XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Première séance du samedi 26 octobre 2024

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Première séance du samedi 26 octobre 2024

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à neuf heures.)

    1. Projet de loi de finances pour 2025

    Première partie (suite)

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2025 (nos 324, 468).
    Hier soir, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 2285 à l’article 12, appelé par priorité.

    Article 12 (appelé par priorité)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 1657, je suis saisie par le groupe Écologiste et social d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Jérôme Legavre, pour soutenir l’amendement no 2285.

    M. Jérôme Legavre

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    Le fret maritime bénéficie d’un dispositif dérogatoire qui lui permet d’échapper de fait à l’impôt sur les sociétés, son assiette n’étant pas assise sur les bénéfices nets, mais sur le tonnage de la flotte.
    Ce dispositif profite à un grand groupe : CMA-CGM. En 2022, ce groupe a réalisé 23,5 milliards d’euros de bénéfices nets –⁠ une somme rondelette. Son PDG est Rodolphe Saadé, à la tête d’un empire multinational dans le secteur maritime mais également dans le secteur des médias : il s’est emparé de La Provence, de La Tribune, de RMC, de BFM TV. Milliardaire, il échappe pourtant quasiment, en France, à l’impôt.
    Nous vous proposons donc de supprimer ce dispositif dérogatoire dont le coût pour les finances publiques s’élève, en 2023, à 5,6 milliards d’euros.
    Pour les macronistes, tout cela est dans l’ordre des choses. Les riches peuvent se gaver tandis qu’on soumet la population à un traitement de cheval. Pour le Rassemblement national, qui a volé hier à son secours, c’est également dans l’ordre des choses. Mais pas pour nous : c’est un concentré d’inégalités et d’injustices. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.

    M. Charles de Courson, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

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    La commission des finances a donné un avis défavorable à cet amendement.

    M. Ugo Bernalicis

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    Tu m’étonnes !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    La taxe au tonnage existe dans vingt-deux des vingt-sept pays de l’Union européenne. Près de 90 % de la flotte mondiale est couverte par un régime similaire, encadré par des recommandations de l’Union européenne.
    Cette taxe a largement rempli son rôle d’outil de défense de la compétitivité des armateurs européens, qui comptent pour trois des quatre premiers armateurs mondiaux : l’italo-suisse MSC, le danois Maersk et le français CMA-CGM. Hors crise, ce dispositif coûtait entre 50 et 300 millions d’euros par an. Son coût a considérablement augmenté entre 2020 et 2023 pour la simple raison que la crise internationale a entraîné une multiplication par dix des taux de fret, expliquant les résultats considérables de toutes les compagnies maritimes –⁠ mais cela à titre exceptionnel.
    Il est tout à fait pertinent de faire contribuer CMA-CGM –⁠ seule entreprise concernée de fait par l’article 12 – par une taxe ponctuelle. Son président est entièrement d’accord avec cette taxation.

    Mme Christine Arrighi

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    Si Monseigneur est d’accord…

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Mais revenir sur cette modalité de taxation mettrait à mal la compétitivité d’une entreprise qui emploie 155 000 personnes dans le monde, dont 4 000 à Marseille.

    Mme Ségolène Amiot

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    Manifestement, en 2023, ça allait bien !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Ce système de taxation au tonnage, chacun le sait, a des contreparties, notamment l’obligation de maintenir une partie de la flotte sous pavillon français. Il n’y a rien de plus facile que de changer de pavillon, et un armateur peut le faire à tout moment. Si cela devait arriver, il n’y aurait plus un seul officier français au sein de CMA-CGM, quand tous le sont actuellement.
    L’abrogation de ce régime de taxation au tonnage serait donc une grave erreur pour les intérêts français et pour l’emploi dans notre pays.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

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    Je ne sais pas si c’est cet amendement qui sera adopté, ou celui que la commission a adopté avant que le texte ne soit rejeté, visant à doubler le montant de la taxe.
    Le groupe CMA-CGM, par rapport aux autres entreprises françaises, bénéficie d’un avantage certain. Il a réalisé 47 milliards d’euros de bénéfices ces trois dernières années. Il faut tordre le cou à une légende, et je vous renvoie pour cela à une enquête parue dans Le Nouvel Obs en décembre 2023 : il est faux de dire que CMA-CGM a toute sa flotte sous pavillon français. Une partie de sa flotte utilise des pavillons de complaisance.

    M. Didier Le Gac

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    C’est la première entreprise française !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Si une partie de sa flotte est sous pavillon français, c’est beaucoup moins reluisant pour le reste. Le groupe CMA-CGM est ainsi déjà très avantagé en tant que flotte battant pavillon français : on peut se demander s’il est nécessaire d’y ajouter un avantage fiscal de ce type.
    Admettons même que toute sa flotte soit sous pavillon français. Embaucher des marins français implique en effet des surcoûts ; mais je doute que ces surcoûts justifient des dizaines de milliards d’euros de cadeaux fiscaux. Il y a là une inégalité vis-à-vis des autres entreprises. Il faut envisager des aides qui soient claires, au lieu de cadeaux fiscaux qui diminuent les recettes de l’État sans permettre la mise en œuvre d’une politique précise. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre du budget et des comptes publics, pour donner l’avis du Gouvernement.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics

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    Au-delà de l’insécurité juridique qui découlerait de l’adoption de l’amendement, que se passerait-il si nous revenions sur la taxe au tonnage ? Comme l’a très bien rappelé le rapporteur général, nous ferions perdre son avantage compétitif à ce secteur d’activité, en France, vis-à-vis des autres pays européens. Nous ne pourrions dès lors pas conserver durablement cette industrie dans notre pays. Ce sont des milliers d’emplois qui sont en jeu, et un secteur d’activité dans son ensemble –⁠ il n’y a pas que le groupe CMA-CGM.
    Nous devons proposer, par souci d’équité, que ce secteur d’activité soit aussi soumis à une taxation exceptionnelle, afin qu’il contribue au redressement des comptes publics. C’est à une telle contribution que vise l’article 12, par un mécanisme fiscal différent de celui prévu par l’article 11. Cette taxation exceptionnelle est assise sur le résultat d’exploitation : 9 % sur le premier exercice, 5 % sur le deuxième. Ce secteur n’échappera ainsi pas injustement à la contribution que nous demandons à toutes les entreprises réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 1 milliard d’euros. Mais cela ne doit pas être une raison pour revenir sur un régime fiscal qui permet à nos armateurs d’exercer leur activité en France, et d’y employer des dizaines de milliers de personnes. Il ne faut pas passer d’une contribution exceptionnelle, exigible par souci d’équité, à la mise en danger d’un secteur d’activité, en revenant sur la taxe au tonnage. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Didier Le Gac.

    M. Didier Le Gac

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    Je confirme que la taxe au tonnage n’est pas une niche fiscale mais un régime fiscal qui ne bénéficie pas uniquement au groupe CMA-CGM mais à l’ensemble des compagnies françaises de ce secteur –⁠ 90 % des compagnies maritimes dans le monde sont également soumises à ce régime. Ce n’est en rien une exception française ni une dérogation accordée à une seule entreprise.
    Au-delà de cette seule question, il faut considérer l’ensemble des enjeux maritimes auxquels la France fait face. La marine marchande française ne va pas bien. Elle a failli disparaître, dans les années 1980 et 1990. Si elle existe encore, c’est grâce au soutien constant des pouvoirs publics : taxe au tonnage en 2004, pavillon RIF (registre international français) en 2005, loi pour l’économie bleue en 2016. Il faut soutenir la marine marchande française, qui est un élément de notre souveraineté, au même titre que les médicaments, l’alimentation, l’énergie. Si, demain, il n’y a plus de compagnie maritime, il n’y a plus de transport de marchandises.

    M. Rodrigo Arenas

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    C’est faux !

    M. Didier Le Gac

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    Ce sont 90 à 95 % des échanges qui, dans le monde, se font par voie maritime. On ne peut pas se passer de compagnie maritime. Nous sommes la deuxième zone économique exclusive du monde, et nous devons approvisionner nos territoires ultramarins. Je suis fier que nous puissions compter dans nos rangs une compagnie comme CMA-CGM, fleuron de la marine marchande mondiale.
    Il faut d’autant plus la préserver que des marins sont en formation au sein de l’École nationale supérieure maritime (ENSM) à Saint-Malo, à Marseille, au Havre. Où iraient-ils naviguer demain ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    M. Aurélien Saintoul

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    Mais combien de temps de parole a-t-il, madame la présidente ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Matthias Renault.

    Mme Ségolène Amiot

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    Pour une minute !

    M. Matthias Renault

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    Cet amendement vise exclusivement le groupe CMA-CGM, et tout ce débat est en réalité apparu au moment de ses résultats pour l’année 2022 : 23 milliards d’euros de bénéfices. Il ne s’agissait pas seulement de superprofits, mais de surprofits : profits indus réalisés grâce à l’inflation.

    M. Jean-François Coulomme

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    Ah !

    M. Matthias Renault

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    Or le bon moyen, pour rattraper cette année exceptionnelle, c’est une contribution exceptionnelle. Ces précédentes années, nous avons d’ailleurs proposé des amendements sur les surprofits d’un certain nombre d’entreprises, dont les compagnies maritimes.
    Mais revenir sur la taxation au tonnage, alors que 90 % de la flotte mondiale y est soumise, aboutirait à créer une distorsion de concurrence insupportable pour les armateurs français, avec le risque que la flotte du groupe CMA-CGM change de pavillon –⁠ opération d’une grande simplicité. Nous préférons donc, pour des questions de souveraineté, une contribution exceptionnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Véronique Louwagie.

    M. Aurélien Saintoul

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    Eux, ils changent de pavillon à chaque élection…

    Mme Véronique Louwagie

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    Je m’étais intéressée l’an passé à cette taxe au tonnage, quand les armateurs, notamment le groupe CMA-CGM, avaient réalisé des profits relativement importants (« Relativement importants ? » sur les bancs du groupe LFI-NFP) –⁠ exceptionnels, vous avez raison.

    Mme la présidente

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    Merci d’écouter les orateurs –⁠ il n’est que neuf heures et quart.

    Mme Véronique Louwagie

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    J’ai pu constater que le dispositif fiscal en vigueur en France ne nous est pas spécifique. Il existe dans les autres pays européens. Nous devons tenir compte des approches fiscales qui existent autour de nous, c’est un enjeu de compétitivité et d’attractivité –⁠ à défaut, nous pourrions avoir à subir des changements de pavillon.
    Avec votre amendement, vous voulez faire fuir les entreprises de France.

    M. Aurélien Saintoul

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    Il ne va pas partir, Rodolphe Saadé !

    M. Michel Herbillon

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    Ils n’aiment pas les entreprises !

    Mme Véronique Louwagie

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    Eh oui, c’est ce qui se passera demain !
    Nos débats dans l’hémicycle, et votre volonté de taxer les entreprises,…

    M. Rodrigo Arenas

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    Vous préférez taxer les pauvres !

    Mme Véronique Louwagie

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    …inquiètent les chefs d’entreprise de mon territoire –⁠ principalement des PME. (Exclamations continues sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Monsieur le ministre, je vous alerte : le monde économique est inquiet ; il l’est depuis le soir de la dissolution de l’Assemblée ; il l’a été durant la période où nous n’avions pas de gouvernement et où les affaires courantes étaient gérées par un gouvernement provisoire. Il nous faut donc le rassurer très vite car nous avons besoin de lui.

    Mme Ségolène Amiot

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    C’est une minute de temps de parole, normalement !

    M. Michel Herbillon

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    Véronique Louwagie a raison !

    Mme Véronique Louwagie

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    Monsieur Coquerel, je suis surprise : en l’espèce, vous semblez plaider pour le remplacement de ce dispositif par une aide aux entreprises alors qu’habituellement vous n’êtes pas favorable à ce type d’aide. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DR.)

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Ce n’est pas vrai ! Je suis contre les aides non conditionnées.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Brun.

    M. Philippe Brun

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    L’amendement no 2614 du groupe Socialistes et apparentés a été déplacé par le service de la séance après l’article 13. Nous souhaiterions le réinsérer dans la liasse à l’article 12. Nous ne comprenons pas pourquoi il a été déplacé car, en commission, nous l’avions examiné à l’article 12.
    Lors de la discussion des deux derniers projets de loi de finances (PLF), nous avions déposé un amendement similaire à celui que nous sommes en train d’examiner. Nous nous interrogions sur l’intérêt de maintenir l’avantage fiscal accordé aux armateurs français –⁠ mais il existe aussi dans vingt-trois autres pays européens et ailleurs dans le monde.
    Cette année, nous n’avons pas souhaité répondre à la question de la même manière. Pourquoi ? Le coût de cette niche est certes très élevé depuis trois ans mais, auparavant, il ne représentait que 45 millions d’euros de dépenses fiscales annuelles.

    M. Ugo Bernalicis

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    Une nichette, en somme…

    M. Philippe Brun

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    C’est un montant raisonnable de soutien au secteur maritime.
    Il faut éviter de mettre à mal la compétitivité de nos entreprises et de nos armateurs –⁠ Brittany Ferries partirait facilement de l’autre côté de la Manche.

    Mme Véronique Louwagie

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    C’est du bon sens !

    M. Philippe Brun

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    Comme en commission, nous souhaitons plafonner le bénéfice de cette niche à 500 millions d’euros. Au-delà, le taux normal d’impôt sur les sociétés (IS), de 25 %, s’appliquerait.
    Il est injuste qu’une entreprise comme CMA-CGM soit taxée à 2 % quand n’importe quelle boulangerie l’est au taux d’impôt sur les sociétés réduit, à 15 %, voire, si elle est plus rentable, à 25 %. Il faut régler ce problème en plafonnant la niche fiscale. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    Monsieur Brun, c’est vous qui, de fait, avez placé votre amendement no 2614 où il se trouve dans la liasse, puisqu’il vise à insérer un article après l’article 13. Le service de la séance s’est contenté d’en prendre acte.

    M. Michel Herbillon

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    Eh oui !

    Mme la présidente

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    Toutefois, après analyse de son contenu et pour la clarté des débats, si vous le souhaitez, il est possible de le « rapatrier » à la fin de l’article 12, appelé par priorité.
    La parole est à M. Jimmy Pahun.

    M. Jimmy Pahun

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    Je vous mets en garde : ne nous leurrons pas, ce ne sont pas les armateurs français qui sont visés par cet amendement, mais CMA-CGM.
    N’oublions pas que, si CMA-CGM a fait des superprofits pendant la crise du covid, il y a quinze ans il a fallu recapitaliser cette même entreprise car le marché du fret maritime est un marché en dents de scie.
    N’oublions pas non plus que CMA-CGM a pris une participation dans Brittany Ferries –⁠ qui a beaucoup souffert du Brexit et de la crise du covid –, que la compagnie a également recapitalisé La Méridionale, contribuant ainsi à la continuité territoriale, qu’elle a investi dans le transport maritime décarboné, rénové sa flotte et acheté des bateaux à voile qui vont traverser l’Atlantique.
    Enfin, CMA-CGM investit également dans des quais et des terminaux portuaires en Afrique, au Brésil et aux États-Unis. Je préfère ces investissements à ceux des Chinois qui achètent le port de Gênes ou du Pirée.

    Mme Christine Arrighi

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    Arrêtez de nous faire la leçon !

    M. Jimmy Pahun

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    On estime que 85 % des superprofits de CMA-CGM ont été réinvestis dans le monde maritime. Heureusement qu’ils sont là !

    Mme Ségolène Amiot

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    C’est par pur altruisme, bien sûr !

    M. Jimmy Pahun

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    Monsieur Coquerel, vous le savez, dépavillonner prend vingt-quatre heures. Réfléchissons donc bien à ce que nous faisons pour ces compagnies maritimes.
    Je m’associe aux propos de notre collègue Le Gac : le Fontenoy du maritime a trois ans et nous avons déjà doublé les effectifs de nos écoles. Il faut continuer ! Or l’adoption de votre amendement risque de porter un coup d’arrêt fatal à la marine de commerce française. (Mme Joséphine Missoffe applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Eva Sas.

    Mme Eva Sas

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    La taxe au tonnage est une niche fiscale, ne jouons pas avec les mots. C’est même l’une des plus coûteuses du budget, avec 5,6 milliards d’euros de dépenses fiscales. C’est énorme et, après analyse des résultats mirobolants du secteur –⁠ notamment ceux de CMA-CGM –, il serait injuste et incompréhensible de ne pas demander un effort, une contribution au redressement des comptes publics et au financement des services publics, à ces entreprises qui font des profits bien supérieurs à la moyenne.
    Alors que les retraités attendront six mois de plus pour que leurs pensions soient revalorisées, comment comprendre que des entreprises aux profits aussi élevés ne soient pas mises à contribution ?

    M. Didier Le Gac

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    Quel rapport ?

    Mme Eva Sas

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    Néanmoins, nous nous abstiendrons sur cet amendement car il nous semble préférable de pérenniser la contribution –⁠ il n’y a pas de raison qu’elle soit exceptionnelle –, tout en l’encadrant, afin que CMA-CGM, comme toutes les entreprises de ce pays, soit mise à contribution.
    Nous plaidons donc en faveur d’un impôt plancher afin que CMA-CGM, et toutes les entreprises de fret maritime, s’acquittent d’une imposition équivalente à au moins 15 % du bénéfice imposable au titre de l’IS, soit le taux auquel sont soumises les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE et PME). C’est le minimum qu’on puisse demander à des entreprises qui font autant de profits. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Joël Bruneau.

    M. Joël Bruneau

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    J’ai bien compris que souvent, dans cette enceinte, certaines mesures visent telle ou telle entreprise. Mais analysons la situation sous un angle plus large. Si CMA-CGM a réalisé de très importants profits ces dernières années, ils ne seront déjà plus de même niveau en 2024. Certains collègues ont évoqué le cas de Brittany Ferries, mais n’oubliez pas que le fret maritime français, c’est surtout une multitude de petits armateurs propriétaires de deux ou trois bateaux et qui ne peuvent maintenir leur activité dans notre pays que grâce à la taxe au tonnage qui permet de financer l’acquisition des bateaux et leur amortissement –⁠ le mécanisme est un peu complexe.
    Quasiment tous les pays du monde ont adopté cette taxe. Certes, les Français se considèrent comme le peuple plus intelligent du monde, ce qui expliquerait un nouveau système dérogatoire et exceptionnel. Mais, je vous en prie, après avoir entendu les différents arguments, à moins de vouloir absolument priver la France de son activité de fret maritime, conservons la taxe au tonnage et préservons cette activité. (M. Charles Sitzenstuhl applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur général.

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Je le répète, la commission des finances a voté contre cet amendement. Si vous l’adoptez, la France n’aura plus de flotte marchande. (M. Didier Le Gac applaudit.)
    Les États-Unis, qui n’ont pas voulu instaurer ce système, n’en ont d’ailleurs plus !

    M. Didier Le Gac

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    Eh oui !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Rien n’est plus mobile que des entreprises de transport maritime.

    M. Ugo Bernalicis

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    Si, l’aviation !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Madame Sas a raison. La moitié des bateaux de CMA-CGM sont sous pavillon européen, et 20 à 25 % sous pavillon français. C’est CMA-CGM qui fait le marché des officiers de la marine marchande française.

    M. Jimmy Pahun

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    Oui !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Sans eux, c’est fini.

    M. Joël Bruneau

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    Mais oui !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    On pourra même fermer les écoles de formation. Soyons-en tous conscients avant de voter.

    M. Didier Le Gac

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    Bravo, monsieur le rapporteur général !

    (L’amendement no 2285 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Eva Sas, pour soutenir l’amendement no 1657.

    Mme Eva Sas

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    Cet amendement vise à pérenniser la contribution exceptionnelle sur les entreprises de fret maritime. Le régime d’imposition forfaitaire actuel dont bénéficient ces entreprises leur permet de minimiser leur IS, puisque celui-ci est calculé selon le tonnage des navires plutôt que sur leurs bénéfices réels. En conséquence, des groupes comme CMA-CGM n’ont payé que 2 % d’impôt sur les sociétés en 2021. On voit bien le caractère exorbitant de cette niche fiscale.
    Bien que ce régime fiscal favorable de taxation au tonnage ait initialement été conçu pour protéger les armateurs européens face à la concurrence étrangère, il nous paraît nécessaire de mieux encadrer cette niche fiscale qui, certaines années, a un coût de plus de 5 milliards d’euros.
    M. Saadé, PDG de CMA-CGM, troisième armateur mondial, assure vouloir prendre sa part pour contribuer au budget 2025, par le biais d’une contribution exceptionnelle.
    Nous lui proposons mieux en pérennisant cette contribution exceptionnelle. Ainsi, chaque fois qu’il le pourra, il participera à l’effort collectif à hauteur de ses moyens et contribuera à financer les services publics et la transition écologique.

    Rappel au règlement

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hadrien Clouet, pour un rappel au règlement.

    M. Hadrien Clouet

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    Il s’appuie sur l’article 100 et concerne les nombreux amendements qui restent à examiner. Madame la présidente, pourriez-vous nous éclairer sur le temps de parole dont nous disposons ? Hier, nous nous étions accordés sur une minute par intervention. Mais peut-être la règle a-t-elle évolué ? Comment envisagez-vous la suite des débats ?
    J’en profite pour remercier le personnel de l’Assemblée pour sa présence matinale et sa contribution au bon déroulement de nos débats. (Applaudissements sur tous les bancs.)

    Mme la présidente

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    Nous nous sommes réunis en conférence des présidents jeudi soir pour ouvrir trois séances ce samedi, et nous sommes convenus que, lorsque ce serait possible, la défense des amendements devrait se limiter à une minute, avec un intervenant pour et un intervenant contre.
    Pour autant, le président est maître des débats.

    M. Hadrien Clouet

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    Tout à fait !

    Mme la présidente

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    En ce qui concerne le premier amendement à l’article 12, voyant que chaque groupe politique voulait s’exprimer et que le sujet était important, après un échange de vues avec le président de la commission des finances, j’ai souhaité que chacun puisse le faire correctement.
    Hier, nous n’avons examiné qu’un peu plus de trente amendements par séance. Vous conviendrez avec moi que les prises de parole ont donc probablement dépassé une minute et qu’il n’y a pas eu qu’un orateur pour et un orateur contre…
    Il faut laisser à la présidence la latitude d’accélérer, ou de faire le choix du débat quand les sujets sont importants. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Pierre Cazeneuve

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    On ne remet pas en cause la présidence !

    Mme la présidente

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    Si chaque groupe demande à s’exprimer, c’est que le sujet est important. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR. –⁠ Mme Véronique Louwagie applaudit également.)

    Article 12 (appelé par priorité - suite)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    La commission des finances a repoussé l’amendement no 1657.
    Je sais que Mme Sas et son groupe sont profondément proeuropéens. La seule solution pour parvenir à une harmonisation consiste à mener des négociations dans le cadre de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Votre amendement revient en effet à créer un dispositif permanent, ce qui ne résout rien car on retombe sur le principe de non-discrimination entre les armements européens. Le problème est toujours le même : comment sommes-nous parvenus à l’impôt minimal de 15 % sur les multinationales ?

    Mme Christine Arrighi

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    Parce qu’on l’a voulu !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Par un accord international ! Telle est la voie à suivre. Pérenniser le prélèvement exceptionnel, c’est une idée qui peut s’entendre mais qui se retournera contre nous.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Dans cet article, il est question de contribution exceptionnelle car des profits ont été enregistrés à la faveur d’une période de crise. Il est très important de ne pas pérenniser cette contribution exceptionnelle, encore plus que celle instaurée par l’article 11. Comme Jimmy Pahun l’a expliqué, nous parlons d’une activité cyclique, en dents de scie. Figer dans la fiscalité de ce secteur d’activité une taxe sur les résultats exceptionnels serait une erreur puisque, par définition, ces résultats peuvent varier très fortement à la baisse –⁠ ce fut le cas dans l’histoire récente des armateurs français. Nous devons rester très souples. Cette année, la contribution exceptionnelle des armateurs et des entreprises françaises du secteur est nécessaire. Si d’autres veulent réinstaurer cette contribution exceptionnelle dans le futur, à la suite d’une autre crise, cela relèvera de leur responsabilité. En revanche, il ne faut pas rendre ce dispositif permanent : nous fragiliserions le secteur en pénalisant sa compétitivité. Avis défavorable.

    M. Didier Le Gac

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    Bravo, il a raison !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Estelle Youssouffa.

    Mme Estelle Youssouffa

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    La situation de CMA-CGM dans les collectivités d’outre-mer pourrait éclairer les débats. Alors que les Antilles se soulèvent contre la cherté de la vie, on ne peut pas avoir cette conversation sans pointer le fait que dans les territoires insulaires, qui dépendent largement du transport maritime pour leur approvisionnement en biens de consommation, ce groupe est souvent en situation de monopole.
    Avant le covid, les tarifs s’élevaient pour Mayotte à 1 500 euros par conteneur ; ils sont passés à 5 000 ou 6 000 euros. La fondation de CMA-CGM a certes généreusement offert de prendre en charge l’approvisionnement en eau de l’île, mais l’entreprise n’a pas baissé ses tarifs. Il faut s’interroger sur les obligations d’une entreprise qui bénéficie des aides publiques (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC, sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe GDR) et qui ne fait aucun effort quand il s’agit de desservir des ressortissants français, en invoquant la compétition internationale. Ce point me paraît important et susceptible d’éclairer nos débats. (Mêmes mouvements.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le président de la commission des finances.

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Votre intervention, collègue, me fournit l’occasion de répondre à Mme Louwagie sur la question des aides aux entreprises. J’ai toujours été favorable à ces aides, à partir du moment où elles s’accompagnent de critères et de conditions –⁠ pour moi, cela devrait être obligatoire. L’entreprise Duralex a récemment été reprise en coopérative : il faut les aider le plus possible à relancer cette chaîne de production indispensable. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)
    L’exemple que notre collègue vient de donner est excellent. Aider CMA-CGM, d’accord, mais quand l’entreprise dégage des profits très importants du fait de sa situation de monopole, on ne peut pas l’aider si elle ne contribue pas à l’intérêt général. C’est toute la question du tonnage. Depuis trois ans, la taxe sur le tonnage –⁠ et j’entends bien que l’activité est cyclique, monsieur le ministre – équivaut à 2 % d’impôts sur les sociétés. Il y a un fossé considérable entre l’avantage conféré et les services rendus, alors même que l’avenir de l’industrie et de l’économie de notre pays passe très certainement par les océans. Il faut certes mettre le paquet là-dessus, mais en l’occurrence le différentiel est trop important et la situation intenable, notamment eu égard aux entreprises des autres secteurs qui s’en étonnent. Cet article doit être l’occasion de prendre des mesures : il faudra au moins doubler cette année la taxe que vous avez proposée et qui devrait en l’état rapporter 500 millions d’euros.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1657.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        173
            Nombre de suffrages exprimés                172
            Majorité absolue                        87
                    Pour l’adoption                94
                    Contre                78

    (L’amendement no 1657 est adopté ; en conséquence, les amendements nos 3143, 2103, 3034, 3196, 3220, les amendements identiques nos 2209 et 3168 ainsi que les amendements nos 1013 et 1603 tombent.)
    (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS, ainsi que sur quelques bancs du groupe GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Christine Arrighi, pour soutenir l’amendement no 3222.

    Mme Christine Arrighi

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    Nous souhaitons corriger une faille dans la rédaction du dispositif de contribution exceptionnelle proposée par le Gouvernement, faille qui pourrait permettre à certaines filiales de grands groupes de transport maritime d’échapper à la contribution au prétexte qu’elles ne réalisent pas individuellement un chiffre d’affaires suffisant. Les groupes pourraient être tentés de créer de nouvelles filiales et de répartir différemment leur activité de manière à optimiser leur contribution, ce qui serait contraire à l’intention du législateur. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Vous souhaitez vous assurer que chaque entreprise faisant partie d’un groupe qui réalise un chiffre d’affaires de plus de 1 milliard d’euros sera assujettie à la taxe. Ces modalités d’assujettissement sont assez classiques en droit fiscal. Je vous garantis qu’il n’y a pas de faille car seule CMA-CGM remplit la condition de chiffres d’affaires –⁠ même si nous adoptions votre amendement, aucune autre entreprise ne serait concernée.
    Cet amendement a reçu un avis défavorable en commission des finances. Vous pouvez le retirer puisqu’il n’a pas de portée.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Christine Arrighi.

    Mme Christine Arrighi

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    Il n’a peut-être pas de portée aujourd’hui, mais les entreprises font preuve de beaucoup d’habileté quand il s’agit de s’adapter à la nouvelle législation. La constitution potentielle de filiales leur permettant d’échapper à l’impôt par une réorganisation de leur capital me paraît possible. Je maintiens mon amendement car je considère qu’il est parfaitement pertinent : les stratégies d’optimisation fiscale, on les connaît ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS, LFI-NFP et SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jimmy Pahun.

    M. Jimmy Pahun

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    J’ai deux éléments faire valoir.
    Nous sommes bien contents d’avoir ces compagnies maritimes pour alimenter les collectivités d’outre-mer, ou quand elles viennent à l’aide de l’État et de la nation…

    M. Jean-Victor Castor

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    Non !

    M. Jimmy Pahun

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    …pour refaire les quais ou les infrastructures portuaires. Heureusement qu’elles sont là !

    Mme Christine Arrighi

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    Mais cela n’a rien à voir avec l’amendement !

    M. Jimmy Pahun

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    Par ailleurs, CMA-CGM avait promis de contribuer à hauteur de 200 millions d’euros à un fonds de dotation pour la décarbonation.

    Mme Christine Arrighi

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    Oui mais on parle de défiscalisation là !

    M. Jimmy Pahun

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    Il me semble que cette participation n’aura finalement pas lieu, en partie par notre faute car nous avons échoué à formuler des propositions très concrètes et claires pour agir vite en matière de décarbonation. En Guadeloupe et en Martinique par exemple, le régime des vents permettrait presque de ne passer que par le transport décarboné.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Nous soutiendrons cet amendement ; comme l’a dit le rapporteur général, il n’a sans doute pas de portée, mais il ne mange pas de pain.
    J’en profite pour interroger le rapporteur général sur l’adoption par la gauche de l’amendement no 1657, qui a fait tomber les amendements identiques nos 2209 et 3168 –⁠ j’étais l’auteur de ce dernier –, lesquels tendaient à doubler la taxe proposée par le Gouvernement. La gauche vient donc de faire un cadeau de 50 % à CMA-CGM en votant n’importe quoi sans réfléchir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    (L’amendement no 3222 est adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 2614 rectifié, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Matthias Renault, pour soutenir l’amendement no 1021.

    M. Matthias Renault

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    Il s’agissait de créer un crédit d’impôt sur la contribution exceptionnelle. Comme nous venons de la pérenniser, le cœur technique du dispositif a un peu moins de sens.
    Nous proposons d’inciter les grands armateurs, en particulier CMA-CGM, à contribuer à la Fondation de l’École nationale supérieure maritime. Pour l’heure, cette contribution est très faible, ce qui est dommage puisque presque tous les officiers de ces entreprises sont français et recrutés à l’issue de leur formation à l’ENSM. Par ailleurs, au terme du Fontenoy maritime, un objectif de doublement du nombre d’officiers français formés par l’ENSM a été fixé. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    La commission des finances a voté contre cet amendement. Le groupe CMA-CGM, qui emploie l’essentiel des marins formés à l’ENSM, a noué des partenariats de longue date avec cette école –⁠ le dernier conduisant au financement du centre de formation Tangram, ouvert sur le site marseillais de l’école en 2023.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Didier Le Gac.

    M. Didier Le Gac

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    Comme notre collègue Jimmy Pahun l’a rappelé, CMA-CGM est déjà un groupe très actif dans le monde maritime, notamment à travers son fonds de décarbonation maritime. Il alimente d’ailleurs le fonds de dotation mis en place l’année dernière par Hervé Berville, alors ministre de la mer. Pour parvenir à décarboner le transport maritime, nous devons franchir un mur d’investissement. Les armateurs français sont sur la bonne voie, notamment grâce à l’utilisation de nouveaux carburants, comme le gaz naturel liquéfié (GNL). Nous avons besoin de ces investissements.
    Le président de la commission des finances a dit que CMA-CGM devait participer davantage eu égard aux autres entreprises. Le Gouvernement a demandé à 400 entreprises françaises de participer à l’effort national de redressement des comptes publics. Il s’agissait de récolter 8,5 milliards d’euros. Le groupe CMA-CGM contribue à hauteur de 800 millions –⁠ la contribution de l’entreprise représente à elle seule 10 % de l’effort demandé par la nation !

    (L’amendement no 1021 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Brun, pour soutenir l’amendement no 2614 rectifié.

    M. Philippe Brun

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    Le coût de la niche fiscale de la taxe au tonnage a explosé en 2022, en 2023 et probablement en 2024. Par cet amendement, je souhaite mettre un terme à ce phénomène.
    Certes elle existe dans vingt-trois autres pays européens mais nous devons tenir compte de l’explosion des profits du groupe CMA-CGM et de l’augmentation du coût des conteneurs, passé, avec la crise du covid, de 2 000 à 20 000 euros –⁠ bien qu’ayant baissé, il demeure élevé aujourd’hui, pour d’évidentes raisons géopolitiques, au premier rang desquelles les menées houthies.
    C’est pourquoi nous proposons que le régime armateur ne puisse s’appliquer que jusqu’à 500 millions d’euros –⁠ c’est déjà un sympathique soutien de l’État –, plafond au-delà duquel s’appliquera le taux normal de l’impôt sur les sociétés, soit 25 %. Ce dispositif permet de taxer nos armateurs, tout en préservant leur compétitivité. S’il avait existé, CMA-CGM n’aurait pas payé seulement 150 millions d’euros d’impôts sur les 25 milliards de profit qu’elle a réalisés en 2022, mais beaucoup plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    L’idée de maintenir un avantage plafonné à 500 millions d’euros est intéressante, mais elle pose plusieurs difficultés. La première, c’est que ce régime est appliqué sous la forme d’une option décennale irrévocable, qui engage à la fois l’entreprise et l’administration, avec le risque que le régime soit modifié dans l’intervalle si le Parlement en décide ainsi. La seconde, c’est que le régime français n’est pas le plus favorable des vingt-deux pays de l’Union européenne qui ont adopté le système de la taxation au tonnage. L’Italie –⁠ où MSC fait partie des quatre plus gros armateurs mondiaux –, la Norvège et l’Espagne ont des systèmes bien plus avantageux.
    Le mieux est parfois l’ennemi du bien et, si la commission n’a pas examiné cet amendement, je donnerai à titre personnel un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Le problème de votre amendement, même si j’en comprends l’intention, c’est qu’en combinant deux assiettes différentes, si vous plafonnez le dispositif, l’activité s’en trouvera freinée et je ne pense pas que nous voulions ralentir la croissance des armateurs français. Je continue donc à penser qu’il vaut mieux en rester à la contribution exceptionnelle, qui se justifie en effet par les profits réalisés depuis la crise du covid. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-René Cazeneuve.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    On l’a beaucoup dit, les concurrents de nos armateurs et du premier d’entre eux ne sont pas français ; ils sont chinois, ils sont danois. L’amendement que l’Assemblée a adopté il y a quelques minutes pose donc un double problème en rendant la contribution permanente.
    D’abord, il envoie au monde de l’entreprise le message que l’effort exceptionnel que nous demandons afin de résoudre notre équation budgétaire pourrait devenir pérenne, alors que nous ne cessons d’insister sur son caractère transitoire. Ensuite, il désavantage évidemment CMA-CGM par rapport à ses concurrents, dans un secteur où les besoins en investissement sont très importants, notamment en matière de verdissement des bateaux. Ce n’est, à nos yeux, pas acceptable.
    Quant à l’amendement de M. Brun, si j’en comprends l’objectif, je pense que nous n’avons pas à porter de jugement moral sur le montant des profits, d’autant que nous parlons d’une activité cyclique et qu’il faut prendre en compte son évolution dans le temps. J’ai d’ailleurs un amendement, après l’article 12, dans lequel il est proposé d’indexer la taxation au tonnage, ce qui est une manière de tenir compte de l’inflation et d’envoyer un signe à nos armateurs, même si la portée de la mesure est moindre.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le président de la commission des finances.

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Cet amendement qui maintient un avantage fiscal en empêchant qu’il devienne totalement disproportionné selon les moments du cycle d’activité me paraît aller dans le bon sens.
    En ce qui concerne l’option décennale évoquée par le rapporteur, elle ne signifie pas que l’Assemblée ne puisse voter une modification de la loi dans les dix ans. S’il est décidé de revenir au strict système de tonnage, la société CMA-CGM y trouvera son avantage, et je doute qu’alors elle aille au contentieux, ce qui limite la portée réelle de cet argument théorique.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2614 rectifié.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        196
            Nombre de suffrages exprimés                193
            Majorité absolue                        97
                    Pour l’adoption                159
                    Contre                34

    (L’amendement no 2614 rectifié est adopté.)
    (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR. –⁠ Mme Estelle Youssouffa applaudit également.)

    (L’article 12, amendé, est adopté.)

    Article 15 (appelé par priorité)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Damien Maudet, inscrit sur l’article 15, pour deux minutes.

    M. Damien Maudet

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    Le groupe LFI-NFP votera cet article qui reporte la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), laquelle, pour 70 %, n’a profité qu’aux grandes entreprises.
    Venons-en à présent à un point de définition. Qu’est-ce qu’un hypocrite ? Selon le dictionnaire, c’est une personne qui cache sa véritable personnalité. À cet égard, ce projet de loi de finances offre de beaux cas d’école : alors que nous examinons un budget qui fait reposer les deux tiers de l’effort sur les Français, sur les écoles, sur les hôpitaux, sur la transition écologique, nous avions, hier, la possibilité d’adopter une taxe exceptionnelle sur les plus grandes entreprises, initialement proposée par le Gouvernement et améliorée par le Nouveau Front populaire. Mais cette dizaine de milliards d’euros qui devaient être prélevés sur les grandes entreprises –⁠ notamment les entreprises du CAC40 – ont été jetés à la poubelle parce que les soixante-dix élus du groupe Rassemblement national présents en séance en ont décidé ainsi. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Emeric Salmon

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    C’est vous qui l’avez saccagée, cette taxe !

    M. Damien Maudet

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    Loin des plateaux télé ou des marchés, dans l’ombre de l’hémicycle sont apparus des hypocrites, nouveaux avocats du CAC40, qui concèdent aux grandes entreprises un magnifique cadeau de 15 milliards d’euros (Mêmes mouvements), alors que 80 % des Français étaient favorables à la taxation, parce qu’ils veulent qu’on arrête de fermer leurs écoles et leurs lits d’hôpitaux, qu’on arrête de taxer les médicaments au travers du reste-à-charge !
    Mais vous avez tout jeté à la poubelle pour faire ce cadeau, et, cet argent, il va maintenant falloir aller le chercher ailleurs. Alors, j’espère que, quand vous irez sur les plateaux télé ou sur les marchés,…

    M. Louis Boyard

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    Les seuls marchés qui intéressent le RN, ce sont les marchés financiers !

    M. Damien Maudet

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    …vous expliquerez aux Français qu’il avait été prévu qu’un tiers de l’effort repose sur les grandes entreprises mais que, grâce à vous, il leur faudra sans doute, à eux, les Français, assumer quasiment 100 % de l’effort, au détriment de leur pouvoir d’achat, de leur pouvoir de vivre et de leur santé. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS. –⁠ M. Olivier Faure applaudit également.)

    M. Emeric Salmon

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    Rien à voir avec l’article 15 !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Tristan Lahais.

    M. Tristan Lahais

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    Rappelons d’abord quelques éléments de contexte. Sur les 3 100 milliards d’euros de notre dette, 250 milliards sont le fait des collectivités territoriales, soit l’équivalent de 8 % du total. Redisons par ailleurs, une fois pour toutes, que cette dette des collectivités est saine puisqu’elle est fondée sur des budgets qui sont non seulement équilibrés mais excédentaires ; elle n’est donc en rien un problème pour la dette publique de la nation.

    Mme Christine Arrighi

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    Il a raison !

    M. Tristan Lahais

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    Pourtant, ce sont près de 10 milliards d’euros qui sont demandés aux collectivités territoriales, sur un total de 20 à 30 milliards d’économies, soit plus de 30 % de l’effort global. C’est profondément injuste.
    Parmi les économies exigées, certaines concernent le produit de TVA affectée puisqu’il est inférieur de 1,5 milliard d’euros à ce qu’était le produit antérieur de la CVAE. C’est la raison pour laquelle nous sollicitons le rétablissement de cette contribution sur la valeur ajoutée des entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)
    Par ailleurs, on ne l’a pas beaucoup dit mais le remplacement du produit de la CVAE par un produit de TVA pose un problème juridique dans la consolidation du PLF. En effet, l’article 72-2 de la Constitution protège l’équilibre entre impôts perçus et dotations reçues dans les ressources des collectivités territoriales. Or, en gelant le produit de la TVA au niveau de 2024, vous transformez de fait cette TVA en une dotation, puisqu’elle devient insensible aux effets d’assiettes et de taux qui sont consubstantiels à l’impôt.
    L’article 15, qui reporte la suppression de la CVAE, est donc une manière pour nous de protéger votre projet de loi de finances contre tout risque d’inconstitutionnalité. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Sansu.

    M. Nicolas Sansu

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    Le groupe GDR soutiendra cet article, qui repousse de trois ans la baisse de la contribution sur la valeur ajoutée des entreprises, même si, évidemment, nous aurions souhaité aller plus loin en rétablissant la CVAE dans son état d’origine.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Je sais !

    M. Nicolas Sansu

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    Vous avez sans doute fait fausse route dans votre poursuite insensée d’une baisse des recettes fiscales dont disposent les collectivités. Leur diminution incessante depuis sept ans, voire depuis des décennies, s’est faite au détriment des ménages puisque, que ce soit par le biais de la TVA, qui compense la baisse de la CVAE et de la cotisation foncière des entreprises (CFE) ou par le biais de l’augmentation des taxes sur les ménages, on diminue la contribution des entreprises aux services publics locaux et à l’investissement public local, ce qui est, à mon avis, une grave erreur.
    Je rappelle qu’avant la suppression de la taxe professionnelle la contribution des entreprises et celle des ménages aux recettes des collectivités territoriales étaient quasiment équivalentes ; aujourd’hui l’écart est de 75 % pour les ménages et 25 % pour les entreprises.
    C’est pourquoi, au-delà de cet article, il y a urgence à réfléchir à un impôt territorial digne de ce nom…

    M. Mathieu Lefèvre

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    Ah ! Un impôt de plus !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Toujours plus d’impôts !

    M. Nicolas Sansu

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    …qui puisse s’asseoir, entre autres, sur la richesse financière, qui a explosé. Je ne veux pas plagier M. Delevoye quand il était président de l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité, mais, oui, la richesse est aujourd’hui financière, et nous devons trouver un impôt territorial qui puisse aussi servir à la péréquation entre collectivités. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur de nombreux bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Edwige Diaz.

    Mme Edwige Diaz

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    En 2022, quelqu’un parlait de « réduire les impôts de production qui pèsent sur l’industrie et l’agriculture, notamment en supprimant la CVAE pour toutes les entreprises ». Ce quelqu’un, c’était le candidat à l’élection présidentielle pour La République en marche, Emmanuel Macron.
    Depuis, les choses ont bien changé. Bruno Le Maire nous a d’abord expliqué que cette suppression se ferait en plusieurs étapes ; puis la mesure a été décalée jusqu’en 2027, et nous découvrons à présent que la suppression définitive ne sera appliquée qu’en 2030.

    M. Ugo Bernalicis

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    Vous êtes plus macronistes que les macronistes !

    Mme Edwige Diaz

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    Nous débattons donc d’une taxe qui aurait déjà dû être supprimée, ce qui est illisible et très anxiogène pour les entreprises, et donc très peu propice à la réindustrialisation du pays, objectif que poursuivent Marine Le Pen et le Rassemblement national.
    Si nous sommes favorables à la suppression de la CFE et de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S), nous pensons qu’il faut respecter la parole donnée pour ne pas rompre le lien de confiance déjà très abîmé entre l’État et les entreprises. Il faut donc aussi supprimer la CVAE.
    Pour que les gens qui nous regardent prennent bien la mesure de la situation hallucinante que nous vivons, plusieurs amendements émanant de macronistes et de membres du groupe Droite républicaine demandent la suppression de cet article, alors qu’il s’agit d’un projet de loi rédigée par leurs propres familles politiques : c’est l’image d’un gouvernement en plein naufrage, et c’est bien dommage. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Nous poursuivons le débat au sujet de la fiscalité des entreprises et le Nouveau Front populaire continuera certainement son concours Lépine en la matière.
    Je m’étonne de ce que vient de dire l’extrême droite, car elle vote depuis des jours toutes les hausses de fiscalité, de concert avec la gauche ;…

    M. Bruno Bilde

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    C’est faux !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    …hier encore elle a soutenu l’augmentation de l’impôt sur les sociétés ;…

    M. Emeric Salmon

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    On a voté contre, avec vous !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    …mais aujourd’hui elle se rend compte que tout cela est peut-être irresponsable et opère un virage à 180 degrés.
    Alors qu’en sept ans elle n’a pas soutenu une fois la volonté d’Emmanuel Macron et de Bruno Le Maire de réduire les impôts de production, elle tente, ce matin, comme par magie, de nous faire croire que c’est le cas –⁠ peut-être qu’une petite lumière s’est allumée.

    M. Julien Odoul

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    C’est vous, la petite lumière !

    M. Nicolas Sansu

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    C’est le réveil des EPR !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Pourquoi défendons-nous depuis sept ans la suppression de la CVAE et la sortie d’une fiscalité fondée sur les impôts de production ? Contrairement à ce que beaucoup prétendent, à gauche et à l’extrême droite, la France n’est pas un paradis fiscal pour les entreprises –⁠ les chiffres le montrent.
    En France, la part des impôts de production dans le PIB s’élève à 4,75 %. Qu’en est-il dans d’autres grandes économies européennes ? En Italie, elle est de 3 % ; en Espagne, celle que le Nouveau Front populaire cite comme exemple, elle est de 2 % ; en Pologne, elle est de 2,5 % ; et en Allemagne, notre principal partenaire et concurrent, elle est de 0,8 %.
    La baisse des impôts de production doit rester un objectif pour le Parlement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jacques Oberti.

    M. Jacques Oberti

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    La suppression de la taxe professionnelle (TP) sur les équipements et biens mobiliers a provoqué l’inquiétude des collectivités territoriales et de leurs entreprises –⁠ la CVAE devait y répondre. De quelles nouvelles recettes dynamiques disposeraient-elles, notamment les intercommunalités, pour subvenir aux investissements majeurs d’aménagement ?
    La CVAE a permis non seulement d’investir dans les infrastructures, dans l’aménagement des zones d’activité et dans les transports, mais aussi dans un certain nombre de services –⁠ les crèches, les centres de loisirs et le logement –, si chers aux chefs d’entreprise, dès lors qu’ils doivent prêter attention à leurs salariés.
    Pourtant, la suppression de la CVAE, annoncée de façon idéologique, n’est pas souhaitée par une grande majorité de chefs d’entreprise dans les territoires. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)

    M. Philippe Brun

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    C’est vrai !

    M. Jacques Oberti

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    La suppression par étapes de la CVAE sera en partie compensée par le fonds Vert –⁠ nous constatons aujourd’hui dans quelle mesure – et privera à terme les territoires de recettes, certes moins dynamiques que la TP, mais encore disponibles.
    Afin de maintenir les investissements nécessaires au développement du monde économique dans nos territoires, il est fondamental de conserver la CVAE. Faisons-le pour les collectivités territoriales. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    M. Philippe Brun

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Corentin Le Fur.

    M. Corentin Le Fur

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    Nous avons pleinement conscience qu’il est impératif de baisser les impôts de production. Y compris la part allouée au versement mobilité,…

    M. Nicolas Sansu

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    Ben voyons !

    M. Stéphane Peu

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    Bien sûr !

    M. Corentin Le Fur

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    …car elle est en partie payée par des entreprises dont les salariés ne bénéficient pas de transports publics.
    Cela étant, compte tenu du déficit très inquiétant et de la dérive vertigineuse des finances publiques, nous soutenons cet article et le report de la baisse des impôts de production –⁠ mais ce n’est pas par gaieté de cœur.
    Collègues du groupe Rassemblement national, nous sommes très fiers de notre indépendance. (MM. Julien Odoul et Matthias Renault rient.) Nous soutenons pleinement Michel Barnier et son gouvernement, mais nous ne sommes pas pour autant caporalisés.

    M. Emeric Salmon

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    C’est parce que votre caporal est absent !

    M. Corentin Le Fur

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    Le droit d’amendement est garanti par la Constitution.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Très juste !

    M. Corentin Le Fur

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    Il est essentiel que nous jouions notre rôle de parlementaires pour infléchir le projet de loi de finances sur certains aspects. C’est fondamental ; c’est pourquoi nous avons été élus. (Mme Émilie Bonnivard et M. Jean-Didier Berger applaudissent.)

    Mme la présidente

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    Sur les amendements no 817 et identiques, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 817, 1178 et 2993, tendant à supprimer l’article 15.
    La parole est à M. Matthias Renault, pour soutenir l’amendement no 817.

    M. Matthias Renault

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    Nous aurions préféré supprimer la CFE, dans le respect de notre programme, mais supprimer la CVAE nous convient aussi car il faut baisser les impôts de production.
    Collègues qui soutenez le Gouvernement, le Rassemblement national défend la baisse des impôts de production. Je préfère le rappeler, parce que sitôt l’examen du budget fini, vous prétendrez le contraire sur les plateaux de télévision et vous nous accuserez d’avoir voté de nouvelles taxes, par une alliance avec la gauche. C’est l’inverse !

    M. David Amiel

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    Elles n’ont pourtant pas été votées par une opération du Saint-Esprit !

    M. Matthias Renault

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    Vous avez adopté une stratégie de l’absence cette semaine, grâce à laquelle ont été adoptées les taxes zinzins de la gauche.
    Cet amendement nous permet de défendre la baisse des impôts de production. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 1178 de M. Vincent Rolland est retiré.

    (L’amendement no 1178 est retiré.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Éric Woerth, pour soutenir l’amendement no 2993.

    M. Éric Woerth

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    Je suis favorable à l’article mais, avant de retirer mon amendement, je dirai quelques mots.
    Il faut supprimer la CVAE car elle est un impôt de production. Il a été démontré qu’il s’agissait d’une erreur économique. Je regrette néanmoins son report causé par les circonstances.
    Au-delà des entreprises, la question qui se pose est celle du financement des collectivités locales. Nous avons besoin, sûrement par une concertation approfondie, de dissiper la défiance absolue entre l’État et les collectivités locales et, afin de motiver les Français, de rééquilibrer et revitaliser cette relation.
    Il faut certes revoir leurs compétences, surtout améliorer la gouvernance des finances locales, mais en se parlant entre adultes. Il faut également discuter de la répartition de l’impôt entre politiques locales et nationales.

    (L’amendement no 2993 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    La commission des finances a voté contre les amendements de suppression de l’article.
    À la suite des réformes de 2021 et de 2023, la CVAE a diminué de 11,3 milliards d’euros. Il restait donc 4,3 milliards à supprimer au titre de l’année 2024 et 6,1 milliards d’euros pour les trois années suivantes à raison de 1,1 milliard pour 2025, 2 milliards pour 2026 et 3 milliards pour 2027.
    Compte tenu de la dégradation des finances publiques, est-il responsable de baisser les impôts sans avoir baissé à niveau équivalent les dépenses ?

    Mme Christine Pirès Beaune

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    C’était déjà le cas l’année dernière !

    Mme Émilie Bonnivard

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    C’est bien le problème !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Il y a un autre problème : la CVAE est uniquement perçue par l’État et sa baisse est compensée par une quote-part de TVA qui ne progressera pas cette année.
    Monsieur le ministre, avant que nous ne votions, il est important de rappeler, comme l’ont fait plusieurs orateurs, que le lien entre les entreprises et les collectivités territoriales a été cassé. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

    M. Guillaume Garot

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    Exactement !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Pourquoi est-ce qu’une intercommunalité, un département ou une région investirait aujourd’hui dans une zone d’activité, s’il n’y a plus de retour sur investissement ?

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Pour l’emploi !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Cela pose un vrai problème pour la compétitivité du pays.

    M. Emeric Salmon

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    C’est bien connu que les collectivités aident seulement dans un but économique !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le président de la commission des finances.

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Certains acceptent d’imposer les bénéfices, mais je suis pour imposer avant. Une entreprise est un agent économique qui bénéficie de structures payées par tout le monde –⁠ par exemple les structures routières ou différents services financés par l’État ou les collectivités territoriales. Dès lors, il est normal d’être imposé et de contribuer au financement de ces services. Voilà le principe.
    Ce qu’a dit le rapporteur général est parfaitement juste. Cette réforme s’est révélée inefficace : si les collectivités territoriales avaient un intérêt à attirer des entreprises, ne serait-ce que pour les ressources que cela pouvait générer, il a été perdu. Tout le monde ici en convient.
    La baisse de la CVAE a été compensée par la TVA. C’est une nouvelle illustration que la TVA sert à tout, dès lors qu’on supprime la redevance télé, la CVAE, etc. Les finances publiques sont biberonnées à la TVA. Si elle est dynamique, tout va bien ; mais sitôt qu’elle l’est moins, comme c’est le cas, apparaissent les difficultés. C’était une très mauvaise compensation.

    Mme Christine Arrighi

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    Nous leur avions pourtant bien dit !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Tout le monde convient qu’il y a des efforts à faire, alors autant reporter cette baisse, afin que chacun y contribue.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    L’amendement de suppression restant en discussion a ouvert un débat sur le lien fiscal entre les territoires, les agents économiques et l’ensemble des contribuables. Je ne veux pas l’éluder mais nous l’avons déjà eu à l’occasion de la discussion sur les finances locales, en présence de Catherine Vautrin, et nous l’aurons à nouveau quand nous aborderons les articles relatifs aux collectivités territoriales.
    Monsieur le président Coquerel, je ne suis pas en désaccord avec vous concernant les impôts de production. Les entreprises contribuent effectivement par l’impôt foncier. La fiscalité sur le foncier est maintenue et les impôts de production ne disparaissent pas. Le sujet est celui de la proportion, comme souvent quand il s’agit de fiscalité.
    Les niveaux d’impôt de production avec les taux de CVAE antérieurs à 2020 étaient-ils trop élevés, du point de vue de notre compétitivité avec nos voisins ? Oui. Est-ce encore le cas ? Oui, mais ça va mieux.
    La question est donc plutôt de savoir s’il faut maintenir la CVAE. J’y suis défavorable, mais l’état de nos finances publiques ne nous le permet pas.

    Mme Christine Arrighi

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    On vous avait prévenus !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Compte tenu de la situation des finances publiques, il serait déraisonnable de maintenir la trajectoire initiale. Nous ne faisons que la reporter, tout en gardant l’objectif de la supprimer définitivement.
    Le Gouvernement souhaite maintenir l’article 15, pour disposer d’une trajectoire crédible de redressement des finances publiques et confirmer aux entreprises, qui ont besoin de visibilité et d’assurances, que la suppression de la CVAE est toujours à l’agenda du Gouvernement.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Très bien ! (M. Charles Sitzenstuhl applaudit.)

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Enfin, pour ce qui est du lien fiscal entre la vie économique ou citoyenne et les collectivités, ne prétendons pas qu’il a été rompu…

    Mme Christine Arrighi

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    Il n’existe plus !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    …quand il a seulement été modifié. Ainsi, il est plus exact de rappeler que la part de CVAE supprimée a été remplacée par une fraction de TVA et que la disparition de la taxe d’habitation a été financée et compensée.
    Quelle est votre solution : réinstaurer la taxe d’habitation ? (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP) En la supprimant, nous avons rendu 20 milliards d’euros à nos concitoyens et je vous laisse leur annoncer le retour de cet impôt ; quant à moi, je crois que le pouvoir d’achat qui leur a été rendu ne doit pas leur être repris dès que les temps deviennent compliqués pour les finances publiques. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Ugo Bernalicis

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    Il aurait fallu bien gérer les comptes !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Cazeneuve.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Je tiens d’abord à m’excuser pour ma tenue : je n’avais pas prévu que nous siégerions ce samedi. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.) Par respect pour mes voisins, j’ai préféré un t-shirt propre à une chemise sale. (Mêmes mouvements.)

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    On a atteint un niveau…

    M. Stéphane Peu

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    Il est venu en pyjama !

    M. Pierre Cazeneuve

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    C’est fantastique, on ne peut pas faire un trait d’humour. Ils ignorent ce que j’ai à dire, mais ils gueulent : la France Insoumise vocifère par réflexe.

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Votre temps de parole n’est-il pas déjà écoulé ?

    Mme la présidente

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    Monsieur le député, poursuivez.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Je voulais revenir sur les propos du député du groupe Rassemblement national qui nous accusait à l’instant d’avoir mené une certaine stratégie : ses collègues et lui ont une mémoire de poisson rouge : contrairement à nous, ils ont voté une taxe pérenne des armateurs, cela avec les voix de la gauche de l’hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR. –⁠ Mme Émilie Bonnivard applaudit également.)

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Ce n’est pas vrai et vous étiez dans votre lit à ce moment-là !

    M. Pierre Cazeneuve

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    Vous venez de voter l’article 12, le compte rendu en fera foi.

    Mme Sandra Regol

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    Pouvez-vous parler de l’amendement plutôt ?

    M. Pierre Cazeneuve

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    On ne comprend rien à la stratégie économique du Rassemblement national : il y a encore un mois, vous défendiez un programme coûtant 100 milliards d’euros –⁠ TVA nulle sur les produits de première nécessité, suppression de l’impôt sur le revenu pour les moins de 30 ans… –, et vous vous faites à présent les grands défenseurs des entreprises.

    M. Julien Odoul

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    Il faut aller se rhabiller !

    Mme Sandra Regol

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    La chemise, les amendements votés les jours précédents… Et si vous parliez de l’amendement en discussion ?

    M. Pierre Cazeneuve

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    Il n’y a aucune cohérence dans ce que vous proposez, en l’occurrence de supprimer cet impôt sans compensation. Vous êtes d’une irresponsabilité économique absolue. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR. –⁠ Mme Émilie Bonnivard applaudit également. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Aurélien Le Coq.

    Mme Clémence Guetté

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    Voilà quelqu’un de bien habillé !

    M. Aurélien Le Coq

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    L’exercice du débat budgétaire est riche d’enseignements et, hier soir, les masques sont définitivement tombés au RN. (M. Hadrien Clouet applaudit.) Ses députés sont, dans cet hémicycle, sans doute les premiers et les plus grands défenseurs de la politique économique d’Emmanuel Macron. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

    M. Théo Bernhardt

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    Vous avez voté pour Emmanuel Macron !

    M. Aurélien Le Coq

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    Hier, ils ont fait supprimer la surtaxe exceptionnelle sur les grandes entreprises que voulaient abroger les premiers macronistes –⁠ elle aurait dû rapporter 8 milliards d’euros dès 2025, d’après le projet initial du Gouvernement, et 13 milliards d’euros après amendement.
    Aujourd’hui, ils décident de réaliser le rêve originel de Bruno Le Maire et d’Emmanuel Macron, avec la suppression de la CVAE, payée par les 10 000 plus grandes entreprises et qui rapporte 5 milliards d’euros à l’État.

    M. Gérault Verny

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    Vous avez voté pour Emmanuel Macron !

    M. Frédéric Boccaletti

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    C’est n’importe quoi !

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    On n’est pas communistes tout de même !

    M. Aurélien Le Coq

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    Comme vous l’avez vous-mêmes rappelé hier, collègues du groupe Rassemblement national, il n’y a pas d’argent magique. Les 5 milliards d’euros que vous voulez supprimer seront donc compensés par la TVA, si bien que vous voulez faire payer aux Françaises et aux Français ce qui permet de faire vivre nos collectivités territoriales. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS.)
    Aujourd’hui, vous décidez de laisser tomber les mairies et les départements ! Vous décidez de laisser tomber les collectivités les plus proches des Français et de le leur faire payer plutôt qu’aux grandes entreprises. C’est une honte ! (Mêmes mouvements.)
    Vous êtes démasqués et il faut que cela se sache : vous avez trahi le peuple français ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Edwige Diaz.

    Mme Edwige Diaz

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    Tout à l’heure, un député macroniste a dit que la France n’était pas un paradis pour les entreprises : rien n’est plus évident, tant les entreprises sont asphyxiées par vos taxes, étranglées par vos normes et fragilisées par l’instabilité réglementaire dont vous êtes responsables. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. –⁠ Exclamations continues sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Charles Sitzenstuhl

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    J’ai dit que la France n’était pas un paradis fiscal pour les entreprises, il faut me citer en entier !

    Mme Edwige Diaz

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    Le temps est venu de respecter la parole qu’Emmanuel Macron, alors candidat à l’élection présidentielle, a donnée : oui, il faut supprimer la CVAE, même si, comme Marine Le Pen, nous aurions préféré la suppression de la C3S et de la CFE.
    Votre comportement est irresponsable, car la CVAE est la cause de la chute du moral des chefs d’entreprise,…

    M. Stéphane Peu

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    C’est le RN qui n’a pas trop le moral en ce moment…

    Mme Edwige Diaz

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    …ces mêmes chefs d’entreprise que vous entendez, en circonscription, vous dire qu’ils attendent pour recruter et investir.

    Mme Alma Dufour

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    Vous devriez parler de l’amendement !

    Mme Edwige Diaz

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    Constatant que les tribunaux de commerces ne désemplissaient pas et s’alarmant de défaillances d’entreprises toujours plus nombreuses, le président de la chambre de commerce et d’industrie (CCI) Bordeaux Gironde s’est inquiété, par voie de presse, de la morosité ambiante. Soyez raisonnables et tenez parole.
    Je m’étonnais plus tôt de l’amendement LR-macronistes,…

    M. Ugo Bernalicis

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    Alors qu’on examine là un amendement RN-macronistes !

    Mme Edwige Diaz

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    …qui tendait à supprimer l’article 15. Vous venez de le retirer et c’est exactement ce qu’il ne fallait pas faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Paul Mattei.

    M. Jean-Paul Mattei

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    Le débat sur les impôts de production est ancien : il a commencé lorsque Nicolas Sarkozy a supprimé la taxe professionnelle, qu’il a fallu remplacer par la contribution économique territoriale (CET), la CFE et la CVAE. Au sujet de cette dernière, je rappelle que la liberté de taux n’apparaît plus pour les communes et qu’en tant qu’impôt de production, il s’applique à toute entreprise, quel que soit son résultat.
    On a du mal, du fait de tout ce qui se passe ici depuis quelques jours, à percevoir l’équilibre du texte. Reste que le PLF, dans sa version initiale, prévoyait le report de la suppression de la CVAE, en guise d’effort exceptionnel. Rappelons également que même si cette contribution était supprimée, les entreprises paieraient encore des impôts en fonction de leur implantation –⁠ la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) ou encore la taxe d’aménagement (TA) sur les locaux industriels.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Et des impôts sur le transport !

    M. Jean-Paul Mattei

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    Dans l’idéal, nous supprimerions la CVAE qui s’applique même en l’absence de profit.

    M. Emeric Salmon

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    Ah !

    M. Jean-Paul Mattei

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    Tandis que la taxation exceptionnelle des profits et la taxe différentielle ne s’appliquent qu’aux entreprises bénéficiaires. Retrouvons le bon sens et l’équilibre qui peuvent nous faire défaut, on le sait bien, même si nos débats, trop souvent émaillés d’invectives, s’achèveront par le rejet du texte. Je le regrette énormément. (Mme Sophie Mette et M. Éric Woerth applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Éric Ciotti.

    M. Éric Ciotti

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    Dans cette affaire se posent un problème de fond et un problème de forme, en l’occurrence le respect de la parole de l’État et la fin de l’instabilité fiscale que subissent les entreprises et les autres acteurs économiques. Les entreprises souffrent d’un régime qui change en permanence. Dans ce théâtre un peu ridicule…

    M. Inaki Echaniz

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    Et dont vous êtes la principale marionnette !

    M. Éric Ciotti

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    …et dont, en définitive, il ne restera rien, nous contribuons à cette immense instabilité en procédant à un détricotage ou en décidant de mesures ahurissantes.

    Mme Clémence Guetté

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    C’est la première fois de la semaine qu’on vous voit, monsieur Ciotti, on se passera donc de votre avis !

    M. Éric Ciotti

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    Ce faisant, nous portons atteinte à la crédibilité et à la compétitivité du pays.
    Sur le fond, on sait que les impôts de production sont en moyenne deux fois plus élevés en France que dans le reste de l’Union européenne : nos entreprises font face à problème de compétitivité, à tel point qu’il est indispensable que la parole de l’État soit respectée et que la baisse de la CVAE s’applique enfin. C’est justement ce que propose l’amendement no 817 de Jean-Philippe Tanguy. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Véronique Louwagie.

    Mme Véronique Louwagie

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    Si nous voulons diminuer les impôts –⁠ ceux des entreprises ou ceux des ménages –, nous devons diminuer les dépenses publiques. Une politique guidée seulement par la diminution des impôts et des recettes de l’État ne parviendrait pas à dévier notre déficit de sa trajectoire et à mettre fin à la spirale de la dette.
    Mme Diaz parle d’instabilité fiscale, mais je voudrais pointer l’instabilité du groupe Rassemblement national. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et EPR.)

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Ah !

    Mme Véronique Louwagie

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    Ses députés viennent de voter pour l’article 12, qui impose une charge aux armateurs, ils ont soutenu les amendements de Mme Sas qui pérennisent ce dispositif, puis l’amendement de Mme Arrighi et l’amendement de M. Brun plafonnant le profit tiré de la niche fiscale au tonnage. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Emeric Salmon

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    Tandis que vous, vous avez déposé un amendement tendant à supprimer l’article 12.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Vous êtes incohérents, on ne comprend rien !

    Mme Véronique Louwagie

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    Le groupe RN a créé une charge pérenne sur le profit des entreprises de transport maritime. L’instabilité de ses positions se manifeste également au sujet de la pérennisation de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus : en commission, ses députés l’ont soutenue, avant de s’abstenir de la voter en séance.

    M. Alexandre Dufosset

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    Vous vous trompez certainement de fiche !

    Mme Véronique Louwagie

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    Où est la stabilité, quelle est leur ligne politique ? (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et EPR.)

    M. Gabriel Attal

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 817.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        214
            Nombre de suffrages exprimés                214
            Majorité absolue                        108
                    Pour l’adoption                67
                    Contre                147

    (L’amendement no 817 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de huit amendements, nos 2483, 2520, 2650, 3373, 496, 2503, 2649 et 2681, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 2520, 2650 et 3373 sont identiques.
    La parole est à Mme Marianne Maximi, pour soutenir l’amendement no 2483.

    Mme Marianne Maximi

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    Il tend à revenir sur les baisses d’impôts de production inscrites dans les dernières lois de finances. Évidemment, quelques améliorations ont été obtenues dans ce PLF, mais le compte n’y est pas encore.
    Les impôts de production constituent une catégorie fourre-tout, qui ne met personne d’accord. En juillet 2020, un rapport du Conseil d’analyse économique (CAE) rattaché à Matignon montrait toutefois que les trois secteurs les plus favorisés par les baisses d’impôts de production sont ceux de la production d’électricité et de gaz, des industries extractivistes et de la finance.
    De fait, ces baisses d’impôts profitent bien plus aux très grosses entreprises qu’aux petites.
    Ce gouvernement et le précédent ont tapé sur les collectivités pour en faire les responsables de la situation budgétaire de l’État. Rien n’est pourtant plus faux ! Alors que vous voulez supprimer des impôts et diminuer la souveraineté de l’administration locale, vous annoncez des prélèvements sur les recettes de ces collectivités responsables. Soyez cohérents !
    Quant au Rassemblement national, je constate qu’il tape systématiquement sur les collectivités locales. Les amendements que vous déposez ont pour effet de les affaiblir et donc d’affaiblir les services publics locaux, les centres communaux d’action sociale (CCAS) ou encore les services de restauration scolaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP, GDR et SOC.) Vous portez par-là atteinte au système de solidarité le plus proche de nos concitoyens, le plus efficace face à la crise sociale que nous traversons. Vous êtes une véritable arnaque sociale ! (Mêmes mouvements.)

    M. Louis Boyard

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    Eh oui, elle a tout dit !

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement n° 2520, je suis saisie par le groupe Écologiste et social d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Aurélien Le Coq, pour le soutenir.

    M. Aurélien Le Coq

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    Il vise à rétablir graduellement la CVAE.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Colette Capdevielle, pour soutenir l’amendement no 2650.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Il faut le retirer, ainsi que l’amendement no 2520 !

    Mme Colette Capdevielle

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    Les deux tiers de l’allègement induit par la suppression de la part régionale de la CVAE ont profité à 10 000 grandes entreprises, issues pour la plupart, qui plus est, de secteurs d’activité polluants. La CVAE ne s’applique qu’aux entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 500 000 euros et ses régimes d’exceptions sont légion. En se privant de ce levier fiscal, l’État réduit les ressources financières des collectivités.
    En défendant la suppression de cette contribution, le Gouvernement s’assoit sur l’autonomie financière des collectivités, qui a pourtant une valeur constitutionnelle. L’argument selon lequel cette suppression procurerait une plus grande liberté aux entreprises et auquel se rangent les macronistes pour justifier un tel cadeau fiscal ne tient pas : les chefs d’entreprise décident rarement de l’implantation de leur société sur des critères fiscaux, mais bien plus souvent en fonction des infrastructures disponibles, de l’environnement économique, de la qualité des services publics locaux, de la possibilité de se loger et des compétences des travailleurs.
    Arrêtons de distribuer des cadeaux fiscaux, Noël est encore loin ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Tristan Lahais, pour soutenir l’amendement no 3373.

    M. Tristan Lahais

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    Je regrette, comme notre collègue Mattei, le ton de notre débat, les invectives que nous pouvons entendre et qui ne sont pas à la hauteur des responsabilités que nous exerçons. « Taxes zinzins », concours Lépine de la fiscalité : il me paraît assez décalé de qualifier de la sorte nos propositions. Ces expressions témoignent, de la part de ceux qui les emploient, d’une certaine indifférence pour le dérapage des comptes publics, alors que le déficit public est passé, je le rappelle, de 2,6 % en 2017 à plus de 6 % aujourd’hui.
    Si l’on veut vraiment remédier à ce déséquilibre, il faut examiner lucidement ce qui, dans cette explosion des comptes publics, relève d’une augmentation des dépenses et d’une baisse des recettes. Or il se trouve que le poids de la dépense publique dans le PIB a baissé de 0,6 point depuis 2017. Ce sont donc exclusivement les baisses d’impôt qui expliquent le dérapage de nos comptes publics. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EcoS et SOC.)

    M. Mathieu Lefèvre

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    Vous racontez n’importe quoi !

    M. Tristan Lahais

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    Par conséquent, il est assez irresponsable de nous invectiver lorsque nous envisageons simplement de rétablir des impôts. Il ne s’agit pas, en l’espèce, d’augmenter des recettes fiscales, mais d’en rétablir certaines, dans un esprit de justice, au moment où nos comptes dérapent.
    Le fait qu’une fraction de la TVA soit reversée aux collectivités territoriales pour compenser les pertes de recettes liées à la réforme de la CVAE n’est acceptable qu’à condition qu’elle reste dynamique –⁠ c’est ce qui en fait un impôt. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EcoS et SOC.) Or, en la gelant à son niveau de 2024, vous la transformez de fait en une dotation, ce qui n’est plus conforme à l’article 72 de la Constitution. Il y a donc, dans ce PLF, un vrai problème juridique. (Mêmes mouvements.)

    Mme Cyrielle Chatelain

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    C’est implacable !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 496.

    M. Stéphane Peu

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    Pour illustrer les propos de nos collègues, je prendrai l’exemple d’un territoire que le président de la commission des finances connaît bien aussi, puisque nous en sommes tous deux élus.
    Pendant près d’un siècle, la Plaine Saint-Denis a été la plus grande zone industrielle d’Europe. Puis, dans les années 1960, avec la désindustrialisation dans la métallurgie et la chimie, ce territoire est devenu une grande friche industrielle. Or c’est l’engagement des collectivités depuis une trentaine d’années, ce sont les dépenses considérables qu’elles ont faites…

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Elles étaient à l’os !

    M. Stéphane Peu

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    …pour créer des zones d’aménagement publiques et acheter des terrains qui font que la Plaine Saint-Denis est, depuis vingt ans, le territoire qui tire la croissance de la région Île-de-France. Plus que La Défense !
    Après avoir coupé le lien entre le logement, la production de logements et les communes en supprimant la taxe d’habitation et les aides aux maires bâtisseurs, vous voulez couper le lien entre les collectivités et les entreprises. Mais les entreprises ne tombent pas du ciel sur un territoire ! Il faut faire beaucoup de dépenses pour les attirer, et c’est toute la croissance de ce pays que vous allez mettre à terre si vous coupez le lien entre les entreprises et les collectivités locales, qui sont le premier facteur de cette croissance par leurs investissements et leurs aménagements.
    C’est pourquoi nous proposons de rétablir la CVAE pour les entreprises qui font non pas plus de 500 000 euros, mais plus de 1 milliard de chiffre d’affaires afin que les collectivités soient au rendez-vous de la croissance dans ce pays, comme elles l’ont été dans le territoire de la Seine-Saint-Denis, et qu’elles puissent créer de la richesse. Ne coupez pas les pattes –⁠ excusez l’expression – à ce qui peut aider notre pays à se développer et à s’enrichir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.)

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Aurélien Le Coq, pour soutenir l’amendement no 2503.

    M. Aurélien Le Coq

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    Avec cet amendement de repli, nous proposons de rétablir la CVAE uniquement pour les entreprises qui font 1 milliard de chiffre d’affaires, ce qui est particulièrement raisonnable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Paul Christophle, pour soutenir l’amendement no 2649.

    M. Paul Christophle

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    Il s’agit également d’un amendement de repli, qui vise à revenir sur la suppression progressive de la CVAE, votée dans la loi de finances pour 2023. Nous ne cessons de le dire : l’effort budgétaire ne doit pas porter seulement sur les familles, le travail et les collectivités territoriales.
    Une partie du fonds Vert sert à compenser la suppression des impôts de production, alors qu’il a vocation à financer la rénovation thermique de nos écoles, la végétalisation de nos places publiques et la création de nouveaux moyens de mobilité dans la ruralité.
    Arrêtez de toujours sacrifier les mêmes et revenez sur la suppression de cet impôt ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 2681 de M. Laurent Mazaury est défendu.
    Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Les premiers amendements proposent de rétablir entièrement et immédiatement la CVAE ; les suivants de la rétablir entièrement, mais progressivement ; les derniers de ne la rétablir que partiellement.
    Ils partent tous du constat, établi par de nombreux orateurs, que l’on a cassé le lien entre les entreprises et les collectivités territoriales et visent à répondre à cette question de fond : comment rétablir ce lien ? Il faut une assiette territorialisée et des taux fixés par les assemblées locales. Sinon, il n’y a plus d’autonomie fiscale et la démocratie locale dépérit : voilà la question de fond.
    La commission des finances a examiné les premiers amendements et les a rejetés. Tous ceux qui ont siégé au sein du Comité des finances locales (CFL) ou dans d’autres instances de ce type savent combien la question de la base territorialisable est difficile. Il y a les salaires ; il y a la valeur ajoutée, qui faisait partie de la CVAE, mais qui pose des problèmes lorsqu’on a des groupes intégrés. Comment, en effet, répartir la valeur ajoutée des groupes entre les différentes unités : communes, communautés de communes, départements, régions ? Tout cela est très compliqué.

    M. Éric Woerth

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    Il y a la taxe professionnelle !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Dans son rapport, Éric Woerth proposait de donner une part d’impôt sur les sociétés, mais la base de l’IS n’est pas territorialisable : c’est bien le problème !

    M. Éric Woerth

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    Autant que la CVAE !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    La contribution sociale généralisée (CSG), elle, est territorialisable, au moins pour les départements, et peut-être les grandes agglomérations. C’est là-dessus qu’il faut travailler.
    Avis défavorable de la commission sur les premiers amendements et avis défavorable, à titre personnel, sur ceux qu’elle n’a pas examinés. Mais le travail est devant nous.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le président de la commission des finances.

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Je soutiens évidemment les amendements qui proposent de rétablir la CVAE pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 1 milliard d’euros. Je n’ai rien à ajouter à la démonstration implacable de Stéphane Peu, qui a parfaitement exposé les enjeux de cette question, mais j’ai souhaité prendre la parole pour faire une petite mise au point.
    Depuis quelques jours, à chaque fois que le Nouveau Front populaire propose des amendements tendant à imposer davantage quelques milliers de nos concitoyens, on entend que nous attaquerions tous les contribuables français, que nous augmenterions les impôts de tous les contribuables français. C’est faux ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et EcoS.)

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Vous attaquez les entreprises !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Quand nous ciblons les très grandes entreprises, celles qui ont bénéficié des années Macron, et qu’on nous dit que nous n’aimons pas les entreprises, c’est faux ! Pas une de nos mesures n’impose davantage les TPE et les PME, ni la plupart des entreprises de ce pays (Mêmes mouvements)…

    M. Denis Masséglia

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    Et les services à la personne ?

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    …dont nous ne pensons pas, d’ailleurs, que les intérêts se résument à ceux de leurs actionnaires. Je voulais en effet vous rappeler que, dans les entreprises, il y a aussi les salariés, qui produisent de la richesse !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    On le sait !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Nous ne sommes pas contre les entreprises ! (M. Benjamin Lucas-Lundy applaudit.)

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Vous faites bien de le préciser parce que ça ne saute pas aux yeux !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement sur cette série d’amendements ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Monsieur le président Coquerel, je suis en désaccord avec vous sur un point. Ce que je disais pour les grandes fortunes vaut aussi pour les grandes entreprises : ce ne sont pas des mondes hermétiques. En économie –⁠ vous le savez puisque vous avez vous-même été chef d’entreprise –, ce qu’on appelle le climat des affaires a une grande importance. Il peut ne concerner, en soi, qu’une catégorie d’entreprises, mais il a un impact sur le comportement d’investissement de toutes les autres entreprises.

    Mme Christine Arrighi

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    En tout cas, ça ne ruisselle pas !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Si j’insiste à ce point sur le fait que la contribution que nous demandons aux grandes entreprises sera temporaire et très ciblée, c’est précisément pour préserver le climat des affaires et ne pas grever la capacité d’investissement. C’est très important.
    Oui, on peut demander un effort aux plus grandes entreprises, et c’est ce que fait le Gouvernement. Mais en proposant de pérenniser cette mesure, on détériore le climat des affaires, pas seulement pour les grandes, mais pour toutes les entreprises.
    Prenez garde au signal que vous envoyez et aux effets qu’il peut avoir sur la volonté d’investissement de nos entreprises en général, des TPE aux grandes entreprises. Dans cet hémicycle, vous pouvez décider d’augmenter le taux et l’assiette de nombreux impôts, ou d’en créer de nouveaux, tout cela très rapidement, mais l’effet cliquet de ces mesures sur le climat des affaires est terrible.
    Lorsque je dis qu’il faut être responsable et raisonnable, je ne porte pas des jugements de valeur.

    M. Ugo Bernalicis

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    Si !

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Mais la politique, ce sont des valeurs !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Ce n’est pas un jugement de valeur, ni même un combat idéologique. C’est tout simplement parce qu’il importe que nous redressions ensemble nos comptes publics sans produire des effets récessifs que nous regretterions tous. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et DR.)
    Pour ce qui est des amendements, il ne faut surtout pas faire marche arrière et revenir sur la baisse des impôts de production. Surtout pas ! Pourquoi avons-nous ouvert plus d’usines que nous n’en avons fermées, dans ce pays ? Pourquoi avons-nous réussi à enclencher une dynamique de réindustrialisation ?

    M. Arnaud Le Gall

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    Faux ! Voyez les chiffres !

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Où est-elle, cette dynamique ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Parce que le taux de l’impôt de production, qui est l’impôt le plus bête du monde, est revenu à un niveau proche des standards européens –⁠ et nous n’y sommes pas encore tout à fait. Il ne faut surtout pas renoncer à notre ambition de supprimer définitivement la CVAE –⁠ et c’est pourquoi il ne faut pas envoyer le signal d’un retour en arrière. Toutefois, la nécessité de redresser vite et fort nos comptes publics impose que nous adaptions notre trajectoire et que nous fassions preuve d’un peu de patience. Je le répète : revenir en arrière serait un signal ravageur en ce qui concerne les investissements.

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Le style est très nuancé.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. David Guiraud.

    M. David Guiraud

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    Au cours de ce débat, l’idée fausse s’est répandue selon laquelle les impôts de production auraient totalement disparu. Ce n’est pas le cas puisqu’ils ont été compensés. En faisant ce cadeau aux entreprises –⁠ et nous savons bien que ce sont en majorité les grandes entreprises qui en bénéficient –, vous ne faites pas disparaître cet impôt : vous le faites payer par d’autres gens. Et ces autres gens, ce sont les Français qui vont au supermarché et qui paient de la TVA. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Nous n’avons pas touché à la TVA !

    M. David Guiraud

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    Monsieur le ministre, je préfère aider les Français à remplir leur frigo et nourrir leurs gamins convenablement, que de donner la priorité à ce que vous appelez le climat des affaires. Dans la frénésie qui vous pousse à donner toujours plus d’argent aux grands groupes, vous oubliez autre chose : le sens de l’État. Cela fait sept ans, depuis qu’Emmanuel Macron est au pouvoir, qu’on nous parle de décentralisation et d’autonomie des collectivités locales. Mais vous êtes en train de faire tout l’inverse…

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Exactement !

    M. David Guiraud

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    …car il n’est pas possible d’avoir des collectivités locales autonomes si elles sont perfusées par l’État avec l’argent de la TVA.
    Et on est en train de passer à l’étape suivante puisque vous commencez à nous dire que, sur les remboursements de la TVA de l’État aux collectivités, il va falloir se serrer la ceinture.
    En d’autres termes, vous supprimez des impôts pour les plus grands groupes, vous les faites payer par les Français avec la TVA et, bientôt, vous allez faire profiter les grands groupes de cet argent, en demandant aux collectivités locales de faire toujours plus d’efforts, jusqu’à ce que nos services publics municipaux et locaux soient eux aussi à l’os. En plus de ne pas pouvoir remplir leur frigo, les Français n’auront plus accès aux services municipaux. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et LFI-NFP.)

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Implacable !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Éric Woerth.

    M. Éric Woerth

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    Il est vrai que nous avons, en quelque sorte, coupé des liens entre les contribuables et les collectivités locales, qui étaient auparavant plus directs, je pense notamment à la suppression de la taxe d’habitation. Bon courage à ceux qui voudront la rétablir ! Vous irez l’expliquer aux Français, vous ne serez pas déçus.

    M. Xavier Breton

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    Il faudra aussi l’expliquer aux conseils municipaux !

    M. Éric Woerth

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    Quant à la CVAE, le lien était faible : la valeur ajoutée ne pouvait pas se calculer au niveau territorial, elle l’était sur une base forfaitaire. Il faut néanmoins poursuivre sa suppression car elle est un mauvais impôt –⁠ non pas pour les collectivités, mais pour les entreprises – qui par conséquent affaiblit le pays. Réfléchissons plutôt au partage de l’impôt national au bénéfice des collectivités : l’impôt sur les sociétés, par exemple, pourrait être partagé au niveau local, sans y être prélevé directement, selon un calcul similaire à celui de la CVAE.
    Ensuite, il est vrai que l’État compense ces coupes au moyen de la TVA, transférée un peu partout, sans organisation aucune. Je comprends bien ce qui a été dit sur la faible dynamique des taxes en ce moment mais, en vérité, c’est tout le système qui est à bout de souffle. Nous devons pouvoir y réfléchir ensemble, calmement, avec les collectivités, afin de concevoir un système solide.
    Je dirai enfin au président Coquerel qu’il diffuse tout de même, à travers les amendements qu’il soutient, la culture d’une certaine lutte de classes de plus en plus agressive (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR)

    Mme Dieynaba Diop

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    Avec vous, c’est : « Touche pas à nos milliardaires » !

    M. Éric Woerth

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    …et qu’il promeut une fiscalisation outrancière. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    Mme Dieynaba Diop

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    Les milliardaires vous remercient.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Kévin Mauvieux.

    M. Kévin Mauvieux

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    Alors que la Macronie, une fois de plus, multiplie les leçons, je citerai un chiffre : 55 492, le nombre de défaillances d’entreprises en 2023, un record depuis 2017. À vous écouter, grâce à vous, dans le monde des Bisounours, tout irait bien. Vous n’avez pourtant pas de leçons de prospérité à donner. Tournez votre langue sept fois dans votre bouche avant d’oser vous exprimer sur le sujet !
    Selon Mme Louwagie, nous serions totalement incohérents, votant tantôt des hausses, tantôt des baisses d’impôts.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    C’est la vérité !

    M. Kévin Mauvieux

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    Nous sommes bien plus cohérents que vous, en réalité.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Nananère !

    M. Kévin Mauvieux

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    Sur le plan économique, nous avons toujours considéré qu’il fallait taxer les surprofits et aider les TPE, les PME et les entreprises asphyxiées par les normes et les impôts. C’est exactement ce que nous avons fait en votant la contribution exceptionnelle des armateurs, qui ne sont pas des TPE ni des PME.

    Mme Véronique Louwagie

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    Elle n’est pas exceptionnelle, elle est pérenne !

    M. Kévin Mauvieux

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    Nous soutenons l’économie. En revanche, vous êtes ici présente, madame Louwagie –⁠ je parle bien de vous seule, puisque votre groupe est aux abonnés absents –, pour détricoter votre propre budget. Je vous demande donc à vous aussi de tourner sept fois votre langue dans votre bouche avant de parler ! (Mme Edwige Diaz applaudit.)

    Mme Stéphanie Rist

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    Vous n’avez pas écouté !

    M. Kévin Mauvieux

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    À destination de la gauche et de l’extrême gauche,…

    Mme Ségolène Amiot

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    Il n’y a pas d’extrême gauche !

    M. Kévin Mauvieux

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    …je dirai que vous êtes tout aussi mal placés pour donner des leçons. Le budget que nous examinons est aussi le vôtre : vous avez voté Macron à plusieurs reprises depuis 2017 ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Louis Boyard

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    Quant à vous, vous ne votez pas la censure !

    Mme Ségolène Amiot

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    Nous n’avons pas voté pour vous, ce n’est pas la même chose !

    M. Kévin Mauvieux

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    Cessez donc de nous reprocher de venir en renfort d’Emmanuel Macron ou du Gouvernement lorsque nous votons de temps en temps comme les députés qui les soutiennent, alors que vous êtes coresponsables de ce budget. (M. Manuel Bompard fait signe à l’orateur de partir. –⁠ Mme Christine Arrighi mime une manivelle.) Ce bilan est le vôtre à tous ici présents !
    Que les représentants censés soutenir son gouvernement se soient levés ce matin pour supprimer toutes les mesures mises en place par Emmanuel Macron, cela démontre que ce dernier est totalement impopulaire ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme Émilie Bonnivard

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    Nous avons retiré nos amendements pour subir cela, madame la présidente ?

    Mme la présidente

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    Huit amendements sont en discussion commune, il ne me paraît pas extravagant que chaque groupe puisse prendre la parole.

    Mme Sandra Regol

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    On n’a qu’à rester là une semaine !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot.

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    Relier l’impôt sur les sociétés aux territoires, comme le suggérait M. Woerth, me semble opportun. Nous pourrions également leur affecter une partie de l’impôt sur le revenu, dans des proportions déterminées par chaque collectivité locale.
    La question de la CVAE est différente car les économistes reconnaissent unanimement qu’elle alourdit le coût des facteurs de production et pénalise en conséquence la compétitivité des entreprises. Cette cotisation entraîne surtout un effet de distorsion dans certains secteurs, en affectant ceux qui nécessitent des investissements capitalistiques substantiels. Ensuite, parce que les entreprises ne s’acquittent pas toutes de la même CVAE, elle est une source de déstabilisation. Enfin, parce que seules 10 % d’entre elles en payent 85 %, elle est hautement inégalitaire. Cet impôt est mauvais, tout le monde le dit, sans pour autant remettre en cause la nécessité d’un impôt en lien avec les territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Sansu.

    M. Nicolas Sansu

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    Pour répondre à M. Allegret-Pilot, il est normal que 10 % des entreprises payent 85 % de la CVAE puisque ce sont les plus grosses qui génèrent de la valeur ajoutée ! Ce n’est pas surprenant.

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Eh oui !

    M. Nicolas Sansu

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    En ce qui concerne le climat des affaires, monsieur le ministre, vous qualifiez nos votes d’inquiétants.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Vous inquiétez les entreprises !

    M. Nicolas Sansu

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    En réalité, quand des entreprises viennent voir les élus locaux d’un territoire pour s’y implanter, elles demandent surtout à connaître ses services publics : quels services pour la petite enfance, la culture, le sport, l’école, les transports ? Combien de crèches, d’écoles ? Êtes-vous bien desservi ? La gare n’est-elle pas trop loin ? Voilà les questions qu’elles posent en priorité. Elles ne concernent pas d’abord le montant de la CVAE, ce n’est pas vrai. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS.)
    À Vierzon, une licorne s’est implantée :…

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Grâce à Emmanuel Macron !

    M. Nicolas Sansu

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    …Ledger, vous la connaissez. Or, chez Ledger, le montant de la CVAE, ils n’en ont rien à faire, sincèrement ! Ils n’ont aucun problème à la payer.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Remerciez Emmanuel Macron, Nicolas !

    M. Nicolas Sansu

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    En revanche, ils souhaitent que des services soient assurés, comme le raccordement à la fibre, par exemple.
    En 2008, la participation des entreprises à l’effort local se situait entre 35 et 40 milliards d’euros, contre 20 à 22 milliards aujourd’hui. Il y a un problème de distorsion.
    Certes, la CVAE n’est peut-être pas le bon levier,…

    M. Gabriel Attal, M. David Amiel et M. Jean-René Cazeneuve

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    Ah !

    M. Nicolas Sansu

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    …mais nous devons, alors, trouver un impôt économique territorial, lequel ne peut pas être l’IS car lui aussi induit une distorsion entre les territoires : les plus pauvres le resteront et les plus riches aussi, ce qui est inenvisageable.

    M. Éric Woerth

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    C’est vrai pour tout impôt territorial.

    M. Nicolas Sansu

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    Trouvons un impôt territorial digne de ce nom et tout le monde sera content. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Baumel.

    M. Laurent Baumel

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    Monsieur le ministre, vous prétendez, le cœur sur la main, ne pas faire d’idéologie. Or le propre de l’idéologie néolibérale, dont vous êtes un représentant affûté, est de se donner les traits du bon sens et de l’évidence. Vous tenez en réalité le même discours que mes maîtres d’économie, à Sciences Po, à la fin des années 1980, c’est-à-dire à l’époque où la droite française a cessé d’être gaulliste pour servir l’idéologie néolibérale. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS.)
    Tout, en réalité, est affaire de bon sens. Personne ne nie que les entreprises doivent disposer des moyens d’investir grâce à leurs profits.

    M. Mathieu Lefèvre

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    Pas trop quand même !

    M. Laurent Baumel

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    Lorsque nous proposons de mettre à contribution les superprofits, les superdividendes, les entreprises qui n’ont pas besoin de conserver autant d’épargne pour investir –⁠ elles en ont tellement qu’elles ne font que distribuer des dividendes toujours plus importants à leurs actionnaires (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC, LFI-NFP, EcoS et GDR) –, nous vous demandons simplement de faire fonctionner le modèle social français. Ce dernier ne se soucie pas simplement d’un taux de rentabilité énorme des investisseurs, il se fonde aussi sur les services publics, la protection sociale, la régulation. Lorsque l’on parle des collectivités, comme l’a fait notre collègue Peu, on parle aussi de gymnases, d’animation culturelle, d’action périscolaire, tout ce à quoi vous devriez, en tant que ministre de la République, être davantage sensible. (Mêmes mouvements.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Cyrielle Chatelain.

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Monsieur Woerth, vous justifiez la suppression de la CVAE par la réflexion que nous pourrions avoir un jour, peut-être, sur l’impôt qui la remplacera.

    M. Éric Woerth

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    Non pas « peut-être » !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Je vous opposerai un principe simple : « Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras ». (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC.)

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    C’est Liliane Bettencourt qui lui a appris ! (Sourires sur quelques bancs du groupe EcoS.)

    Mme Cyrielle Chatelain

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    On ne supprime pas un impôt parce qu’un jour, peut-être, il sera remplacé. Premièrement, je suis profondément en désaccord avec l’idée de flécher un impôt national vers les collectivités. Ce n’est pas possible : les collectivités ont besoin d’être autonomes fiscalement et financièrement. Elles sont en première ligne, vous l’avez constaté durant l’épidémie de covid. Quand des enfants sont à la rue en trop grand nombre, ce sont elles qui trouvent des places en foyers d’accueil, comme elles peuvent et jamais suffisamment. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC, ainsi que sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
    Ce sont les agents des collectivités qui prennent en charge nos aînés durant les vagues de chaleur, eux qui savent s’adapter ! La fiscalité doit en tenir compte.

    M. Éric Woerth

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    Les policiers, les gendarmes, les hôpitaux, c’est l’État !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Deuxièmement, je dirai aux collègues du groupe Rassemblement national que j’assume d’avoir, à chaque fois, fait barrage à l’extrême droite et à son projet xénophobe. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Matthias Renault

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    Bravo d’avoir voté Macron !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    C’est ce que nous avons fait et ce qu’ont signifié des millions de Français lors des législatives : nous ne voulons pas de vous au pouvoir ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.) La béquille d’Emmanuel Macron et de sa politique, c’est vous !

    Plusieurs députés du groupe RN

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    Non, c’est vous !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    C’est vous qui avez refusé de rétablir l’ISF, de pérenniser la contribution des grandes entreprises. (De très nombreux députés des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR se lèvent et applaudissent de manière prolongée. –⁠ M. Matthias Renault brandit un bulletin de vote.) Il y a quelque chose qui s’appelle la censure ; quand vous refusez de la voter, il devient clair que vous soutenez, sans y participer, le Gouvernement ! D’ailleurs les députés qui soutiennent officiellement ce dernier n’ont pas besoin d’être présents, ils savent que vous défendrez leurs propositions en faveur des plus riches. Finalement, c’est vous qui êtes d’astreinte ce week-end ! (« Bravo ! » sur plusieurs bancs des groupes EcoS, LFI-NFP et SOC.)

    M. Emeric Salmon

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    On n’est pas dans un meeting !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur général.

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Avant que nous ne les votions, je rappellerai que les premiers amendements relatifs à la reconstitution de la CVAE représentent 11 milliards d’euros supplémentaires pour les entreprises, quand les suivants représentent 4 milliards –⁠ soit le montant actuel de la cotisation telle qu’elle existe encore –, un montant qui ne revient pas, je le rappelle, aux collectivités mais à l’État.
    Deuxièmement, 35 % des PME, 39 % les entreprises de taille intermédiaire (ETI) et seulement 21 % des grandes entreprises s’acquittaient de la CVAE. Soyons conscients du fait que son rétablissement pèserait surtout sur les PME et les ETI.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le président de la commission des finances.

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Je continue à relever les perles de mon estimé prédécesseur, Éric Woerth. Hier, vous disiez que nos mesures allaient appauvrir les milliardaires.

    M. Éric Woerth

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    Qu’elles appauvriront tout le monde !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    J’entends aujourd’hui que nous mènerions une lutte de classes de plus en plus agressive. Cela me rappelle les propos de Warren Buffet : « Il y a une guerre des classes, c’est un fait, mais c’est ma classe, celle des riches, qui mène cette guerre et qui est en train de la gagner. » Nous déposons des amendements parce qu’il nous faut inverser le rapport de force et revenir sur la politique totalement inédite de guerre de classes que vous menez depuis sept ans. Les inégalités ont tellement augmenté dans le pays qu’elles en menacent le ciment républicain. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Avis défavorable. Pour répondre rapidement à M. Baumel : une « France néolibérale », mais de quoi parle-t-on ? (« De la vôtre ! » et exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.)

    M. Pierre Cazeneuve

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    Avec 56 % de prélèvements obligatoires, c’est quasiment le communisme !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Pendant la crise sanitaire, certains nous ont reproché d’incarner un État social-étatiste dépensant trop d’argent public pour protéger sa population ; nous en étions fiers et nous l’avons fait avec vous ! De quel néolibéralisme parlez-vous ? (« Du vôtre ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Ayda Hadizadeh

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    De la fermeture d’hôpitaux, de crèches !

    Mme Dieynaba Diop

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    Des 50 milliards de cadeaux fiscaux aux plus riches !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    La France doit être fière de son État-providence qui permet de protéger la population, la vie économique, les collectivités territoriales… (Exclamations prolongées sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.) Vous pourriez écouter deux minutes !

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Je le répète, c’est parce que nous voulons continuer à le défendre dans les prochaines années qu’il nous faut rétablir les finances publiques. Dire que ce gouvernement et ceux l’ayant précédé sont de grands néolibéraux relève du slogan ! La vérité, c’est que jamais la France n’a autant protégé sa population, ses entreprises et ses collectivités face aux crises. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR. –⁠ Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.)

    Mme Béatrice Bellay

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    Touche pas à mon multimillionnaire !

    Mme Dieynaba Diop

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    Non, à mon milliardaire ! (Sourires.)

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    S’agissant des impôts locaux, dont je souhaite que nous puissions discuter plus tard lors de l’examen de ce PLF, le problème tient à ce que la Constitution ne prévoit aucune autonomie fiscale ; elle se borne à l’autonomie financière. La question de prospective qui se pose est donc de savoir si nous voulons instaurer une véritable autonomie fiscale et procéder à un nouvel acte de décentralisation. Nous pourrons nous appuyer sur l’excellent rapport d’Éric Woerth en la matière et sur les travaux complémentaires de Boris Ravignon mais, tant que ce débat n’aura pas eu lieu, nous resterons au milieu du gué…

    Mme Béatrice Bellay

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    Le milieu du gué, c’est que les Français n’ont pas voté pour vous !

    Mme Christine Arrighi

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    Laissez-nous le pouvoir et nous le ferons !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    …avec des impôts locaux qui n’en sont pas vraiment et une dépendance des finances locales à l’égard des projets de loi de finances et de l’État. (Mme Stéphanie Rist et M. David Amiel applaudissent.)

    (L’amendement no 2483 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 2520, 2650 et 3373.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        233
            Nombre de suffrages exprimés                233
            Majorité absolue                        117
                    Pour l’adoption                118
                    Contre                115

    (Les amendements identiques nos 2520, 2650 et 3373 sont adoptés ; en conséquence, l’article est ainsi rédigé et les amendements nos 496, 2503, 2649 et 2681 tombent.)
    (Les députés des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS se lèvent et applaudissent. –⁠ Les députés du groupe GDR applaudissent également.)

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à onze heures, est reprise à onze heures quinze.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.

    Rappel au règlement

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Matthias Renault, pour un rappel au règlement.

    M. Matthias Renault

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    Il est fondé sur l’article 100, relatif à la bonne tenue des débats. Les groupes gouvernementaux, par leur absence, sont en train de saboter le budget.

    M. Jean-François Coulomme

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    Non, c’est vous qui le sabotez !

    M. Matthias Renault

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    Les amendements visant à augmenter la CVAE ont été adoptés à une voix près. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    Ce n’est pas un rappel au règlement. Les débats se déroulent normalement.

    Article 26 (appelé par priorité)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Mathieu Lefèvre.

    M. Mathieu Lefèvre

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    Nous abordons un sujet technique. J’espère que le caractère enflammé de nos débats nous permettra néanmoins de mener une réflexion approfondie.
    Le rachat d’actions n’est pas un outil à proscrire systématiquement. Plusieurs cas de figure existent. D’abord, les actions peuvent être attribuées aux salariés –⁠ nous proposerons par amendement de préserver cette possibilité. Ensuite, une entreprise peut recourir au rachat d’actions pour stabiliser son capital et se protéger, dans une période d’incertitude, d’une prise de capital externe –⁠ là encore, cette possibilité doit être maintenue. Enfin, l’opération peut être liée à la mise en œuvre d’un contrat de liquidité pour renforcer l’attractivité de l’entreprise.
    L’article concerne les cas où le rachat d’actions entraîne une rémunération des actionnaires. Contrairement aux États-Unis, il n’y a aucun biais fiscal. C’est la raison pour laquelle nous proposerons de plafonner le montant de la taxe au montant réel de l’opération, à rebours de ce que prévoit le texte –⁠ un taux très élevé et une assiette très restreinte. Un autre amendement vise à rendre la taxe rétroactive, au 1er janvier 2024, afin d’assurer des recettes supplémentaires et d’empêcher toute stratégie d’optimisation. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement n° 882, je suis saisie par le groupe Écologiste et social d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Eva Sas, pour soutenir l’amendement no 882.

    Mme Eva Sas

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    La taxe prévue par le Gouvernement est assise sur la valeur faciale des actions et non sur leur valeur de marché : la portée en est donc très faible. Nous proposons d’instaurer une véritable taxe sur les rachats d’actions, assise sur la valeur d’acquisition, à l’image de la taxe de 1 % en vigueur aux États-Unis. Pour assurer un bon rendement, nous proposons d’en fixer le taux à 2 %. Bien moins cosmétique que la mesure du Gouvernement, cette taxe est à la hauteur des enjeux posés par le déficit public.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Mme Sas soulève le problème central de cet article : la taxe est assise sur la valeur faciale des actions, non pas sur leur valeur de marché, à la différence de la taxe américaine de 1 %.

    M. Olivier Faure

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    Exactement ! C’est une supercherie !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Mais son amendement n’est pas compatible avec le droit européen.

    M. Arnaud Le Gall

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    C’est ce qu’on disait hier, on ne peut rien faire !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    J’ai essayé, sans succès, de trouver une solution eurocompatible. Peut-être le Gouvernement a-t-il réussi depuis le dépôt du projet de loi de finances ? En effet, cette taxe risquerait d’être contraire à la directive « mère-fille » –⁠ concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et filiales d’États membres différents – puisqu’elle reviendrait à taxer deux fois les bénéfices provenant de la filiale d’un groupe opérant le rachat d’actions.
    Souvenez-vous du contentieux sur la fameuse taxe de 3 % sur les dividendes, invalidée par le juge communautaire et annulée par le Conseil constitutionnel : les remboursements avaient coûté 10 milliards à l’État.

    M. Arnaud Le Gall

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    Ça suffit, les diktats de Bruxelles !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    On a remboursé 10 milliards, mais on en a taxé 5 !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Faute de solution satisfaisante, je pose la question : si le rachat d’actions est une mauvaise chose pour l’économie, pourquoi ne pas le limiter, voire l’interdire ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Antoine Léaument

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    Excellent !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Permettez-moi de rappeler que, jusqu’en 1966, le droit commercial l’interdisait. La possibilité a été ouverte, puis généralisée dans les années 1990. Au lieu de s’acharner à taxer, l’interdiction ne serait-elle donc pas une solution ? Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    L’amendement pose deux problèmes. Premièrement, il n’est pas eurocompatible.

    M. Arnaud Le Gall

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    Lorsqu’il s’agit des libertés publiques, cela ne vous gêne pas d’être en contradiction avec le droit communautaire !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    On ne peut pas taxer deux fois la même chose. Sinon, nous nous retrouverions dans la même situation –⁠ pour des raisons différentes – que pour la contribution de 3 % sur les dividendes, qui s’était soldée par une ardoise de 10 milliards en 2017.
    Pour respecter le droit européen –⁠ les États-Unis n’ont pas cette contrainte –, il est proposé à l’article 26 d’asseoir la taxe sur la valeur nominale des actions et sur les primes d’émission.

    M. Arnaud Le Gall

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    Ça ne marche pas !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Deuxièmement, comme l’a rappelé Mathieu Lefèvre, il faut veiller à ne pas taxer toutes les opérations de rachat d’actions –⁠ notamment celles effectuées dans le cadre de l’actionnariat salarié. Cette nouvelle fiscalité ne concerne que les opérations de rachat-annulation de titres.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    La question des rachats d’actions a été introduite dans le débat public par Marine Le Pen, en 2022.

    Mme Danielle Simonnet

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    N’importe quoi !

    Plusieurs députés du groupe LFI-NFP

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    D’ailleurs, où est-elle ?

    Mme Dieynaba Diop

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    Au tribunal !

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Marine Le Pen est la première personnalité politique à avoir dénoncé ces méthodes spéculatives et toxiques pour l’économie. C’est la première femme d’État à avoir proposé une mesure drastique pour y mettre fin : une taxe de 33 % sur la valeur d’acquisition des actions. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    M. Damien Girard

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    C’est faux !

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    L’objectif était d’obtenir un quitus des surprofits, mais surtout de dissuader les entreprises de se livrer à ces pratiques. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Nicolas Sansu

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    Arrêtez de donner des leçons !

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Une taxe de rendement sur les rachats d’actions ne servirait à rien. Ces opérations mènent à une destruction de valeur, pour les entreprises comme pour les salariés. Il faut y mettre fin !

    Mme Béatrice Bellay

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    Vous n’avez rien compris !

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Notre groupe proposera d’instaurer une taxe de 33 %, dont le rendement sera de 9 milliards. Je demande donc à Mme Sas de retirer son amendement.
    Le groupe Écologistes et le Nouveau Front populaire ont déjà signé un chèque de 500 millions d’euros à la CMA-CGM ; l’adoption de l’amendement vert à l’article 12 a fait tomber le nôtre, qui prévoyait un doublement de la taxe : c’est complètement surréaliste ! (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) Madame Sas, retirez votre amendement ou prenez la responsabilité de refuser 7 milliards de revenus fiscaux et la fin des rachats d’actions !
    Enfin, les Insoumis proposent aussi une vraie taxe sur les rachats d’actions. Alors, soyez cohérents ! Nous ne sommes pas dans une AG de Tolbiac ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN et UDR. –Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Béatrice Bellay

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    C’est de l’esbroufe !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Eva Sas.

    Mme Eva Sas

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    Monsieur Jean-Philippe Tanguy, veuillez changer de ton. On ne s’adresse pas ainsi à un autre député ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    Je retire cet amendement, au profit, non pas de vos amendements d’hurluberlus, mais de l’amendement no 2371, qui vise à tripler le taux de la taxe. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EcoS et LFI-NFP.) La taxe sera ainsi conforme à la directive « mère-fille », car elle conservera la même assise, et aura un rendement supérieur à celle proposée par le Gouvernement, qui n’est pas à la hauteur des enjeux. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et SOC).

    (L’amendement no 882 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Sur les amendements nos 1127, 997, 994 et 992, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Matthias Renault, pour soutenir les amendements nos 1127, 997, 994 et 992, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    M. Matthias Renault

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    Si, en France, peu de taxes sont vertueuses en elles-mêmes, il faut bien reconnaître que celle-ci a une vertu économique. Le système des rachats d’actions n’a aucun avantage économique. Notre discussion ne porte pas sur l’actionnariat salarié…

    M. Mathieu Lefèvre

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    Bien sûr que si !

    M. Matthias Renault

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    …mais sur les rachats-annulations en faveur des actionnaires. Sans logique productive ou salariale, le rachat d’actions n’a aucun intérêt. Nous proposons l’amendement le plus puissant de tous ceux qui sont présentés : une taxe à hauteur de 33 %, dans l’objectif assumé de mettre fin à la pratique. Cette taxe aura un rendement très fort la première année, puis l’objectif est de faire cesser ces rachats. Je le répète, elle ne vise pas l’actionnariat salarié. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    La commission a émis un avis défavorable. L’amendement de notre collègue fixe à 33 % la taxation des rachats d’actions sur la valeur de marché. Pourquoi 33 % ? Cela remonte à l’époque où l’amendement Mattei avait relevé le prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 à 33 %.
    S’il y a des actionnaires très riches, il vaut mieux racheter des actions que leur distribuer des dividendes. En France, les rachats d’actions ont représenté 30 milliards, contre 67 milliards de dividendes distribués. Aux États-Unis, c’est pire : 800 milliards, contre 600 milliards ! L’effet de substitution est bien visible.

    M. Éric Woerth

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    On n’a qu’à taxer les États-Unis !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Il existe deux manières de voir les choses. Prôner un retour en arrière, afin de lutter contre une dérive complète du système économique. On en reviendrait à la loi de 1966 qui interdisait ces rachats, sauf pour les salariés et la régulation du marché. Ce serait l’arme atomique. Il nous faut faire preuve de prudence.
    La seconde possibilité serait de porter le taux à 33 %, ce qui reviendrait à tuer le dispositif. (« Oui ! » sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    M. Alexandre Sabatou

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    On récupère un peu d’argent !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Nous devons réfléchir ensemble…

    M. Laurent Jacobelli

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    Est-ce qu’on a le temps ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    …car chacun s’accorde à dire qu’il est impossible de conserver un système qui dérive de la sorte. C’est pourquoi j’ai déposé un amendement, le no 2775, demandant un rapport sur les différentes solutions.
    En outre, la commission a émis les mêmes objections quant à l’euro-incompatibilité –⁠ certes regrettable – d’une taxe assise sur la valeur de marché. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Ces amendements posent toujours le même problème : la directive « mère-fille » interdit de telles dispositions.
    Si je comprends bien, vous luttez contre le rachat d’actions en tant que tel. C’est pourtant une forme autorisée de la distribution des revenus du capital. Si on le supprimait, davantage de dividendes seraient versés. Or on a besoin de cet outil, notamment pour l’actionnariat salarié.
    La question est de savoir si l’on veut taxer le rachat-annulation d’actions, et comment le faire dans le cadre juridique européen. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP).
    Pour toutes ces raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il est urgent que le Rassemblement national organise une réunion de groupe. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN).

    Un député du groupe RN

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    Regardez ce qu’il reste de votre groupe !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Tout à l’heure, Mme Diaz a voulu nous faire croire que le Rassemblement national souhaitait baisser les impôts sur les entreprises. Ensuite, M. Tanguy, avec ses vociférations, a dit tout et son contraire. Maintenant, M. Renault assume le fait que le Rassemblement national veut exploser les compteurs avec ses quatre amendements.

    M. Pierre Cazeneuve

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    On n’y comprend rien !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Vous ne ferez croire à personne que vous voulez aider les entreprises et soutenir leurs dirigeants !
    Monsieur le ministre, pouvez-vous préciser le rendement que vous escomptez en 2025 des dispositions de l’article 26 ? La représentation nationale doit être informée, afin de reprendre de la mesure face aux amendements délirants qui sont proposés. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    M. Pierre Cazeneuve

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Ce rendement est estimé à 200 millions.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Antoine Léaument.

    M. Antoine Léaument

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    Il faut expliquer à nos concitoyens, dont certains sont présents dans les tribunes de l’Assemblée, ce que sont les rachats d’actions : une entreprise rachète des actions qu’elle peut, ensuite, choisir de faire disparaître. Ainsi, elle fait gagner de l’argent aux actionnaires en augmentant la demande d’actions de l’entreprise sur les marchés. Puis elle fait augmenter la valeur de chaque titre en faisant disparaître les actions rachetées. (« Mais non ! » sur quelques bancs du groupe EPR.) Si, si !
    M. Tanguy prend toujours la parole pour dire que Marine Le Pen a été la première à faire ceci ou cela. Tout à l’heure, c’était pour dire : « Marine Le Pen la première, en 2022, a dénoncé les rachats d’actions ». (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Pierre Cazeneuve

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    C’est maman qui l’a dit !

    M. Antoine Léaument

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    J’ai là un article du journal Le Monde de 2017, où Jean-Luc Mélenchon explique que les rachats d’action se font au détriment des salariés.

    Un député du groupe RN

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    La référence !

    M. Antoine Léaument

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    Un expert lui donne raison : « en rendant le cash aux actionnaires et en réduisant son volume d’investissement, l’entreprise peut avoir moins de croissance et donc ne pas développer/créer des emplois. » (Mêmes mouvements.)
    En réalité, les rachats d’action sont une absurdité. Nous proposons de les taxer pour changer les comportements –⁠ et je rejoins M. de Courson, il faudrait même voir à les interdire. En imposant davantage, on change les comportements.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    C’est zéro ! Vous n’avez aucun projet !

    M. Antoine Léaument

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    M. le ministre nous a donné raison sur un autre point : en imposant plus les dividendes, on peut aussi changer le comportement des entreprises pour qu’elles distribuent davantage la richesse aux salariés. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Paul Mattei.

    M. Jean-Paul Mattei

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    Nous revenons sur les questions de justice fiscale et de bénéfices utiles ou futiles. Je rappelle qu’en commission, nous avions fait adopter un amendement qui prévoyait une taxe de 1 % sur la valeur vénale des actions.
    Je suis toutefois étonné que l’on parle de taxe. La piste des droits d’enregistrement aurait pu être étudiée.
    Je partage la position du ministre sur les limites juridiques du dispositif. Tout en étant favorable à l’article, je m’interroge sur le rendement de la taxe –⁠ le montant n’est pas colossal. Il est temps que l’on dispose d’un rapport pour faire le point sur le bon outil.
    Il y a quelques années, nous avons subi l’invalidation de la taxe de 3 % sur les dividendes, qui a coûté 10 milliards à l’État, dont 5 milliards ont été assumés par les entreprises et le reste, par les contribuables français.
    Enfin, nous y sommes, nous essayons de raisonner et de retrouver notre ligne. Dans ce débat un peu lunaire, nous discutons sur un texte dont je ne sais pas s’il existera encore dans quelques minutes (Exclamations sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et SOC), mais il faut bien que l’on parle, que l’on pose les questions pour faire évoluer la réflexion.
    Les rachats d’actions mériteraient que l’on analyse un autre outil de taxation, notamment les droits d’enregistrement, car l’annulation des titres est un mode de destruction de la valeur.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Véronique Louwagie.

    Mme Véronique Louwagie

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    M. Renault a indiqué qu’il souhaitait mettre fin à ces opérations en les taxant à un niveau élevé. Je ne suis pas sûre qu’il faille supprimer le rachat d’actions car il peut répondre à la stratégie d’une entreprise qui a besoin de resserrer son actionnariat ou de favoriser l’actionnariat salarié.
    En revanche, il n’y a aucune raison que ces opérations ne soient pas assujetties à un droit d’enregistrement ou à une taxe, comme l’est la distribution de dividendes –⁠ qui, elle, ne met pas fin au rétrécissement ou à la réorganisation de la répartition du capital social.
    Nous voterons contre ces amendements, qui ne paraissent pas opportuns. En revanche, nous sommes favorables à l’article 26, qui ouvre la voie à un dispositif de taxation.
    M. Léaument a dit que, lors d’un rachat, les actions disparaissaient. Ce n’est pas tout à fait vrai ! Le rachat entraîne une réduction de capital social, avec un mécanisme de primes d’émission et de réserves. Ce n’est pas une disparition pure et simple. Il faut corriger ce point, pour ne pas laisser entendre que les actions disparaissent. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR et sur quelques bancs du groupe EPR. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Antoine Léaument

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    Si ! Elles sont annulées !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le président de la commission des finances.

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    « Il y a quand même un peu de cynisme à l’œuvre quand on a des grandes entreprises qui font des revenus tellement exceptionnels qu’elles en arrivent à utiliser cet argent pour racheter leurs propres actions » : vous aurez reconnu là les propos tenus le 22 mars 2023 par Emmanuel Macron. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
    Je discutais hier avec mon ami Jean-Paul Mattei de la morale et du but du capitalisme. Le nouvel âge du capitalisme, le capitalisme financiarisé, a pour seul critère de réussite le fait de nourrir ses actionnaires. Plus ceux-ci sont satisfaits, plus l’entreprise a de valeur dans la concurrence internationale. À certains moments, cette logique contredit les intérêts des salariés voire de la perpétuation de l’entreprise.
    Les rachats d’action le montrent –⁠ ô combien ! L’instauration du PFU fait que, désormais, les dividendes sont moins imposés qu’ils ne l’étaient auparavant. On aurait pu penser que cela suffirait à satisfaire les dirigeants, mais non ! On observe que la proportion des rachats d’actions par rapport aux dividendes continue de progresser, inexorablement, au point, l’an dernier, de représenter près de 50 % des dividendes, et ce, parce que les rachats d’action ne sont pas du tout imposés.

    Mme Véronique Louwagie

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    Ce n’est pas la même chose !

    M. Éric Coquerel, président de la commission des finances

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    Ce système est le pire du capitalisme spéculatif. Pour cette raison, il faut que l’on y mette fin. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
    C’est encore une façon pour le capital de défiscaliser entièrement les revenus et de faire en sorte qu’ils ne soient soumis à aucune cotisation.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Eva Sas.

    Mme Eva Sas

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    On n’est pas là pour se faire plaisir, pour faire des effets de manche ou présenter des amendements idéologiques qui ne tournent pas et n’ont aucune portée opérationnelle. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Mathieu Lefèvre

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    Ce n’est pas le genre de la maison !

    M. Laurent Jacobelli

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    Il faut changer de groupe, alors !

    Mme Eva Sas

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    C’est pourtant ce que fait le Rassemblement national avec ses amendements. Le rapporteur général l’a dit, comme le dispositif se fonde sur la valeur de marché, il n’est pas eurocompatible. Il n’aurait aucune portée s’il était adopté.
    Nous voterons contre ces amendements qui ne changent rien, au profit de l’amendement no 2371, dont la portée opérationnelle est réelle. Enfin, nous pourrons taxer les rachats d’actions avec un dispositif opérant, fondé sur la valeur faciale, qui sera compatible avec la législation européenne. Nous sommes là non pour nous faire plaisir mais pour changer vraiment les choses ! (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 1127.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        233
            Nombre de suffrages exprimés                226
            Majorité absolue                        114
                    Pour l’adoption                71
                    Contre                155

    (L’amendement no 1127 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 997.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        228
            Nombre de suffrages exprimés                225
            Majorité absolue                        113
                    Pour l’adoption                72
                    Contre                153

    (L’amendement no 997 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 994.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        229
            Nombre de suffrages exprimés                225
            Majorité absolue                        113
                    Pour l’adoption                71
                    Contre                154

    (L’amendement no 994 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 992.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        231
            Nombre de suffrages exprimés                227
            Majorité absolue                        114
                    Pour l’adoption                71
                    Contre                156

    (L’amendement no 992 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Félicie Gérard, pour soutenir l’amendement no 2761.

    Mme Félicie Gérard

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    Il semble sain d’instaurer une taxe sur les rachats d’actions afin de limiter ceux qui auraient pour unique but de faire varier les cours de manière artificielle. Toutefois, pour préserver l’actionnariat salarié, nous proposons de limiter le champ d’application de cette taxe aux sociétés cotées.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    La commission a donné un avis défavorable car le dispositif créerait une rupture d’égalité entre les sociétés cotées et non cotées. Certaines sociétés non cotées, très importantes, recourent au rachat d’actions.

    M. Pierre Cazeneuve

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    La CMA-CGM, par exemple !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-René Cazeneuve.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Je voudrais répondre à M. Léaument, qui nous a dispensé un cours sur le rachat d’actions. Celui-ci n’est pas condamnable en soi. À certains moments, les entreprises, ayant besoin de financer leur développement, émettent des actions afin de récupérer du cash ;…

    M. Aurélien Le Coq

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    Arrêtez avec ça !

    M. Jean-René Cazeneuve

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    …à d’autres, possédant du cash en abondance, elles ne peuvent en faire meilleur usage que de racheter leurs actions. Cela ne modifie pas d’un centime la valeur de l’entreprise. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
    Nous pensions avoir tout vu : vous avez fait adopter en commission 60 milliards de taxes supplémentaires ; ce matin, après que le président de la commission a expliqué n’avoir rien contre les entreprises, vous avez obtenu le rétablissement et l’augmentation de la CVAE ; et maintenant, vous voulez taxer davantage le rachat d’actions, tout en ayant en tête de recréer la taxe d’habitation sur les résidences principales. Quand allez-vous vous arrêter ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Antoine Léaument.

    M. Antoine Léaument

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    Sans doute ne m’avez-vous pas écouté, monsieur Cazeneuve. Je n’ai pas dit que le rachat d’actions fait augmenter la valeur de l’entreprise, mais que, cette valeur restant la même, on fait augmenter la valeur des actions en en faisant disparaître une partie –⁠ je maintiens le terme, puisqu’il s’agit de les annuler. Pour calculer le coût d’une action, on divise la valeur totale de l’entreprise par le nombre des actions.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Les entreprises ont besoin de cash !

    M. Antoine Léaument

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    En effet ! Un versement de dividendes obéit au même principe : il enlève du cash à l’entreprise et en fait diminuer la valeur faciale.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Exactement !

    M. Antoine Léaument

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    Taxer des comportements nocifs peut inciter à les modifier. Prenez l’exemple de la vente à découvert, qui consiste à vendre des actions que l’on ne possède pas encore, en spéculant sur le fait que leur prix baissera et qu’on les achètera moins cher qu’on ne les a vendues. Une telle pratique ne devrait pas exister, tant elle est stupide. Le rôle de l’Assemblée nationale consiste à défendre l’intérêt général, non les intérêts des quelques-uns qui ont beaucoup d’argent et en souhaitent encore plus ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP, ainsi que sur quelques bancs du groupe EcoS.) Par conséquent, je le répète, nous devons imposer davantage les mauvais comportements, afin de les décourager.

    (L’amendement no 2761 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Mathieu Lefèvre, pour soutenir l’amendement no 2110.

    M. Mathieu Lefèvre

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    Il vise à préserver la transmission familiale en excluant du dispositif les sociétés non cotées. Les actionnaires des sociétés familiales sont généralement liés par un pacte qui leur interdit de céder leurs titres à l’extérieur ; or, souvent, lorsque l’un d’eux souhaite par exemple sortir du capital, les autres n’ont pas les moyens de lui racheter ses actions, si bien que l’entreprise le fait elle-même.
    Les amendements du Rassemblement national vont à rebours de ce qu’il propose en matière de lutte contre les ingérences étrangères : le rachat d’actions peut servir à éviter une prise de contrôle hostile,…

    Un député du groupe LFI-NFP

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    Il y a d’autres méthodes pour ça !

    M. Mathieu Lefèvre

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    …et je m’étonne que ceux qui prétendaient hier défendre notre souveraineté soient aujourd’hui incapables de le reconnaître.

    Un député du groupe RN

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    Oh là là ! C’est tiré par les cheveux !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Avis défavorable.

    (L’amendement no 2110, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Matthias Renault, pour soutenir l’amendement no 996.

    M. Matthias Renault

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    Il vise à élargir l’assiette de la taxe (« Ah ! » sur quelques bancs du groupe EPR) en y assujettissant les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse, au lieu de 1 milliard, 750 millions, seuil retenu pour la taxe sur les services numériques, dite taxe Gafa.
    Par ailleurs, je suis surpris de voir la Macronie monter au créneau au sujet d’une pratique spéculative alors qu’il y a quelques minutes, notre assemblée adoptait l’augmentation de la CVAE à une voix près, à la faveur de son absence stratégique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.) Les chefs d’entreprise feraient bien de suivre nos débats et d’étudier, sur le site de l’Assemblée, les données des scrutins publics. Je le dis aux électeurs : demandez compte de sa présence à votre député, et sachez qui vous défend ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    La commission a émis un avis défavorable. Abaisser le seuil à 750 millions n’aurait pas grand effet, la majeure partie de ces opérations étant le fait d’entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 1 milliard, puisqu’il s’agit de celui du groupe consolidé.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. David Amiel.

    M. David Amiel

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    Nous sommes habitués à ce que le programme économique du Rassemblement national change tous les trois mois, généralement au rythme des interviews de Jordan Bardella (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN) ; sa dernière version n’est apparemment pas encore stabilisée. Il y a quelques heures, le Rassemblement national nous disait défendre l’industrie et proposait d’aider les banques, le secteur financier, en supprimant la C3S. Il y a une heure, il poussait des cris d’horreur devant les hausses d’impôt et faisait exploser les compteurs des armateurs ; à présent, il s’attaque aux entreprises, dont il prétend défendre la souveraineté. Pardonnez-moi, mais celles-ci ont précisément besoin de pouvoir racheter leurs actions afin d’échapper aux offres publiques d’achat (OPA) hostiles ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    M. Gabriel Attal

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    Exactement !

    M. David Amiel

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    C’est pour ce motif que Joe Biden n’a pas interdit les rachats d’actions : moins naïfs que le Rassemblement national, les Américains n’ignorent pas dans quel monde nous vivons. S’il convient de taxer ces rachats afin d’éviter la spéculation ou la manipulation abusive des cours, il ne faut ni les interdire ni instaurer des mesures confiscatoires. Vous pourriez ainsi livrer notre économie aux fonds de pension étrangers : bravo, le Rassemblement national ! Mais je ne doute pas que, la semaine prochaine, Le Figaro publiera une interview de Jordan Bardella destinée à rectifier vos propos ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR. –⁠ M. Laurent Jacobelli s’exclame.)

    M. Pierre Cazeneuve

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    Quand Jean-Philippe Tanguy n’est pas là, vous ne savez même pas quoi voter !

    (L’amendement no 996 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Mathieu Lefèvre, pour soutenir l’amendement no 3314. (Brouhaha.) Chers collègues, s’il vous plaît !

    M. Mathieu Lefèvre

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    Je comprends que le Rassemblement national soit déboussolé. Rassurez-vous, il vous reste des assiettes à élargir et des taux à augmenter ; nous avons encore beaucoup d’amendements devant nous, monsieur Renault !
    Celui-ci, que nous devons à Paul Midy, vise au contraire à plafonner la valeur de rachat des actions, afin d’éviter que l’entreprise ne soit perdante.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    M. Lefèvre a en effet soutenu un amendement de M. Midy, mais ce n’est pas grave.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Chacun voit Midy à sa porte !

    Mme la présidente

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    M. Lefèvre est cosignataire de l’amendement, monsieur le rapporteur général, c’est pourquoi il a pu le soutenir.

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Les opérations de croissance externe étant déjà couvertes par l’article, je conçois votre volonté de bien prendre en compte les opérations en capital pouvant être considérées comme vertueuses. Reste que cet amendement reviendrait à réduire encore une assiette limitée, et sur laquelle seront imputées les augmentations de capital, en en excluant les rachats réalisés par les entreprises en vue de distribuer des actions aux salariés ou de préparer des opérations de restructuration. La commission n’ayant pas examiné l’amendement, j’émets à titre personnel un avis défavorable.
    Je profiterai de cette intervention pour apporter une précision. Pourquoi le rendement de cette taxe ne sera que de 200 millions ? Parce que la valeur nominale, ou faciale, d’un titre, fixée lors de son émission, n’est pas sa valeur de marché. Les rachats de l’année dernière portent sur une valeur nominale de 2,3 milliards mais la valeur de marché est de 30 milliards – treize fois plus. Parmi les entreprises qui ont le plus racheté, prenez LVMH : son action vaut nominalement 0,30 euro, elle atteint sur le marché 655 euros, soit une multiplication par près de 2 200 ! L’action de L’Oréal atteint 329 euros, contre 0,20 euro de valeur faciale.

    M. Ugo Bernalicis

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    C’est qu’elle le vaut bien !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    L’effondrement de l’assiette s’explique par l’énormité de cet écart. C’est ce problème qu’il nous faudrait résoudre ; mais en tant que rapporteur général, je n’ai pas la solution.

    (L’amendement no 3314, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2637.

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Il s’agit d’un amendement rédactionnel accepté par la commission.

    (L’amendement no 2637, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement no 505.

    M. Nicolas Sansu

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    Comme l’a signalé le rapporteur général, le fait d’asseoir la taxe sur la valeur nominale des actions la rend inéquitable : certaines entreprises auront vu cette valeur multipliée sur le marché par sept ou huit, d’autres par 350. Cet amendement vise donc à asseoir la taxe sur la valeur vénale des actions, au cours de la Bourse –⁠ mon ami Jean-Paul Mattei a fait l’an dernier une tentative en ce sens.
    On nous a objecté qu’une telle disposition serait contraire au droit européen. Je retire donc le no 505 au profit des amendements identiques nos 876 et 2371, mais si nous n’obtenons pas satisfaction cette année, nous ne manquerons pas de revenir à la charge.

    (L’amendement no 505 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 872 et 2765, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Sur l’amendement no 872, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Christine Pirès Beaune, pour soutenir cet amendement.

    Mme Christine Pirès Beaune

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    L’article 26 vise à corriger les dérives du système économique : un tel objectif est louable, et nous l’approuvons. En revanche, comme il arrive souvent, vos mesures se révèlent cosmétiques ; cet amendement du groupe Socialistes, adopté en commission, tend donc à les rendre effectives.
    Cette taxe sur la valeur nominale des actions rachetées est la promesse d’un rendement dérisoire, une vraie supercherie. La valeur d’un titre sur le marché atteint entre vingt et cent fois sa valeur nominale ! L’action de TotalEnergies, de 2,50 euros, est passée à 62 euros. Prenons l’exemple des 9 milliards de rachats effectués par cette entreprise en 2023 : au lieu de 2 milliards si nous les avions soumis au régime des dividendes, ils auraient, en vertu de votre article, rapporté à l’État 30 millions, soit une taxation à 0,32 % et non à 8 %. De 30 milliards de rachats, vous retireriez 100 millions, au lieu de 2,4 milliards si vous preniez en compte la valeur réelle des titres et de plus de 6 milliards si vous les assimiliez aux dividendes !
    Vous l’aurez compris, notre amendement prévoit de substituer la valeur de marché à la valeur nominale, en ramenant concomitamment le taux de 8 % à 4 %.
    J’ajouterai, monsieur le rapporteur général, que je doute fortement de la non-conformité au droit européen de cette mesure : votre rapport n’en fait aucune mention. Je ne retirerai donc pas l’amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC, ainsi que sur quelques bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 2765 de Mme Eva Sas est retiré.

    (L’amendement no 2765 est retiré.)
    Quel est l’avis de la commission sur le no 872 ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    La commission a en effet adopté cet amendement, mais comme vous l’évoquez vous-même, il n’est pas eurocompatible. À titre personnel, je ne peux que vous mettre en garde sur ce point.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Visiblement, madame Pires Beaune, ce qui s’est passé en 2017 concernant la taxe sur les dividendes n’a pas suffi, puisque vous proposez de refaire exactement la même chose ! Il ne s’agit pas de se demander quelle assiette on voudrait dans le meilleur des mondes, mais ce que les directives européennes nous permettent de faire. Adoptez cet amendement si vous le souhaitez ; non seulement le rendement sera nul, mais la France recevra la même pénalité qu’il y a sept ans. Se conformer à la réglementation européenne n’est pas qu’une mesure cosmétique ; c’est une obligation.
    Il existe une directive concernant le régime fiscal applicable aux sociétés mères et à leurs filiales, la directive « mère-fille », en vertu de laquelle on ne peut faire autrement que de tenir compte de la valeur nominale, à laquelle s’ajoutent les primes d’émission. Ne racontez donc pas d’histoires ! Avis défavorable.

    Mme Ségolène Amiot

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    C’est toujours quand ça vous arrange !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Frédéric Petit.

    M. Frédéric Petit

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    Dans la mesure où il s’agit de sociétés installées dans plusieurs pays, le droit communautaire prévoit que, dans un espace de marché commun, elles ne puissent pas être imposées deux fois sur les mêmes gains.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Eh oui !

    M. Frédéric Petit

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    C’est donc bien la double imposition qui est condamnée par l’Europe. Il faudrait trouver un autre moyen, mais c’est compliqué.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 872.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        216
            Nombre de suffrages exprimés                167
            Majorité absolue                        84
                    Pour l’adoption                116
                    Contre                51

    (L’amendement no 872 est adopté. En conséquence, les amendements nos 876, 2371, 1225 et 3208 tombent.)
    (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    En adoptant cet amendement, vous venez d’annuler le rendement de la taxe sur le rachat d’actions, qui passe ainsi à zéro !

    Mme Annaïg Le Meur

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 2112 et 3524, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Mathieu Lefèvre, pour soutenir l’amendement no 2112.

    M. Mathieu Lefèvre

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    Hier soir, M. Brun soulignait qu’en 2017 nous avions procédé à une surtaxe de l’impôt sur les sociétés : nous avions dû y recourir parce que la majorité précédente nous avait laissé un contentieux sur les dividendes. En adoptant cet amendement, vous venez de faire exactement la même chose. Bravo, monsieur Brun, pour ce tête-à-queue fiscal en moins de sept ans !
    Le présent amendement vise à plafonner l’assiette de la taxe à la valeur des actions annulées, appréciée à la date de leur rachat. À défaut, les entreprises pourraient être perdantes, au-delà des sommes qu’elles auraient réinvesties.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 3524 de M. David Amiel est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Il a été dit tout à l’heure que les rachats d’actions n’augmentaient pas mécaniquement la valeur de l’entreprise. C’est vrai. Toutefois, il faut distinguer les rachats d’actions qui donnent lieu à annulation –⁠ c’est l’objet de l’amendement – de ceux qui n’y donnent pas lieu : une société peut parfaitement racheter ses actions et les conserver –⁠ sachant que le nombre d’actions acquises ne peut excéder 10 % de son capital. Elle peut néanmoins garder 3 % à 4 % sans problème.
    Pour tout vous dire, j’avais moi-même exploré la piste d’une limitation de l’assiette taxable. Le problème de cette taxe est que les entreprises seront imposées sur une assiette inférieure au montant qu’elles consacrent aux rachats d’actions. Votre amendement concerne les cas hypothétiques dans lesquels la valeur nominale est inférieure à la valeur de marché. Je ne suis pas certain que, dans ces situations, l’entreprise réalise des rachats massifs. Il s’agit d’une hypothèse théorique, un cas d’école, qui existe peut-être de temps à autre. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Ces amendements ne sont pas techniquement tombés dans le cadre de la procédure parlementaire, néanmoins ils tombent de fait puisque la taxe n’est plus assise sur la valeur nominale depuis l’adoption de l’amendement no 872 de M. Brun, lequel place la France en situation de non-conformité avec le droit européen et suscitera la même pénalité qu’en 2017.

    Mme Prisca Thevenot

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    Ils n’aiment pas l’Europe !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Brun.

    M. Philippe Brun

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    Les arguments d’autorité juridique qui ne se fondent sur rien et ne sont pas démontrés ont tendance à annihiler totalement le débat démocratique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
    Le rapporteur nous répond que les dispositions que nous avons adoptées sont contraires au droit européen : je me suis donc référé à son rapport, sachant qu’étant un rapporteur général consciencieux, il a dû préciser les directives ou les jurisprudences auxquelles nous contrevenons. Or il n’y a aucune trace des références qui justifient son avis d’incompatibilité avec le droit européen. J’irai même plus loin : dans son rapport, il écrit lui-même que la situation est injuste et qu’il serait de bonne politique d’asseoir cette taxe sur la valeur réelle des actions et non sur leur valeur nominale.
    J’ai également étudié les circonstances de l’annulation, en 2017, de la taxe sur les dividendes et j’ai consulté la décision rendue à l’époque par le Conseil constitutionnel sur une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). L’annulation avait un fondement juridique totalement différent de ce dont nous débattons, puisque l’appréciation portait sur la rupture de l’égalité devant les charges publiques, en raison de la distribution de dividendes provenant d’autres filiales établies en Europe, soumises de ce fait à la taxe sur les dividendes. Cela n’a donc rien à voir avec cette taxe sur les rachats d’actions.
    Si vous voulez nous opposer des arguments d’autorité juridique –⁠ ce qui peut s’entendre –, ils doivent être démontrés et partagés avec la représentation nationale. Vous ne pouvez pas lancer en l’air des arguments qui, à l’instant où nous parlons, ne sont fondés que sur du vent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ M. Benjamin Lucas-Lundy applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Si vous voulez que nous parlions de ce qui s’est passé en 2017, ce ne sera pas à votre avantage, je vous le dis tout de suite ! (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) Le Conseil d’État a bien sûr été saisi sur cet article. Et si, comme le fait le rapporteur général, j’oppose un argument d’eurocompatibilité, ce n’est pas « en l’air », pour reprendre vos propos. Il aurait d’ailleurs été préférable que vous sécurisiez vous-mêmes le dispositif en 2017, cela aurait évité à la France un rattrapage de 10 milliards d’euros ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR. –⁠ Exclamations sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et SOC.)

    M. Nicolas Sansu

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    Ce n’est pas un argument, ça !

    (Les amendements nos 2112 et 3524 sont retirés.)

    Mme la présidente

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    Les amendements suivants, qui concernaient un changement du taux à l’alinéa 19, sont tombés du fait de l’adoption de l’amendement no 872.
    Nous en venons donc à l’amendement no 2113 de M. Mathieu Lefèvre.

    M. Mathieu Lefèvre

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    Je le retire.

    (L’amendement no 2113 est retiré.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement no 3662.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Je vais le présenter, même si je ne sais pas, techniquement, s’il convient de le faire étant donné ce qui a été adopté précédemment.
    Il vise à préciser les obligations déclaratives liées à la taxe sur les réductions de capital créée par l’article 26 en proposant de les adapter en fonction de la situation des redevables à l’égard de la TVA.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Elle a émis un avis favorable puisque l’amendement gouvernemental précise les modalités de déclaration de la taxe sur les réductions de capital pour les entreprises soumises à un régime simplifié de TVA par rapport à celles qui ne sont pas redevables de la TVA. C’est une mesure technique nécessaire pour que la taxe soit opérationnelle dès le début de l’année prochaine.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Matthias Renault.

    M. Matthias Renault

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    Permettez-moi de rebondir sur l’intervention de M. Brun. Le ministre pourrait-il nous préciser la base juridique sur laquelle se fonde son argumentation ? De quelle directive s’agit-il ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Je l’ai dit : la directive « mère-fille ».

    (L’amendement no 3662 est adopté. En conséquence, l’amendement no 3520 tombe.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l’amendement no 3386.

    M. Jean-Paul Mattei

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    Je suis gêné de présenter cet amendement car il avait pour objet d’éviter que la taxe sur le rachat d’actions ne puisse être considérée comme incompatible avec la réglementation européenne, comme a pu l’être celle de 3 % sur les dividendes.
    Pour répondre à notre collègue Renault, le Conseil constitutionnel a invalidé cette dernière. L’une de mes premières expériences dans cette assemblée a été lorsqu’il a fallu trouver 10 milliards pour financer la pénalité infligée à la France. À l’époque, les grandes entreprises avaient contribué à hauteur de 5 milliards et le reste de la charge avait été partagé, en quelque sorte. Il y avait eu un consensus généralisé.
    Par ailleurs, j’espère que l’amendement no 2775 de M. de Courson, qui prévoit la remise d’un rapport permettant d’évaluer les effets de la taxe, sera adopté, car ce document nous permettra de nous poser calmement et de faire le tour de la question. Dans cette attente, j’aurais aimé que l’on maintienne la taxe sur les rachats d’actions, comme garantie plancher. Je retire le présent amendement, qui n’a plus de sens, compte tenu de ce qui vient d’être adopté.

    (L’amendement no 3386 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 2109 et 2369.
    La parole est à M. Mathieu Lefèvre, pour soutenir l’amendement no 2109.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Nous n’examinons pas l’amendement no 3520 de M. Cazenave ?

    Mme la présidente

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    Il visait à supprimer l’alinéa 26 ; il est tombé à la suite de l’adoption de l’amendement n°3662, qui introduit une nouvelle rédaction de cet alinéa.
    M. Lefèvre, vous avez la parole.

    M. Mathieu Lefèvre

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    Cet amendement visait à rendre la taxe rétroactive au 1er janvier 2024 et non plus au 10 octobre, à la fois pour assurer un rendement sur l’année 2024, puisque nous en avons cruellement besoin, et pour éviter toute stratégie de contournement que pourrait susciter l’adoption de ladite taxe. Néanmoins, l’article 26 modifié étant désormais contraire au droit européen, je retire mon amendement. Cela dit, j’aimerais que le ministre nous précise sa position en la matière. A-t-il, oui ou non, l’intention de rendre cette taxe rétroactive pour les raisons que je viens d’évoquer ?

    (L’amendement no 2109 est retiré.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Aurélien Le Coq, pour soutenir l’amendement no 2369.

    M. Aurélien Le Coq

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    Une fois n’est pas coutume, nous avions un amendement identique à celui de M. Mathieu Lefèvre. Puisqu’il le retire, nous le maintiendrons. L’objectif est que la taxe soit effective à partir du 1er janvier 2024 : il n’y aurait aucune cohérence, au moment où nous devons trouver des recettes pour les finances publiques, à ce qu’elle ne s’applique qu’à partir du 10 octobre, date bien tardive de transmission du PLF. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    La commission a émis un avis défavorable. Cet amendement pose en effet un problème de rétroactivité,…

    M. David Amiel

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    C’est l’objectif !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    …puisque le fait générateur de l’impôt a déjà eu lieu. Or le but de cette taxe est de dissuader certains comportements ; ces opérations ayant, par définition, été effectuées, il n’est plus question de dissuader qui que ce soit. Je vous invite plutôt à retirer l’amendement.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    La disposition s’applique à compter de la réunion du Conseil des ministres, le 10 octobre, comme cela se fait généralement pour ce type de taxations. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    M. Le Coq, retirez-vous votre amendement ?

    M. Aurélien Le Coq

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    Non.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Permettez-moi, puisque nous arrivons à la fin de l’examen de l’article 26, de prendre la parole pour clarifier et clore la discussion relative à la fameuse taxe de 3 % sur les dividendes. Notre collègue Philippe Brun semble avoir la mémoire sélective. Cette taxe a été annulée en deux temps : d’abord au printemps 2017, par une décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), en raison d’une incompatibilité avec le droit européen – vous avez dit qu’il n’y avait aucun lien avec les textes européens, mais cette taxe y contrevenait bel et bien –⁠ ; ensuite, en octobre 2017, la deuxième partie de cette taxe a été annulée par le Conseil constitutionnel. La disposition prise par François Hollande à l’époque était donc à la fois contraire aux textes européens et contraire à la Constitution.

    M. Philippe Brun

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    Cela n’a rien à voir !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Christine Pirès Beaune.

    Mme Christine Pirès Beaune

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    À titre d’exemple, aux Pays-Bas, le gouvernement précédent a souhaité instaurer une taxe sur la valeur de marché, qui aurait dû rapporter, selon les calculs, 1,2 milliard.

    M. Philippe Brun

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    La mesure est donc conforme !

    Mme Christine Pirès Beaune

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    Celle-ci n’a finalement pas été instaurée puisque le gouvernement a changé. Néanmoins, cela prouve que les Pays-Bas considéraient, eux aussi, que cette disposition n’est pas anticonstitutionnelle. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Paul Mattei.

    M. Jean-Paul Mattei

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    Je souhaitais simplement revenir sur l’amendement relatif à la rétroactivité. Nous savons bien que de nombreuses mesures ne peuvent prendre effet, et ne sont garanties juridiquement, qu’à partir du moment où l’annonce en a été faite au Conseil des ministres –⁠ dans le cas présent, il s’agit du 10 octobre. C’est également pour la modification de certaines règles. Il s’agit d’une obligation constante dans le droit fiscal. Vous prendriez un risque juridique à voter cet amendement. Je sais bien que vous ne voulez pas que l’on vous oppose trop d’arguments juridiques et que vous préférez faire de la politique, néanmoins nous sommes aussi là pour faire la loi.

    (L’amendement no 2369 est adopté.)
    (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et SOC.)

    Mme la présidente

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    Sur l’article 26, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2775.

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Il prévoit que le Gouvernement remettra au Parlement un rapport avant le 1er octobre 2025 –⁠ afin que nous puissions en tirer les conséquences dans le projet de loi de finances pour 2026. Il évaluera les effets de la taxe sur les pratiques des entreprises en matière de rémunération de leurs actionnaires. Il identifiera également des pistes de réflexion pour modifier les règles du droit commercial encadrant les rachats d’actions et étudiera les conséquences d’une éventuelle interdiction.
    Une première hypothèse consisterait à revenir sur la réforme de 1966, voire celle de la fin des années 1990, pour les interdire. Dans la deuxième hypothèse, des droits d’enregistrement seraient rétablis, comme le préconise Jean-Paul Mattei. Dans la troisième hypothèse, la taxe serait assise sur la valeur de marché plutôt que sur la valeur faciale. Nous sommes quasi unanimes quant à la nécessité d’agir face à cette situation inacceptable, je compte sur vous pour voter cet amendement. Je précise que la commission l’a adopté.

    (L’amendement no 2775, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’article 26, tel qu’il a été amendé.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        232
            Nombre de suffrages exprimés                232
            Majorité absolue                        117
                    Pour l’adoption                186
                    Contre                46

    (L’article 26, amendé, est adopté.)
    (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

    Mme la présidente

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    Nous avons terminé d’examiner les articles appelés par priorité, nous en revenons donc au cours normal du débat.

    Article 8

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Corentin Le Fur.

    M. Corentin Le Fur

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    Le groupe DR est opposé à un durcissement brutal du malus automobile, qui concernera 80 % des immatriculations de voitures. Ce malus pénalisera la France qui travaille et les territoires ruraux, dont les habitants n’ont d’autre solution que la voiture. Les ouvriers de ma circonscription, qui souvent travaillent en deux-huit ou en trois-huit et n’ont pas accès aux transports en commun, seront pénalisés, tout comme notre industrie automobile, alors qu’il est nécessaire de réindustrialiser le pays. Pour toutes ces raisons, nous voterons contre cet article. Sans être dans l’opposition au gouvernement de Michel Barnier, nous jouons notre rôle parlementaire en cherchant à infléchir certaines mesures qui nous semblent négatives. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Eddy Casterman.

    M. Eddy Casterman

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    Le Gouvernement avait promis un projet de loi de finances de la préservation du pouvoir d’achat. Les Français auront tout le contraire.

    M. Louis Boyard

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    Votez la censure !

    M. Eddy Casterman

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    L’article 8 en est un exemple supplémentaire. Alors que les dépenses liées à l’usage de l’automobile sont déjà très élevées, il marque une nouvelle offensive contre les automobilistes. Ils subiront une fois encore la hausse du malus sur les émissions de CO2, du malus masse et du barème relatif aux chevaux fiscaux. Certains utilitaires étant visés, cet article met en péril nos petites entreprises déjà étouffées par les taxes, les impôts et les charges. Il cible également des voitures familiales, peu émettrices et plébiscitées par de nombreux Français, –⁠ les Peugeot 208 et 2008, les Dacia Sandero ou les Renault Captur.
    Une fois encore, les commerçants, les artisans et les familles des classes moyennes et populaires seront frappés de plein fouet par une écologie punitive et idéologique. Ce sont ceux qui sillonnent nos territoires ruraux ou nos périphéries urbaines et qui n’ont d’autre choix que d’utiliser la voiture pour se déplacer et aller travailler qui devront payer.
    Vous voulez pousser les ruraux vers des véhicules électriques inadaptés et souvent inabordables. Au moment où la réindustrialisation de notre pays devrait être érigée en priorité, vous mettez en péril la filière automobile, de l’industrie aux concessionnaires. Cette filière va mal : les immatriculations de véhicules neufs ont chuté de 23,2 % par rapport à 2019.
    Cette disposition n’est dans l’intérêt de personne. Les Français trop pauvres pour être aisés et trop riches pour être aidés n’en peuvent plus de payer pour éponger votre mauvaise gestion, pour des services publics toujours moins performants et une dette nationale qui ne cesse d’augmenter ! Soucieux de préserver le pouvoir d’achat des automobilistes et l’industrie de notre pays face à l’écologie punitive et au fanatisme vert, nous voterons les amendements de suppression (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ Mme Dominique Voynet applaudit de manière ironique.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Éric Woerth.

    M. Éric Woerth

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    Nous sommes plutôt opposés à cet article. Au-delà de l’écologie, cette discussion touche au cœur de l’industrie française et européenne, qui, on le voit dans nos rues et au Salon de l’automobile, se déporte de plus en plus vers la Chine et vers l’est. Des centaines de milliers d’emplois sont en jeu. Nous devons réussir l’électrification –⁠ les échéances sont très proches et nos constructeurs s’y préparent. Il serait intéressant d’organiser un débat de fond sur la capacité de l’industrie automobile à absorber de telles augmentations du malus, en présence du ministre de l’économie.
    Une trajectoire avait été définie, on ne peut pas constamment en changer. Le Gouvernement durcit à la fois le malus masse et le malus sur les émissions de CO2. L’industrie automobile a besoin de stabilité et de prévisibilité. Les constructeurs ne sont opposés ni à l’électrification ni à la réduction des émissions de CO2, mais en allant trop loin, le Gouvernement met en péril l’industrie automobile française. (M. Sébastien Huyghe applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Éric Ciotti.

    M. Éric Ciotti

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    Cet article constitue malheureusement un exemple supplémentaire du délire fiscal qui guide le Gouvernement et de son approche purement technocratique. Cette disposition, qui frappera les Français les plus modestes, est vecteur d’injustice sociale et territoriale. Le Gouvernement a annoncé vouloir taxer les SUV des riches –⁠ pris pour cible en permanence – mais ce sont les propriétaires de véhicules d’entrée de gamme –⁠ les Clio, Renault Captur, Dacia Sandero – qui seront aussi taxés.
    Cette erreur économique majeure accélérera la désindustrialisation de notre pays, qui a conduit à la suppression de 2 millions d’emplois depuis 1981 –⁠ l’industrie a été sacrifiée au profit des services. On est en train de tuer l’industrie automobile française…

    Un député du groupe RN

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    Bravo !

    M. Laurent Jacobelli

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    Eh oui !

    M. Éric Ciotti

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    …par des mesures technocratiques stupides qui n’auront aucun effet vertueux sur la protection de la planète (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN).

    Mme Christine Arrighi

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    Pour vous, quelles seraient les mesures intelligentes ?

    M. Éric Ciotti

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    La Chine représente 30 % des émissions de gaz à effet de serre, les États-Unis 10 %, l’Inde 8 % ; l’Union européenne tout entière, 6 % seulement ! (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et RN). Nous rajoutons à l’autoculpabilisation en frappant les Français et notre économie. Retirez cette mesure totalement inepte et stupide ! (Mêmes mouvements.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Eva Sas.

    Mme Eva Sas

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    Cet article renforce le malus masse en abaissant le seuil de chacune des tranches du barème de 100 kilogrammes. Compte tenu de l’effet de l’augmentation incessante du poids des véhicules sur les émissions de gaz à effet de serre –⁠ donc sur le dérèglement climatique dont nous constatons de plus en plus fréquemment les conséquences au quotidien –, cet article va plutôt dans le bon sens.

    M. Laurent Jacobelli

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    Écologie punitive !

    Mme Eva Sas

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    Néanmoins, il manque d’ambition : le Gouvernement aurait pu aller plus loin en abaissant le seuil d’entrée dans le malus masse.

    M. Laurent Jacobelli, M. Philippe Ballard et M. Julien Odoul

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    La charrue !

    Mme Eva Sas

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    Les écologistes défendent un mécanisme de bonus-malus, qui pénalise les comportements néfastes pour le climat et récompense les personnes engagées dans la transition écologique et les produits vertueux.

    M. Laurent Jacobelli

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    Le quinoa !

    Mme Eva Sas

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    Vous faites exactement le contraire. Vous utilisez la fiscalité écologique pour remplir les caisses de l’État. Vous alourdissez le malus tout en abaissant le bonus pour les véhicules propres. Ce n’est pas du tout notre ligne : nous souhaitons récompenser les produits les plus vertueux.

    M. Julien Odoul

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    Les véhicules électriques ne sont pas vraiment propres !

    Mme Eva Sas

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    Par ailleurs, il est nécessaire de flécher la fiscalité écologique vers le financement de la transition écologique. Ainsi, vous auriez pu utiliser ces recettes supplémentaires pour financer le leasing social, qui permet à des familles modestes en milieu rural d’acquérir un véhicule propre.

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous êtes complètement hors-sol ! Depuis combien de temps n’êtes-vous pas allée en milieu rural ?

    Mme Eva Sas

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    Vous ne vous êtes absolument pas engagés sur les montants que vous comptez consacrer à cette mesure.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Sansu.

    M. Nicolas Sansu

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    Monsieur le ministre, vous ne pouvez vous acheter une conscience écologique à si bon compte. Vous baissez les crédits du fonds Vert de 1,5 milliard, vous diminuez les aides à la rénovation thermique, en particulier MaPrimeRénov’, puis vous tentez de vous refaire une conscience écologique en augmentant le malus masse. Ce n’est pas possible ! Le groupe GDR votera pour les amendements de suppression car ce n’est pas la bonne manière d’encourager la défense de l’environnement. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes GDR et SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hervé Saulignac.

    M. Hervé Saulignac

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    Plusieurs angles sont possibles pour évoquer l’article 8 : la défense de l’industrie automobile, la dimension écologique, tout à fait légitime. Cependant, le pouvoir d’achat des Français est au cœur des préoccupations du groupe socialiste et nous ne pouvons que regretter que cette disposition concerne 80 % du parc automobile, soit l’immense majorité des Français. Je pense à toutes celles et ceux qui m’ont écrit, comme sans doute à beaucoup de parlementaires : parents de famille nombreuse, ils n’ont d’autre solution que de rouler avec un véhicule break et déplorent d’être traités comme des propriétaires de SUV Rolls-Royce.

    Plusieurs députés du groupe RN

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    Bravo !

    M. Hervé Saulignac

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    C’est inadmissible ! Cette mesure est inepte, à l’heure où le pouvoir d’achat doit être notre priorité. Cet article doit être supprimé.

    Un député du groupe RN

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    Des dissensions au NFP ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Je veux répondre aux questions, fort légitimes, qui ont été posées lors de cette mini-discussion générale sur l’article 8. Les véhicules qui sortent des usines émettent de moins en moins. Pour accompagner cette baisse des émissions, nous faisons évoluer le système de malus en abaissant le seuil de déclenchement de 5 g de CO2 par km en 2025 et de 7 g en 2026 et en 2027. Ce seuil s’établira donc à 113 g de CO2 par km pour l’année 2025, à 106 g pour l’année 2026 et à 99 g pour l’année 2027. La trajectoire proposée suit de façon linéaire l’évolution des caractéristiques des véhicules neufs, de moins en moins polluants.
    Les dispositions de cet article me paraissent justes et ne me semblent pas de nature –⁠ je partage votre vigilance – à casser notre industrie automobile et à paupériser la population. De combien de véhicules parlons-nous ?

    M. Éric Ciotti

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    De la moitié des véhicules achetés !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Non, de 44 % des véhicules achetés neufs, qui représentent eux-mêmes 12,5 % de l’achat total de véhicules, soit environ 6 % du nombre de véhicules achetés dans notre pays. L’évolution du malus doit être cohérente avec notre objectif de baisse du seuil. Ce n’est donc pas un article de nature idéologique, ce n’est pas l’enfer vert que vous décrivez, monsieur Ciotti.

    M. Éric Ciotti

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    Mais si !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Il s’agit d’adapter le dispositif à l’évolution naturelle du marché. Je suis tout à fait d’accord avec votre idée, monsieur Woerth, d’un débat sur l’avenir de l’industrie automobile. Vous excuserez le ministre de l’économie qui assiste à une réunion du Fonds monétaire international (FMI) à Washington, vous n’aurez que moi aujourd’hui (Sourires) mais je suis disposé à débattre avec vous de cette filière très importante.
    Madame Sas, je n’ai pas compris si vous alliez soutenir ou non cet article.

    Mme Eva Sas

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    Oui !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Très bien ! Il ne faudrait pas croire que les dispositions de l’article 8 annulent les mesures en faveur de l’achat de véhicules propres. Nous maintenons les aides à l’achat de véhicules propres, ainsi que le leasing social, un peu victime de son succès,…

    Mme Eva Sas

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    Justement !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    …mais c’est une bonne nouvelle et nous allons continuer à l’accompagner.
    Cet article n’est donc pas l’achat d’une conscience, monsieur Sansu. Il illustre au contraire notre volonté de poursuivre la transition écologique au moyen du verdissement de la flotte des véhicules, par l’achat des voitures neuves de tourisme. Enfin, j’entends toutes les trois heures votre argument sur le fonds Vert. Ses crédits s’élèvent encore à 1 milliard d’euros en 2025. Dans un moment où il faut redresser nos comptes publics, ne dites donc pas qu’on annule le financement de la transition écologique dans les territoires !

    M. Nicolas Sansu

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    Mais si ! Les crédits ont baissé de 1,5 milliard !

    Mme Dominique Voynet

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    Écoutez l’Ademe !

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux demandes de scrutin public : par les groupes Rassemblement national et Libertés, indépendants, outre-mer et territoires sur les amendements no 530 et identiques ; par le groupe Rassemblement national sur l’amendement no 3554.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisie de trois amendements de suppression, nos 530, 1444, 3559.
    L’amendement no 530 de Mme Émilie Bonnivard est défendu.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Edwige Diaz, pour soutenir l’amendement no 1444.

    Mme Edwige Diaz

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    Les macronistes, bien aidés par le Nouveau Front populaire, sont vraiment passés maîtres dans l’art de la stigmatisation des automobilistes.

    M. Louis Boyard

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    En matière de stigmatisation, vous êtes orfèvres !

    Mme Edwige Diaz

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    Les premiers, soutenus en général par les seconds, ont augmenté les prix du carburant, imposé la limitation de vitesse à 80 km/h sur les routes départementales, rendu obligatoire le contrôle technique pour les motards, instauré les zones à faibles émissions et soutenu la politique de l’Union européenne visant à interdire la vente des véhicules à moteur thermique à l’horizon 2035. Voilà votre bilan !

    M. Damien Girard

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    Le réchauffement climatique, ça vous dit quelque chose ?

    Mme Edwige Diaz

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    Dans ce PLF, vous continuez de rivaliser d’ingéniosité en matière d’écologie punitive, avec la naissance d’un nouvel impôt déguisé qui consiste à rendre encore plus sévère le malus écologique et qui, contrairement à ce que vous avez dit, monsieur le ministre, concernera 80 % des véhicules à l’horizon 2027 –⁠ pas seulement les grosses berlines, mais aussi les 208, Sandero, Clio et autres petites voitures citadines.
    Nous proposons de supprimer cet article car nous contestons fermement ce nouvel impôt déguisé, injuste socialement puisqu’il frappera durement le pouvoir d’achat des plus modestes, fracturant du point de vue territorial puisqu’il pénalisera d’abord les ruraux, inefficace économiquement puisqu’il affaiblira l’industrie automobile et menacera des emplois, et enfin contre-productif en matière écologique puisque le prix trop élevé des véhicules conduira les personnes à renoncer à l’achat et à conserver des véhicules polluants.

    M. Emeric Salmon

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    C’est vrai !

    Mme Edwige Diaz

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    La mesure proposée par le Gouvernement est donc inacceptable et insoutenable, à la fois pour les familles, les entreprises et l’industrie. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 3559.

    Mme Véronique Louwagie

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    Cet amendement du groupe Droite républicaine vise à faire obstacle au durcissement du malus automobile. Monsieur le ministre, en répondant aux interventions de nos collègues, vous avez bien identifié les deux risques : casser la filière automobile et paupériser la population. La filière automobile est fortement impliquée et essaie de s’organiser pour faire face aux mutations, notamment technologiques. Elle connaît des difficultés car les évolutions sont très rapides et la modification du malus en ce moment précis contribuerait encore un peu plus à la déstabiliser. Il convient donc de faire une pause.

    M. Xavier Breton

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    Très bien !

    Mme Véronique Louwagie

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    Par ailleurs, les mesures que vous proposez pénaliseront les ménages propriétaires de ces véhicules, à rebours de votre engagement à ne pas alourdir la charge fiscale. Avec les nouveaux barèmes proposés par cet article, le malus automobile touchera 80 % des véhicules immatriculés en 2027, contre seulement 40 % en 2023, soit 40 points d’écart. Loin de concerner une minorité d’automobilistes, cette mesure toucherait aussi des modèles populaires prisés par les Français : 44 % des Peugeot 208 seraient soumis à malus, contre seulement 13 % aujourd’hui ; pour les Renault Captur, le montant moyen du malus doublerait pour atteindre 695 euros en 2025. Enfin, dans les territoires ruraux, la mobilité est difficile et la voiture est nécessaire car les transports collectifs y sont rares.

    M. Xavier Breton

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    Tout à fait !

    Mme Véronique Louwagie

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    C’est pourquoi je vous demande de faire une pause dans l’évolution du dispositif et de voter, mes chers collègues, les amendements de suppression de l’article 8. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    La commission des finances a donné un avis favorable à ces amendements de suppression, pour plusieurs raisons. La première concerne la productivité fiscale : le malus rapporte 1 milliard en 2024 et son produit va progressivement augmenter –⁠ 2 milliards en 2025, 4 milliards en 2027. Ces recettes ne sont pas affectées à une autre cause.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Un peu au bonus quand même !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Non ! La deuxième raison est le caractère excessif de cette réforme. Selon une étude publiée par Mobilians, 40 % des véhicules –⁠ 44 % selon le ministre – sont assujettis à un malus. Cette proportion passerait à 80 % en 2027, c’est énorme ! Troisième raison : ce n’est pas le tout de produire des voitures électriques ou hybrides, encore faut-il des consommateurs pour les acheter.

    M. Xavier Breton

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    Eh oui !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Or, les derniers chiffres européens –⁠ puisqu’on ne produit pas simplement pour le marché national – révèlent que les véhicules électriques et hybrides –⁠ toutes catégories – ne représentent respectivement que 10 % et environ 20 % des achats de véhicules neufs. Il convient de respecter le comportement des consommateurs.
    Problème social, également : ces malus frappent très différemment nos concitoyens, selon qu’ils habitent des secteurs tels que la région parisienne, dotée d’un réseau dense de transports collectifs, ou des espaces ruraux sans transports.
    Enfin, l’objectif européen de ne plus produire de véhicules à moteur thermique à partir de 2035 a été évoqué. Le nouveau Parlement européen se saisit à nouveaux frais du dossier. La réalisation de cet objectif selon ce rythme beaucoup trop rapide serait en effet une catastrophe. C’est sans doute ce qu’avaient à l’esprit tous ceux qui ont voté pour la suppression de l’article 8.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Je suis en désaccord avec le rapporteur général.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Très bien !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Vous faites une erreur d’appréciation quand vous dites que la part des véhicules propres passerait de 44 % à 80 %. C’est nier l’évolution technologique que j’ai évoquée.

    Mme Prisca Thevenot

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    Eh oui !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    En abaissant le seuil du malus de 5 grammes de CO2 par kilomètre, ce qui est la tendance de la production, cet article ne vise pas l’accélération, mais seulement la poursuite de l’évolution de la flotte des véhicules. Plusieurs études montrent d’ailleurs que le ratio de 44 % va peu évoluer. Il ne s’agit donc pas d’un article de rendement, visant à ce que l’État se refasse la cerise sur les consommateurs.

    M. Éric Ciotti

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    Mais si !

    Mme Véronique Louwagie

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    Ce n’était pas mon propos !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Nous ne faisons qu’accompagner le verdissement de la flotte à rendement constant. Le seuil évoluant de lui-même au moyen de la technologie automobile, il est normal que la loi avance au même rythme. Si nous ne faisions pas évoluer le barème, nous enverrions le signal selon lequel nous n’avons pas vraiment la volonté d’accompagner la transition écologique en développant les véhicules propres.

    M. Gérault Verny

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    Et on tue l’industrie automobile !

    M. Éric Ciotti

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    La Chine vous dit merci !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    De fait, il est vrai, madame Louwagie, que des véhicules qui n’émettent pas moins de CO2 entreront dans le barème. Mais ce n’est pas le cas des hybrides, comme la 208 hybride que vous avez évoquée. La loi s’adapte donc à la réalité de ces véhicules, c’est pourquoi je ne souhaite pas que l’article 8 soit supprimé.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Rousseau. (« Ah ! » sur les bancs du groupe RN.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Pas de langage corporel, hein !

    Mme Sandrine Rousseau

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    Nous vivons un moment de bascule climatique. Les puits de carbone ne l’absorbent plus. On élabore des plans d’adaptation dans la perspective d’une hausse des températures de 4 degrés, mais aucune adaptation n’est possible à un tel niveau de réchauffement. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EcoS, LFI-NFP et SOC.)

    M. Gérault Verny

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    Quel est le rapport ?

    Mme Sandrine Rousseau

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    La question qui se pose est celle du changement de nos comportements pour éviter la catastrophe. Et à chaque fois qu’on s’attelle à modifier un des comportements, on trouve de multiples raisons de ne pas agir.
    Évidemment, monsieur le ministre, une politique de bonus-malus n’est pas en soi une politique publique de mobilité, mais seulement une petite partie de ce que devrait être cette politique : accompagnement des personnes dans le changement de mobilité et de véhicule, développement des transports publics, de tous les transports collectifs et du fret ferroviaire. (Mêmes mouvements.)
    En refusant de donner des signaux pour une part minime des achats de nouvelles voitures, vous enfermez les gens dans la dépendance à l’essence –⁠ dont il est tout à fait illusoire de penser qu’elle sera moins chère demain. Vous les enfermez dans ce modèle et dans une perte de pouvoir d’achat et d’autonomie. C’est coupable d’agir ainsi alors que nous connaissons parfaitement les évolutions du climat ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS, LFI-NFP et SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Béatrice Bellay.

    Mme Béatrice Bellay

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    Nous allons voter contre ces amendements…contre l’article, pardon… (Mouvements sur divers bancs.) Vous aviez compris (Sourires) et vous comprendrez encore mieux grâce à ma démonstration et à mon vote. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Prisca Thevenot

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    On vous écoute !

    Mme Béatrice Bellay

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    Le Gouvernement s’obstine dans sa pédagogie particulière qui consiste à taxer les populations et à éviter toute taxation des grandes entreprises. Vous ne pensez pas à tous les territoires, en premier lieu à ces pays des océans, bien trop loin de vos yeux pour mériter votre considération.

    Mme Dieynaba Diop

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    En l’occurrence, je veux vous rappeler que la plupart de nos pays des océans, dits d’outre-mer, n’ont accès qu’aux énergies carbonées, en l’occurrence fossiles. Je veux vous rappeler que les véhicules hybrides ou électriques coûtent 30 % plus cher dans nos pays. Je veux enfin vous rappeler que chez moi, en Martinique, plus de 50 % de la population vit avec moins de 1 500 euros.
    Ce que vous prévoyez, c’est de faire les poches aux malheureux et d’éviter à l’État –⁠ comme à la CMA-CGM, d’ailleurs – de participer à l’effort de transition, à la transformation des modes de transport et au renouvellement des véhicules dans nos territoires. En effet, vous abaissez toujours davantage la participation de l’État à l’achat de véhicules plus ou moins propres ; je dis « plus ou moins », car chez nous, malheureusement, les véhicules électriques ne seront jamais vraiment propres. La Martinique ne saurait tirer fierté de son électricité majoritairement carbonée et issue des énergies fossiles.
    Nous nous opposerons donc à l’article 8, car cette mesure n’est pas au bénéfice de nos populations. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Victor Castor.

    M. Jean-Victor Castor

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    Je rejoins les propos de ma collègue, parfaitement illustrés par l’exemple de la Guyane. On vote des mesures sans s’intéresser à l’impact qu’elles auront sur nos populations. En Guyane, il n’y a presque pas de routes, nous ne roulons donc quasiment qu’avec des pick-up ; pourtant, un malus écologique sur les pick-up nous a été appliqué.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Eh oui !

    M. Jean-Victor Castor

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    Vous avez pénalisé les agriculteurs, les artisans, les professionnels de toutes sortes et les familles qui habitent dans des lieux desservis par des pistes en terre. Il n’y a pas de transports en commun, l’État se désengage de l’investissement dans la construction de routes, et ce sont toujours les populations qui sont pénalisées.
    Je ne comprends pas que cette mesure n’ait pas fait l’objet d’une étude d’impact, alors que ses conséquences sur la population seront énormes. Entre 2017 et 2022, en seulement cinq ans, la part de la population guyanaise vivant sous le seuil de pauvreté est passée de 30 % à plus de 53 % ! Notre population s’appauvrit de jour en jour, et vous vous apprêtez à la pénaliser encore ! L’amendement no 1088 de M. Rimane a été déposé pour cette raison ; si l’article est supprimé, nous ne pourrons pas en débattre, c’est pourquoi j’ai pris la parole. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR et SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Claire Lejeune.

    Mme Claire Lejeune

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    Je tiens à souligner l’immense hypocrisie et l’immense démagogie du Rassemblement national, qui chouine sur le malus écologique alors qu’il vote systématiquement contre toutes les mesures qui permettraient aux Français de sortir de la dépendance aux énergies fossiles. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Exclamations sur quelques bancs des groupes RN et UDR.)

    M. Gérault Verny

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    Nous sommes pour le nucléaire ! Vous dites n’importe quoi !

    Mme Claire Lejeune

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    La voiture électrique, vous votez contre ; toutes les mesures en faveur de mobilités plus douces, vous votez contre ! Que proposez-vous aux Français ?

    M. Laurent Jacobelli

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    Laissez les Français tranquilles !

    Mme Claire Lejeune

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    Vous êtes une impasse pour les Français. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) Les images des récentes inondations ont montré, entre autres, les dégâts sur les voitures ; les automobilistes sont aussi des citoyens qui ont déjà commencé à payer le dérèglement climatique.
    L’article vise à renforcer le malus écologique sans augmenter les aides à l’électrification : 500 millions ont été retirés à ces aides qui alimentent le bonus écologique. Nous ne saurions nous contenter d’une politique qui donne des coups d’arrêt aux mesures écologiques sans déployer de stratégie industrielle pour favoriser la transition des mobilités dans leur ensemble. (Mêmes mouvements.)

    M. Alexandre Sabatou

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    Vous ne proposez pas d’alternative !

    Mme Claire Lejeune

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    Il aurait fallu établir une vraie stratégie pour la filière automobile française. Au lieu de cela, tout s’effondre ; les constructeurs et les équipementiers comme Valeo sont en train de tomber. (Vives exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Ce qu’elle récite mal !

    Mme Claire Lejeune

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    Sans stratégie industrielle et sans cap pour la planification écologique, vous ne proposez en fait que des impasses. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    Madame Lejeune, soutenir un amendement devant cette assemblée, ce n’est pas chouiner, c’est exercer sa mission de parlementaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. –⁠ Mme Véronique Louwagie applaudit également. –⁠ Exclamations prolongées sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    La parole est à M. Julien Rancoule.

    M. Julien Rancoule

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    Je voudrais expliquer à Mme Rousseau, aux écologistes et aux Insoumis comment cela se passe dans la vraie vie. Tout le monde n’habite pas dans une métropole, et les habitants de la ruralité ont encore besoin de véhicules qui consomment de l’essence ou du diesel. Dans ma circonscription de l’Aude, certains étudiants habitant par exemple Axat ou Quillan doivent faire plus de 100 kilomètres pour aller suivre des cours à Toulouse. Si vous leur enlevez leur véhicule à moteur essence ou diesel, ils ne pourront pas s’y rendre car les véhicules électriques n’ont pas assez d’autonomie pour un aller-retour et les transports en commun ne desservent pas ces communes rurales. (Mme Sandrine Rousseau s’exclame.) Je vous invite à vous reconnecter à la réalité du terrain et à sortir de Toulouse, de Paris et des grandes métropoles. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Cazeneuve.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Il n’est pas surprenant que le Rassemblement national soit contre le malus écologique et contre les véhicules électriques ; c’est une constante.

    M. José Beaurain

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    Nous ne sommes pas contre les véhicules électriques !

    M. Pierre Cazeneuve

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    C’est assez logique, connaissant votre moratoire sur les énergies renouvelables et sachant que vous refusez l’idée que le monde puisse s’électrifier. Vous refusez de produire plus d’électricité en France dans les trente prochaines années (Protestations sur quelques bancs du groupe RN) et préférez rester dépendants du gaz russe pour vous chauffer, du pétrole kazakh pour rouler.
    En revanche, je suis plus étonné de la position des socialistes qui, par la voix de leurs orateurs, ont annoncé qu’ils allaient voter pour les amendements de suppression et contre l’article. Vous déviez de la volonté qui était jusqu’alors la vôtre d’accompagner la transition écologique par des mesures ambitieuses.

    M. Hervé Saulignac

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    Ce n’est pas vrai ! Mais ce n’est pas comme cela qu’il faut l’accompagner.

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Ce n’est pas de l’écologie que vous faites, c’est de la fiscalité !

    M. Pierre Cazeneuve

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    La position du Gouvernement me semble équilibrée. La mesure ne concerne que les véhicules neufs, c’est-à-dire seulement 12 % des véhicules achetés. Elle n’affectera donc pas l’ensemble des acquisitions de véhicules, notamment pour les Français les plus modestes qui achètent d’occasion. Il est donc hypocrite et faux de prétendre que cet article ne cible que les classes populaires.

    Mme Dieynaba Diop

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    C’est bien le problème : les gens n’ont pas les moyens d’acheter un véhicule électrique neuf ou hybride !

    M. Pierre Cazeneuve

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    Par ailleurs, même s’il est vrai que nous ne sommes pas prêts à passer à 100 % de véhicules électriques, nous progressons, monsieur le rapporteur général : l’électrique représente 10 % des acquisitions de véhicules neufs en Europe et 18 % en France en 2024.

    M. Gérault Verny

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    Ils sont fabriqués en Chine !

    M. Pierre Cazeneuve

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    Il faut continuer à accompagner cette trajectoire grâce à une fiscalité incitative, c’est-à-dire un bonus écologique pour les véhicules propres, financé par un malus écologique sur les véhicules polluants. Cela me paraît être un juste équilibre.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur général.

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Monsieur le ministre, la meilleure manière de rendre les véhicules moins polluants consiste à continuer d’améliorer les moteurs thermiques et à imposer, comme le fait l’Union européenne au niveau européen, la réduction lente mais continue des émissions, permise par les progrès technologiques (M. le ministre acquiesce), le passage aux véhicules hybrides ou électriques restant une solution complémentaire.
    Votre réponse repose sur l’hypothèse que le consommateur se conformera à vos souhaits, mais ce n’est pas ce que l’on constate, puisque les véhicules électriques ne représentent que 10 % des achats neufs. Cette politique menée à l’échelle européenne a abouti à une catastrophe industrielle en Europe.

    M. Gérault Verny

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    Tout à fait !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Pourquoi ? Parce que nous allons beaucoup trop vite. Oui, il faut aller dans cette direction, mais à vouloir aller trop vite, on casse les outils industriels.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Tous les constructeurs sont d’accord avec cette trajectoire !

    M. Charles de Courson, rapporteur général

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    Ce ne sont pas les constructeurs qui décident quels véhicules sont achetés, mais les consommateurs ! Il faut donc avancer progressivement.
    Puisque nous allons voter, je rappelle que la commission des finances est favorable aux amendements de suppression.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 530, 1444 et 3559.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        220
            Nombre de suffrages exprimés                218
            Majorité absolue                        110
                    Pour l’adoption                128
                    Contre                90

    (Les amendements identiques nos 530, 1444 et 3559 sont adoptés ; en conséquence, l’article 8 est supprimé et les amendements suivants tombent.)
    (Applaudissements sur les bancs des groupes RN, DR et UDR.)

    Rappel au règlement

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour un rappel au règlement.

    Mme Véronique Louwagie

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    Il se fonde sur l’article 100 de notre règlement, relatif à la tenue de nos débats et à l’examen des amendements. Je crois qu’il est interdit de prendre des photos dans l’hémicycle. Je le rappelle donc à nos collègues, en particulier à M. Guillaume Bigot, qui publie des photos sur les réseaux sociaux en insultant ses collègues. Il ne suffit pas de porter une cravate, il faut aussi respecter les règles ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes DR et EPR, ainsi que sur quelques bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)

    Mme la présidente

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    Il est effectivement interdit de prendre des photos de la séance. On peut tolérer la photographie du résultat d’un vote –⁠ nous le faisons tous –, mais il ne faut photographier ni ses collègues, ni l’hémicycle.

    M. Emeric Salmon

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    Justement, Guillaume Bigot a photographié des chaises vides, pas des collègues !

    Mme la présidente

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    La suite de l’examen du projet de loi de finances est renvoyée à la prochaine séance.

    2. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
    Suite de la discussion de la première partie du projet de loi de finances pour 2025.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à douze heures cinquante-cinq.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra