéressant. Toutefois, il faudrait mesurer les risques que nous ferions prendre aux entreprises dont la valeur est supérieure à ce seuil de 50 millions. C’est le cas de nombreuses petites et moyennes entreprises (PME) et d’entreprises de taille intermédiaire (ETI). Par définition, ce sont celles qui, dans le cadre de la transmission, sont davantage exposées à des risques quant à la pérennité de leur activité et des emplois – d’autant que cela concerne davantage d’emplois. C’est pourquoi il faut toucher à ce dispositif avec prudence. La question n’est pas de savoir s’il s’agit de riches ou de non-riches, mais bien quel volume d’activité nous souhaitons préserver dans les territoires. Je serai donc très prudent sur l’effet de seuil et sur la nature des entreprises, parce que, à ce niveau, ce sont des entreprises que nous préférons voir prospérer et résister.
Je précise d’ailleurs, puisque nous avons déjà évoqué quelques comparaisons avec d’autres pays, notamment en matière d’attractivité des entreprises, que la France n’est pas très bonne en matière de transmission familiale des entreprises. Nos voisins italiens ou allemands ont une culture bien plus développée que la nôtre en la matière.
M. Gérault Verny
Il a raison !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Par conséquent, il ne faudrait pas casser l’outil principal de la transmission familiale. Quelqu’un a souligné tout à l’heure que la transmission par filiation pouvait menacer la pérennité d’une entreprise si ce n’est pas la bonne personne qui la reprend. C’est un très bon argument. Mais cette personne n’occupe pas nécessairement le poste numéro 1 de l’entreprise ; elle peut être l’un des dirigeants, dans un cadre collectif de direction.
M. Nicolas Sansu
Vous émettez donc un avis favorable ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Jordan Guitton.
M. Jordan Guitton
Nous voyons bien, depuis tout à l’heure, que le Nouveau Front populaire essaie de détricoter petit à petit le pacte Dutreil. Pourtant, il s’agit d’un formidable outil de transmission. Pendant les élections législatives, vous vous êtes efforcés de draguer les PME, les agriculteurs, les viticulteurs… Mais que va-t-on pouvoir leur dire dans les territoires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN et sur plusieurs bancs du groupe UDR.) J’entends les collègues de la Macronie s’indigner que le Nouveau Front populaire veuille supprimer le pacte Dutreil. Pourtant, ils les ont fait élire lors des élections législatives ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) Vous avez contribué à la coalition ; vous formez tous, ici, un parti unique ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) Si, demain, la transmission des entreprises agricoles, viticoles, des TPE et des PME est menacée, c’est bien parce que vous formez un parti unique entre NFP et Macronie, entre Gabriel Attal et Jean-Luc Mélenchon ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe EPR.)
M. Maxime Laisney
Vous, vous avez la Macronie honteuse !
M. Jordan Guitton
C’est vous qui menacez la transmission des entreprises. Assumez de former un parti unique ! Vous pourrez toujours compter sur le Rassemblement national et ses alliés pour permettre aux entreprises de se transmettre, parce que c’est l’économie et l’avenir de notre pays qui en dépendent. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei
Essayons d’en revenir au pacte Dutreil. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.) C’est un sujet sérieux. Il s’agit d’un très bon outil même si, avec Nicolas Sansu, nous avons constaté quelques dérives dans notre rapport d’information relatif à la fiscalité du patrimoine. Permettez-moi de reprendre le cas d’un seuil fixé à 50 millions : avec le pacte Dutreil, le coût des droits de transmission s’élèvera à peu près à 5,6 millions. Pour les financer, il faudra piocher dans les bénéfices de l’entreprise et donc opérer une distribution. Compte tenu de la flat tax, il faudra sortir de l’entreprise environ 8 millions, autant d’argent qui fera défaut à sa trésorerie pour assurer sa pérennité.
L’intérêt du pacte Dutreil est d’éviter que l’entreprise ne soit vendue à des fonds étrangers, afin de conserver nos entreprises sur le territoire français.
Mme Danièle Obono
Mais non !
M. Jean-Paul Mattei
Comme Mathieu Lefèvre l’a rappelé en commission, ce dispositif résulte de la jurisprudence UPSA, lorsque l’entreprise familiale basée à Agen a été obligée de se vendre à des fonds étrangers. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe EPR.)
Mme la présidente
La parole est à M. David Amiel.
M. David Amiel
Il est tout de même paradoxal que cet amendement soit issu de partis qui dénoncent, parfois à juste titre, la financiarisation de l’économie et son ouverture à tous vents. En fragilisant le pacte Dutreil, ils renforceraient précisément ce risque.
Le pacte Dutreil permet de protéger nos entreprises au moment où elles sont vulnérables ; s’il n’existait pas, la voie serait ouverte à des rachats par des fonds, notamment étrangers. C’est encore plus vrai des entreprises visées par M. Sansu, car c’est précisément à ce niveau d’activité qu’elles peuvent intéresser des fonds étrangers et qu’en l’absence de ce dispositif, la plupart des héritiers ou des repreneurs n’auraient pas les moyens de reprendre l’activité.
On peut envisager des adaptations, notamment pour lutter contre certains abus ; nous examinerons des amendements en ce sens. Toutefois, le cœur du pacte Dutreil doit être préservé car il est indispensable pour notre tissu économique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
M. Franck Riester
Très juste !
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Sansu.
M. Nicolas Sansu
Je n’ai pas demandé la suppression du dispositif. Je propose simplement d’abaisser le taux d’exonération à 50 % au-dessus de 50 millions. Ce n’est donc pas la fin du pacte Dutreil.
M. Philippe Juvin
C’est le début de la fin !
M. Nicolas Sansu
Pour répondre au collègue du Rassemblement national : le boucher-charcutier n’est pas concerné ! (« Si ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.) Pas plus que la PME ou le petit garagiste. Arrêtez de raconter des histoires. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) Vous pouvez avoir le macronisme honteux parce que vous vous apprêtez à voter avec eux, mais assumez ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS.) – Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.) Voilà la réalité ! Entre les macronistes à peine assumés, qui ne sont pas présents dans cet hémicycle, et le macronisme honteux,…
Mme Prisca Thevenot
Parlez-leur directement ! (Mme Prisca Thevenot désigne les bancs des groupes RN et UDR.)
M. Emeric Salmon
Vous avez été élus par des macronistes !
M. Nicolas Sansu
…je crois que le pacte Dutreil devrait être encadré. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 475.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 202
Nombre de suffrages exprimés 201
Majorité absolue 101
Pour l’adoption 77
Contre 124
(L’amendement no 475 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Gérault Verny, pour soutenir l’amendement no 3072.
M. Gérault Verny
Permettez-moi de poser une question à la gauche : pour qui avez-vous voté en 2022 au second tour, si ce n’est pour Emmanuel Macron ? Soyez cohérents ! Assumez ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)
M. Maxime Laisney
La destitution, c’est pour quand ?
Mme Dieynaba Diop
Nous avons voté contre les fachos et les néonazis !
M. Gérault Verny
Est-ce que je peux en placer une ?
Mme la présidente
S’il vous plaît, laissez parler M. Verny.
M. Gérault Verny
Cet amendement vise à faciliter le dispositif Dutreil. Il faut comprendre ce qu’est une entreprise : ce n’est ni une œuvre d’art ni un château, mais une personne morale très fragile. (Les exclamations se poursuivent sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.)
M. Charles Sitzenstuhl
Laisse tomber. Tu n’arriveras pas à le leur expliquer !
M. Gérault Verny
J’en veux pour preuve les dizaines de milliers de défaillances au premier trimestre. Vous ne pouvez pas dénoncer, d’un côté, les fermetures d’usines et, de l’autre, considérer les entreprises comme des tirelires.
Ensuite, on a un problème en France : il y a des grandes et des petites entreprises, mais il manque des ETI. Or une ETI se construit sur plusieurs générations. Si nous voulons éviter que nos PME championnes ne soient vendues à des fonds étrangers, il faut favoriser leur transmission.
Un député du groupe RN
Il a raison !
M. Gérault Verny
C’est ainsi qu’il y aura le plus de création de richesses, pour la France et les Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission a rejeté cet amendement.
M. Marc Fesneau
Très bien !
M. Charles de Courson, rapporteur général
L’exonération actuelle est de 75 %, assortie de conditions de conservation des titres pour une durée relativement courte, puisqu’elle est de deux ou quatre ans. Comme notre collègue le souligne à raison dans son exposé sommaire, en Allemagne, le taux d’exonération est supérieur au nôtre. Toutefois, la contrepartie y est que le maintien du caractère familial de l’entreprise courre sur une durée beaucoup plus longue. Nous y reviendrons.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je souhaite également le maintien du taux de 75 % et j’émettrai un avis défavorable sur tous les amendements visant à l’augmenter. Cependant, M. Verny a raison sur un point : c’est par la transmission génération après génération qu’une entreprise peut devenir une ETI. C’est ainsi que les PME italiennes sont devenues des ETI industrielles puissantes et exportatrices. C’est pourquoi il faut conserver le dispositif Dutreil.
(L’amendement no 3072 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Élisa Martin, pour soutenir l’amendement no 1887.
Mme Élisa Martin
Son objectif est de limiter l’abattement à 2 millions d’euros. Connaissez-vous l’effet Carnegie ? Des études se sont penchées sur la transmission à des héritiers occupant la place de dirigeants. Il s’est avéré que ce n’était pas toujours, bien au contraire, la meilleure des solutions pour faire perdurer l’activité. Par conséquent, ce que vous nous opposez n’est pas exact. Permettez-moi de vous dire ce que je ressens : vos indignations sont celles de ceux à qui on veut retirer des privilèges. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Limiter à 2 millions l’abattement me semble très excessif – si tant est que nous devions plafonner le pacte Dutreil. La valeur des entreprises transmises dans le cadre de ce dispositif est en moyenne de 5 millions. À ce niveau, il s’agit de PME et non de grosses entreprises.
M. Hervé de Lépinau
Ils ne savent pas ce que c’est, l’entreprise !
M. Charles de Courson, rapporteur général
Si nous devions plafonner le pacte Dutreil, ce ne serait donc certainement pas à 2 millions. La commission des finances a émis un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
À 2 millions, autant supprimer le pacte Dutreil ! C’est, au contraire, pour les PME qu’il faut être vigilant lors de leur transmission, parce qu’elles commencent à être structurées, que les enjeux sociaux sont plus lourds et que c’est plus difficile. Avis défavorable.
Mme Élisa Martin
Justement, il faut faire autrement !
Mme la présidente
La parole est à Mme Danièle Obono.
Mme Danièle Obono
Je suis surprise d’entendre dans ce temple républicain, espace de la représentation nationale, un tel éloge de la transmission, alors qu’on devrait plutôt parler de méritocratie. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)
M. Philippe Juvin
Justement !
M. Hervé de Lépinau
Vous êtes en terrain glissant !
Mme Danièle Obono
Nous, nous considérons, et c’est une autre vision du monde, que ce sont les salariés qui font la richesse des entreprises. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Ce sont eux qui usent leur vie, et la perdent souvent, pour que celles-ci fonctionnent, alors qu’ils sont très peu rémunérés en comparaison de l’effort auquel ils consentent – quand ils ne perdent pas leur travail ! S’il devait y avoir une transmission, ce serait plutôt aux salariés de récupérer l’entreprise,…
M. Gérault Verny
Les chefs d’entreprise n’ont plus rien ! Vous leur prenez tout !
Mme Danièle Obono
…quitte à ce que l’État assure cette reprise. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)
M. Gérault Verny
Ah ! Nous y voilà !
Mme Danièle Obono
Oui, ce sont deux visions différentes du monde : l’une véritablement républicaine, l’autre aristocratique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)
Pour répondre au collègue du RN, oui, nous sommes des antifascistes et s’il ne doit rester qu’un ou une antifasciste qui fasse barrage, ce sera un membre du groupe La France insoumise et nous en sommes fiers ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS – Vives protestations sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Mathieu Lefèvre.
M. Mathieu Lefèvre
Les auteurs de ces amendements font un contresens. En réalité, le pacte Dutreil est né de l’affaire de la cession d’UPSA aux Américains. La question est très simple : au moment où nous rencontrons des difficultés avec le Doliprane – l’histoire est quelque peu ironique –, voulez-vous, oui ou non, consolider l’actionnariat français ? Voulez-vous, oui ou non, que les industries restent dans notre pays ? Voulez-vous, oui ou non, un tissu industriel français ?
Le choix est le suivant : adopter vos amendements et laisser libre cours à la mondialisation débridée et à la financiarisation de l’économie ou dresser un rempart face à cette financiarisation.
M. René Pilato
On croit rêver !
M. Mathieu Lefèvre
Il s’agit d’organiser une transmission dans des conditions, non pas libres de droits, mais de marché véritable, comme c’est le cas chez tous nos voisins européens.
Un dernier chiffre, madame Obono : la fiscalité du capital en France représente 4 % du PIB, contre 1 % dans l’Union européenne.
(L’amendement no 1887 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Aurélien Le Coq, pour soutenir l’amendement no 1890.
M. Aurélien Le Coq
Qu’est-ce qui fait la valeur d’une entreprise ? Qui produit la richesse ?
Plusieurs députés des groupes RN et UDR
Ce n’est pas vous ! Ce n’est pas LFI !
M. Aurélien Le Coq
Celles et ceux qui, souvent de génération en génération, ont bossé dans la boîte, parfois jour et nuit, pour des salaires de misère et ont fabriqué tout ce qui était vendu ? Ou bien l’enfant du patron, qui n’a rien fait d’autre que de naître ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Un député du groupe RN
C’est Germinal !
M. Aurélien Le Coq
Qu’a-t-il produit ? Mérite-t-il de récupérer l’intégralité d’une richesse qui ne lui appartient pas, puisqu’il n’a rien fait ? Oui, nous avons deux visions du monde différentes. (Mêmes mouvements.)
La réalité, c’est que vous défendez une infime minorité ! Pendant que 500 familles possèdent trois fois le budget de l’État, tous les autres crèvent. Les super-milliardaires aujourd’hui sont tous des super-héritiers ! Et cet argent, ils l’ont pris aux travailleuses et aux travailleurs qui l’ont produit à la sueur de leur front ! (Mêmes mouvements.)
M. Hervé de Lépinau
Le retour des « deux cents familles » !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson
Vous n’avez fait que rappeler ce que disait le célèbre Jean Bodin : « Il n’est de richesse que d’hommes ». La richesse vient du travail.
Votre amendement soulève un vrai problème, que l’amendement no 2915 vise à résoudre en excluant de l’assiette les biens qui ne sont pas liés à l’activité professionnelle. Je vous suggère donc de le retirer.
Mme la présidente
Sur le vote de l’amendement no 476, je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
On peut considérer, sans polémique, que l’entreprise, c’est à la fois le capital et les travailleurs. Il est sain, quand il n’y a pas de successeur naturel, de rechercher un successeur au sein des entreprises. Mathieu Lefèvre a parfaitement raison : se priver d’un outil fiscal de transmission est le meilleur moyen de laisser les fonds vautours s’emparer des entreprises, les dépecer et repartir avec les dividendes – tout ce contre quoi vous luttez. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)
(L’amendement no 1890 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement no 476.
M. Nicolas Sansu
Si vous cumulez les niches fiscales, le Dutreil et le démembrement, vous atteignez 90 % d’abattement. C’est un vrai problème. Le démembrement ne servant qu’à faire de l’optimisation fiscale – la Cour des comptes l’a souligné –, nous proposons d’empêcher la cession de titres démembrés dans le cadre du pacte Dutreil. Celui-ci ne doit servir qu’à la transmission des entreprises. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR, LFI-NFP et EcoS.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission des finances a donné un avis défavorable au motif que le démembrement de propriété peut accélérer la transmission. En effet, l’entrepreneur peut transmettre à ses descendants la nue-propriété des parts tout en s’en réservant l’usufruit, pour vivre. Exclure cette possibilité du mécanisme Dutreil freinerait de nombreuses transmissions.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Même avis.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 476.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 187
Nombre de suffrages exprimés 186
Majorité absolue 94
Pour l’adoption 77
Contre 109
(L’amendement no 476 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Daniel Labaronne, pour soutenir l’amendement no 3410.
M. Daniel Labaronne
Cet amendement, comme une centaine d’autres, a été retiré par mon groupe – un exemple concret de notre volonté d’accélérer les débats.
(L’amendement no 3410 est retiré.)
Mme la présidente
Sur le vote de l’amendement no 1254, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1254 et 2915.
La parole est à Mme Christine Pirès Beaune, pour soutenir l’amendement no 1254.
Mme Christine Pirès Beaune
Il ne s’agit ni de supprimer le pacte Dutreil ni de toucher au taux de 75 %, mais de revoir le périmètre de l’exonération.
Comme l’a souligné la Cour des comptes dans un rapport sur les droits de succession remis à la commission des finances en juin 2024, l’évaluation du pacte Dutreil n’a pas été réalisée de façon fiable. En effet, le montant de l’estimation de la dépense fiscale est resté identique pendant des années alors que le nombre de pactes Dutreil augmentait.
Transmettre une entreprise dans le cadre du pacte Dutreil pour éviter son démembrement, c’est bien – j’ai pu le constater dans ma circonscription – mais cela suppose qu’on transmette l’outil de production et non des biens personnels.
M. Inaki Echaniz
Tout à fait !
Mme Christine Pirès Beaune
Dans ce dernier cas, c’est un abus. Nous proposons donc d’exclure les biens personnels de l’assiette de l’exonération. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NFP, EcoS et GDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2915.
M. Charles de Courson, rapporteur général
Le pacte Dutreil est conçu pour transmettre des biens professionnels, dans l’intérêt du pays. Dans de très rares cas, et il est vrai que c’est choquant, des biens personnels se trouvent inclus dans la transmission.
Cet amendement a pour but non de remettre en cause les grands équilibres du pacte Dutreil mais de le recentrer sur son objectif principal, et d’éviter ainsi tout détournement. Il a été adopté par la commission des finances avec un soutien transpartisan. Il faut l’adopter, même s’il est encore nécessaire de préciser quel doit être le sort de la trésorerie.
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Même si je m’interroge sur son efficacité, j’entends que le pacte Dutreil peut servir à maintenir l’entreprise dans le giron familial, et éviter ainsi toute financiarisation. Autrement dit, l’objet du dispositif n’est pas l’optimisation fiscale ou la valorisation en vue d’une revente quelques années plus tard.
Ces amendements visent à empêcher le détournement à des fins d’optimisation puisqu’ils limitent strictement l’exonération aux biens professionnels. Je vous inviterai aussi à voter les amendements qui sécurisent le nombre d’années au cours desquelles il est impossible de revendre une entreprise transmise dans le cadre d’un pacte Dutreil – à ceux-là mêmes qui contribuent à financiariser la société.
J’espère que ces amendements connaîtront le même sort qu’en commission.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Le resserrement du dispositif est une intention louable mais modifier ces outils comporte un risque, celui d’envoyer un signal négatif pour l’attractivité – Charles Sitzenstuhl l’a souligné.
M. Philippe Brun
Il n’y a pas de signal, là ! (Exclamations sur les bancs du groupe SOC.)
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Je resterai vigilant sur ce point. C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable.
M. Philippe Brun
Un avis de sagesse, plutôt !
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Les outils fiscaux existants peuvent sans doute être améliorés mais, dans un contexte d’évolution de la fiscalité et des prélèvements obligatoires – comme le texte initial le propose –, nous devons opérer avec prudence vis-à-vis d’outils repérés comme étant très sensibles en matière d’attractivité.
Mme la présidente
La parole est à M. David Amiel.
M. David Amiel
J’avais déposé un amendement identique mais, fidèle aux engagements pris en début de séance, je l’ai retiré pour accélérer les débats.
Un député du groupe SOC
Oh !
M. David Amiel
Le pacte Dutreil est très précieux pour protéger la transmission des entreprises et éviter de les exposer à un dépeçage par des fonds de pension étrangers. Comme je pense qu’il ne doit servir qu’à cela, j’estime qu’il est normal d’exclure les biens personnels de l’assiette de l’exonération. Seuls doivent être concernés les actifs professionnels, l’outil de production. Ce sont des amendements de bon sens, conformes à l’esprit du Dutreil.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei
Pour ce qui concerne les bateaux et les chalets, il n’y a pas de sujet, il faut les exclure de l’assiette.
Mme Christine Arrighi
Comme les châteaux bordelais !
M. Jean-Paul Mattei
Les professionnels essaient d’ailleurs d’éviter de tels travers, qui relèvent de l’abus de droit – heureusement, des contrôles sont menés. Le pacte Dutreil vise à transmettre des entreprises et non des biens privés, c’est évident.
Reste un problème d’interprétation assez complexe sur le sort à réserver à la trésorerie nécessaire pour faire tourner l’entreprise et assurer son développement. Il convient d’éviter les effets de bord. En matière d’immobilier, s’agit-il de l’immobilier nécessaire à l’exploitation ? Le sujet est difficile, mais ces amendements envoient un signal. L’interprétation gagnerait à être précisée dans le Bofip, le Bulletin officiel des finances publiques, pour savoir ce que l’on peut faire. Cela permettrait d’éviter les dérives et les contrôles, et de sécuriser ainsi les transmissions.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 1254 et 2915.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 189
Nombre de suffrages exprimés 188
Majorité absolue 95
Pour l’adoption 101
Contre 87
(Les amendements identiques nos 1254 et 2915 sont adoptés.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et EcoS.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Mathilde Panot.
Mme Mathilde Panot
Je demande une suspension de cinq minutes.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures quinze, est reprise à vingt-trois heures vingt-cinq.)
Mme la présidente
La séance est reprise.
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, pour soutenir l’amendement no 1579.
M. Jean-René Cazeneuve
Je suis surpris que mon amendement n’ait pas fait l’objet d’une discussion commune avec les deux amendements précédents. Pour préserver l’activité et sauvegarder l’emploi, nous souhaitons évidemment pérenniser le pacte Dutreil. Les rapports de l’Inspection générale des finances (IGF) préconisent cependant de clarifier le contenu des actifs bénéficiant de l’exonération, en les limitant aux biens professionnels affectés à l’activité opérationnelle. C’était l’objectif de cet amendement, que je retire puisque les précédents ont été adoptés.
(L’amendement no 1579 est retiré.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 793 et 1266, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l’amendement no 793.
Mme Danielle Simonnet
La majeure partie des biens bénéficiant de l’exonération prévue dans le pacte Dutreil sont concentrés chez les plus riches. En effet, une étude de l’Institut des politiques publiques (IPP) a révélé que, jusqu’au seuil des 0,1 % les plus riches, les biens professionnels représentent moins de 10 % du patrimoine total ; chez les 0,01 % les plus riches, ils représentent 30 % du patrimoine ; chez les 0,001 % les plus riches – soit 380 foyers fiscaux –, 60 % du patrimoine.
Monsieur le ministre, vous affirmez que vous souhaitez pérenniser au maximum l’activité et l’emploi. Je ne doute pas que vous donnerez un avis favorable à cet amendement et au suivant, no 1266. Tous deux visent à renforcer l’obligation pour les héritiers de conserver les parts de société, en portant la durée de détention à huit ans, pour le premier, à six ans pour le second.
Mme la présidente
Sur l’amendement no 1266, je suis saisie par le groupe Écologiste et social d’une demande de scrutin public. Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
À l’engagement individuel de conservation des titres de quatre ans s’ajoute un engagement collectif de deux ans. En allongeant la durée de détention individuelle des parts de quatre à huit ans, l’amendement no 793 porte donc l’engagement à dix années au total. La commission des finances a donné un avis défavorable à cet amendement. En revanche, elle a voté en faveur de l’amendement no 1266, puisqu’il limiterait l’engagement total à huit ans – six ans d’engagement individuel et deux ans d’engagement collectif.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Avis défavorable.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 1266.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 126
Nombre de suffrages exprimés 125
Majorité absolue 63
Pour l’adoption 58
Contre 67
(L’amendement no 1266 n’est pas adopté.)
(L’amendement no 793 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 867 de M. Franck Allisio est défendu.
(L’amendement no 867, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l’amendement no 1272.
Mme Danielle Simonnet
Je suis surprise, madame la présidente : l’amendement no 1266 avait reçu un avis favorable de la commission des finances. Je ne sais pas pourquoi nous avons procédé au vote sur cet amendement avant de nous prononcer sur le no 793.
Mme la présidente
C’est une erreur de ma part.
Mme Danielle Simonnet
Je crains que cette inversion n’ait privé notre assemblée d’informations propres à éclairer notre vote.
M. Emeric Salmon
Non, pas du tout !
Mme Danielle Simonnet
Je me demande s’il ne serait pas préférable de procéder à nouveau à ces votes. (« Non ! » sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)
Quant à l’amendement no 1272, il s’agit d’un amendement de repli. Il vise à fixer une nouvelle condition au bénéfice du pacte Dutreil qui, on ne le rappellera jamais assez, permet tout de même une exonération de 75 % des droits de donation et de succession sur les actions d’une société : le maintien en poste, pendant au moins deux ans, des salariés présents dans la société à la date de la transmission.
Monsieur le ministre, puisque vous affirmez qu’il faut préserver le dispositif Dutreil pour protéger les entreprises et l’emploi,…
M. Jean-René Cazeneuve
Eh oui !
Mme Danielle Simonnet
…il serait totalement incompréhensible que vous ne souteniez pas cet amendement qui aura pour effet de préserver pendant au moins deux ans l’emploi des salariés.
M. Sylvain Maillard
Cela n’a rien à voir ! Vous mélangez tout.
Mme Danielle Simonnet
Je compte sur l’esprit de responsabilité de tous les députés pour l’adopter. Je vous signale d’ailleurs que cette mesure est déjà appliquée en Allemagne et en Wallonie ; appliquons-la enfin en France !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission a donné un avis défavorable.
(L’amendement no 1272, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme Danielle Simonnet
Vous ne voulez pas sauver les emplois, voilà la vérité ! (Exclamations sur les bancs des groupes RN, EPR, DR et UDR.)
Mme la présidente
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 140.
M. Thibault Bazin
Nous avons déjà parlé d’accession au logement et d’investissement locatif ; cet amendement concerne la rénovation des logements. Nous sommes loin de nos objectifs en la matière. Nous sommes confrontés à des défis calendaires puisqu’au 1er janvier 2025, au 1er janvier 2028, en 2031 puis en 2034, certaines catégories de logements deviendront impropres à la location. Certains propriétaires préfèrent renoncer à la location et n’effectuent pas les travaux de rénovation ; en conséquence, de plus en plus de logements sortent du parc locatif.
L’amendement a peu d’incidence sur les finances publiques, mais il contribuerait à remettre des logements sur le marché. Il vise un allégement de 50 % des DMTG, applicable à la transmission par donation ou succession des logements du parc locatif énergétiquement peu performants, sous condition de leur rénovation et de leur maintien dans le parc locatif à un prix abordable pendant une durée d’au moins six ans.
Il s’agit d’une proposition vertueuse du point de vue du développement durable et susceptible d’élargir le parc locatif ; ne serait-ce qu’à Paris, de très nombreux logements sont vacants au lieu d’être loués.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Il est défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Il existe déjà des dispositifs fiscaux comme l’imputation du déficit foncier sur le revenu global, doublé si le bailleur réalise des travaux de rénovation énergétique, et des dispositifs budgétaires comme MaPrimeRénov’. Nul n’est besoin d’une nouvelle incitation fiscale. Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Inaki Echaniz.
M. Inaki Echaniz
La niche du groupe Socialistes et apparentés comportera un excellent texte pour aider les propriétaires à rénover leur logement grâce à un dispositif de « zéro reste à charge ». J’invite le groupe Les Républicains à venir en séance pour voter cette proposition de loi de M. Stéphane Delautrette.
M. Thibault Bazin
Il n’y a plus de groupe Les Républicains, il y a un groupe Droite républicaine !
(L’amendement no 140 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 3560.
Mme Véronique Louwagie
Cet amendement des députés du groupe Droite républicaine – M. Nicolas Forissier, en particulier, a beaucoup étudié le sujet – concerne le pacte Dutreil. Ce dispositif est une des clés de la croissance industrielle française, cela mérite d’être répété. Trois ans après la cession, les transmissions familiales présentent un taux de survie très supérieur aux autres types de cession.
Nous proposons un pacte Dutreil « longue durée ». Il serait conditionné à une durée de détention supplémentaire de quatre ans, qui s’ajouterait à la durée de quatre ans déjà inscrite dans la loi. En contrepartie, il permettrait de bénéficier d’un abattement supérieur : une exonération de 15 % des DMTG, en sus de l’exonération de 75 %. Cela sécuriserait les entreprises pendant plus longtemps, ce qui permettrait davantage de lisibilité pour l’avenir.
M. Nicolas Sansu
Allez jusqu’à 100 %, ce serait encore mieux !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Porter l’exonération de 75 % à 90 %, en contrepartie d’un allongement de la durée minimale de détention, portée à huit ans – en fait dix ans –, c’est excessif ! Avis défavorable.
(L’amendement no 3560, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 3562.
M. Philippe Juvin
Par cet amendement, le groupe Droite républicaine souhaite faciliter la transmission entre les grands-parents et les petits-enfants – l’allongement de l’espérance de vie donne l’occasion aux premiers d’aider les seconds lorsqu’ils commencent leur vie d’adulte. Nous proposons donc d’étendre aux legs consentis aux petits-enfants l’abattement en vigueur de 31 865 euros prévu pour les seules donations.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
Défavorable. Ce type d’amendements pose toujours le même problème : en matière de fiscalité, il ne faut pas bricoler. On ne peut toucher à une variable sans considérer la cohérence d’ensemble. La commission juge inutile d’instaurer un nouvel abattement sur les legs des grands-parents aux petits-enfants.
(L’amendement no 3562, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de six amendements, nos 1295, 1290, 293, 2072, 1410 et 3498, pouvant être soumis à une discussion commune. L’amendement no 3498 fait l’objet d’un sous-amendement, no 3690.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 1295.
Mme Véronique Louwagie
Je présenterai à la fois les amendements nos 1295, 1290 et 293. Ils visent à exonérer de DMTG les donations d’un montant maximal de 150 000 euros consenties pour permettre au bénéficiaire de procéder à l’achat d’un logement neuf. Ce dispositif s’appliquerait à partir du 1er janvier 2025 et pour une durée limitée. L’amendement no 1295 en fixe le terme au 31 décembre 2027, l’amendement no 1290 au 31 décembre 2026 et l’amendement no 293 au 31 décembre 2025.
Mme la présidente
Les amendements nos 1290 et 293 viennent donc d’être défendus.
La parole est à M. François Jolivet, pour soutenir les amendements nos 2072, 1410 et 3498, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
M. François Jolivet
La production de logements neufs est actuellement à l’arrêt car, depuis vingt-cinq ans, nous avons fait reposer les politiques publiques sur l’accès à la propriété dans un système d’opérations mixtes. En effet, les communes construisent un tiers de logements sociaux, un tiers de logements intermédiaires et un tiers de logements destinés à l’accession à la propriété, et ces derniers compensent financièrement le déficit lié à l’opération des HLM. Or dans le contexte de remontée des taux et de blocage du marché immobilier, le reste des opérations s’en ressent.
J’appelle votre attention sur ce fait : nous risquons de perdre quatre ans de programmation HLM, compte tenu des délais liés à la livraison des bâtiments et à l’obtention de l’agrément. La promotion immobilière, qui produit 58 % de la construction HLM, se met en berne ; de ce fait, tout s’arrête.
En commission des finances, Mme Louwagie et moi nous étions mis d’accord sur un amendement identique au no 2072. Toutefois, après avoir travaillé avec le Gouvernement et au vu du sous-amendement déposé par Mme Gérard, je retire les amendements nos 2072 et 1410 au profit de l’amendement no 3498, qui vise à exonérer de DMTG les donations d’un montant maximal de 50 000 euros consenties à un enfant ou un petit enfant dans le cadre d’une primo-accession dans le neuf.
Par ailleurs, le Premier ministre a annoncé que le prêt à taux zéro (PTZ) dans le neuf serait généralisé à toute la France, ce qui devrait dynamiser la production de logements sociaux et faciliter l’accession à la propriété.
(Les amendements nos 2072 et 1410 sont retirés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Félicie Gérard, pour soutenir le sous-amendement no 3690 à l’amendement no 3498.
Mme Félicie Gérard
Ce sous-amendement vise à ce qu’un même donataire puisse bénéficier de l’exonération à raison des dons de sommes d’argent consentis dans la limite de 50 000 euros par chacun de ses parents ou grands-parents.
M. Inaki Echaniz
C’est de l’esbroufe ! Ce n’est pas sérieux.
Mme Félicie Gérard
Dans cette période où nous devons réduire dette et déficit et où il est donc difficile d’avoir recours à la dépense publique pour faire face à la crise du logement, il nous semble de bon sens de la combattre en s’appuyant sur l’argent privé.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission a donné un avis favorable à l’amendement no 293 de Mme Louwagie. À titre personnel, j’ai soulevé plusieurs problèmes que me semble poser cette mesure, le principal étant qu’elle est purement conjoncturelle ; comme pour chaque mesure conjoncturelle, il y a fort à parier qu’on demandera à la prolonger dans un an.
Ayant approuvé l’amendement de Mme Louwagie, la commission est défavorable à l’amendement no 3498 de M. Jolivet. Quant au sous-amendement de Mme Gérard, la commission ne l’a pas examiné, mais je peux donner mon sentiment personnel. Il me semble qu’il tend à doubler le plafond de la donation susceptible d’exonération : au lieu de 50 000 euros au total, on pourra en recevoir 50 000 de papa et 50 000 de maman. Au fond, l’amendement no 3498, même sous-amendé, est moins favorable au donataire que l’amendement de Mme Louwagie, et la mesure proposée est tout aussi temporaire.
M. Jean-François Coulomme
Que le logement soit considéré comme bien essentiel, voilà qui fait plaisir !
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Le principe de flécher la donation pour l’acquisition d’un logement me paraît intéressant. En outre, comme l’a très bien dit Félicie Gérard, ce n’est pas excessivement coûteux pour les finances publiques. Nous le savons tous, ces dispositions ne résoudront pas le problème global du logement, mais elles peuvent donner un coup de pouce.
Le Gouvernement donne donc un avis favorable au sous-amendement no 3690 et à l’amendement no 3498 ainsi sous-amendé. Comme l’a dit le rapporteur général, le sous-amendement permet que plusieurs donateurs donnent à un même donataire. Enfin, même si les amendements présentés par Mme Véronique Louwagie sont différents, j’en demande le retrait.
M. Jean-François Coulomme
Ce n’est pas un cadeau pour les enfants, ça ?
Mme la présidente
La parole est à M. Inaki Echaniz.
M. Inaki Echaniz
Nous avons déjà abordé cette question hier soir. Nous sommes défavorables à de telles dispositions, car nous considérons qu’elles concentreront encore les biens immobiliers dans les mains de ceux qui ont déjà la possibilité de donner 150 000 euros, si nous nous appuyons sur les amendements défendus par Mme Louwagie. C’est encore une fois concentrer le patrimoine chez ceux qui en ont déjà. Je rappelle que 50 % des biens immobiliers sont détenus par 3,5 % de la population.
Dans notre société, tout le monde n’a pas la possibilité de donner 150 000 euros en cash, qui viennent s’ajouter aux 100 000 euros en donation qui sont déjà exonérés de droits de succession. Le tout fait 250 000 euros ; c’est un peu gros !
M. Dominique Potier
Exact !
M. Inaki Echaniz
Monsieur le ministre, dès que nous proposons un dispositif, vous nous répondez qu’il faut faire une évaluation pour en connaître le coût pour les finances publiques. Dans le cas présent, bizarrement, une telle évaluation n’est pas nécessaire et vous jugez le coût raisonnable, alors que nous ne connaissons pas le détail. Plutôt que de procéder à des exonérations de donation, concentrons-nous sur le logement social !
Enfin, défendre le sous-amendement no 3690 de Mme Gérard revient à nous prendre pour des idiots.
Mme Véronique Louwagie
Vous n’avez pas le droit de dire ça de Mme Gérard !
M. Inaki Echaniz
En effet, en commission, nous avions jugé que 150 000 euros, c’était trop, par conséquent le plafond a été baissé à 50 000 euros pour être raisonnable ; mais, tout d’un coup, on propose d’adopter un sous-amendement qui a pour conséquence de doubler ou de tripler la mise. Soyez un peu sérieux et arrêtez de nous prendre pour des idiots ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS. – Protestations sur quelques bancs des groupes DR et HOR.)
M. Jean-François Coulomme
Est-ce que ça peut marcher pour les bateaux aussi ?
Un député du groupe LFI-NFP
Et pour les châteaux ?
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Paul Mattei.
M. Jean-Paul Mattei
Hier soir déjà, je voulais intervenir sur ces donations de sommes d’argent. Il s’agit d’argent que les personnes possèdent déjà ; on ne va pas le leur enlever. (Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LFI-NFP, SOC et GDR.) Comme je l’ai dit précédemment, ce qui est intéressant, c’est de faire circuler cet argent. La donation proposée est ciblée vers l’acquisition d’un logement ; elle générera donc de la TVA ; le but est bien de relancer la construction et non d’accumuler un patrimoine pour le plaisir. (Mêmes mouvements.) J’entends ce que vous dites, mais ce patrimoine existe. On peut vouloir changer complètement de société – ce n’est pas notre vision des choses.
J’estime que ce sont des amendements de bon sens, qui permettront de relancer la construction. Il n’est pas question d’aller faire le tour du monde avec cet argent ! Ces exonérations sont ciblées et concernent les investissements dans l’immobilier. Certes, je préférerais qu’elles soient dédiées à la location, au respect des loyers encadrés, mais encore une fois, c’est de l’argent qui existe, on ne va pas le prendre.
M. Nicolas Sansu
C’est de l’argent public puisque ce sont des sommes exonérées de droits !
Mme la présidente
La parole est à M. le président de la commission des finances.
Un député du groupe Dem
Il est d’accord ! (Sourires.)
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Non, je ne suis pas d’accord, et je vais expliquer pourquoi. Il existe déjà un abattement à 100 000 euros par héritier ; cette somme n’entre pas dans la fiscalisation de l’héritage ; c’est déjà beaucoup. Disons-le clairement : on pourrait très bien faire en sorte que ces 100 000 euros servent à acheter un appartement. On pourrait même les cibler vers les logements neufs.
En effet, la première question posée à ceux qui voudraient acheter un logement neuf, c’est : quel est votre apport personnel ? Avec un apport de 100 000 euros – la somme retenue pour la défiscalisation de l’héritage –, on peut assez facilement se lancer dans l’achat d’un logement neuf. Théoriquement, ce premier abattement vise à permettre aux enfants d’entrer dans la vie, si on peut s’exprimer ainsi. Et maintenant, on nous propose d’augmenter encore le montant des donations exonéré de droits – 50 000 euros, voire davantage. C’est sans fin ! Si on met bout à bout ces dispositions, les sommes en jeu sont considérables. On ne fait que renforcer une situation dans laquelle les donations sont de moins en moins fiscalisées. Ce n’est pas acceptable.
M. Inaki Echaniz
Et en plus, il n’y a pas de contrôle !
M. Éric Coquerel, président de la commission des finances
Considérez que les donations de 100 000 euros concernent très peu de Français, dès lors que 85 % des Français ne paient pas de fiscalité sur l’héritage. Pourquoi augmenter encore le montant des donations défiscalisées ? Je suis sensible aux arguments qu’a présentés M. François Jolivet, et je le crois sincère. Néanmoins, ce ne sont pas de telles dispositions qui feront la différence : si quelqu’un hérite de 100 000 euros pour acheter un appartement neuf, il pourra le faire, c’est certain ; il n’a pas besoin d’avoir 150 000 euros pour le faire.
Mme la présidente
La parole est à M. François Jolivet.
M. François Jolivet
J’entends. Je vous invite à lire le rapport publié hier par le Conseil économique, social et environnemental (Cese) : le premier sujet d’inquiétude des Français, c’est le logement, suivi par la santé. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et SOC.)
Plusieurs députés du groupe LFI-NFP
Justement !
M. François Jolivet
Laissez-moi vous répondre. J’invite M. Inaki Echaniz à revoir les amendements adoptés en commission des finances, qui exonéraient de droits des donations supplémentaires de 150 000 euros par donateur ; ça faisait encore plus d’argent par donataire. Pour ma part, je propose 50 000 euros par donateur et donataire – et il s’agit d’un maximum.
Il faut que nous soyons malins tous ensemble, sinon la production de logements s’arrêtera complètement ; les promoteurs procèdent déjà à des licenciements.
Je vous rappelle qu’un logement neuf, d’après les chiffres de l’Insee en 2023, coûte en moyenne 240 000 euros TTC, dont 40 000 euros de TVA. Le Gouvernement a annoncé que le nombre de logements neufs mis sur le marché risquait de baisser de 250 000. Voyez à quelle somme on aboutit en multipliant ce chiffre par 40 000 euros ! Cet argent peut être rattrapé grâce à des mesures concrètes, en s’appuyant sur le principe de réalité. À mon avis, ce que nous proposons ne sauvera pas tout, mais cela permettra tout de même de faire aboutir certaines opérations immobilières.
Je rappelle qu’en 1993, le gouvernement Balladur avait fait voter à l’unanimité de cette assemblée la possibilité pour toute personne d’acheter un logement neuf, sans limite de montant, en étant exonérée des droits de succession. Cela a sauvé les promoteurs et des immeubles ont pu sortir de terre. Aujourd’hui, la production est en train de s’arrêter. Vous pouvez faire le choix de ne pas voter cet amendement (Exclamations sur les bancs du groupe SOC), mais ceux qui en feront les frais sont ceux qui demandent un logement.
(Les amendements nos 1295, 1290 et 293, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
(Le sous-amendement no 3690 n’est pas adopté.)
(L’amendement no 3498 n’est pas adopté.)
(Protestations sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Plusieurs députés du groupe RN
Il faut recommencer le vote !
M. Erwan Balanant
Ils remettent en cause la présidence !
Mme la présidente
Depuis le début de ma présidence, j’ai souvent des doutes, et je demande alors un scrutin public. Si je ne l’ai pas fait cette fois, c’est que je n’avais aucun doute. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, LFI-NFP, SOC, DR, EcoS, Dem et GDR.)
La parole est à M. Vincent Trébuchet, pour soutenir l’amendement no 2909.
M. Vincent Trébuchet
Je suis ravi de présenter cet amendement, car je vais donner une occasion à la gauche de défendre la jeunesse. Nous proposons d’augmenter l’abattement sur les donations dont bénéficient les petits-enfants, actuellement de 31 865 euros, pour le porter à 200 000 euros. (Exclamations prolongées sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.) Nous soutiendrons les amendements suivants qui vont dans ce sens, même s’ils sont moins-disants.
Nous parlions du logement, or 80 % des jeunes souhaiteraient être propriétaires, tandis que seuls 23 % des 25-34 ans sont propriétaires. Parmi les trois quarts qui sont locataires, 75 % ne peuvent pas acheter de logement faute d’apport.
Mme Dieynaba Diop
Et ceux qui veulent juste se loger ?
M. Vincent Trébuchet
Nous proposons qu’au lieu que l’épargne soit stockée entre les mains des personnes les plus âgées,… (Mêmes mouvements.)
Mme Dieynaba Diop
Il y en a qui n’ont pas de quoi manger !
M. Vincent Trébuchet
…des sommes d’argent soient données aux petits-enfants pour qu’ils puissent payer leurs études et surtout s’acheter un logement.
M. le rapporteur général me dira sans doute que si l’on touche à ce dispositif, il faudra toucher à tout – je comprends. Il me dira aussi que cet abattement est plus important que celui qui concerne les donations aux enfants, mais c’est normal,…
Mme la présidente
Il faut conclure.
M. Vincent Trébuchet
…le rappel fiscal étant le même pour les parents et les grands-parents… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur, dont le temps de parole est écoulé.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Charles de Courson, rapporteur général
La commission des finances a donné un avis défavorable, en s’appuyant sur les arguments qu’a évoqués M. Trébuchet. (Sourires.)
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre
Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Vincent Trébuchet.
M. Vincent Trébuchet
Ce que soulignait M. Mattei, à savoir que les parents qui veulent faire une donation à leurs enfants peuvent le faire une fois, rarement deux puisqu’ils ont 85 ans à l’expiration du délai de quinze ans, est vrai a fortiori pour les grands-parents. Il est donc normal que les donations des grands-parents bénéficient d’un abattement plus important.
(L’amendement no 2909 n’est pas adopté.)
Un député du groupe UDR
Vous n’aimez pas la jeunesse !
Mme la présidente
La suite de l’examen du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.
2. Ordre du jour de la prochaine séance
Mme la présidente
Prochaine séance, demain, à neuf heures :
Suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2025.
La séance est levée.
(La séance est levée à minuit.)
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra